ARMADA, ARMADILLE → ARME
ARMAGNAC n. m. est le nom d'une région du Bassin aquitain, issu du latin médiéval (pagus) armeniacensis (mil. Xe s.), Armeniacus (Armagnac) étant un nom de familles attesté dès le début du Xe siècle.
❏  Le mot désigne une célèbre eau-de-vie de raisins de cette région (1802).
ARMAILLI n. m., mot de Suisse romande, apparaît sous la forme armailler (1584), puis armailli (1803), et provient du parler roman de Fribourg (écrit armaillie en 1497). Le mot est une altération d'un dérivé du latin animal → animal.
❏  En français de Suisse, armailli désigne un homme qui s'occupe des troupeaux dans un alpage et confectionne le fromage.
ARMATEUR, ARMATURE → ARME
+ ARME n. f. est emprunté, d'abord au pluriel (1080), au latin arma (comme dans les autres langues romanes et en celtique), pluriel neutre collectif devenu féminin singulier en bas latin. Le mot latin vient probablement (selon Bréal, par un verbe armare) du nom masculin armus « haut du bras ; épaule », correspondant à un radical indoeuropéen que l'on retrouve dans le sanskrit īrmáh, le grec armos. Ce radical, de forme °er-, °ar-, r̥̄, est repérable dans plusieurs autres mots latins : artus « membre » (d'où articulus ; → article), ars, artis (→ art) et aussi ritus (→ rite). Il est également apparenté au grec arithmos (→ arithmétique). Les arma sont originellement « ce qui garnit (ou prolonge) le bras » dans la lutte ; le mot désigne surtout les armes qui restent près du corps, notamment le bouclier, mais aussi tous les instruments pour le combat. Ce sens prévaudra aux dépens de celui de « bras », réalisé par l'anglais arm, mot de même origine indoeuropéenne.
❏  Comme en latin, les armes, dans La Chanson de Roland (1080), désignaient spécifiquement l'armure, mais ce dernier mot (XIIe s.) permit à armes de s'appliquer de préférence aux armes offensives. ◆  Dans ce sens, de nombreux syntagmes spécifient la nature des armes : armes molues (moulues) [1247], esmoulues (1270) qui désignait les armes pointues, tranchantes ; armes de trait (1562), de jet (1694), à hampe (1691), synonyme de hautes armes (1690), « piques et hallebardes » (les deux derniers sortis d'usage).
■  Étant l'un des mots clés du domaine de la guerre, arme évolue selon les mœurs et les techniques, de la féodalité aux conflits mondiaux et à l'arme nucléaire, en passant par l'invention des armes à feu (en provençal armas de fuech, 1567 à Nice ; 1671 en français). ◆  La phraséologie est très abondante, souvent au pluriel et avec la valeur symbolique de « situation militaire ». As armes (« aux armes ») est attesté dès Roland (1080), aux armes au XVe s. (1465) et aux armes citoyens en 1790, dans ce qui va devenir La Marseillaise (Cf. ci-dessous alarme). ◆  Gens d'armes (1306) signifie « soldat » (→ gendarme), comme homme d'armes (av. 1309, Joinville). ◆  Des expressions d'ancien français, comme a armes, d'armes, par (per) armes puis en armes, signifient « en combattant ou en s'y préparant » ; seule la dernière s'est conservée. Parmi les expressions verbales, porter les armes (1080), « servir dans une armée », et avoir, porter, prendre armes (XIIe s.) concernent en particulier le fait d'être armé chevalier, mais faire armes signifiait en général « combattre » (XIIIe-XIVe s.). Être sous les armes (1671) est encore usuel. Rendre (v. 1200), poser (1559), mettre bas (1606) les armes signifient « se rendre ». Fait d'armes (déb. XIVe s., Joinville) « exploit guerrier » reste en usage. ◆  Les armes, depuis le XIIe s., équivaut à « métier de soldat » et à « campagne militaire » (d'où les premières armes, aussi au figuré).
■  Le premier emploi extensif du mot (v. 1170) est celui du blason, que l'on retrouve dans une forme dérivée, armoiries (ci-dessous) : les armes et l'écu ou le blason, à la guerre comme au jeu du tournoi, sont les signes distinctifs du chevalier ; elles sont portées par un héraut d'armes (Cf. héraldique). Signes distinctifs du guerrier, elles deviendront ceux du noble héréditaire, l'allusion au combat disparaissant assez vite. ◆  Un cas analogue de symbolisation, mais où le mot arme ne s'est pas conservé, est celui des emblèmes de jeux de cartes en français, trèfle représentant la garde de l'épée, cœur la pointe de flèche, carreau le fer de la lance (peut-être aussi le carreau ou flèche) et pique le fer de la pertuisane.
Un sens métonymique de armes est « troupe ; soldats » (1508) en concurrence avec armée* ; il reste de cet emploi des expressions, par exemple place, commandant d'armes, et un sens technique (1730), « corps de l'armée, infanterie, cavalerie, etc. ». ◆  Une spécialisation, qui apparaît dans la langue classique (1670), est « épée ou fleuret » d'où, au pluriel, « escrime » (faire des armes) ; elle correspond à la vogue du combat singulier, non plus seulement comme moyen de régler les conflits personnels par le duel, mais comme exercice (on dira plus tard : sport). ◆  D'autres sens extensifs, comme armes Dieu (XIIe s.), armes de Dieu (XIVe s.) « vêtement d'Église », et au figuré armes espirituelles (v. 1120), sont sortis d'usage.
■  Par analogie, arme s'est dit des défenses du sanglier (1390), d'épines, d'aiguillons de plantes (1799), de tiges de fer en charpenterie (1704), etc.
■  Le mot est employé métaphoriquement dans de nombreuses expressions anciennes ou classiques : faire ses premières armes (1495, au propre) « débuter dans une carrière » (1831), baisser les armes « céder » (1690) ; être sous les armes se disait d'une femme parée (1718). Le contexte du combat amoureux sert de prétexte à de nombreux emplois littéraires, surtout depuis la préciosité, dont la plupart ont vieilli. ◆  Passe d'armes, récent (1838), se dit au figuré pour « discussion vive et rapide » (1874). Combattre à armes égales (1690) vaut pour « avoir des chances équivalentes ». ◆  Passer l'arme à gauche, familier pour « mourir » (1832), est expliqué par une image de l'escrime où passer l'arme à gauche correspond à « se faire désarmer par l'adversaire ».
■  Au-delà des emplois figés, où arme correspond à l'idée générale de « moyen pour combattre », le mot s'est lexicalisé dans ce sens au XVIe s. (depuis 1553) pour « moyen d'attaque, moyen de pression ».
❏  ARMOIRIES n. f. pl. est dérivé du verbe ancien français armoier, armoyer « combattre » (v. 1180) qui avait pris au XIVe s. (1381) le sens de « garnir (un écu) des figures du blason », d'après une des valeurs figurées de arme (voir ci-dessus). Le dérivé armoierie, qui signifiait « ensemble des armes » (v. 1350-fin XVIe s.) et « salle d'armes » (1420), avait lui aussi reçu cette valeur symbolique : « ensemble des bannières des chevaliers » (1373, Froissart), « signes héraldiques » (armories, 1334 ; aussi armoisies au XVIe s.). ◆  Ce dernier sens a seul survécu en français moderne, avec le dérivé armoirié (1596), devenu ARMORIÉ, ÉE adj. (1718), ARMORIER v. tr. « orner d'armoiries » (XVIIe s. ; mais les héraldistes disaient, selon Furetière, armoyer) et ARMORIAL, ALE, AUX adj. (1606), « qui décrit les armoiries », surtout diffusé comme nom (1690), pour « livre contenant les armoiries ».
ALARME n. f. vient (v. 1470) de l'appel (cri, sonnerie, etc.) à l'arme (crier à l'arme, v. 1310), c'est-à-dire au combat. C'est un emprunt à l'italien all' arma, la forme française ancienne était aus armes, as armes. Du domaine de la guerre, avec sonner l'alarme (XVIe s., sonner a l'arme), le mot est passé (1560) à la psychologie, pour désigner une inquiétude et (déb. XVIIe s.) une frayeur vive ; dans la langue classique, les alarmes de la pudeur sont encore senties comme appartenant à la grande métaphore guerrière appliquée aux relations érotiques. ◆  Signal d'alarme a servi à désigner un cri (fin XVIIIe s.) puis (XXe s.) le dispositif permettant d'arrêter un train en cas de danger (in Larousse 1928). Tirer le signal, la sonnette d'alarme, s'emploie aussi au figuré. ◆  Dispositif d'alarme, alarme, dans le contexte « sécuritaire », concernent (v. 1970) un dispositif électronique d'alarme contre le vol.
Le mot a plusieurs dérivés.
■  ALARMER v. tr., rare au sens d'« appeler aux armes » (v. 1620, d'Aubigné), est très employé au figuré dans la langue classique (depuis 1611) comme alarme, pour « troubler, inquiéter », « apeurer », « effaroucher (la pudeur) », mais aussi « éveiller le désir » (1665, Molière). Vieillies, ces acceptions résistent mieux au pronominal, et s'alarmer (1642) « s'inquiéter » est toujours usuel.
■  De ce verbe alarmer, la partie la plus vivante est probablement les participes adjectivés, ALARMÉ, ÉE adj. (1664) et surtout ALARMANT, ANTE adj. (attesté 1766) « qui cause de l'inquiétude, quant à l'avenir ».
■  ALARMISTE n., tiré de alarme (1775, d'après Boiste), semble contemporain de alarmant ; Mercier, en 1801, le croyait créé par les révolutionnaires pour dénoncer les critiques contre des mesures en effet inquiétantes.
■  Cependant, ALARMISME n. m. n'est attesté que depuis 1956 (Mémoires de De Gaulle). ◆  TÉLÉALARME n. f. (1982) désigne un dispositif d'alarme, de demande de secours à distance.
De arme au sens militaire vient encore le préfixé INTERARMES adj. inv. « commun à plusieurs armes, infanterie, cavalerie, etc. » (1948, dans les dictionnaires).
ARMER v. tr. est emprunté très anciennement (980) au latin armare, dérivé de arma (→ arme) qui a plusieurs significations : « équiper d'armes », « équiper (un vaisseau) », « fortifier (une place) » et plus généralement « garnir, pourvoir ».
■  En français, le verbe, plus ancien encore que arme, signifie d'abord « pourvoir (qqn) d'armes défensives, d'une armure » (1170) et, très tôt comme en latin, « équiper (un navire) pour la navigation » (1118) : le dérivé armement et l'emprunt armateur sont liés à ce sens (voir ci-dessous). ◆  Les sens figurés, « prémunir », « exciter à la guerre, à la lutte », semblent appartenir à la langue classique, mais apparaissent sporadiquement plus tôt : armer qqn de vertus, de pouvoirs, etc. (1495). L'ancien français a connu d'autres métaphores, « flatter » ; armer de coups « battre », etc. ◆  Armer une ville, un fort, sens pourtant attesté en latin, n'apparaît qu'en 1669 et armer un canon au XVIIe s. (1691). Le sens technique « rendre (une arme à feu) capable de tirer (en tendant le ressort de percussion) » n'est attesté qu'au XVIIIe s. (1752). ◆  D'autres valeurs techniques ou spéciales existent dont, en musique, « indiquer la tonalité au moyen des altérations convenables » (1768). De armer un arbre, « le protéger en garnissant sa tige » (1505), vient un sens spécial de armure. ◆  D'une manière générale, le verbe s'emploie, peut-être d'après le sens ancien en marine, pour « garnir ou fortifier » (1532), notamment en technique, par exemple dans armer un aimant (1668), un fourneau de mine (1776) et, au XXe s., armer un puits de mine.
■  De « donner des armes à, militariser » vient au XVIIe s. le sens extensif de armer (un peuple, une nation, un groupe) « pousser au combat, à la guerre » (1667, Racine) et, abstraitement, armer le courage, l'esprit à qqch. (1650, Corneille) ; avec une valeur analogue, étaient déjà en usage armer de (vertu, courage...) [1495] et armer (qqn, un sentiment...) contre qqch. (XVIe s., Montaigne).
■  Le pronominal S'ARMER (d'abord soi armer) est courant au propre (1170) en ancien français pour « revêtir l'armure » comme, par extension, pour « se préparer à une lutte » (soi armer encountre qqn, XIIIe s.). En moyen français, s'armer se dit aussi pour « devenir chevalier » (XIVe-XVe s.). ◆  Les valeurs figurées sont nombreuses, de soi armer (sous-entendu des signes chrétiens, pour se protéger du démon) « se signer », en ancien français (XIIe s.), d'où s'armer du signe de la croix (1690), explicite, aux valeurs abstraites de s'armer des armes de la raison (Montaigne), s'armer contre qqn (XVIIe s.), en faveur de qqn (id.).
■  Le participe passé ARMÉ, ÉE, adjectivé depuis le XIIe s., possède la plupart des valeurs du verbe, avec des locutions, par exemple armé de toutes armes (XIIe s.), disparue ; de pied en cap (fin XIIe-déb. XIIIe s., Gace Brûlé) ; armé jusqu'aux dents (fin XVe s.) « jusqu'au visage » est encore en usage. À main armée apparaît au sens analogique de « par la force des armées » (Froissart) et est repris (XXe s.) pour « en se servant d'armes », au cours d'un délit (cambriolage à main armée). ◆  Force armée (1811) désigne en droit public la troupe requise pour faire exécuter la loi puis, au pluriel, les armées d'un pays. ◆  Le mot s'emploie aussi en blason, dans lion, aigle armé « dont les griffes ou serres sont d'un autre émail que le corps » (1456). Au figuré poisson armé s'est dit (1611-fin XIXe s.) d'un poisson à écailles pointues. ◆  Un sens technique, lié à armature, est « muni d'une armature métallique », dans béton, ciment armé (1898), d'où (mil. XXe s.) un nouvel emploi du verbe.
■  ARMÉ n. m. se dit de la position du mécanisme d'une arme à feu prête à partir (1890) ; de là, le cran de l'armé.
■  De armé adj. vient le préfixé SURARMÉ, ÉE adj. (1955), « dont l'armement est excessif ».
Plusieurs dérivés du verbe, courants et polysémiques, s'en sont relativement détachés, par le sens (armée, armure), ou se sont spécialisés : armement.
ARMÉE n. f. est le participe passé substantivé au féminin : « troupe armée ». Le mot désigne d'abord (1305) une expédition militaire, mais aussi une flotte de guerre (v. 1350) comme l'ancien provençal et l'espagnol armada, qui sera emprunté en français. Le sens moderne est assuré au XIVe s. (1365) ; il se substitue à l'ancien français ost (du latin hostis « l'ennemi » puis « l'armée ennemie ») qui devient archaïque aux XVe-XVIe siècles. Armée coexiste avec troupe. ◆  Un sens figuré (1690) est d'ailleurs quasi synonyme de celui de troupe, « grande quantité », dans une armée de...
■  La locution Armée du Salut est un calque (attesté en 1885, chez Daudet) de l'anglais Salvation Army, métaphore religieuse.
■  Le mot entre dans des syntagmes qui correspondent à l'extension de la notion, qui requiert de plus en plus de précision : armée de mer (fin XVe s.), armée navale (1599), disparu, armée de terre (1680) ; à armée active (1789) s'opposera armée de réserve (1811). Ces syntagmes, à partir du début du XVIIe s., correspondent à la valeur spéciale « ensemble des troupes levées par un pays » (1636), comme dans armée de terre (1845), de mer (1890), puis de l'air (1934). Plusieurs armées célèbres sont dénommées : la Grande Armée « celle de Napoléon », ainsi appelée depuis 1814 ; l'armée Rouge « soviétique », l'armée des ombres « la Résistance armée ». Armée de libération nationale (A. L. N.) est le nom de l'organisation militaire algérienne créée en 1954 qui combattit les forces françaises jusqu'en 1962, date à laquelle l'indépendance fut obtenue. ◆  Un emploi technique, dans l'organisation militaire française, distingue l'armée (d'où général d'armée) du corps d'armée.
■  De là le préfixé INTERARMÉES adj. inv. (mil. XXe s.), distinct de interarmes (ci-dessus).
ARMEMENT n. m. (1310, en marine) a sélectionné parmi les sens du verbe armer, dont il dérive, deux valeurs principales : « ensemble des armes et des moyens de guerre d'un navire » (1525) et (1630), au singulier, « préparatif de guerre », correspondant au sens le plus usuel de désarmement, d'où « ensemble des armes » (1636), déjà armement de teste « casque » (1483). Dès 1310, apparaît la seconde valeur du verbe, la plus ancienne pour ce nom : « action d'armer un navire » et « profession d'armateur ».
■  Plusieurs sens techniques extensifs, pour « action d'armer » : l'armement d'un pistolet (1879), d'une fusée (1930), ou figurés, en musique (1829), mines (1928), électricité, pêche, où le mot a la valeur générale d'« équipement », apparaissent aux XIXe et XXe siècles.
■  D'autres dérivés, comme armacion (1279) puis armoison (1607), armaison (1611), ont disparu.
■  ARMABLE adj. « qu'on peut armer » s'est employé au XVe s. et au début du XVIe siècle.
■  ARMEUSE n. f., du sens technique du verbe, désigne une machine disposant l'« armure » de protection des câbles électriques (1948, dans les dictionnaires généraux).
Le verbe a produit plusieurs verbes préfixés.
■  DÉSARMER v. tr. apparaît (1080) pour « enlever l'armure de », puis (XIIe s.) « dépouiller de ses armes », le pronominal possédant les mêmes valeurs. Un sens spécial est, en escrime, « enlever l'épée des mains de (l'adversaire) » (1718). ◆  Le verbe assume aussi la valeur contraire à armer un navire depuis 1466, avec un emploi intransitif (1701), aussi appliqué aux marins : « être congédié » (1773). ◆  Aux sens analogiques et figurés du verbe simple correspondent désarmer la colère, etc. de qqn (XVIe s., Montaigne) puis désarmer qqn au XVIIe s. (1640, chez Corneille). Se désarmer « se laisser fléchir » (fin XVIIe s.) a disparu, mais désarmer v. intr. (mil. XIXe s.) « abandonner » s'emploie, surtout au négatif (sans désarmer « sans désemparer »). ◆  Le verbe a pris, au sens propre, des valeurs différentes : « obliger (une troupe) à rendre les armes, à se rendre » (1669), désarmer v. intr. signifiant « cesser de se battre » (1636) puis, en politique, « réduire ou supprimer son armement (d'une armée, d'un pays) » (1890), sens où désarmement semble antérieur. De là, l'idée de « réduire ou supprimer le potentiel militaire d'un pays, généralement un vaincu », que le verbe assume à partir du traité de Versailles, en 1918. Ce sens, comme pour désarmement et pour réarmer, est devenu très usuel.
■  Les dérivés de désarmer suivent la même évolution. DÉSARMÉ, ÉE adj. s'emploie au propre (XIIe s.) et au figuré pour « sans force » (XVIIe s., Retz), puis « apaisé, sans ressentiment » (1667), sens auquel correspond plus récemment DÉSARMANT, ANTE adj. (1910), lequel se dit pour « qui désarme l'hostilité, rend indulgent ».
■  DÉSARMEMENT n. m. (1594), spécialement « licenciement des soldats » (1636), vieux, signifie surtout « diminution ou suppression des armées d'un pays » (1864), avec la même valeur que le verbe à partir de 1918. Le mot s'emploie aussi en marine (1689) et en technique.
RÉARMER v. tr. (v. 1495), d'abord rarmer (1165-1170), aussi en marine (1771), puis à propos d'un fusil (1872), s'emploie également comme intransitif pour « reconstituer ses armées et son armement » (1831), sens où le transitif « redonner une armée, un armement à (un pays) » semble récent.
■  RÉARMEMENT n. m. s'est d'abord employé en marine (1771) et tardivement pour « action de redonner une armée, des armements » (1875). ◆  D'un sens figuré et rare de réarmer, « renforcer (une chose abstraite) » (1869), procède réarmement moral, nom d'un mouvement chrétien fondé en 1921, préconisant, contre les idéologies matérialistes, une réforme par les valeurs chrétiennes dans la vie personnelle.
ARMADA n. f. est emprunté (v. 1550, armade) à l'espagnol armada (XVe s.), qui correspond au provençal armada, au français armée (ci-dessus), et désigne une flotte militaire. ◆  Le mot armade est appliqué (déb. XVIIe s., d'Aubigné) à la grande flotte envoyée par Philippe II d'Espagne contre l'Angleterre en 1588, puis repris par les historiens sous la forme espagnole Armada, et parfois appliquée à toute grande flotte (1828 chez Hugo). Au figuré, une armada se dit familièrement comme armée, troupe, pour « très grande quantité » (v. 1980).
■  ARMADILLE n. f. est un autre emprunt (1615) à l'espagnol, au mot armadillo, de armado qui correspond au français armé. ◆  Le mot désigne un tatou, animal à carapace articulée en plaques, évoquant une armure. Il s'est appliqué aussi à un cloporte (1804, Latreille ; après cloporte armadille, 1762).
Deux mots usuels, armure et armature (voir plus loin), viennent de dérivés latins de armare.
■  Ce n'est probablement pas le cas de ARMATEUR n. m. « celui qui équipe les navires » (1543, armateur de(s) navires), qui serait emprunté, selon le F. e. w., au vénitien armatore, armadore (XVe s.) ou serait un dérivé français du latin armare, source du verbe armer dans ce sens, le latin médiéval armator étant très tardif (v. 1360, en Dalmatie) et signifiant normalement « armurier » (XIIIe s.). ◆  Le mot s'est employé seul, malgré les ambiguïtés possibles, à partir du XVIIe s. (1671) et s'est étendu de la marine de guerre, désignant aussi le capitaine d'un navire armé pour la course (1671) [Cf. corsaire], puis à la marine de commerce (1723).
Le latin armatura, dérivé de armare, a produit par voie orale le mot armeure et par emprunt armature.
■  ARMURE n. f., d'abord armeure, apparaît tôt (1130) et désigne l'ensemble des armes défensives, poussant le mot arme, plus général, à ne plus désigner ces armes. ◆  Un autre sens, « armes offensives » (v. 1200), a disparu au XVIe siècle. ◆  L'ancien français connaît d'autres valeurs de armeure, comme « homme en armes » (v. 1280), « bataille » (XIIIe-XIVe s.), « exercice militaire » (1271), « escrime » et « armoiries » (v. 1286). Certains de ces emplois, où armeure était encore senti comme une sorte de dérivé collectif de arme, étaient en concurrence avec armes (ci-dessus). Armeure (1226), puis armure, s'est aussi employé pour « moyen de protection morale », aujourd'hui par métaphore littéraire du sens concret. C'est aussi cette image qui persiste dans les sens figurés, à propos d'animaux (XIIIe s., puis 1611 ; Cf. ci-dessus armadille), de plantes (1501) et d'équipements humains lourds. ◆  Cependant, en relation avec les valeurs figurées de armer et avec armature, les emplois techniques de armure échappent au sens dominant. Le mot s'emploie pour désigner un aimant renforcé (1668), les pièces de renfort d'une machine (1751), en marine (armure de baux, de mât, 1783) et pour désigner la protection des câbles électriques armés (mil. XXe s.). Dans ces emplois, armure est en concurrence avec armature. ◆  Une valeur technique autonome est, d'après l'armure de la navette et celle des lisses du métier à tisser (où armure équivaut à « structure des pièces de renfort »), le sens de « contexture (d'un tissu) » (1751), d'où « mode d'entrelacement des fils de trame et de chaîne, caractéristique des types de tissus » (armure toile, etc.).
■  De armeure, armure est dérivé armeurier (1268), puis ARMURIER n. m. (fin XIIIe s.) « fabricant ou vendeur d'armes ou d'armures », sens sorti d'usage comme celui de « fabricant d'armoiries » (1338). ◆  Armurier a été repris pour « fabricant et vendeur d'armes, spécialement d'armes à feu » (déjà au XVIIe s., Furetière). Des emplois spéciaux ont eu cours en marine et dans l'armée pour « matelot (1736), soldat (1825) chargé de l'entretien des armes ».
■  ARMURERIE n. f. (1364), d'abord armeurerie (1352-1356), désigne la boutique de l'armurier, puis la fabrication et le commerce des armes. Comme armurier, le mot s'est détaché de armure et concerne les armes, aujourd'hui les armes à feu.
■  ARMURÉ, ÉE adj., mot didactique ou technique, dérivé de armure, semble récent pour « vêtu d'une armure » et au figuré « recouvert, protégé comme par une armure » (1947, in T. L. F.). Il s'emploie surtout en parlant de tissus ayant telle ou telle armure (1953).
ARMATURE n. f. est emprunté (1282, in Arveiller ; puis XVIe s.) au dérivé latin armatura « troupes », qui est passé dans la plupart des langues romanes. C'est un emprunt savant, d'abord en latin médiéval, armatura désignant en architecture au XIIIe s. la charpente, le cintre sur lequel on construit une voûte, sens réattesté au XVIIIe s. (1755). ◆  La reprise du mot au début du XVIe s., au sens d'« armure », « arme », au figuré « ce qui protège », a été sans lendemain, et armature reprend vers la fin du XVIIe s. des valeurs techniques, correspondant aux emplois du verbe armer et parfois de armure : « structure maintenant les parties d'un objet technique complexe » (1694), « plaques métalliques d'un condensateur » (1836) et « d'un aimant » (1845), « protection d'un câble sous-marin » (1898), « monture d'un parapluie » (in Larousse 1982). ◆  Le mot s'est aussi appliqué à des objets naturels, en géologie et paléontologie (1752). ◆  Des emplois techniques vient un nouveau sens figuré (1895), « ce qui soutient un organisant ».
■  Le dérivé ARMATURER v. tr., doublet plus explicite de armer (1907), est rare ; un figuré littéraire du participe passé armaturé, « qui a une armature rigide », est attesté avant le verbe (1886).
❏ voir ARMILLE, ARMISTICE, ARMOIRE.
ARMILLE n. f. est un emprunt ancien (fin XIIe s.) au latin armillae (pluriel) puis armilla, passé dans plusieurs langues romanes et dans tout le domaine occitan (armelo, armel). Le mot latin est dérivé de arma au sens de « bras » (→ arme) ; il est employé au pluriel armillae pour désigner un bracelet à plusieurs tours (notamment signe d'une récompense militaire), puis des anneaux, des colliers de parure et, en technique, des anneaux métalliques.
❏  Le mot, en ancien français, a été éliminé par bracelet et repris comme terme d'histoire (1610, puis 1836). Au pluriel, d'après le latin médiéval armillae (XIIIe s.), armilles désigne les anneaux d'un astrolabe, sens attesté au XIXe siècle. ◆  Le mot a aussi désigné une moulure en anneau (1611).
❏  ARMILLAIRE adj., dans sphère armillaire (1557), est emprunté au dérivé latin armillarius, pour désigner l'appareil formé de cercles matérialisant la sphère céleste locale. D'autres emplois didactiques ont disparu.
ARMISTICE n. m. est un emprunt de la langue classique (attesté 1680) au latin médiéval armistitium (1335), composé de arma (→ arme) et d'un élément tiré de statum, statio (→ station), du verbe stare, d'après d'autres mots (solstitium, etc.).
❏  Le mot s'applique à un « arrêt des armes », proposé pour remplacer suspension d'armes ou trêve ; il est d'abord critiqué. ◆  Assez rare dans la langue classique, où il passe au féminin (XVIIIe s.), armistice se répand au XIXe s., reprenant son genre masculin, et surtout à la fin de la guerre de 1914-1918, avec l'armistice du 11 novembre 1918. La distinction de droit international entre armistice et paix en a fait un mot institutionnel. ◆  Littré signale la confusion possible avec amnistie, qui a pu entraîner et maintenir populairement le féminin. ◆  Depuis 1918, en français de France, le mot évoque en premier lieu la fin des hostilités de la Première Guerre mondiale (pour la Seconde, on parle de la « victoire »).
L ARMOIRE n. f. Dans ce mot pacifique, on ne reconnaît plus l'origine de arme*, le latin arma. Celui-ci signifiait aussi « ustensile », comme armare signifiait « équiper », et le dérivé armarium, d'où vient armoire, s'il a pu signifier « dépôt d'armes, arsenal », est surtout attesté pour désigner un placard, puis un espace pour ranger des livres (chez Vitruve).
❏  Le latin armarium a d'abord donné en ancien français armaire (XIIe s.), armarie, parfois dissimilé en almaire (mil. XIIe s.), aumaire ou aulmaire, et almarie. Le type plus tardif armoire (XVe s.) l'emporte au XVIe siècle. ◆  Quant aux sens, l'ancien français privilégie celui de « niche dans le mur, servant à ranger », soit des livres (« bibliothèque », XIIe-XIVe s.), soit les objets du culte (XIIe-XVIe s.), parfois avec la valeur de « tabernacle » (XVe-déb. XVIIe s.). ◆  Par extension, le mot s'applique (entre 1360 et 1460) à un espace de rangement en général, muni d'une porte (un placard) ; dans ce sens la forme armoire apparaît au XVe s. (1461). Une spécialisation importante (XIIIe-XVe s., plus longtemps dans les dialectes) est « garde-manger ». Cette idée de meuble fixe, concurrencée par le sens dominant (ci-dessous) et attestée du XVIe au XIXe s., ne survit que dans des emplois spéciaux et par des syntagmes qualifiés : armoire arasée (1835), emmurée, armoire de cheminée. Le cas des meubles fixés au mur (voir ci-dessous) est différent.
■  Depuis le début du XIIIe s., le mot désigne aussi un meuble de rangement qu'on peut déplacer, un coffre à bagages (1210) et même un coffret, un écrin (aumoire, XIIIe-XIVe s.). Techniquement, c'est du coffre que vient le meuble de rangement en bois, sur pieds, fermé par une ou deux portes, mobile mais moins que le coffre ; ce meuble est nommé armaire (déb. XIIIe s.), armoire (déb. XVe s., dans fenestre [vitre] a armoire) ; ce meuble qui se répand aux dépens des coffres est parfois affecté au rangement de la vaisselle (armeres, 1402 ; armoire à vaisselle, 1680), concurrencé par vaisselier, mais surtout aux vêtements, au linge (aumaire, 1285, pour les draps ; 1404 pour les vêtements). Dans cette acception, une paire d'armoires s'est dit pour « armoire à double battant » (1599) ; cependant, le syntagme armoire à linge semble récent (1887). Parmi les armoires, certaines étaient vitrées, au moins depuis le début du XVe s., mais le mot implique le plus souvent des portes pleines. Le mot est parfois mal distingué de bahut et de buffet et l'on a dit bas d'armoire (1708) et armoire basse pour « buffet bas ». Au début du XIXe s. les portes, lorsqu'il s'agit du meuble servant à ranger les vêtements, sont parfois munies d'un miroir ; d'où armoire de glace (1830 chez Stendhal), devenu armoire à glace (attesté en 1830 au Canada). Armoire normande, désignant une grande armoire rustique ancienne, n'est pas attesté avant le dictionnaire de Havard (1887). Quant aux utilisations, armoire à livres (1636), à papiers, « archives » (1636), témoignent du recul du sens ancien de armoire pour « bibliothèque ».
■  Au XXe s., le mot, sauf dans des emplois particuliers, semble reculer avec la vogue d'autres types de rangements (placards, rayonnages). ◆  Cependant, sans rapport direct avec les valeurs médiévales, le mot s'emploie, concurremment à placard, pour un meuble de rangement fixé au mur, par exemple dans armoire à pharmacie (1929 ; d'abord armoire-pharmacie, 1914) et armoire de toilette (1929). ◆  D'autres emplois extensifs sont techniques, en électronique et en électricité, dans armoire frigorifique (1929), armoire chauffante (1974). ◆  Le mot s'emploie encore en français du Canada pour « placard » (1725), emploi normal en français d'Europe du XIVe au XVIIIe s., le mot placard n'apparaissant qu'à la fin du XVIIIe. D'autres emplois vieillis, pour « buffet, vaisselier », ou l'expression armoire de coin, correspondent à des emplois archaïques du français de France.
Les sens figurés relèvent surtout, au XXe s., de l'argot militaire : « sac », « cartouchière » (1879). De l'idée de contenant vient aussi l'emploi pour « tête » (1896), longtemps après un emploi rare en ancien français de aumaire « ventre » (fin XIIe s.), repris indépendamment dans l'argot vieilli armoire à linge (1916) « ventre » ou « poitrine ». ◆  Les seuls figurés vivants sont armoire à glace (mil. XXe s.), armoire normande (1928) et armoire (1945, chez Sartre), « homme à forte carrure ».
ARMOIRIES → ARME
ARMOISE n. f. est issu (XIIIe s.), d'abord sous la forme hermoiz (XIIe s., selon T. L. F), du latin populaire °artemesia, du latin classique artemisia qui a donné le moyen français armise (XVe s., isolément), d'où les formes populaires larmise ou herbe de la remise. Artemisia est emprunté au grec artemisia, nom de diverses plantes utilisées en gynécologie (essentiellement l'armoise), dérivé de Artemis, nom de la déesse. L'origine de ce nom est très controversée, l'explication par l'Asie Mineure semblant la plus probable.
❏  Le mot, avec diverses variantes jusqu'au XVIe s., désigne une plante aromatique servant de remède. Il entre dans plusieurs désignations, armoise âcre, amère, maritime (1791), vulgaire (1803), commune (1816), des champs (1836), de Judée (1816), etc., qui correspondent à des variétés d'artemisia. ◆  Armoise absinthe (1866), armoise estragon (id.) désignent d'autres plantes, appelées plus couramment absinthe, estragon, et qui appartiennent à la même famille botanique.
ARMORIAL, ARMORIER → ARME
? ARNAQUER v. tr. est l'altération de arnacher (1837, Vidocq), harnacher (1835) « tromper pour voler » ; les formes en qu- ne sont attestées qu'en 1903 pour le verbe et le nom ; elles semblent picardes. Harnacher*, pris au figuré, ayant signifié « accoutrer », c'est-à-dire « tromper ».
❏  Le verbe et le nom, ARNAQUE n. f., apparaissent à peu près simultanément, et l'on ne peut dire lequel vient de l'autre. La première attestation de la série, arnache (1833, in Esnault), apparaît dans l'expression rousse à l'arnache « policier en civil », c'est-à-dire « harnaché, habillé de manière à tromper » et l'arnache semble bien être un « travestissement ». Cette valeur se maintient avec une arnaque (1849) « un policier » (en civil ?), encore attesté en 1891. À l'expression à l'arnache, succèdent (1903) d'arnaque « capable de tromper, malin » et enfin une arnaque « tromperie ». On a prétendu que le mot s'était croisé avec renacle (1883), « police secrète », de renâcler (Cf. moyen français renaquer « manifester sa colère », XIVe s. ; de naquer « renifler », lui-même d'un dérivé latin populaire de nasus « nez »), mais on ne voit pas comment renaquer, qui était archaïque au début du XIXe s., aurait pu donner arnaquer, par ailleurs très homogène avec la forme harnacher, l'une des plus anciennes. ◆  Arnaque désigne une escroquerie habile.
❏  Le verbe arnaquer, de sens analogue, a pour dérivé ARNAQUEUR, EUSE n. (1895) « escroc qui commet des arnaques ».
ARNICA n. m. ou f. est un mot du latin des botanistes, passé en français à la fin du XVIIe s. (1697). On considère en général arnica comme une altération de ptarmica, du grec ptarmikê, de ptarmos, nom d'action de ptarnunai « éternuer », mais ce dernier désigne une autre plante, à propriétés sternutatoires, la ptarmique. La forme ptarnunai (mot appartenant à une famille indoeuropéenne expressive) expliquerait le n, et le latin n'ayant jamais le groupe pt- à l'initiale, on aurait ainsi arnica.
❏  Le mot désigne une plante des montagnes dont les fleurs ont des propriétés stimulantes et toniques. ◆  On extrait de l'arnica une teinture utilisée pour soigner les contusions, les entorses, et le mot sert surtout à désigner cette teinture.
AROBAS ou ARROBAS(E) n. m. d'origine douteuse, pourrait être une « déformation de a rond bas [de casse] » (Vocabulaire d'Internet ; Office de la langue française du Québec).
❏  Le mot désigne un symbole formé d'un a minuscule aux trois quarts entouré d'un cercle, utilisé sur les claviers d'ordinateur, et servant de séparateur dans les adresses d'Internet. L'équivalent anglais est at sign.
AROLLE ou AROLE n. m. (parfois fém.) est un emprunt aux dialectes francoprovençaux attesté en 1760 (arole). Le mot s'emploie en français de Suisse, de Savoie, pour désigner une espèce de pin, le Pinus Cembra qui croît entre 1 200 et 2 500 mètres, dans les Alpes, ainsi que son bois aromatique employé en chauffage et en menuiserie.
AROME ou ARÔME n. m. est emprunté (v. 1130) au latin aroma, hellénisme. Le grec arôma désigne d'abord une plante aromatique.
❏  Ce mot, très rare en ancien et moyen français, semble repris dans le contexte de la nouvelle chimie (1787, Guyton de Morveau) ; remplaçant esprit recteur, il désigne alors le principe qui s'exhale des essences de végétaux et s'impose rapidement dans la langue gastronomique (Brillat-Savarin) et courante, où il désigne une odeur agréable associée à un végétal, souvent comestible, puis à un vin, à côté de bouquet ; arome concerne alors non seulement l'olfaction, mais le goût. On parle aussi de l'arôme du café, des cigares. ◆  Écrit arôme depuis 1803, le mot a pris, sous l'influence de aromatique en chimie, une valeur précise en industrie alimentaire (arômes alimentaires, arômes artificiels). ◆  Pour Fourier, dans son système, l'arôme est un principe subtil émanant des astres et qui induit la répartition des êtres en animaux, végétaux et minéraux.
❏  Le dérivé AROMAL, ALE, AUX adj. (av. 1837, Fourier, au sens spécial que l'utopiste donne à arôme) est poétique ou didactique.
■  Quelques composés en aroma-, tel AROMATHÉRAPIE n. f. (1965), sont en usage dans l'industrie des parfums.
AROMATE n. m. est emprunté (déb. XIIIe s.) au latin populaire aromatum « parfum », dérivé du latin classique aroma, et aussi emprunté sous la forme aromat (XIIIe s.).
■  Surtout employé au pluriel, le singulier n'étant attesté qu'au XVIIe s. (1693), il se dit de végétaux à odeur agréable et caractéristique, servant de parfums, puis de condiments.
D'autres dérivés latins de aroma ont produit un verbe et un adjectif.
■  AROMATISER v. tr. (mil. Xe s.), au sens disparu d'« embaumer (un cadavre) », est emprunté au bas latin aromatizare, d'après le verbe grec arômatizein dérivé de arôma. Son emploi moderne correspond à un réemprunt du XVIe s. (1562) au sens de « parfumer avec une substance aromatique ».
■  Le participe passé AROMATISÉ, ÉE adj. est plus courant que le verbe en français moderne ; il est usuel dans le contexte des industries alimentaires.
■  Le verbe a pour dérivé AROMATISATION n. f. (1581).
AROMATIQUE adj. est emprunté (v. 1220-1230) au latin aromaticus. Son sens premier est lié à celui de aromate, par exemple dans arbre (1330), herbe, plante aromatique. ◆  En chimie, l'adjectif s'applique d'abord (1878, Berthollet) à certains composés odorants refermant un cycle benzénique, puis à tout composé, odorant ou non, présentant une structure cyclique similaire.
■  Ce sens chimique a suscité des dérivés récents. AROMATISATION n. f. (1962) est dérivé de aromatiser.
■  Aromatique a pour dérivés AROMATICITÉ n. f. (1982) et AROMATICIEN, IENNE n. (1971) « spécialiste des arômes », en industrie alimentaire.
ARYLE n. m. est une formation des chimistes à partir de la syllabe initiale de aromatique, avec l'élément -yle (1928, dans les dictionnaires). Le mot désigne un radical carboné dérivé des composés aromatiques.
■  De là ARYLÉ, ÉE adj. (1959), ARYLISATION n. f., termes techniques de chimie.
ARONDE, ARONDELLE → HIRONDELLE
ARPÈGE n. m. est un emprunt musical du XVIIIe s. à l'italien arpeggio, déverbal de arpeggiare « jouer de la harpe » (→ harpe). La forme harpègement est dans Furetière (1690).
❏  Démotivé en français par rapport au nom de l'instrument, arpège (1751) désigne un accord dont les notes sont émises successivement et rapidement.
❏  Le dérivé ARPÉGER v. tr. (1751) correspond à « exécuter (un accord, une suite d'accords) en arpège ».
■  ARPÈGEMENT n. m. semble emprunté au dérivé italien arpeggiamento. Les trois mots se trouvent dans le Dictionnaire de musique de J.-J. Rousseau.
L ARPENT n. m. est issu (1086) du latin tardif arepennis, emprunt au gaulois, la forme irlandaise airchenn manifestant la parenté avec le mot cenn « tête », d'où « extrémité ». C'est probablement une forme dialectale modifiée °arependis (d'où arpendia, VIIIe s.) qui est à l'origine de la finale -ent.
❏  L'arpent est essentiellement une mesure agraire et par extension (1080) une mesure de longueur et de superficie (sens encore vivants au Canada). ◆  L'expression familière long d'un arpent (visage, nez) [1690] atteste la vitalité du mot avant le système métrique. ◆  C'est aujourd'hui un terme d'histoire.
❏  Le verbe ARPENTER v. tr. (1247) ainsi que ses dérivés, ARPENTAGE n. m. (1293) et ARPENTEUR n. m. (1247), sont d'abord étroitement liés au nom. Leur sens s'étend à « mesure d'une superficie terrestre » (d'abord en mesures agraires), puis à « technique géométrique de mesure des surfaces terrestres », sens usuel pour arpenteur. ◆  Par ailleurs, arpenter signifie figurément (XVIe s.) « parcourir à grands pas », sens courant dans la langue classique, d'où récemment arpenter le bitume, variante élégante de faire le trottoir. Le sens spécial de « filer, fuir » (v. 1500) a disparu.
■  ARPENTEUSE n. f. se dit figurément (1700) d'une chenille qui, par sa reptation, semble mesurer le sol ; on dit aussi chenille arpenteuse (1759).
ARPETTE n. f. est un mot suisse, probablement emprunté à l'allemand Arbeiter « travailleur », employé péjorativement (1858, arpets, à Genève), sans doute dans un contexte de concurrence d'emploi entre les horlogers genevois et ceux de Suisse alémanique. Arbeiter, du groupe Arbeit « travail », repose sur une racine indoeuropéenne que l'on repère également dans le vieux slave rabota (→ robot).
❏  Repris (v. 1875, arpète) en français de France pour « apprenti », sens disparu au XXe s., le mot, probablement à cause de la finale, confondue avec le suffixe diminutif -ette, s'applique (1901) aux jeunes apprenties modistes ou couturières. On le rencontre aussi au masculin pour « jeune garçon de course » (1936, Céline). Le mot a vieilli, sauf par évocation de la période 1900-1940, ou encore régionalement (Touraine) et il est alors assez péjoratif.