ADMIRER v. tr. est la réfection (XVIe s.) de amirer (1360, « apprécier »), s'ammirer (1468, « s'étonner, s'ébahir »), emprunts au latin admirari « admirer » et « considérer avec étonnement », de ad- (→ à) et mirari « s'étonner » (→ mirer).
❏  Le verbe, qui signifie aussi à l'époque classique « considérer avec surprise, étonnement » (1644, Corneille), a développé un sens apparu au XVIe s. (1566, amirer) « éprouver un sentiment de grande estime pour (qqn) ». Il s'applique aussi aux choses, aux actions, avec diverses nuances, surtout morales et esthétiques. Il se construit aussi avec que, comment, de (admirer qqn de...), etc., parfois avec une nuance ironique qui continue l'emploi classique.
❏  ADMIRATION n. f., réfection (XIVe s.) de amiration (v. 1190), amiracion, est emprunté au dérivé latin admiratio « admiration » et « étonnement ». ◆  Ses sens en français sont parallèles de ceux d'admirer, celui de « surprise » (v. 1190) et « objet d'étonnement » (1548) disparaissant au XVIIe siècle. ◆  Le sens moderne, apparu très tôt (mil. XIIe s., ammiration, in T. L. F.), se développe en français moderne.
■  ADMIRATIF, IVE adj. est un emprunt du vocabulaire philosophique (1370) au dérivé latin tardif admirativus, mot de rhétorique. ◆  Le sens premier, conforme à celui de admirer et admiration jusqu'au XVIIe s., est « étonné, stupéfait » et (XVe s.) « qui exprime la crainte, l'étonnement ». ◆  La valeur moderne se développe au XVIIe s. (1636, des personnes ; 1690, de l'expression). L'emploi linguistique (particule admirative, 1718) et rhétorique (genre admiratif, 1798) a disparu. ◆  Le dérivé ADMIRATIVEMENT adv. entre en 1866 dans les dictionnaires.
■  ADMIRATEUR, TRICE n. est emprunté (1542) au dérivé latin admirator, qui ne semble pas avoir le sens de admirare « s'étonner », mais seulement celui de « personne qui admire ». Le mot a conservé ce sens, aussi comme adjectif (1684, La Fontaine), emploi rare.
ADMIRABLE adj., réfection (1546, Rabelais) de amirable, ammirable (1170), a les deux valeurs du latin, d'abord « étonnant, étrange », souvent ironique à l'époque classique (Vaugelas), puis « digne d'admiration » (XVIe s.) d'où « excellent, parfait » (1680). ◆  Le mot a été substantivé au féminin pour « élégante » (1672) et pour désigner une variété de pêche (1620), puis de rose (1866). ◆  Il est aussi employé collectivement comme nom masculin, pour « ce qui mérite l'admiration » (1808).
■  En dérive ADMIRABLEMENT adv. « étonnamment » (1416), puis « de manière à susciter l'admiration » (1564).
ADMISSIBLE, ADMISSION → ADMETTRE
ADMONESTER v. tr. coexiste en ancien français (depuis 1160-1170) avec la forme ancienne amonéter, amonester (1170), ceci jusqu'au XVIe s., époque où le latin admonere, de ad- (→ à) et monere (→ moniteur), est pris pour modèle. Admonere signifie « avertir, sans critiquer ». L'ancien français a aussi monester « exhorter ». Comme des formes parallèles existent en espagnol, en catalan et en ancien provençal (amonestar), on a supposé une forme latine populaire °admonestare, mais il peut s'agir d'un croisement entre admonere, au p. p. admonitus, et molestus « pénible » ; P. Guiraud évoque même administrare. Il s'agit en tout cas d'une forme hybride, apparue en milieu étudiant. Par ailleurs admonitio, dérivé de admonere, a fourni amonition n. f. (v. 1180) puis admonition*, dont les emplois interfèrent avec ceux d'admonestation.
❏  Le verbe a en ancien et moyen français le sens dominant de « conseiller, avertir » (v. 1130, F. e. w.) et d'« exhorter » (XIIe s.), admonester qqn de qqch. signifiant « exhorter à » et amonester que « demander avec insistance ». ◆  Amonester a qqn que... prend (fin XIIIe s.) la valeur de « reprocher, réprimander pour », le verbe s'étant déjà employé pour « avertir » (1208). L'emploi pour « réprimander » semble rare avant le début du XVIIe s. (Satires de M. Régnier) et se spécialise en droit pour « adresser des remontrances » (1690). Le verbe est didactique ou littéraire. ◆  Ses dérivés disparus, admonestance, admonestement, admonesteur, admonestable (aussi amo-), témoignent de sa vitalité jusqu'au XVIe siècle.
❏  ADMONESTATION n. f., reprise tardive (1837) du dérivé isolé amonestation (v. 1260), est le seul mot vivant issu d'admonester.
❏ voir ADMONITION.
ADMONITION n. f. est la réfection (2e moitié XIIe s., in T. L. F. ; puis 1561) de amonition (v. 1180), employé jusqu'au XVIe siècle. C'est un emprunt au latin admonitio « remise en mémoire » et « exhortation », de admonere « avertir », « remettre en mémoire », de ad- (→ à) et monere (→ admonester ; moniteur).
❏  Le nom signifie d'abord « avertissement, conseil » et, ne correspondant pas à un verbe, il est souvent pris pour substantif de admonester notamment en droit, pour « remontrance faite par le juge à un délinquant » (1690) et en général « réprimande » (1694). Il signifie aussi « invitation pressante, exhortation », emploi littéraire.
❏  ADMONITEUR n. m., emprunt (1609) au latin admonitor, de admonere, a signifié « conseiller », puis (1761) « personne qui réprimande », avec des emplois spéciaux en religion (l'admoniteur du général des jésuites). Il est archaïque.
ADN n. m. est le sigle de acide désoxyribonucléique (→ nucléaire ; ribo-).
❏  Ce mot de biologie l'a emporté en français sur l'anglicisme DNA, pour desoxyribo-nucleic acid, et est devenu usuel, du fait des conséquences multiples, en droit, de la détermination individuelle, où l'ADN remplace et va au-delà des données que fournissent les empreintes digitales. Le mot a pris des valeurs figurées, pour « caractères propres, particuliers » comparés aux caractères génétiques que fournissent l'ADN.
ADOBE n. m. est un emprunt (1868, chez J. Verne) à l'espagnol adobe « brique d'argile crue » (1157), lui-même emprunté à l'arabe al-ṭūb, pluriel, avec l'article.
❏  Le mot conserve le sens de l'étymon. Souvent employé à propos de l'architecture indienne du sud des États-Unis, il est alors passé par l'emprunt anglais à l'espagnol (Mexique et Nouveau-Mexique).
ADOLESCENT, ENTE adj. et n. est emprunté (1327, n. m.) au latin adolescens, participe présent de adolescere « grandir », verbe d'origine incertaine, mais formant couple antithétique avec abolescere et le simple abolere, qui a donné abolir*. On peut supposer, au-delà de l'opposition marquée par les préverbes (ad- et ab- ; → à), une source commune, à rapprocher de alere « nourrir » (→ aliment), dont le participe passé est altus « haut* », de indoles « accroissement » et de proles « descendance » (d'où proletarius → prolétaire).
❏  Le nom est employé aussi (XVe s.) au féminin et prend au masculin la valeur extensive de « jeune homme inexpérimenté, naïf » (1634). L'emploi adjectif est attesté au XVIe s. (Ronsard), avec des emplois figurés (2e moitié XVIIe s.). ◆  Didactique ou ironique en français classique, le nom, qui semble repris au XIXe s., est plus courant au XXe s. ; il a fourni la forme abrégée ADO n. (1974 ; surtout au pl. les ados), usuel dans la langue parlée.
❏  ADOLESCENCE n. f. est emprunté (1270) au latin adolescentia, de adolescens. Il désigne par métonymie l'ensemble des adolescents (1845) et au figuré les débuts, l'époque du premier développement (de qqch.) [1680].
PRÉ-ADOLESCENT, ENTE n. et adj. (1959) a été abrégé en PRÉ-ADO (1975). ◆  PRÉ-ADOLESCENCE n. f. est attesté en 1922.
❏ voir ADULTE.
ADONIS n. m. est emprunté (1565), avec la variante adon (1576, encore chez La Fontaine), au nom grec Adônis, par le latin. Ce nom est à l'origine le titre d'une divinité phénicienne (identique au nom hébreu ᾿ādôn « seigneur »), la réputation de beauté s'établissant dans les mythologies grecque et latine.
❏  Le mot désigne un homme jeune et beau (Cf. Apollon). Il a eu divers emplois pour désigner des animaux (un poisson, 1554 ; un papillon, 1829), soit avec l'idée de beauté, soit, comme pour la fleur ainsi nommée (1615), par allusion au sang d'Adonis, tué dans la légende par un sanglier.
❏  ADONISER v. tr. est dérivé (1552) de Adonis au sens de « parer, embellir » et comme intransitif (1611), « faire le beau, être infatué ». Il s'est aussi employé au pronominal. Le verbe est archaïque et les autres dérivés du nom ont disparu.
ADONNER (S') v. pron. est emprunté (v. 1140) au latin populaire °addonare, de ad- (→ à) et donare (→ donner), induit des mots romans correspondants : français, ancien provençal, catalan et espagnol adonar, ancien italien addonare, latin médiéval addonare se (1296). Le verbe a dû être rapidement considéré comme un préfixé de donner, tout en perdant son lien sémantique avec lui.
❏  S'adonner signifie d'abord « se présenter ou regarder dans une direction », puis (fin XIIe s.) « tendre vers un point » (Cf. donner sur...). En ancien et moyen français, il est aussi transitif : adoner qqn a et infinitif ou nom, « soumettre », au propre et (XVIe s.) au figuré (être a honeur addonné, Marot), et a parfois le sens de « donner, livrer », notamment à propos d'un serf donné à un établissement religieux (1253).
■  L'emploi qui a survécu, s'adonner à, semble apparaître avec un infinitif (2e moitié XIIe s.), avant de se construire avec un nom, surtout péjoratif (1342, s'adoner au péché), plus récemment s'adonner à la boisson. Le verbe, usité absolument, a signifié en ancien français « s'abandonner, supplier » (1205).
En emploi transitif, adonner s'est employé en marine (1687) à propos du vent qui souffle dans le bon sens pour la marche d'un navire. D'autres emplois transitifs et intransitifs plus anciens (voir ci-dessus) se sont conservés en français du Canada (Québec, Acadie), comme « arriver, survenir » (1727) dans ça adonne bien « ça arrive à propos », « ça coïncide, ça va bien avec » (1877). Quant au pronominal s'adonner, pour « être, se trouver (dans tel ou tel état) », usuel en ancien et moyen français, il est encore vivant au Canada (attesté depuis 1817), alors que le sens réciproque de s'adonner pour « s'entendre, se plaire », qui existait dans les parlers de l'ouest et du centre de la France, est vivant en français québécois (attesté 1894).
❏  ADON n. m., déverbal, mot régional de l'ouest et du nord de la France, par exemple dans à l'adon « au hasard », est passé en français du Canada (1877) pour « coïncidence, chance ». Le mot a eu d'autres valeurs, aujourd'hui disparues, dans des régions de France et du Québec, par exemple « ce qui est à propos, convenable, correct », avec l'expression d'adon, et aussi pour « aptitude, talent, habileté » (de 1894 aux années 1920-1930). ◆  ADONNANCE n. f. s'emploie en Acadie et en français de Louisiane pour « hasard, chance » et « rencontre ».
ADOPTER v. tr. est un emprunt (XIIIe s.) au latin juridique adoptare, de ad- (→ à) et optare « choisir » (→ opter).
❏  Le mot est d'abord (XIVe s.) spécialisé en droit au sens de « choisir légalement pour enfant ». Il prend une valeur extensive au XVIIe s., « traiter (qqn) comme son enfant » (depuis 1631, Corneille). ◆  Il s'emploie au figuré dès le XVIe siècle : « faire sienne (une opinion, une décision) », puis (1798) « choisir pour soi de manière durable » (adopter une apparence, un habillement). ◆  Au XIXe s., il acquiert le sens d'« approuver, voter pour », en droit constitutionnel (1845).
Au sens premier, en Afrique subsaharienne, adopter se dit pour « recueillir (un enfant) dans sa famille, sans formalités ni conséquences juridiques ». Il en va de même pour adoption.
❏  Il a pour dérivés ADOPTÉ, ÉE participe passé adjectivé (un enfant adopté) puis (1804) substantivé ; ADOPTANT, ANTE participe présent substantivé (1728), terme juridique et ADOPTABLE adj. (1801).
ADOPTION n. f. est un emprunt plus ancien (XIIe s., en religion, « grâce du baptême ») au dérivé latin adoptio, avec les mêmes valeurs que le verbe, juridique (XIIIe s.), extensive et figurées, en particulier adoption d'une loi (1845) et adoption d'un mot (dans une langue) [XVIIIe s., Voltaire].
■  ADOPTIF, IVE adj. est un emprunt juridique (XIIIe s.) au dérivé latin classique adoptivus. Il s'emploie pour « qui a été adopté » (enfant adoptif), « qui a adopté » (père adoptif, XIIe s.), c'est-à-dire adoptant, et en général pour « relatif à l'adoption » (1662, Corneille). ◆  Le dérivé ADOPTIVEMENT adv. (1556) est rare.
ADORER v. tr. est emprunté (fin du Xe s.) au latin adorare, formé de ad- (→ à) et de orare « prier » (→ oraison). La forme évoluée aorer, aürer (1080), encore en usage au XVIe s. (le vendredi aoré « vendredi saint »), a été éliminée sous l'influence du latin d'Église.
❏  Adorer apparaît dans le contexte religieux, pour « honorer (la divinité) par le culte », s'appliquant aussi aux idoles, aux faux dieux (1080) et à des symboles sacrés, la Croix (fin XIIIe s.), les reliques (in Furetière, 1690). Le sens extensif, « respecter de manière extrême », apparaît en ancien français (v. 1165) pour aorer et au XIVe s. (Froissart) pour adorer. ◆  Aorer était aussi employé pour « aimer passionnément », dans la poésie lyrique (Chatelain de Coucy, fin XIIe s.), sens développé au XVIe s. par adorer (1576). Depuis le XVIIe s., le verbe s'applique aussi aux abstractions, devenant hyperbolique pour aimer (voir le schéma). Ainsi, l'expression d'origine publicitaire vous avez aimé... vous allez adorer, calque de l'anglais (you liked... you'll love), est devenue fréquente, souvent employée ironiquement.
❏  Le dérivé ADORATIF, IVE adj. (1503) est archaïque.
■  ADORATEUR, TRICE n., emprunt au latin chrétien adorator (Tertullien), remplace (1420) le dérivé français aoreor (fin XIIIe s.) aux sens religieux et extensif (1611), puis amoureux (1644, Corneille) de adorer. Le féminin adoratrice est attesté à la fin du XVIIe s. (1696).
■  ADORATION n. f. est un mot du moyen français (une fois fin XIVe s. sous la forme provençalisante azoration ; chez Jean de Vignay, XIIIe ou XVe s.), emprunté au latin adoratio (depuis Pline, répandu en latin chrétien), de adorare. Il a eu en religion des emplois spécialisés : adoration de la Croix (mil. XVIIe s., Retz), adoration perpétuelle (du Saint-Sacrement) [1752]. En peinture, le mot désigne la représentation des mages adorant l'Enfant Jésus (1737). ◆  Les emplois extensifs, notamment amoureux (1611), sont plus rares que pour adorer et adorateur.
ADORABLE adj. est soit emprunté (fin XIIIe s., en parlant de l'encens) au latin adorabilis (IIe s.), soit dérivé de adorer, au sens de « digne d'être adoré » (1611), puis « vénérable » (1690). ◆  Le mot prend au XVIIe s. les valeurs extensives et figurées du verbe : « digne d'être aimé » (1640) et, dans un contexte mondain, « digne d'une grande estime ». Les valeurs hyperboliques se développent au XIXe s., à propos des personnes, des qualités puis des choses, pour « exquis, parfait » (1845).
■  L'adjectif a pour dérivé ADORABLEMENT adv. (1660), employé aussi comme hyperbolique (1838, Barbey, in T. L. F.).
⇒ tableau : Adorer
ADORNER → ORNER
ADOSSER → DOS
G + ADOUBER v. tr., mot de féodalité attesté dans La Chanson de Roland (1080), viendrait d'un radical francique °dubban « frapper », parce qu'on armait le chevalier en lui frappant symboliquement l'épaule du plat de l'épée (Cf. ancien anglais dubban). Le mot francique serait à rattacher à la racine indoeuropéenne dheubh-, dubbh-. L'importance des institutions féodales explique la reprise du sens extensif « préparer (comme un chevalier qu'on arme) ». Ce radical se retrouve, avec le sens très général de « préparer, arranger », dans des mots de nature bien différente, comme radouber « réparer (un navire) » (XIIIe s.) ou encore daube, en cuisine.
❏  Le mot est aujourd'hui un terme d'histoire, mais son emploi évocateur du moyen âge lui donne un statut plus large. ◆  Il s'emploie en outre au jeu d'échecs, pour « remettre en place une pièce déplacée involontairement ».
❏  Son dérivé ADOUBEMENT n. m. (XIIe s., apr. 1150, adobement) désigne la cérémonie par laquelle on adoubait le nouveau chevalier et, par métonymie, son équipement. Ce sens est attesté le premier, et la valeur active seulement en 1306. En ancien français, le mot a eu le sens large de « parure, ornement » (v. 1230) et en moyen français « fard » (XIVe s.), valeurs qui correspondent au sens extensif du verbe.
❏ voir DAUBE, RADOUBER.
ADOUCIR → DOUX
ADRÉNALINE n. f. est un emprunt à l'anglais adrenalin, mot créé en 1901 aux États-Unis par le découvreur de la substance, Takamine, et formé du latin ad- (→ à) et de renal « rénal » (→ rein) , d'où adrenal « surrénal », avec le suffixe -in (en français -ine), la substance ayant été extraite des glandes surrénales du bœuf et du cheval.
❏  Le mot désigne l'hormone principale de la glande médullo-surrénale.
❏  Il a plusieurs dérivés et composés, comme ADRÉNALINÉMIE n. f. (1920-1924, in T. L. F.), ADRÉNALINIQUE adj.
■  Du radical, H. H. Dale a tiré en 1934 l'anglais adrenergic, avec le radical du grec ergon « énergie » (→ énergie), d'où en français ADRÉNERGIQUE adj.
+ 1 ADRESSER v. tr. est composé de a- et de dresser*, d'abord sous la forme drecer, drecier, d'où adrecier (déb. XIIe s., pron.), adrecer, écrit adresser au début du XVe siècle.
❏  Le verbe, au pronominal comme à l'actif (1170), signifie d'abord « dresser, élever » et d'abord pour s'adrecer (1174), puis adrecer « aller vers » et « diriger », sens vivant jusqu'au XVIIe siècle. ◆  De l'idée de direction proviennent les emplois modernes, pour « émettre (des paroles) à l'intention de qqn » (XIVe s.) et « envoyer en direction de qqn » (mil. XVIe s.), spécialement par un intermédiaire ou par la poste. ◆  L'emploi de adresser a qqn « lui parler » (1518) a été remplacé par le pronominal s'adresser à, qui s'emploie aussi avec un sujet nom de chose, au sens d'« être destiné à ».
❏  Le dérivé 1 ADRESSE n. f. apparaît sous la forme adrece et signifie d'abord « chemin direct » (1177-1179), « direction, bonne voie » (v. 1280), puis (XVe s.) abstraitement « action d'avoir recours à qqn ». Ce n'est qu'aux XVIe et XVIIe s. que les deux sens modernes apparaissent, produisant deux mots aujourd'hui distincts. ◆  L'un, provenant de l'idée de bonne direction, est rattaché à l'adjectif adroit, de droit (ci-dessous 2 adresse). ◆  L'autre, à partir de l'idée d'« indication » mais aussi de « bonne direction », se développe au début du XVIIe siècle. On passe d'« indication du lieu où l'on peut trouver qqn » (par exemple dans le bureau d'adresses de Théophraste Renaudot, 1623) à « description du lieu où une personne vit » puis « suscription d'une lettre portant l'adresse ». ◆  La valeur du XVe s., « fait de recourir à qqn », passée en anglais (address), revient d'Angleterre (1656) avec un sens politique, « message d'une assemblée au roi » ; ce sens politique se diffuse en France avec la Révolution (1789, Mirabeau). ◆  Enfin, un autre sens de l'anglais est récemment passé en français : « signe sous lequel est classée une information ». ◆  En informatique apparaissent de nouveaux dérivés : un verbe transitif 2 ADRESSER (v. 1960), l'adjectif ADRESSABLE (v. 1960), le substantif ADRESSAGE n. m. (1968).
2 ADRESSE n. f., au sens d'« habileté », provient (1559) de la contamination par adroit, dont il est devenu le substantif, de 1 adresse (adrece) « chemin direct », d'où « manière d'aller droit au but ».
ADRET n. m., attesté dans les dict. depuis 1927 comme terme de géographie, mais plus ancien en français régional, est un emprunt à l'ancien provençal adreg (v. 1300), adrech, adret, qui correspond à a-droit, (→ 1 droit). Le mot, usuel dans les Alpes françaises, désigne le versant exposé au soleil et s'oppose à ubac*.
ADROIT, OITE adj. est formé (XIIe s.) de a- et de l'adjectif droit*. À noter que le latin dexter, « situé à droite », signifie « habile » (→ dextre), dès l'Empire ; mais l'ancien français adestre, « habilement » (XIIIe s.), n'a pas de correspondant sémantique dans l'adjectif destre « qui est à droite », à partir duquel il est formé.
❏  L'adjectif est attesté au XIIe s. à la fois au sens de « svelte, élégant » (Chrétien de Troyes) et de « habile au combat » (id.) ; c'est un mot du vocabulaire de la chevalerie qui évoque probablement la forme droite (Cf. dressé, élancé...) et aussi le coup au but (Cf. adresser). Il a aussi signifié, comme droit, « moralement juste » (XIIe-XIIIe s.). ◆  L'emploi moderne, « habile dans les exercices physiques » (adroit à, XVIe s.), est précédé par adroit de employé avec l'infinitif, « habile à » (2e moitié XIIe s.), emploi qui sert de passage. L'extension aux activités intellectuelles est attestée au XVIIe s. (1680) comme l'emploi pour « qui témoigne d'adresse ».
❏  Le dérivé ADROITEMENT adv. a suivi l'évolution de l'adjectif, depuis le sens de « correctement » (fin XIIe s.) à « de manière habile » (1306), aussi dans le domaine intellectuel (1641). ◆  Enfin, le substantif correspondant à adroit (→ 2 adresse) vient d'une autre origine, mais a été influencé par l'adjectif.