AGAMI n. f. est un emprunt des ornithologues (1664) à un mot de la langue amérindienne karib (caraïbe). Le nom désigne un oiseau d'Amérique centrale et méridionale, échassier au plumage noir et roux, dont le mâle pousse un cri perçant (on l'appelle l'oiseau-trompette).
AGAPE n. f. est emprunté (1574) au latin chrétien agape, du grec agapê « affection » et en grec chrétien « charité », mot sans étymologie connue. Le pluriel du grec agapai s'est spécialisé pour désigner un repas pris en commun en signe de fraternité chrétienne, acception reprise par le latin chrétien.
❏
Le mot français s'emploie d'abord au sens chrétien du grec et du latin. Son emploi laïc, surtout au pluriel, est attesté au milieu du XIXe s. chez les francs-maçons (in Larousse, 1866) et dans l'usage familier (1859, Sainte-Beuve) ; il conserve alors l'idée de communauté (agapes fraternelles). La valeur moderne, d'emploi littéraire, est « repas excellent, festin ».
AGAPANTHE n. f. est emprunté (1812) au latin botanique agapantha, du grec agapê (→ agape) et de -anthe. C'est le nom d'une liliacée ornementale aux hampes florales bleues ou blanches.
AGAR-AGAR n. m. est emprunté à un mot malais (1865) et désigne une gélose végétale, ainsi que les algues marines qui la fournissent.
AGARIC n. m. est un emprunt (1256) au latin agaricum, hellénisme, du grec agarikon, nom de plusieurs champignons ; le terme vient sans doute du nom de pays Agaria, dans l'ancienne Sarmatie (au nord de la mer Noire). En latin, le mot ne désigne qu'une ou deux sortes de champignons poussant sur les arbres, notamment l'olivier.
❏
Le mot s'applique progressivement, en français, à un grand nombre d'espèces de champignons à chapeau et à lamelles, parfois désignées par des syntagmes figés : agaric de (puis du) chêne (1694) « amadouvier », agaric noir (1611), etc.
◆
Faux agaric (1714) désigne le polypore du chêne, utilisé aux XVIIIe et XIXe s. comme combustible, de même que l'amadou, et comme hémostatique, d'où le nom d'agaric des chirurgiens (1791), et agaric astringent (1866) pour la substance qu'on en tire. Ces désignations sont archaïques, comme agaric minéral (1694) et agaric fossile (1721), désignant un minéral calcaire et spongieux.
❏
Agaric, depuis le début du XIXe s., a de nombreux dérivés, qui ont vieilli. AGARICINÉES n. f. pl. (1846), AGARICACÉES n. f. pl. (1928) et AGARICALES n. f. pl. (v. 1960) sont des termes taxinomiques, les deux derniers (famille et ordre de Basidiomycètes) sont en usage.
AGATE n. f., d'abord agathe (XIIIe s.), écrit agate au XVIIe s., est l'altération de achate (XIIe s.), emprunt au latin achates, hellénisme, du grec akhatês, désignant le même minéral, mot d'emprunt. La graphie avec g provient du latin médiéval et s'explique peut-être par contamination avec agapis, bien attesté aux XIIe et XIIIe s. au sens d'« agathe ».
❏
Le mot désigne une variété de calcédoine et ce minéral lorsqu'il est poli et brillant.
◆
Par métonymie, il se dit d'un polissoir (1680), puis d'un objet décoratif en agate polie (1718) ; enfin d'une bille en agate, puis (1928) en verre coloré imitant l'agate.
◆
Au figuré, agate se dit d'un papier marbré (mil. XVIIIe s.) et d'une tulipe panachée (1667).
❏
Parmi les dérivés, AGATISER v. pron. (1819) et tr. ; AGATISÉ, ÉE adj. (1781 ; agathisé, 1763) et AGATISATION n. f. (1871, Goncourt) concernent l'apparence de l'agate.
AGAVE n. m., nom d'un végétal mexicain, est un pur hellénisme (1769). Le latin scientifique agave (Linné), adapté en français par Lamarck (agavé, 1778), est en effet un emprunt au grec agauê « l'admirable », féminin de l'adjectif agauos. On explique le passage par le nom propre mythologique Agauê, femme qui inaugura le culte de Dionysos, dont elle était la tante ; or, l'agave sert à fabriquer une boisson alcoolisée qui a pu être assimilée au vin dionysiaque.
❏
Le mot désigne une plante d'origine mexicaine, dont les feuilles fournissent une fibre textile et le suc fermenté, un alcool, le pulque.
G
AGE n. m., désignant la flèche d'une charrue, est une forme dialectale (Berry, Poitou) de l'ancien français haie (v. 1290), forme évoluée pour hage, issu d'un francique °hagja.
❏
Le mot, sous cette forme, n'est attesté en français général écrit qu'en 1801 (Brunot).
L
ÂGE n. m. vient du latin populaire °aetaticum, par les formes edage, eage (1080), aage, à moins qu'il ne soit dérivé en français de l'ancien français aé, ée (1125), d'abord edet (1080), edé (v. 1140), puis eié, lequel, comme l'italien eta et l'espagnol edad, vient du latin aetatem, accusatif de aetas. Ce dernier, comme aeternus (→ éternel), est un dérivé du mot plus ancien aevum « temps, durée » (qui s'oppose à tempus, dont le sens premier est « instant »). Ces mots continuent le nom indoeuropéen de la durée, de la force vitale, °ai-w-, radical dont les descendants sont attestés en persan, grec (aiôn), dans les langues germaniques, etc., et que l'on retrouve dans le latin juvenis (→ jeune).
❏
Après
edet et
edage, eage, aage signifie en ancien français « vie », puis « temps depuis lequel on est en vie » (1160), sens aujourd'hui dominant. Le mot, écrit avec l'accent circonflexe à partir du
XVIe s., signifiait aussi (
XVIe s.) « durée d'une génération » et « moment, portion de la vie (d'un être humain) » (
XIIIe s.), en particulier « vieillesse » (
XIVe-
XVIIe s.) et « jeunesse » (1636) ; ces dernières acceptions ayant disparu.
◆
L'emploi absolu pour « majorité » (1180,
aage) reste usuel jusqu'au
XVIIe siècle.
◆
Au sens de « moment de la vie »,
âge entre dans de nombreuses locutions, comme
bas âge (1538), qui succède à
petit aage, jeune age (1307),
âge tendre « enfance » (1680),
bel âge « jeunesse » (1669),
âge mûr « maturité »,
d'un certain âge (fin
XVIIe s., La Bruyère),
grand âge (
de grand aage « vieux »,
XIIe s.) et récemment
troisième âge « vieillesse » (1966).
D'âge « âgé » (
XIIe s.),
être en âge de... « avoir un âge qui permet de... »,
être d'âge à... (1835),
ne pas paraître son âge (1798),
être entre deux âges (
XVe s.) sont restés dans l'usage, mais de nombreuses autres expressions ont disparu.
■
Au sens de « période de l'histoire » (eage, Wace) et « époque », d'autres locutions ont cours ; certaines sont devenues archaïques comme âge doré (XVIe s., Baïf), d'abord doré aage (v. 1320), remplacée (2e moitié XVIIe s.) par âge d'or, contemporaine ou encore âge d'airain (1559), âge de cuivre (Académie, 1694), âge de fer (d'abord âge ferré, Malherbe), puis âge de pierre et âge de bronze (in Larousse, 1866). Dans le contexte de la nouvelle science de la préhistoire, les savants préconisent âge de la pierre, du bronze, du fer pour éviter les interprétations mythiques (1882, de Mortillet).
■
À ce sémantisme appartient moyen âge* « époque entre l'Antiquité et la Renaissance », peut-être par calque de l'anglais middle age, attesté avant le français dans ce sens ; moyen âge avait signifié « âge mûr (d'une personne) » (une fois au XIIIe s. ; puis XVIe-XVIIe s. ; Cf. moyen).
◆
Âge d'or, se dit en français canadien pour « vieillesse, âge de la retraite », le Club de l'âge d'or acceptant les personnes de plus de cinquante ans se consacrant à des activités bénévoles. En français de l'île Maurice, la puberté peut être appelée l'âge cochon.
❏
Le dérivé
ÂGÉ, ÉE adj., écrit
aagé, aagié jusqu'au
XVIIe s., signifie d'abord (1283,
aagé) « qui a l'âge, la majorité », puis « qui existe depuis une certaine durée » (1314, d'un bois) et s'est dit d'un animal sevré (
aagié, 1324).
◆
Le sens actuel, « qui a un âge assez grand », d'une personne (1370), est devenu un euphémisme usuel pour
vieux, notamment dans
personnes âgées.
◈
ANTI-ÂGE adj. inv. (vers 1985) qualifie de manière publicitaire un cosmétique censé atténuer les effets du vieillissement (crème anti-rides ; etc.).
❏ voir
LONGÉVITÉ, MÉDIÉVAL, MOYEN ÂGE.
AGENCER v. tr. est composé (XIIe s.) de l'ancien adjectif gent, gente « noble, beau », encore connu par le syntagme gente dame (→ gentil), qui vient du latin genitus « né », spécialement « bien né », en latin médiéval. L'adjectif est le participe passé du verbe gignere « engendrer » (→ genre, gens ; et aussi naître). On a aussi proposé un latin oral °adgentiare, formé sur °gentus, contraction de genitus.
❏
Le verbe, d'abord attesté avec le préfixe re- pour « remettre en ordre » (1164, rajancier), s'est employé en ancien français pour « organiser, disposer en bon ordre » (fin XIIe s., Renart), et absolument pour « arranger, adoucir les choses ». La valeur étymologique de « rendre agréable ou beau (gent) » s'étant perdue, le verbe se rattache sémantiquement à agent, agir ; à partir des XIVe-XVe s., l'idée dominante devenant « organiser, arranger », spécialement en arts, et AGENCÉ, ÉE adj. correspondant à « disposé, organisé ». En français de Suisse, agencer correspond à « aménager » (une cuisine agencée).
❏
AGENCEMENT n. m. (v. 1200) a suivi l'évolution du verbe, d'« ordonnance, organisation » à « ornement » (XVIe s.), « disposition des draperies » en art (engencement, 1752) puis à « organisation », abstraitement ou concrètement.
+
AGENT n. m. est un emprunt (1332), aussi comme adjectif (1337, agent à, avec un infinitif), au latin scolastique agens, participe présent substantivé de agere (→ agir).
❏
Le mot désigne en philosophie l'être qui agit, en général, la cause agissante (1370), puis (
XVIIe s.) tout ce qui déclenche des effets (comme
cause, origine, force, etc.). Cette valeur didactique se prolonge en philosophie et en sciences (
agent naturel, 1690 ;
agent [chimique], 1835).
◆
Dès le
XIVe s. (1332), le mot reçoit une valeur plus concrète, développée au
XVIe s. par influence de l'italien
agente, de même origine, « chargé de mission, diplomate » (1578), d'où plus tard
agent diplomatique (1804),
consulaire (1835). De là aussi
agent de banque (1636),
agent de change (1639), qui est resté en usage,
agent des finances en 1800, sous Napoléon.
◆
On doit à la Révolution l'
agent de police (1797), dénommé simplement
agent en français courant (1913). À côté de ce « gardien de la paix » en uniforme, sens très courant, le vocabulaire de la police connaît
agent secret (1825),
agent provocateur (1829), au
XXe s.
agent double. Dans les affaires, on a
agent d'affaires (1835),
agent d'assurances (
XXe s. ;
in Académie, 1932), certains de ces syntagmes semblant venir d'emplois correspondants de
agence (ci-dessous).
◆
En français d'Afrique, le mot, qualifié, s'emploie à propos de certains fonctionnaires :
agent de santé, agent d'agriculture, etc.
◆
Le féminin
AGENTE est courant en français de Genève, dans
agente de circulation « auxiliaire de police » ; en emploi général, il est utilisé au Québec, recommandé en Belgique et en Suisse.
■
SOUS-AGENT n. m. (1874) désigne une fonction inférieure à celle d'agent.
❏
AGENCE n. f., substantif qui correspond à certaines valeurs de
agent (1653, Colbert), est soit dérivé de ce mot, d'après le verbe
agencer*, plus ancien et d'origine différente, soit emprunté à l'italien
agenzia, dont la première attestation sûre est cependant tardive (fin
XVIIe s.).
■
Outre l'acception didactique et rare pour « emploi d'agent » (in Furetière, 1690), le mot désigne d'abord un comptoir de commerce à l'étranger, puis (1797) un intermédiaire commercial, d'où au XIXe s. une société commerciale (1840, l'Agence Havas).
◆
L'expression agence d'affaires semble antérieure (1797) à agent d'affaires. Parmi les syntagmes usuels, figurent agence matrimoniale (v. 1870), agence théâtrale (1890), agence de voyage (1898), agence de presse (XXe s.), d'où vient AGENCIER n. m. « journaliste travaillant pour une agence de presse ».
◆
Agence spéciale, dans certains pays africains, se dit d'un service administratif chargé de maniements de fonds.
◈
AGENDA n. m. est emprunté (1535), à une forme latine du verbe
agere « agir », signifiant « ce qui doit être fait, choses à faire », d'où en latin médiéval « office », par l'expression
agenda dei « (registre des) offices du jour ».
Agenda, d'abord employé pour « livre de comptes municipal » (1535 in
T. L. F. ; 1719 in
F. e. w.), a pris en français le sens de « livre sur lequel on note les choses à faire » (1640 in
F. e. w.). La valeur plus large de « carnet de notes » reprend le sens du
XVIIe s., mais lui donne une valeur plus concrète
(acheter un agenda).
◆
Le dérivé verbal
AGENDER v. tr. s'emploie en français de Suisse (attesté 1919) pour « noter sur son agenda », aussi au participe passé
AGENDÉ, ÉE adj., par exemple dans
un rendez-vous agendé (pour telle date),
une séance agendée, « prévue ».
❏ voir
AGILE, AGITER, et les mots venant des composés latins de agere : EXIGER, EXIGU, PRODIGUER...
AGGLOMÉRER v. tr. est un emprunt de la fin du XVIIIe s. (v. 1790) au latin agglomerare, composé de glomus, -eris « pelote », « boule », sens et forme proches de globus (→ globe) ; d'origine obscure, glomus est peut-être apparenté à globus et à gleba (→ glèbe).
❏
Agglomérer est un mot scientifique dont l'emploi s'est élargi au XIXe s., moins cependant que celui d'agglomération (ci-dessous).
❏
Le verbe a produit
AGGLOMÉRAT n. m. (1824), mot didactique, et
AGGLOMÉRÉ, ÉE adj. (1817), qui qualifie des fruits ou fleurs rapprochés en une masse, puis d'autres éléments, et qui est devenu substantif pour désigner des briquettes de charbon aggloméré (
in Larousse, 1866), ainsi qu'un matériau de construction (1924). L'abréviation
AGGLO n. m. (1930) est courante.
◈
AGGLOMÉRATION n. f. est soit emprunté (1762) au latin médiéval
agglomeratio, soit dérivé de
agglomérer, qui doit dans ce cas être plus ancien que son attestation. Il désigne le fait de s'agglomérer, puis la fabrication des agglomérés (1905).
◆
Il a pris par métonymie (déb.
XIXe s.) le sens d'« entassement, groupement de nombreux éléments ou individus » et spécialement (1861) celui de « concentration d'habitations », d'abord avec un complément, puis employé seul (
XXe s.). Dans ce sens, il rejoint le champ sémantique de
ville, bourg, village, et se sépare de la valeur étymologique
(une agglomération lâche, dispersée...).
❏ voir
CONGLOMÉRER.
AGGLUTINER v. tr. est un emprunt (XIVe s.) au latin agglutinare, composé de gluten, -inis « colle » (→ glu, gluten).
❏
Le verbe, transitif et pronominal, signifie d'abord « (se) joindre, (se) réunir moralement », puis devient concret (1543, adglutiner) surtout en technique, aussi en chirurgie et médecine (mil. XVIe s., Paré), emploi disparu.
◆
Le pronominal s'agglutiner s'est employé aussi en linguistique (mil. XIXe s., Renan) ; Cf. ci-dessous agglutinant et agglutination.
❏
Le dérivé
AGGLUTINANT, ANTE adj. s'est dit de ce qui aide les plaies à se cicatriser (1590, Paré), emploi substantivé (1751). Au
XIXe et pendant une partie du
XXe s., on parle aussi de
langues agglutinantes (1863, Littré) « qui procèdent par affixation de racines ».
■
AGGLUTINATIF, IVE adj. (mil. XVIe s., Paré) s'est employé en médecine, aussi substantivé (1845) avant de prendre en sciences une valeur générale (v. 1920).
■
AGGLUTINATION n. f., emprunt (1537) au latin des Gloses agglutinatio, est aussi un mot de médecine, puis signifie en général « action d'agglutiner ou de s'agglutiner », comme le dérivé français AGGLUTINEMENT n. m. (1611). Seul agglutination s'emploie en linguistique (1814, A. de Humboldt).
■
AGGLUTININE n. f., formé avec le suffixe -ine, désigne (1903) des substances provoquant l'agglutination de microorganismes, de globules.
■
AGGLUTINOGÈNE adj., « qui a le pouvoir d'agglutiner » (1904), est formé avec -gène*. Il est substantivé (1945) pour désigner des anticorps à pouvoir agglutinant.
AGGRAVER et dérivés → GRAVE
AGHA n. m. est un emprunt au turc (1535) désignant en histoire un officier ottoman de la cour du sultan.
◆
Par réemprunt à l'arabe algérien, lui-même pris au turc, agha désigne un chef placé au-dessus du caïd.
◆
AGHA KHAN n. m. désigne le chef spirituel des musulmans ismaéliens.
AGILE adj. est emprunté (XIVe s.) au latin agilis « qui avance vite ; rapide », au figuré « facile », dérivé de agere (→ agir), verbe parallèle au sanskrit ajirah « rapide », ce qui confirme le caractère archaïque de cette famille de mots.
❏
L'adjectif s'emploie à propos de la vivacité physique et aussi morale (1543). Il a été substantivé (un agile) à propos de quelques animaux (1791, d'un serpent ; 1826, de loirs : les agiles, famille de rongeurs, emploi disparu).
❏
Le dérivé
AGILEMENT adv. (1380) correspond à l'adjectif.
■
AGILITÉ n. f. est emprunté (XIVe s.) au dérivé latin agilitas « vivacité (physique et intellectuelle) » à propos de la subtilité de l'air (J. de Vignay) puis au sens moderne, physique (v. 1360-1370, Oresme) puis (1601) intellectuel. Il se dit aussi de la voix (1845).
■
Un dérivé spontané formé sur agile, AGILETÉ n. f. est attesté depuis le XIXe s. (av. 1852, en Suisse) ; il est condamné par les puristes.
AGIO n. m. est un emprunt des financiers (1679) à l'italien agio, aujourd'hui aggio, terme de banque (mil. XIVe s.), probablement de agio « aise » (→ adagio), emprunté soit à l'ancien provençal aize, soit au latin médiéval aisium « droit d'usage sur des biens communaux » et « bénéfice ajouté », de l'ancien français aise* en droit féodal. Le mot serait passé du droit terrien au vocabulaire des affaires.
❏
En français, les agios désignent d'abord une différence en plus entre les cours d'une même monnaie, puis (fin XVIIIe s.) une spéculation malhonnête sur des effets publics (écrit parfois agiot, d'après agiotage, dans ce sens) et, par métonymie, le bénéfice réalisé dans l'un et l'autre cas. Ces emplois sont archaïques ou historiques.
◆
Au XIXe s., le mot reçoit une valeur technique neutre, en finances, pour « commission retenue par une banque sur une opération » (par exemple frais d'agio).
❏
Le dérivé
AGIOTER v. tr. (1716) correspond à « spéculer sur les cours des monnaies, puis sur les effets publics ».
■
AGIOTAGE n. m. est déjà chez Saint-Simon (1710) et prend très vite une valeur nettement péjorative (1720, d'Aguesseau). Les deux mots ont été très employés lors des spéculations financières de la fin du XVIIIe s. et à propos des assignats, sous la Révolution, avec l'idée de crise économique.
■
Il en va de même pour AGIOTEUR n. m. (1710, Saint-Simon), concurrencé pendant la Révolution par agiotateur (Brunot) au sens péjoratif de « spéculateur ».
AGIR v. est issu assez tard (1450) du verbe latin agere, ancien verbe de la langue pastorale qui signifie « pousser devant soi », et se dit aussi des hommes avec le sens de « poursuivre, pousser, mener », et des choses. Agere s'emploie absolument pour « aller, se diriger », spécialement dans la langue juridique (« mener une affaire »), théâtrale (« représenter, jouer ») et en grammaire (« être actif »). Ce mot appartient à une racine indoeuropéenne aux représentants celtiques, arménien, sanskrit et grec (agein ; → agonie) ; voir aussi le schéma.
❏
Le verbe apparaît d'abord dans un contexte chrétien, au sens didactique de « produire, rendre effectif », lié aux valeurs philosophiques d'acte et d'actif. Le sens le plus usuel, où le sujet est un nom de personne et qui correspond à « être actif, faire qqch. », se développe en moyen français, aussi comme transitif (agir qqch., XVIe s.). Le verbe, comme le transitif indirect (agir de qqch., 1503), signifiait alors aussi « parler, traiter de qqch. ».
◆
L'emploi intransitif moderne apparaît dans la seconde moitié du XVIe s. (Montaigne), mais ne semble devenir usuel qu'au XVIIe siècle ; on disait auparavant œuvrer, faire.
◆
L'emploi transitif est aussi attesté en droit au sens de « poursuivre en justice » (1538 ; encore dans Académie, 1932) ; il correspond au sens spécial d'acte, action*. Il s'est conservé didactiquement en philosophie pour « pousser (qqn) à l'action », aussi au passif dans être agi (fin XVIIe s., Bossuet).
◆
L'emploi intransitif usuel est souvent qualifié : agir bien, mal (1650, Corneille), et il prend des valeurs spéciales : « négocier » (1636), « passer à l'action au lieu de parler » (1701).
◆
Le pronominal impersonnel s'agir, d'abord dans il s'agit que (1600, O. de Serres qui le construit avec à et infinitif : il ne s'agit qu'à...), puis il s'agit de (1656, Corneille), est devenu usuel, surtout au négatif (il ne s'agit pas, plus de...).
◆
S'agissant de... (1688) est didactique mais vivant.
❏
Agir a plusieurs dérivés.
AGISSANT, ANTE adj., tiré du participe présent (1584), a signifié « qui est vif, est actif » (1660), peut-être avec influence de
s'agiter.
■
AGISSEMENTS n. m. pl. apparaît pendant la Révolution (1794) pour désigner des actions critiquables, blâmables (des agissements suspects).
■
À ce sens est lié AGISSEUR n. m. (1871) qui s'est employé en politique, puis a disparu.
❏ voir
ACTE, AGENT, AGILE, AGITER, AMBAGES, RÉAGIR.