ANTONYME n. m., enregistré dans le Dictionnaire universel de P. Larousse (1866) doit être antérieur. Comme antonymie, il est formé sur ant(i)-* d'après synonyme*, -nymie.
❏  Il désigne une unité lexicale (mot, expression) de sens contraire à une autre (relation de contrariété ou de complémentarité).
❏  ANTONYMIE n. f. serait chez Robespierre (av. 1794) selon Boiste 1829. ◆  Le mot désigne la relation sémantique entre antonymes (opposition de sens).
■  ANTONYMIQUE adj. (mil. XIXe s.) en est l'adjectif.
ANTRE n. m. est emprunté (mil. XIVe s.) au latin antrum « caverne », hellénisme poétique (grec antron « caverne, fosse ») passé plus tard en prose et en latin chrétien. Le mot grec, rapproché de l'arménien ayr « caverne », semble lié à la racine indoeuropéenne du grec anemos « vent », sanskrit áni-ti « souffler » (→ âme, anémo-, etc.), si l'on admet pour valeur initiale « lieu d'où sortent des émanations ».
❏  En français, le mot est resté didactique ou littéraire. Il a commencé par désigner une grotte (v. 1350), notamment l'abri d'une bête féroce. Des connotations mythologiques ou métaphoriques sont apparues : « lieu inquiétant, mystérieux, abritant des dangers », sens usuel pendant la Révolution (1790).
■  En sciences, il sert à désigner certaines cavités de l'organisme (1751) ; ce sens spécialisé (antre du pylore, antre mastoïdien), et qui a produit des dérivés récents (ANTROTOMIE n. f., 1928 ; ANTRITE n. f.), est très didactique.
■  Enfin, depuis le XIXe s., antre se dit plaisamment pour « lieu où l'on se retire (pour vivre, travailler) » (1878, Flaubert).
ANUS n. m. est un emprunt savant (1314) au latin anus (→ anneau, qui vient d'un diminutif latin), spécialisé en anatomie pour « orifice du rectum ». On ne peut faire de rapprochement qu'avec le vieil irlandais ānne « anneau », si toutefois ce dernier n'est pas repris au latin.
❏  Le mot, désignant l'orifice du rectum, est resté didactique (anatomique, médical) ; il a eu quelques significations extensives, par exemple à propos des mollusques (1834), dont la plupart ont disparu.
❏  Le dérivé ANAL, ALE, AUX adj. (1805, nageoire anale, Cuvier) est attesté un peu plus tard au sens général, « relatif à l'anus » (1821). ◆  Le mot a reçu en psychanalyse (1914) un sens spécifique, pour désigner la libido infantile prégénitale notamment dans le syntagme stade anal.
■  De là ANALITÉ n. f. (mil. XXe s.) « caractère anal (d'une pulsion) » et « stade anal », qui succède à l'oralité et précède la génitalité.
ANXIEUX, EUSE adj. est emprunté (1529), longtemps après anxiété (ci-dessous) au bas latin anxiosus (Ve s.), terme de médecine, dérivé de anxius « qui ressent ou qui fait ressentir de l'angoisse », lui-même dérivé de anxi, forme du verbe angere « oppresser, serrer la gorge », mot qui a donné angoisse*. Alors que angoisse et sa famille ont une valeur concrète, physiologique, anxieux et anxiété ont un contenu psychologique.
❏  Anxieux, qui a éliminé les formes d'ancien français issues de anxiosus, comme ainsus (XIIe s.), puis entieus (Froissart), signifiant aussi « rêveur, soucieux », se dit d'abord des personnes (1533) et des choses (discussion, situation..., 1529). ◆  À peu près disparu, il a été repris en médecine (1793), puis dans l'usage général où (être) anxieux de... s'emploie pour « désireux, avide de... » (mil. XIXe s.) ; c'est alors un calque de l'anglais anxious to, de même origine. ◆  La substantivation (un anxieux, une anxieuse) semble récente (Bernanos, 1929, in T. L. F.).
❏  Le dérivé ANXIEUSEMENT adv. (1823) est assez courant.
ANXIÉTÉ n. f. est un emprunt ancien (1190) au dérivé latin anxietas, de anxius. Le mot est attesté sporadiquement en ancien et moyen français, puis au XVIe s. (1531), où il est renforcé par anxieux. Du sens psychologique, il passe alors à une valeur double, aussi physiologique, à la manière de angoisse, et il signifie « oppression » (1564) et même « suffocation » (1585). ◆  À la différence de l'adjectif anxieux, anxiété se conserve au XVIIe s., mais avec une valeur « morale », c'est-à-dire psychologique (Cf. Furetière, 1690). Il devient plus courant en médecine (1751), puis dans l'usage général, à peu près lorsque anxieux redevient usuel. L'histoire du mot évoque celle d'angoisse*, à ceci près que anxiété apparaît exceptionnel avant le XVIe siècle. Le mot d'ancien français est ainsse (XIIe s.), aisse (aussi en ancien provençal ais, aisse), issu du latin anxia.
Sur anxiosus, les composés savants ANXIOGÈNE adj. (1968) « qui cause de l'anxiété, de l'angoisse » et ANXIOLYTIQUE adj. et n. m. (1970) « qui combat, supprime l'angoisse » sont des formations médicales et pharmacologiques récentes.
❏ voir ANGINE.
AO DAÏ n. m., emprunt à la langue vietnamienne, est le nom du vêtement traditionnel féminin, longue tunique fendue sur les côtés, ajustée, à col montant, portée sur un pantalon. En français, le mot ne s'est pas diffusé hors du milieu vietnamien.
AORISTE n. m. est un emprunt grammatical (1548, puis 1564, Rabelais, écrit aorist) au latin de Macrobe, calque du grec aoristos (khronos) « (temps) indéterminé ». Aoristos « non limité » est formé de a- privatif (→ 2 a-) et de horistos, adjectif verbal de horizein « séparer par une frontière, délimiter », terme sans étymologie connue, qui a donné horizon*.
❏  Ce mot de linguistique grecque désigne un temps du verbe qui correspond à un passé indéterminé. Il s'est appliqué (XVIe-XVIIIe s.) au passé défini en français.
❏ voir APHORISME.
AORTE n. f. est un emprunt (1478, Grande Chirurgie) au grec aortê, de même origine que artêr, artêria (→ artère).
❏  Le mot désigne la grande artère qui sort du ventricule gauche du cœur.
❏  Le dérivé AORTIQUE adj. (1805, Cuvier), d'abord attesté comme n. m. (1789), est courant en anatomie.
■  AORTITE n. f. (1824) désigne une inflammation de l'aorte, puis (XXe s.) l'ensemble des lésions affectant cette artère.
■  AORTISME n. m. (1907) s'applique à l'artériosclérose aortique.
Plusieurs composés en AORTO- ont été formés, comme AORTOSTÉNIE n. f. (1855), AORTOGRAPHIE n. f. (mil. XXe s.).
L AOÛT n. m. est issu, par la forme bisyllabique aüst (v. 1120), puis aoust ou oust (XIIe s.), du latin populaire agustus, altération de augustus « (mois) d'Auguste », nom substitué en l'honneur de l'empereur à sextilis (mensis), le sixième mois de l'ancienne année romaine.
❏  Le mot désigne en français le huitième mois de l'année, correspondant au cœur de l'été. Mi-août « milieu du mois » (XIIe s.), encore employé au début du XXe s., est archaïque ou plaisant. ◆  Le sens dérivé de « récolte », en français (v. 1170), a vécu jusqu'au XVIIe siècle ; il a produit les dérivés anciens aoûter et aoûtage (ci-dessous).
❏  Les dérivés marquent bien l'évolution des connotations sociales du mot.
■  AOÛTER v. intr. « faire la récolte » (aoster, fin XIIe s.), d'où AOÛTÉ, ÉE adj., spécialisé en arboriculture (1571), et AOÛTAGE n. m. (1232) sont les plus anciens.
■  Des travaux des champs, le sens sélectionné par les dérivés est passé aux particularités de l'époque, d'où AOÛTAT n. m. « parasite du plein été » (mot régional attesté par écrit en français à la fin du XIXe s.), et, de là, aux conditions de la vie moderne : AOÛTIEN, IENNE n. (v. 1965) signifie « personne qui prend ses vacances en août » ou « qui reste dans une grande ville en août ».
❏ voir AUGMENTER, AUGURE, AUGUSTE, AUTEUR, AUTORISER, AUXILIAIRE, HEUR, INAUGURER, OCTROYER.
APACHE n. m., mot désignant un malfaiteur parisien, provient d'une idée du journaliste Victor Moris (1902) qui faisait allusion à la réputation de férocité et de ruse de la tribu Apache. Ce nom ethnique, attesté en 1751 en français, réduit phonétiquement l'anglo-américain Apache (1745), prononcé apatchi, apatchè, emprunt à l'espagnol et déformation du nom indien mieux transcrit par Athapaska, Atabasca. Les romans populaires traduits ou écrits en français (Gustave Aimard) avaient transmis de manière innocemment raciste la réputation de ces Indiens guerriers.
❏  Le sens français, inventé à propos d'une des bandes en lutte au sujet d'une belle prostituée, Casque d'or, est resté typique d'un milieu (banlieues ou plutôt « barrières » parisiennes) et d'une époque (1900). Il est courant jusqu'en 1920 environ, puis connu, mais comme allusion au passé.
APAISER → PAIX
APANAGE n. m., attesté sous la forme apanaige en 1297, est un dérivé de l'ancien verbe apaner, qui signifiait « donner son pain, sa part de nourriture à (qqn) », emprunt au latin médiéval apanare, composé de panis (→ pain). Cf. l'ancien provençal apanar « nourrir ».
❏  Apanage est un mot du Bourbonnais, du Berry, propre au régime féodal et à la succession des fiefs, et qui est entré dans le vocabulaire juridique du royaume au XVe s., désignant une portion du domaine accordée à un prince en compensation de son exclusion du pouvoir, concept essentiel pour le réglage des successions. En effet, le retour des apanages à la Couronne garantissait dans certains cas l'unité du royaume. ◆  Le mot prend le sens figuré de « privilège » avec la Renaissance (1546, Rabelais) ; il l'a conservé dans un registre soutenu.
❏  Le dérivé APANAGER v. tr. (1407) précède APANAGISTE adj. et n. (1669), lui aussi mot d'historien.
APARTÉ n. m. est un emprunt du français classique (1640) à l'italien a parte « à part ». L'expression vient du bas latin a parte (→ part), du latin classique pro parte sua « pour sa part, pour soi-même ».
❏  Un aparté désigne, au théâtre et comme en italien, ce que l'acteur est censé dire « à part soi », sans que nul sur la scène ne l'entende. ◆  Le mot s'emploie par extension (a-parté, 1770) à propos d'un entretien particulier, puis d'une remarque faite « à part soi ».
APARTHEID n. m. est emprunté (1954) à un mot afrikaans, c'est-à-dire de la variété de néerlandais parlée en Afrique du Sud par une partie de la population blanche, et signifie « mise à part, ségrégation ». Le mot afrikaans (1929) signifie « état séparé » et est formé du néerlandais apart, lui-même emprunté au français à part (→ part), et de l'élément -heid, qui correspond à l'anglais -hood, servant à former des substantifs abstraits.
❏  Cet emprunt dénomme la politique de séparation des races dans la pratique sociale, qui fut adoptée par l'Afrique du Sud de manière officielle jusqu'en 1990, et en général condamnée par le reste du monde. Par extension, il se dit d'un système raciste de séparation d'un groupe social.
❏  ANTI-APARTHEID adj. inv. qualifie ce qui combat le système d'apartheid, et par extension, tout système de ségrégation raciale.
APATAM n. m., emprunt à une langue africaine, désigne en français d'Afrique un panneau fait de tiges végétales tressées, supporté par des pieux, pour protéger du soleil. Par extension, le mot désigne une « case de plage », un abri analogue.
APATHIE n. f. est un emprunt (1375) au latin apathia, mot grec (apatheia), de a- privatif (→ 2 a-) et de pathos (→ patho- ; comme dans antipathie et sympathie). C'est un terme de philosophie désignant l'impassibilité psychique, le mépris des émotions, notamment chez les Cyniques.
❏  Le mot, d'abord employé en français à propos des philosophes antiques, avec la valeur du grec et du latin, étend son sens au XVIe s., signifiant « insensibilité passive ». Il reste rare avant la première moitié du XVIIIe s. (Saint-Simon). Il devient alors péjoratif, désignant couramment l'absence d'activité et de réactions due à la mollesse, à un état dépressif, etc.
❏  Le dérivé APATHIQUE adj. (1643, en philosophie) prend le sens usuel au début du XIXe siècle.
APATRIDE → PATRIE
APERCEVOIR → PERCEVOIR
APÉRITIF n. m. est un terme de médecine ancien (XIIIe s.), d'abord adjectif, emprunté au bas latin aperitivus, dérivé du verbe aperire qui a donné ouvrir*.
❏  Le mot qualifie d'abord les médicaments qui « ouvrent » les voies d'élimination, c'est-à-dire les sudorifiques, diurétiques, purgatifs. ◆  Ce sens, substantivé pour « médicament qui ouvre les pores » (1751), a dû vieillir et disparaître dans la première moitié du XIXe s., pour qu'une autre valeur, correspondant à « qui stimule, ouvre l'appétit », puisse se développer après 1850 (un exemple de 1750, concernant le poivre, relève plutôt de l'acception ancienne, même si ces médicaments ou substances sont reconnues « ouvrir l'appétit »). ◆  Au cours du XIXe s., l'adjectif se substantive à nouveau pour désigner, au masculin, une boisson alcoolisée prise avant le repas (1888, Maupassant). Il s'agit d'une désignation quelque peu publicitaire et pseudo-médicale, dont le succès est dû aux mœurs françaises et à l'alcoolisme convivial. Courant, le mot donne lieu à une métonymie : « réunion où l'on boit des apéritifs » (Cf. un vin d'honneur, etc.).
❏  L'abréviation APÉRO n. m. (1901) est très usuelle, mais ne prend guère la valeur métonymique (on boit l'apéro, mais on est invité à un apéritif).
❏ voir APERTURE.
APERTURE n. f. est un emprunt savant (XIVe s.), effectué plusieurs fois, au latin apertura, dérivé de aperire (→ apéritif, ouvrir).
❏  En moyen français, le mot s'est employé à l'abstrait (aperteure, XIVe s.) pour « intelligence » (Cf. ouverture d'esprit) ; repris en architecture (le mot latin étant employé par Vitruve) et en emploi général au sens concret (1556), il est sorti d'usage à l'époque classique. ◆  Par un nouvel emprunt (1916, chez Saussure), il désigne en phonétique l'écartement des organes de la phonation lors de l'articulation d'un phonème, entre occlusion et ouverture maximale. Il est aussi employé en sciences naturelles, à nouveau en emploi concret.
APEX n. m. est un emprunt didactique (1771) au latin apex « sommet, pointe », dans quelques emplois spécialisés. Pour les Latins eux-mêmes (Festus), apex vient de apere « lier, attacher » (→ apte), comme vertex de vertere, mais le sens attesté le plus ancien, « pointe », ne convient pas, et s'il s'agissait vraiment du sens originel, une étymologie étrusque (F. Müller) serait plus vraisemblable.
■  Un homonyme plus fréquent après 1980, emprunt d'un sigle anglo-américain, désigne un tarif réduit aérien.
❏  Le mot, plusieurs fois réemprunté, désigne d'abord un ornement du bonnet, un cimier de casque, dans l'Antiquité romaine ; puis, en sciences naturelles, le sommet ou la pointe d'un organe. ◆  Le sens le plus courant est astronomique (1894) : il concerne le point du ciel vers lequel le système solaire semble se diriger.
❏  APICAL, ALE, AUX adj., dérivé savant du latin apex, apicis, s'emploie (1838) en anatomie et en sciences naturelles, puis (1933) en phonétique, pour un phonème (par ex. le r) prononcé avec la pointe (apex) de la langue.
■  De là, APICO-, élément de composés (APICO-LABIAL, APICO-ALVÉOLAIRE adj.).