La journée de repos arriva beaucoup plus vite que je ne l'aurais voulu. Je ne sautais pas vraiment de joie à l'idée de passer un après-midi complet en compagnie de Christopher. Je n'avais pas envie de me retrouver seule en sa compagnie, même avec d'autres personnes aux alentours… et bien que je l’eusse déjà été. Ana était tout excitée. Elle n'arrêtait pas de dire que Christopher et moi étions « si mignons ensemble ». Cela ne faisait même pas deux semaines que le camp avait commencé. Elle allait trop vite en affaires. De plus, l'idée d'être en couple avec qui que ce soit, et spécifiquement avec un garou, me donnait mal au cœur. Cependant, il fallait bien que Christopher s'attache à moi d'une façon ou d'une autre. Ainsi, il me présenterait à ses parents ainsi qu'au reste de sa famille.
À moins qu'il ne puisse emmener une simple amie chez lui…
Après tout, ses parents étaient les créatures les plus importantes de la communauté des garous et ils devaient cacher leur secret à tout prix. Je repensai à un livre que j'avais lu. Les garous attendaient leur âme sœur, alors ils ne s'attachaient jamais à personne d’autre. J'étais mal barrée. Comment allais-je m'y prendre ? Il devait bien y avoir des exceptions. Il était impossible que tous les garous restent célibataires jusqu’à ce qu’ils trouvent leur âme sœur. Dacre, il devait y avoir un moyen. J'avais l'impression que j'allais être malade. Cela n’aiderait pas si je voulais aller tirer des flèches et apprendre de nouveaux trucs.
Je respirai profondément en me regardant dans le miroir. J'étais plus blême qu'à l'habitude. Je me tapotai les joues et me forçai à sourire. Tout allait bien. J'ouvris le petit étui qui contenait mon maquillage et le fixa un moment en ne sachant pas par quoi commencer. Que devais-je appliquer en premier ? Je sortis un tube au hasard et lus les inscriptions. Il s'agissait d'un rouge à lèvres rose pâle. M’aidant du miroir, je l'appliquai sur mes lèvres avec précaution. Ensuite, je pris le tube de mascara et en appliquai sur mes cils. Du moins, je tentai de le faire, puisqu'au lieu de rencontrer mes cils, l’applicateur rencontra mon œil. Je grimaçai avant de recommencer. Pas évident. Je réussis finalement, après plusieurs tentatives. J'avais l'impression que mes cils pesaient une tonne. C'était la dernière fois que je mettais ce foutu truc. Cependant, je devais admettre que cela rendait mon regard plus profond et intense.
Je brossai mes cheveux et les attachai avant de décider de les laisser lousses. Ana ne m'avait-elle pas dit qu'elle me trouvait plus jolie avec les cheveux relâchés ? Et tant pis s’ils devaient me fouetter le visage.
Je sortis de la salle de bain et pris l’étui qui contenait mon arc et mes flèches. Ana était déjà partie avec Xavier pour s’entraîner à faire des passes. Nous avions mangé ensemble un peu plus tôt, et j'avais dû la calmer tant elle était nerveuse à l’idée de se retrouver seule avec Xavier.
J’avais à peine mis un pied dehors que je manquai foncer dans le torse de Christopher. Il me stabilisa en m'attrapant par la taille, et je me dégageai brusquement. Il avait l'air surpris. Pas autant que moi.
— Que fais-tu ici ? Je croyais que nous devions nous retrouver au champ de tir. Et puis, comment sais-tu que ma cabine est celle-ci ?
Il se passa une main dans les cheveux. Soit il était embarrassé, soit il était nerveux. Je penchai plus pour la première option.
— J'ai questionné quelques filles en route et j’ai pensé qu’on pourrait faire le chemin vers le champ de tir ensemble.
Je croisai les bras sur ma poitrine.
— Tu sais, je peux me débrouiller seule. Ce n'est pas comme si le champ de tir était loin.
Il leva les mains devant lui.
— D'accord, dans ce cas nous marcherons à deux mètres de distance l’un de l’autre jusqu'au champ de tir, et je ferai semblant de ne pas t'avoir aperçue avant.
Ce qu'il venait de dire était totalement absurde. Je soupirai.
— Ne fais pas l'idiot. Tu es là et je ne peux rien y faire.
Il haussa un sourcil.
— Tu sais que si une autre fille était à ta place, elle ne maugréerait pas, elle ?
— Alors, va voir une autre fille, dis-je en lui souriant.
Je fermai la porte de ma cabine et dévalai les escaliers.
Christopher resta un moment figé au même endroit, abasourdi parce que je venais de lui dire. Il ne devait pas avoir l'habitude de se faire dire ce genre de chose. Il se ressaisit et me suivit en m'offrant un sourire charmeur.
— Je ne veux pas être avec une autre fille.
— Ne me dis pas que tu deviens comme Emmanuel.
Son sourire disparut.
— Est-ce qu'il te dérange ?
— Non, pas du tout. Il est...charmant. Mais si tu deviens comme lui, je ne pourrai pas te supporter.
— Ça veut dire que tu m'aimes bien comme je suis présentement, dit-il en souriant de nouveau.
Je manquai de m'étouffer en lui répondant :
— Oui, on peut dire cela.
— Je le savais. Personne ne peut résister à mon charme.
— Car tu es charmant ?
— Oui, et c'est justement pour cette raison que tu es avec moi en ce moment.
— Qui te dit que je ne veux pas être avec toi simplement pour exploiter tes talents d'archer ?
— Qui dit que tu ne restes pas avec moi pour mes autres talents ?
Je fronçai les sourcils.
— Quels autres talents ?
Ses yeux gris me fixèrent avec malice comme si je devais connaître la réponse.
— À toi de deviner.
Je rougis en comprenant le sous-entendu, mais ne répondis pas et continuai de marcher. Il m'observa, hilare. Je ne pus résister à l’envie de lui frapper l'épaule. C'était mieux que de le plaquer au sol et d’essayer de l'étrangler. Nous arrivâmes au champ de tir quelques minutes plus tard. Il alla demander au surveillant un arc et des flèches et revint vers moi.Je soupirai intérieurement en songeant avec sarcasme aux heures de plaisir que j'allais passer en sa compagnie...