ALBIGEOIS, OISE adj. et n. est la francisation (déb. XIIIe s.) du latin albigensis, de Albiga « Albi », peut-être dérivé de Albius, nom d'homme de albus « blanc » (→ albe), ou du préceltique alb « colline », que l'on retrouve dans Alpes*. Cette racine, peut-être ligure, est d'origine indoeuropéenne.
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Le mot, qui signifie « d'Albi », sert à désigner (depuis 1223) une fraction de la secte chrétienne des Cathares, ou « purs », contre lesquels Innocent III fit prêcher une croisade exterminatrice au XIIIe siècle.
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L'adjectif, outre « d'Albi », qualifie ce qui a rapport à la secte des Cathares de la région d'Albi.
ALBINOS adj. et n. est emprunté (1665) à l'espagnol, où il note le pluriel de albino (v. 1570), du latin albus « blanc » (→ albe).
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Le mot, surtout appliqué à des Noirs dépourvus de pigment mélanique, s'emploie jusqu'au XVIIIe s. en concurrence avec nègres blancs, traduisant l'espagnol negros albinos, par exemple chez Buffon. Puis le mot s'étend à toutes les races humaines et se dit aussi d'animaux, surtout comme adjectif (souris, lapin albinos).
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ALBINISME n. m. est un dérivé savant (1838).
ALBUGO n. m. est un emprunt (1492) au latin albugo, précédé par le dérivé albugine (XIVe s.) ; il correspond à l'ancien provençal albuge (v. 1220). Le mot latin est dérivé de albus « blanc » (→ albe).
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Terme de médecine désignant une tache blanche sur la cornée, le mot, attesté isolément au XVe s., s'emploie aussi pour désigner une tache blanche des ongles (1606).
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La forme ALBUGINE a donné naissance à plusieurs dérivés, comme ALBUGINÉ, ÉE adj. (1495) appliqué à la tunique de l'œil (1751) et celle du testicule (id.) ; ALBUGINEUX, EUSE adj., « blanchâtre » (1503), mot très didactique ; ALBUGINITE n. f. « inflammation du tissu fibreux, dit albugineux » (1845).
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Comme albugo, tous ces mots appartiennent à l'usage médical.
ALBUM n. m. est un mot latin signifiant « surface blanche, tableau blanc », qui est tiré de l'adjectif albus « blanc » (→ albe).
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Le premier emploi en français (Saint-Évremond, 1662) mentionne l'emploi par les Allemands d'un « livre blanc relié » que l'on fait signer par des personnalités visitées et que l'on nomme album amicorum (le livre blanc des amis).
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Le mot, employé seul, est adopté en français (1704) ; son sens s'étend (déb. XIXe s.) à des cahiers ou publications contenant beaucoup d'illustrations, d'où album de famille, qui a pris en argot (1939) le sens de « collection de portraits d'anthropométrie, concernant des malfaiteurs ».
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Au XIXe s. (1865), album commence à désigner un cahier relié destiné à recevoir une collection (de timbres, par exemple). On parle ensuite d'album de disques pour une série de disques vendus ensemble (attesté mil. XXe s., dans les dictionnaires ; déjà album à records [disques], 1921 au Canada) et même pour une pochette contenant un seul disque ; ce sens tend à vieillir avec la diffusion du disque compact.
ALBUMINE n. f., mot savant, a été tiré à la fin du XVIIIe s. (1792) de l'expression suc ALBUMINEUX (1736), cet adjectif étant dérivé du bas latin albumen (IVe s.) « blanc d'œuf », de l'adjectif classique albus « blanc » (→ albe). Albumen avait donné en ancien français albun n. m. (déb. XIIe s.) « blanc d'œuf » ou aubun, abun (1245), puis par emprunt, dans le même sens, albumen (1787).
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La notion scientifique d'albumine, d'abord « protéine coagulable nécessaire à la nutrition », s'est rapidement étendue à un groupe de protéines aujourd'hui spécifiées par des désignations obtenues à partir d'albumine : lactalbumine, etc.
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Le mot s'emploie couramment pour albuminurie.
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Le mot a de nombreux dérivés et composés dans la terminologie chimique et médicale.
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ALBUMINURIE n. f., mot forgé en 1838 par Martin Solon avec le grec ourein « uriner », désigne la présence d'albumine dans les urines.
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De là ALBUMINURIQUE adj. (1857), aussi substantivé.
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ALBUMINOÏDE adj. (1849) « analogue à l'albumine » est archaïque, sauf comme nom pour « protéide ».
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ALBUMINOSE n. f. (1857) a été remplacé par ALBUMOSE n. f. (1898) pour désigner un corps produit par hydrolyse incomplète de l'albumine.
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ALBUMINER v. tr. signifie « enduire d'albumine » (1865).
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ALBUMINASE n. f. (1920-1924) désigne une enzyme agissant sur les albumines.
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ALBUMINATE n. f. (1865) s'applique à une combinaison d'albumine et de sels ou d'oxydes métalliques.
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ALBUMINEUX, EUSE adj., après l'expression suc albumineux (ci-dessus) a été reformé (1905) et s'emploie pour « relatif à l'albumine » et pour « albuminurique ».
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ALBUMINÉMIE n. f. (1926) concerne le taux d'albumine du sang.
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ALBUMINIQUE adj. (v. 1950) tend à remplacer albumineux.
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Le préfixe ALBUMINO- est productif.
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ALBUMEN n. m. est emprunté au début du XIXe s. (av. 1808) au bas latin albumen au sens de « blanc d'œuf », puis spécialisé en botanique à propos de la réserve alimentaire des graines.
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Il a pour dérivé ALBUMINÉ, ÉE adj. (1814).
ALCADE n. m. est un emprunt médiéval (1323) à l'espagnol alcalde (attesté v. 1060), lui-même emprunté à l'arabe ᾿al-qāḍī « le juge » (Cf. cadi), participe présent substantivé du verbe qádà « juger ».
❏
Le mot est resté typique de l'administration espagnole ; il désigne un magistrat exerçant diverses fonctions, notamment municipales.
ALCALI n. m. est un emprunt du moyen français (1363, alkali) à l'arabe ᾿al (article) qaly « la soude » désignant la cendre des plantes marines et la soude qu'on en tirait, par le latin médiéval alkali (1215).
❏
Alcali, mot de chimie ancienne, s'applique en français comme en arabe à la soude tirée des cendres, et par analogie aux sels basiques produits par une série de métaux. Le mot désigne encore dans le commerce une solution ammoniacale, aussi dans alcali volatil.
❏
Le dérivé
ALCALIN, INE adj. (1691) qualifie les métaux qui produisent des alcalis. Il a été substantivé en pharmacie (1884, Zola in
T. L. F.).
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De là
ALCALINISER v. tr. (1877).
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ALCALOÏDE n. m. est la réfection (1827), avec le suffixe -oïde, de alcalide (1823, Guibourt) et désigne les corps à réaction basique qui se trouvent avoir une puissante action physiologique (comme la morphine, la strychnine, les principes du café, du thé, etc.).
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De là ALCALOÏDIQUE adj. (1879) et ALCALOÏDISME n. m. (1881) « intoxication par les alcaloïdes ».
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ALCALOSE n. f. est dérivé (1926) de alcali pour désigner un trouble de l'équilibre entre les bases (alcalines) et les acides de l'organisme.
ALCARAZAS n. m. est un emprunt (1798) à l'espagnol alcaraza (XVIe s.) au pluriel, emprunt (sous la forme carraço, 1330) à l'arabe al karrāz « la jarre ».
❏
Le mot désigne, toujours dans un contexte hispanique ou arabe, un vase de terre poreuse utilisé pour conserver les liquides au frais (analogue à la gargoulette).
ALCAZAR n. m. est un emprunt en architecture (in Larousse, 1866) à l'espagnol alcazar (1069), lui-même pris à l'arabe al qaṣr « la forteresse » (aussi ksar, ksour), issu du latin castrum « château fort » (→ château).
❏
Le mot désigne un palais fortifié des musulmans d'Espagne. Il a été appliqué au XIXe s. (1872 in T. L. F.) à des lieux de plaisir décorés dans le style mauresque et fort utilisé comme nom propre pour ces lieux.
ALCHIMIE n. f. Les formes françaises alkimie (1275), alchimie et, par altération (grec arkhê, latin ars), arkemie, archimie ont été précédées par le latin médiéval alcheimia (mil. XIIe s.) ; elles sont empruntées à l'arabe ᾿al kīmiyā᾿, mot désignant la pierre philosophale et passé au XIIIe s. à l'espagnol et au catalan (chez le philosophe et savant Ramon Llull, en 1295). Ce mot est d'origine incertaine : on invoque soit le grec tardif khêmia « magie noire » ou le copte chame « noir » (désignant les Égyptiens, renommés comme alchimistes), tous deux apparentés, soit le grec khumeia « mélange », dérivé de khumos « jus », enfin le grec khuma « ce qui se répand » (hypothèse aujourd'hui écartée). Cependant, certains arabisants se réfèrent au radical arabe kama « tenir secret ». ᾿Al kīmiyā᾿ est très proche par le sens de ᾿al-᾿iksīr (→ élixir). Les anciens alchimistes grecs pensaient à l'hébreu šemeš, un des noms du Soleil (Cf. René Alleau, in Encyclopaedia Universalis), arabe šams. On voit donc deux séries d'hypothèses, l'une fondée sur des pratiques (préchimiques), l'autre sur un savoir ésotérique, toutes deux situant l'apparition de l'alchimie dans le Proche-Orient.
❏
Le mot désigne depuis le XIIIe s. l'activité qui consiste à rechercher la transmutation des métaux. Il a désigné un alliage de composition alchimique (arquemie, 1447) et au figuré une opération de transformation, d'où faulse alquemie (1547) « tromperie ». Ces valeurs ont disparu, mais le mot a pris au XIXe s. la valeur métaphorique de « processus mystérieux » (Cf. l'alchimie du verbe chez Rimbaud). Les dérivés latins (ci-dessous) témoignent de la vitalité du domaine à partir du moyen français. L'alchimie est aussi un langage, « qui permet de décrire des opérations avec précision tout en les situant par rapport à une conception générale de la réalité » (M. Butor) ; elle est alors en rapport avec l'hermétisme.
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Alors que le mot est encore synonyme de chimie en français classique, les deux notions s'opposent depuis que la chimie moderne s'élabore (fin XVIIIe s.).
❏
Le dérivé
ALCHIMISTE n., d'abord sous la forme
alkemiste (v. 1370), puis
alchymiste (1582), est emprunté au dérivé latin médiéval
alchimista (v. 1200) et désigne le praticien de l'alchimie.
◈
ALCHIMIQUE adj., d'abord attesté isolément au figuré (
alquimique, « factice »
XIVe s.), signifie « de l'alchimie » (1547,
alki-). Il est emprunté au latin médiéval
alchimicus (
XIIIe s.), employé notamment dans
aurum alchimicum « or obtenu par l'alchimie », c'est-à-dire « artificiel ».
❏ voir
CHIMIE.
+
ALCOOL n. m., attesté au XVIe s. sous la forme alcohol (1586, Paré), est emprunté au latin moderne alcohol (XVIe s.), lui-même emprunté à l'arabe ᾿āl (article) kuḥl « la poudre d'antimoine » (kuḥl a aussi donné kohl*, d'où vient khôl).
❏
D'abord présenté comme mot arabe (A. Paré) au sens de « poudre d'antimoine », le mot acquiert la valeur plus générale de « poudre obtenue par trituration et sublimation » (
alcohol martis, etc. en latin).
◆
Par analogie,
vini alcohol (1594) désigne l'« esprit » du vin, fluide obtenu par sublimation et
alcohol équivaut alors à « essence » ou « esprit ». Cette acception (1612,
alkol), qui, s'agissant du vin, correspond au concept moderne d'
alcool éthylique (où
alcool a le sens étendu en chimie, ci-dessous), passe dans les langues modernes au
XVIIe s. et l'emporte sur la première (
alkool, dans le dictionnaire de Thomas Corneille, 1694). Le mot reste alors rare et didactique mais, au
XVIIIe s., l'acception d'« esprit de vin » (désignée par
alcool ou
alcool de vin, 1762) est seule connue, même si le sens de « poudre » est encore rappelé (1757,
Encyclopédie).
◆
Le mot devient usuel au début du
XIXe s., soutenu par plusieurs dérivés (
alcoolique, alcoolisé, alcoolisme, ci-dessous), et s'emploie collectivement pour « boisson alcoolisée », spécialement, hormis le vin (d'où
vins et alcools, en commerce).
◆
Il évolue à la même époque (1830-1860) dans deux directions : en chimie (voir ci-dessous) et en technique, il désigne ce que l'on appellera le méthanol, utilisé comme combustible, d'où
alcool à brûler (pour le distinguer de l'
alcool éthylique) et
lampe, réchaud... à alcool, puis l'« esprit de bois » (1835).
◆
Alcool de bois, se dit en français du Canada pour « alcool méthylique » et
alcool à friction, d'après l'anglais
rubbing alcohol, là où on parle en France d'
alcool à 90 (degrés).
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Alcool de jarre, en français du Viêtnam, s'applique à un alcool de riz fermenté en jarres.
Le concept chimique d'alcool procède de ces acceptions techniques ; c'est une nouvelle extension englobant des composés de carbone, d'hydrogène et d'oxygène de même nature que l'esprit de vin et que l'« alcool » combustible (lesquels seront identifiés aux alcools éthylique et méthylique). Ce nouveau concept est proposé par Dumas et Péligot (1834-1835) et de nouveaux alcools sont identifiés dans les années qui suivent (alcool cétylique, 1836 ; amylique, 1844, Cahours ; etc.). Ce sens apparaît ensuite dans les dictionnaires généraux (1863, Littré), après les syntagmes alcool éthylique (1850) et méthylique (1839).
❏
Le sens chimique de
alcool a servi à former plusieurs dérivés.
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1 ALCOOLISER v. tr. (1620) signifie « transformer un alcool, en esprit de vin ».
◆
1 ALCOOLISATION n. f. (1838) en est dérivé.
■
1 ALCOOLIQUE adj. (1789, Lavoisier, gaz alcoolique) sert à qualifier ce qui est relatif à l'esprit de vin, puis aux alcools en général, au sens chimique moderne (mil. XIXe s.).
■
ALCOOLAT n. m. (1819, aussi alcoholat, 1823) est relatif aux alcools méthylique, éthylique, puis aux autres alcools.
■
ALCOOLOMÈTRE n. m. (1809), « instrument déterminant la teneur d'un liquide en alcool éthylique », a cédé la place à ALCOOMÈTRE n. m. (mil. XIXe s.).
■
ALCOOLYSE n. f. (déb. XXe s.), de -lyse, désigne la séparation des éléments d'un composé (glycéride, ester) par l'éthanol.
■
POLYALCOOL n. m. (1903) se dit d'un corps organique dont la molécule possède plusieurs fonctions alcool. Forme contractée POLYOL n. m. Certains polyalcools sont des DIALCOOLS, des TRIALCOOLS.
◈
Le radical
alc- de
alcool a servi à former en chimie
ALCANE n. m. (mil.
XXe s.), désignant des hydrocarbures saturés, autrefois appelés
paraffines.
◆
Sur le même modèle sont formés
ALCÈNE n. m. (mil.
XXe s.) « carbure éthylénique » (olégine) et
ALCYNE n. m. (
-yne, de acét
ylè
ne).
◈
Parallèlement, le sens courant d'
alcool « boisson alcoolisée » a produit plusieurs dérivés plus usuels.
2 ALCOOLISÉ, ÉE adj., indépendamment du verbe
alcooliser (ci-dessus) dont il spécialise le participe passé, qualifie les boissons contenant de l'alcool (1834).
◆
S'ALCOOLISER v. pron. (
in Larousse, 1866) est un équivalent plaisant de « boire de l'alcool ». De là
2 ALCOOLISATION n. f.
◈
2 ALCOOLIQUE adj. se dit (1859) de ce qui concerne l'alcool consommé et ses effets, de ce qui contient de l'alcool (boisson), ainsi que d'une personne qui consomme beaucoup d'alcool, aussi substantivé (1873). Le mot, usuel, est abrégé en
ALCOOLO n.
■
ALCOOLISME n. m. (1852, après le lat. moderne alcoholismus) se dit de l'abus des boissons alcoolisées et de ses effets pathologiques. Ces deux dérivés sont très courants.
■
Le premier a produit ANTIALCOOLIQUE adj. (1890, anti-alcoolique) « qui combat l'alcoolisme », le second ANTIALCOOLISME n. m. (1898).
◈
ALCOOLIER, IÈRE n. (1987) désigne une personne qui fabrique et vend des boissons alcooliques.
◈
Cependant, cette valeur usuelle d'
alcool sert à former des mots plus techniques, comme
ALCOOLÉMIE n. f., de
-émie (1938) désignant la teneur du sang en alcool.
■
ALCOOTEST n. m., marque déposée en 1953, entré dans l'usage au début des années 1960, et la variante ALCOOLTEST n. m., de test, désignent une épreuve pour déceler l'alcoolémie, notamment dans le cas des conducteurs d'automobile.
◈
Autour du concept d'étude médicale de l'alcoolisme, le composé
ALCOOLOGIE n. f. a été créé en 1983 (P. Fouquet). Ont suivi
ALCOOLODÉPENDANCE, n. f. (1987) et
ALCOOLODÉPENDANT, ANTE, n. (1980).
◈
Enfin, de la valeur étymologique de « poudre », vient l'ancien terme technique
ALQUIFOUX n. m. (1687), désignant le sulfure de plomb pulvérisé, utilisé en vénerie. Le mot est encore connu en histoire des sciences et des techniques.
❏ voir
ALDÉHYDE, KHÔL.
ALCÔVE n. f. comme plusieurs mots français en al-, est un emprunt à l'arabe, al (ou el) étant l'article défini. Ainsi al qubbat est passé au français par l'espagnol alcoba et le français l'a transmis à d'autres langues européennes, tel l'anglais (alcove). Le sens avait beaucoup évolué depuis l'arabe qubbat « coupole », puis (XIVe s.) « petite chambre contiguë à une grande pièce », jusqu'à l'espagnol alcoba qui a signifié « passage public (couvert) », puis, comme en arabe, « coupole » (fin XIIIe s.), enfin « renfoncement d'une chambre, où l'on place le lit » (XVIe s.). Le mot arabe avait donné en ancien français alcube, acube ou ancube (XIIIe s.), désignant une petite tente.
❏
C'est le sens espagnol de « renfoncement où l'on place le lit » qui a été retenu en français, dans un contexte mondain et précieux (1646, Boisrobert), d'où tenir alcôve (1660), avec le sens précieux de ruelle, puis, bien plus tard, galant, d'où une expression comme secrets, mystères d'alcôve (enregistrée par Larousse, en 1866).
◆
Dans la région lyonnaise, le mot désigne une petite pièce qui, en arrière d'une autre pièce, en reçoit le jour (attesté 1796).
ALCYON n. m. est un emprunt (2e moitié XIIIe s., alcion) au latin alcyon, emprunté, à côté de la forme alcedo, au grec alkuôn, d'origine inconnue (emprunt méditerranéen ?). L'étymologie populaire des Anciens voyait le mot comme un composé de hals « mer » et de kuôn, du verbe kuein « porter des petits » ; en effet, dans la légende, l'oiseau faisait son nid l'hiver, au moment où la mer était calme. La graphie moderne apparaît au XVIe s. (1547) ; halcion (1519) a disparu au XIXe siècle.
❏
Ce mot littéraire de mythologie désigne, comme en grec et en latin, un oiseau de mer, d'heureux présage ; la femelle, lorsqu'elle était séparée du mâle, poussait continuellement un chant plaintif. Le mot s'emploie surtout dans la poésie classique.
◆
Puis il s'applique à des oiseaux réels, de rivière (
halcyon 1555, Belon) ou de mer.
■
Les zoologistes ont aussi donné ce nom à un polypier marin (alcyonium, 1690 ; puis alcyon, 1752), et nid d'alcyon (1829) s'est dit du nid de salangane, appelé aussi par confusion nid d'hirondelle.
❏
ALCYONIEN, ENNE adj. est dérivé de
alcyon, halcyon (
halcyonien, 1562) pour traduire le latin
alcyoneus « relatif aux alcyons ».
Alcyonei dies a fourni
jour alcyonien (1694), jours qui entourent le solstice d'hiver et pendant lesquels l'alcyon fait son nid et la mer se calme, selon la croyance antique.
■
ALCYONAIRE adj. et n. m. est dérivé (1838) de alcyon au sens de « polype » ; il a servi à former le nom d'un ordre (ancien) de cœlentérés (1838).
ALDÉHYDE n. m. est emprunté (av. 1845) à l'allemand Aldehyd, mot formé par J. von Liebig d'après le latin moderne al(cohol) dehy(drogenatum) (→ alcool, hydrogène).
❏
Le mot désigne en chimie un corps obtenu par oxydation (ou déshydrogénation) d'un alcool primaire. Par apposition, on emploie fonction aldéhyde (comme fonction alcool) et, en composition, ALDÉHYDE-ALCOOL n. m.
❏
Il a pour dérivés
ALDÉHYDIQUE adj. (1845) et
ALDÉHYDÉ, ÉE adj. (mil.
XXe s.), notamment dans
parfums aldéhydés.
◈
Du radical d'
aldéhyde a été tiré un élément
aldo-, par exemple dans
ALDOSTÉRONE n. f., nom d'une hormone sécrétée par les glandes corticosurrénales.
ALE n. f. est d'abord un emprunt (v. 1223) au moyen néerlandais. En effet, les attestations du XIIIe s. sont de G. de Coincy, originaire de Soissons, et en picard on trouve aussi gœdale (« bonne bière ») à la même époque. Le moyen néerlandais est lui-même emprunté à l'anglais ale, mot très ancien (v. 940), dont la racine germanique pourrait être apparentée au latin alumen (→ alun), mais sous toute réserve.
❏
Les emplois médiévaux étant oubliés, le mot a été réemprunté à l'anglais sous la forme aile (1701), qui correspond à la prononciation, mais est critiquée comme incorrecte (1835, Platt) et remplacée par l'emprunt graphique ale. Il désigne une bière anglaise blonde, peu amère (opposé à bitter), appelée aussi pale ale.
ALÉA n. m. est emprunté (1852) au sens de « hasard » au latin alea, mot d'origine inconnue signifiant « jeu de dés », puis « dés » (le mot classique pour « dés » étant tali) et enfin « hasard ». Le sens de « dés » reste connu par la phrase célèbre de César, franchissant le fleuve Rubicon, alea jacta est, « les dés sont jetés ».
❏
Le mot signifie « hasard » puis, surtout au pluriel, « événements imprévisibles ».
❏
ALÉATOIRE adj. adapte le dérivé latin aleatorius et apparaît en droit (1596), pour qualifier un contrat qui prévoit des conditions liées à la chance, puis (1837, chez Balzac) dans des emplois généraux (« problématique »), enfin en mathématiques, en logique et (v. 1955) en musique, pour signifier l'intervention du hasard. Il est devenu relativement usuel dans l'usage général.
◆
Il a pour dérivé ALÉATOIREMENT adv. (1829).
ALÈNE n. f. est un emprunt (v. 1180) au germanique °alisno, dont le radical se retrouve dans l'allemand Ahle ou, selon Guiraud, serait apparenté au latin licinus « courbé vers le haut ».
❏
Le mot désigne d'abord un stylet, puis (v. 1200) un poinçon pour coudre le cuir, employé par les cordonniers. Aujourd'hui alène s'applique aussi à l'élément de machine-outil servant au même usage.
◆
Par apposition, le mot caractérise un poisson à museau effilé (rai alène, 1558), d'où une alène, et aussi un coquillage (1842).
◆
En alène se dit en botanique (1835) pour subulé.
❏
Le dérivé
ALÉNIER n. m. (1798), d'abord
allesnier (
XVIe s.), a désigné la personne qui fabrique ou vend des alènes.
■
ALÉNÉ, ÉE adj. (1808) signifie « pointu comme une alène » et en botanique « subulé » (Cf. en alène).
❏ voir
LÉSINE.
ALENTOUR, ALENTOURS → ENTOUR
ALERTE n. f. et adj. est un emprunt (XVIe s.), sous des graphies variées (a l'herte, chez Rabelais ; a l'airte, chez Montaigne), à l'italien all'erta, « sur ses gardes », pris comme interjection dans un sens voisin de alarme*. Le mot italien signifie proprement « sur la crête, sur la hauteur », erta étant le nom dérivé de l'adjectif erto « escarpé », participe passé du verbe ergere « dresser » qui représente le latin erigere (→ ériger).
❏
En français, l'exclamation, qui correspond à « debout ! », donne d'une part un adjectif (XVIe s.), qui signifie « sur ses gardes » puis « vif, leste », au physique et au moral, et d'autre part un nom féminin (2e moitié XVIIIe s.) équivalant à alarme.
◆
Ce dernier emploi s'est diffusé dans la langue générale (par exemple, fausse alerte, être en alerte) et comme terme de guerre (alerte aérienne, sirène d'alerte), emploi fréquent dans le contexte de la Seconde Guerre mondiale.
❏
Le dérivé ALERTÉ, ÉE adj. (1836, chez Stendhal) a les mêmes valeurs, d'abord militaires, comme le suggère l'apparition du verbe actif pendant la guerre, en 1918.
◆
Alerté, comme ALERTER v. tr. (1918), s'étend à de nombreux contextes et équivaut à « avertir, lorsqu'il peut y avoir danger ».