AUSSI adv. et conj. est soit issu (déb. XIIe s., aisi) du latin populaire °alid sic ou °alesic, composé de aliud « autre » (dont le résultat en latin populaire °ale a donné en ancien français le pronom al ou el ; → alias, alibi) et de sic « ainsi » (→ 2 si) ; soit formé en français de °ale et de si (latin sic). Il a éliminé le composé français correspondant, altresi ou autresi.
❏
Les premiers emplois de aussi diffèrent des usages actuels : alsi... cum (aussi... comme), locution adverbiale (1re moitié XIIe s.), correspond à « de la même manière que... » ; il sera remplacé (XVIIe s.) par aussi bien que.
◆
En tête de phrase, l'adverbe, sous la forme ausins (v. 1160), correspond à ainsi. En phrase négative, ausi (v. 1170, Chrétien de Troyes) équivaut à non plus, mais l'emploi en phrase affirmative, attesté à la même époque, est toujours vivant.
◆
Aussi (adj.) que (osi que, v. 1270) a été remplacé par autant que.
◆
Les emplois du moyen français, « de plus, pareillement » (mil. XVe s.) et aussi bien « d'ailleurs », ont mieux résisté et aussi reste très usuel dans ses emplois classiques, comme aussi bien que..., ou en conjonction pour « en conséquence » (attesté dès v. 1180) et comme adverbe de phrase, souvent au début de la phrase : aussi bien, mais aussi... En Afrique, aux Antilles, aussi, placé après un pronom personnel, peut exprimer la surprise, la désapprobation (lui aussi, il aurait pas dû...).
❏
Le composé AUSSITÔT adv. et prép. (XIIIe s.), de tôt*, a vieilli comme préposition, mais s'est perpétué comme adverbe et dans aussitôt que, loc. conj. (aussitos que, 2e moitié XIIIe s.). La locution aussitôt dit, aussitôt fait est attestée à la fin du XVIe s. (1594) et dès 1531 sous la variante aussi tost faict que dict.
❏ voir
AINSI.
AUSTÈRE adj. est emprunté (v. 1120) au latin austerus « âpre » et « sévère », lui-même emprunté au grec austêros « âpre, amer », d'abord « sec », apparenté à hauos, auos « sec », d'une forme °hauhos, variante d'une forme indoeuropéenne en s (sanskrit śoṣa) « action de sécher ».
❏
Le mot, mis à part un emploi étymologique (
XVe-
XVIe s.) au sens du grec, dans
un fruit austère « âpre » (encore au
XVIIIe s. ;
in Trévoux, 1771), ne s'est implanté en français qu'au sens moral, une
vie austère (v. 1120) étant une vie ascétique.
■
Appliqué aux personnes, l'adjectif a voulu dire en ancien français (v. 1300) « cruel, rigoureux » ou seulement « sévère pour les autres », mais c'est au sens quasi latin de « sévère envers soi-même » qu'il s'est imposé, avec l'idée de privations volontaires pour des raisons morales et surtout religieuses (XVIIe-XVIIIe s.).
◆
Il se dit ensuite pour « sévère, strict », aussi des apparences physiques, de l'habillement, du décor, etc.
❏
Le dérivé
AUSTÈREMENT adv. (1212) est demeuré rare.
◈
AUSTÉRITÉ n. f. est emprunté (
XIIIe s.) au dérivé latin
austeritas ; le sens concret, « âpreté », attesté chez Nicot (1606), semble très peu usité, alors même que
austère pour « âpre » était en usage.
◆
Le mot s'est spécialisé en religion, aussi en emploi concret
(une, des austérités) pour « mortification » (1671), puis pour désigner une attitude psychologique et morale et une apparence, suivant les emplois de l'adjectif.
AUSTRAL, ALE, AUX adj. est emprunté (1372) au latin australis « du Sud », adjectif dérivé de auster « vent du Sud » et « région méridionale ». À la différence d'autres termes désignant les vents, celui-ci n'est pas grec ; on l'a rapproché de l'ancien haut allemand ostar « de l'Est » (Ost) mais la confusion des points cardinaux est très improbable. Toutefois, les philologues anglo-saxons maintiennent cette hypothèse qui conduit à apparenter le nom de l'est (→ est), celui du vent et celui du lever du jour (→ aurore). Si cela était, il y aurait aussi parenté avec les noms propres Autriche et Ostrogoth, formés sur le nom de l'est. Auster avait donné en ancien français austre (v. 1120), repris (déb. XIVe s.) sous la forme latine, mot poétique et rare désignant le vent du Sud.
❏
En français, austral ne signifie plus « du Sud », mais « au sud du globe terrestre », d'où pôle austral (1680).
❏
L'élément
AUSTRAL(O)-, tiré du latin
austral, a servi à former plusieurs mots scientifiques, comme
AUSTRALOPITHÈQUE n. m., du latin moderne
Australopithecus africanus, terme créé par l'Anglais Dart en 1925, ou encore
AUSTRALANTHROPE n. m., terme forgé par Leroi-Gourhan pour remplacer le précédent, ces préhominiens possédant déjà des caractères anthropoïdes.
◈
Le latin
australis a aussi servi à former le nom
Australie, d'où
AUSTRALIEN, IENNE adj. et n. (attesté 1842 ;
Australian en anglais, 1812). On parlait depuis le
XVIe s. de
Terra Australis pour désigner les terres inconnues supposées exister dans l'océan Austral ; d'où l'emploi extensif de l'adjectif
australian (1693) en anglais.
Terra Australis, ainsi que
Australia, s'est appliqué au début du
XIXe s. à la Nouvelle-Hollande (Australie actuelle).
◆
AUSTRONÉSIEN, IENNE adj., dérivé du nom propre
Austronésie, n'est guère employé qu'en linguistique.
Austronesia est une création du linguiste allemand Wilhelm Schmidt, en 1899, comme synonyme d'
Oceania, qui s'est substitué à
Asianesia (J.-C. Logan), mais a été remplacé par
Oceania-Océanie. L'adjectif
austronésien s'applique aux langues d'une famille comprenant des idiomes d'Indonésie, des Philippines, de Polynésie.
AUSTRO-, premier élément de mots concernant l'Autriche, tiré du latin moderne Austria. AUSTRO-HONGROIS, OISE adj. concerne l'Empire des Habsbourg s'étendant sur l'Autriche et la Hongrie. AUSTRO-PRUSSIEN, IENNE adj. s'applique au conflit, à la guerre entre la Prusse et l'Autriche, en 1866.
AUTAN n. m. est emprunté (1545, aultan) à l'ancien provençal auta (provençal moderne autan), mot issu du latin altanus « vent de la haute mer », dérivé de altum « la haute mer », emploi spécialisé et substantivé de l'adjectif altus, à la fois « haut » (comme excelsus) et « profond » (→ haut).
❏
Le mot, régional du sud de la France, désigne un vent orageux soufflant du sud ou du sud-ouest (de la mer).
◆
Les autans, en langage poétique, désignent des vents impétueux.
AUTANT adv. est emprunté (XIe-XIIe s.) à une forme altérée du latin populaire °al (ou ali) tantu, d'un °aliud tantum issu du latin classique alterum tantum (→ autre, tant), qui signifie « une autre fois autant, encore une fois ».
❏
Autant remplace l'ancien français altretant (1080) sous les formes écrites altant (v. 1170) puis autant (v. 1180), d'abord comme adjectif (XIIe-XIVe s.), puis comme adverbe (v. 1180).
◆
De nombreux emplois apparaissent au XVIe siècle : autant... autant, d'autant et d'autant que, loc. conj. (1532), pour autant que (mil. XVIe s.), d'autant plus que (chez Montaigne), etc. Autant comme autant a signifié (1690) « en quantités égales » et s'est conservé jusqu'au XXe s. dans l'usage familier pour « selon le cas, la circonstance ». En français régional du Centre et de l'Ouest, l'expression veut dire « énormément » ; on dit aussi (Allier) autant qu'autant.
◆
Autant s'emploie en français de Belgique à propos d'une quantité, d'une somme non précisée. Aimer* autant exprime le consentement.
AUTARCIE n. f. est emprunté (1793) au grec autarkeia, composé de autos « soi-même » (→ auto-) et de -arkeia, de arkein « protéger, secourir » et « suffire », à rapprocher peut-être du latin arx « citadelle » et du verbe arcere « contenir, maintenir », « écarter » (→ exercer).
❏
Le mot, apparu sous la Révolution, a d'abord désigné didactiquement le bien-être résultant de la sobriété, par laquelle une personne se suffit à elle-même.
■
Repris en économie sous la forme autarchie (1896), puis autarcie (XXe s. ; 1931, dans les dictionnaires), le mot s'applique à l'état d'un pays, d'un groupe en économie fermée, qui n'a pas besoin d'importations pour subsister.
❏
Le dérivé AUTARCIQUE adj. (1938), d'abord autarchique (1928), correspond au substantif dans son emploi moderne.
AUTEL n. m. est une altération (1080) de l'ancien français alter (1050), emprunté au latin religieux altare, n. m., du pluriel classique altaria, désignant un support placé sur la table des sacrifices, sur l'autel au sens antique (ara), où l'on brûlait les entrailles de l'animal sacrifié. Dès le latin, altaria remplace ara, parfois avec un sens spécialisé (« partie supérieure de l'autel »). Le rapprochement avec altus « haut » est ancien et non étymologique ; altaria est en revanche apparenté à adolere « consumer, faire brûler », verbe archaïque qui semble être d'origine autochtone (italique). La forme latine se retrouve par exemple dans l'anglais altar.
❏
Autel a son sens chrétien dès 1080, d'où la valeur symbolique (mil. XVIIe s.) de « religion chrétienne » (le trône et l'autel).
◆
Cependant, la plupart des figurés (dresser, élever des autels, etc.) viennent du sens antique, attesté assez tard (1644 chez Corneille) et repris au latin.
◆
Dans ses emplois religieux, le mot donne lieu à plusieurs syntagmes, comme maître-autel « autel principal (d'une église) », table, pierre d'autel, et à des locutions, à l'autel s'étant employé dans le contexte du mariage (XVIIe-XVIIIe s.) et s'approcher de l'autel correspondant à « communier ».
AUTEUR n. m., apparu au XIIe s. sous diverses formes (auctur, chez Wace ; autor, en 1174), est un emprunt au latin auctor « instigateur », spécialement « conseiller », en droit « garant d'une vente ». Le mot est dérivé du verbe augere « faire croître » (→ augmenter) et a lui-même pour dérivé auctoritas (→ autorité). Le sens initial du latin, qui l'apparente à augur (→ augure), serait religieux, puis social, « celui qui fonde et établit » ; le mot a enfin pris les valeurs que le français retiendra, y compris celle du latin chrétien, où auctor sert à désigner Dieu, ce qui a pu entraîner des confusions avec actor, dérivé de agere « agir » (→ acteur, à acte).
❏
Le sens aujourd'hui dominant de
auteur, « écrivain par rapport à son œuvre », est aussi le plus ancien, la spécialisation juridique, pour « personne qui est à l'origine d'un droit », n'apparaissant qu'en 1606
(autheur).
◆
Au sens d'« écrivain »,
auteur s'emploie aussi absolument pour « personne qui a écrit des ouvrages, dans quelque domaine que ce soit ». Le mot s'applique aussi à d'autres créations (
l'auteur d'un tableau, d'une musique, d'un film, etc.).
◆
Par métonymie, il désigne aussi l'œuvre, le texte
(étudier les auteurs), sens usuel depuis le
XVIIe siècle.
◆
L'expression
droit d'auteur est courante depuis la législation française de 1866.
■
Une autre valeur du mot, moins usuelle et aussi ancienne (1174, autor), correspond à « personne qui est la cause de, qui a fait (qqch.) », le complément désignant en général un acte (l'auteur d'un crime, etc.).
Le mot n'a pratiquement pas de féminin en français d'Europe : on trouve néanmoins femme-auteur, autrice et auteuse (1785, Restif), auteuresse (av. 1921), autoresse et authoress (1867, chez Taine, anglicisme). Même autrice, plus régulier et ancien, reste peu usité. Les Québécois utilisent en revanche la forme analogique auteure.
❏
Le préfixé CO-AUTEUR n. m. (1857) désigne l'une des personnes qui ont signé ensemble un ouvrage. Une variante conautheur avait existé au XVIe s. (v. 1562).
❏ voir
AUTORITÉ.
AUTHENTIQUE adj. est emprunté (1211) au bas latin authenticus, adjectif signifiant « original et bien attribué (d'un texte) » et substantif neutre (authenticum), « acte juridique qui peut faire foi », lui-même hellénisme. Le grec tardif authentikos signifie « dont le pouvoir, l'autorité est inattaquable ». Il est dérivé de authentes « auteur responsable » (notamment d'un meurtre), d'où authentia « autorité ». C'est un composé de auto- (→ auto-) et de °hentês « qui réalise, achève », d'un thème indoeuropéen.
❏
Le mot français apparaît en droit comme adjectif
(autentique escripture) puis nom (
XIIIe s., déformé en
antentique) ; il s'écrit
auctentique en 1403 (par confusion probable avec
auctoritas), puis (
XVe s.)
authentique. Il s'applique alors (1403) aux personnes dont l'autorité est reconnue et légitime, puis aux choses véridiques, indiscutables, emploi normal en langue classique et moderne.
◆
Ce n'est qu'au
XXe s. (1923 chez Gide) que l'adjectif correspond à « sincère, naturel, non affecté ».
■
Le sens très spécial en musique sacrée, dans modes authentiques, a été pris (1751, Encyclopédie), au latin médiéval authenticus (v. 1230).
❏
Parmi les dérivés,
AUTHENTIQUEMENT adv. (déb.
XIVe s.,
autenticquement ; graphie moderne,
XVe s.) et
AUTHENTIFIER v. tr., récent (1860, Goncourt), « identifier comme authentique », comme son dérivé
AUTHENTIFICATION n. f. (1933), sont devenus relativement courants.
◈
Le verbe
AUTHENTIQUER v. tr., sous la forme
autenticier (v. 1260), puis
autentiquer (1316), est pris au latin médiéval
authenticare (v. 1030) « déclarer (un acte) authentique ». Son usage est limité au droit.
■
Un dérivé isolé et régulier est authentiquité (1557), repris sous la forme AUTHENTICITÉ n. f. (1684), modifié d'après le radical latin et qui a pris aux XIXe et XXe s. les diverses valeurs de authentique. En français d'Afrique, le mot s'applique aux valeurs spécifiquement africaines, selon la doctrine développée par Mobutu en 1971 au Zaïre. L'adjectif authentique est aussi employé dans ce contexte.
◈
INAUTHENTIQUE adj. (1869), « non authentique », est entré dans l'usage littéraire par la philosophie existentialiste (v. 1950-1960), à propos des humains et de leur existence. Substantivé, l'
inauthentique correspond à
INAUTHENTICITÉ n. f. (1867).
AUTISME n. m. est un emprunt (1913) à l'allemand Autismus, créé en 1911 par Bleuler à partir du grec autos « soi-même » (→ auto-).
❏
Ce terme correspond à la « schizothymie » de Kretschmer et ses emplois actuels apparaissent d'abord dans le syntagme autisme infantile précoce (Kanner).
❏
L'adjectif AUTISTIQUE (1913) adapte l'allemand autistisch (1911, Bleuler), alors que AUTISTE adj. et n. semble dérivé en français (1913) sur autisme.
1 AUTO-, en français contemporain, correspond à deux éléments initiaux distincts. Le premier est tiré de l'adjectif et pronom grec
autos « le même », « lui-même » et « de lui-même », mot d'origine incertaine, et se trouve d'abord dans des mots empruntés au grec, souvent par le latin
(Cf. ci-dessous et automate, autonome, autopsie). Ce processus commence au
XVIe siècle.
◆
D'autres composés sont formés à l'époque moderne, en français ou dans une langue indoeuropéenne. Le second élément est alors tiré du grec (
autochrome, 1907), du latin (
autoclave, avec
clavis « clé », 1820) ou, plus récemment, du français :
auto-accusation (1903),
auto-accusateur (1908),
auto-allumage (1904), etc. Ce procédé commence à être productif au début du
XIXe s. et l'est pleinement à partir de 1890 environ, avec le développement des terminologies scientifiques et techniques. Ainsi
automoteur, trice adj. (1834), qui aurait pu concurrencer
automobile*.
■
L'autre élément 2 auto- vient du composé automobile, lui-même formé avec auto-, du grec autos (→ automobile).
■
Fonctionnellement, les productions de 1 auto- sont des substantifs, parfois des adjectifs ; des verbes, surtout pronominaux comme s'autodéterminer, s'autodétruire, s'y sont récemment ajoutés.
❏
D'autres sont formés avec un élément grec ou latin lié.
■
AUTOGRAPHE adj. (1580) et n. m., « écrit par l'auteur même », est plus courant que ses dérivés AUTOGRAPHIE n. f. (1800) et AUTOGRAPHIER v. tr. (1829).
■
AUTOCÉPHALE adj. (1723 ; de -céphale) qualifie une Église chrétienne orthodoxe refusant de se soumettre à une direction unique.
■
AUTOCLAVE adj. et n. m., formé (1820) à l'aide du latin clavis « clé », signifie « qui se ferme de soi-même » et s'applique spécialement (1825, n. m.) à un récipient servant d'étuve.
■
AUTOGÈNE adj., d'abord terme philosophique (1840) « qui se fait de lui-même », s'est employé en physiologie (1855), par emprunt à l'anglais autogenous (Owen, 1842), avant de se diffuser avec la soudure autogène (1885).
■
AUTOPHAGE adj. (1854) et AUTOPHAGIE n. f. (1854), de -phage, -phagie, sont restés didactiques en biologie, pour « qui se nourrit de sa propre substance », avec l'idée figurée (XXe s.) d'autodestruction.
■
AUTONYME adj. et n. m., d'abord formé d'après anonyme, pseudonyme, a qualifié (1866) un ouvrage publié sous le nom de son auteur.
◆
Il a été reformé (1957), d'après l'allemand (autonym, 1934), pour désigner et qualifier un mot se désignant lui-même, c'est-à-dire un mot en mention, et non pas en usage.
■
AUTOTOMIE n. f. (1882), de -tomie, désigne une mutilation réflexe d'une partie du corps ; il a pour dérivé S'AUTOTOMISER v. pron. (1897).
■
AUTOSCOPIE n. f. (1903), formé avec l'élément -scopie, désigne l'hallucination par laquelle on croit voir sa propre image.
■
AUTOGAMIE n. f. (1904 ; de -gamie) désigne en biologie la reproduction par union des gamètes d'un même individu.
◆
AUTOGAME adj. (XXe s.) en est dérivé.
■
AUTOTROPHE adj. (1905 ; de -trophe) est un terme important en biologie, pour « qui élabore lui-même ses substances organiques », à propos des végétaux chlorophylliens.
■
AUTOCHROME adj. (1906) est formé avec l'élément -chrome et se dit d'un procédé, d'une plaque enregistrant les couleurs sans recourir à un agent extérieur.
◆
De là AUTOCHROMIE n. f. (1907).
◈
Parmi les emprunts,
AUTOCHTONE adj. et n. est pris (1560) au grec
autokhthôn, de
autos et de
khthôn « terre »
(→ chtonien). Il signifie « habitant du lieu même, indigène » et devient adjectif (1835).
■
AUTOCRATE n. et adj. est emprunté (1768) au grec autokratês, de kratein « gouverner ». Il désigne la personne qui exerce un pouvoir absolu et qui ne détient ce pouvoir que d'elle-même.
◆
AUTOCRATIQUE adj. est attesté en même temps, alors que AUTOCRATIE n. f. n'apparaît que pendant la Révolution (1794), emprunté au dérivé grec autokrateia.
◈
AUTODIDACTE adj. et n., d'abord (1557) « que l'on apprend sans maître », puis (1580) « qui apprend sans maître », est pris au grec
autodidaktos, de
didaskein « s'instruire »
(→ didactique).
❏ voir
AUTARCIE, AUTISME, AUTOMATE, AUTOMÉDON, AUTOMOBILE, AUTONOME, AUTOPSIE, TAUTOLOGIE.
AUTOBUS, AUTOCAR → AUTOMOBILE
AUTODAFÉ n. m. est un emprunt (1687, écrit en trois mots : auto da fé) au portugais auto (« acte », « jeu » au sens théâtral) da fe (« de la foi »), expression appliquée au supplice des hérétiques condamnés par le tribunal de l'Inquisition ; la formule espagnole étant quasi identique (auto de fe).
❏
Le mot se trouve chez Lesage et a été diffusé au XVIIIe s., notamment par Voltaire.
◆
Devenu synonyme de « supplice du feu », il a été appliqué au XIXe s. (1826) à une destruction par le feu pour des raisons idéologiques (livres, etc.).
AUTOMATE n. m. et adj. est emprunté (1532) au grec automatos « qui se meut de lui-même », de autos (→ auto-) et de -matês, appartenant à la racine du verbe memonenai, qui exprime la force, la tension psychologique, passion, désir, intention. Ce verbe, qui correspond au latin memini « avoir présent à l'esprit ; se souvenir » (→ mémento), se rattache au radical indoeuropéen °men- « pensée », que l'on retrouve dans mens « esprit » (→ mental).
❏
L'adjectif apparaît dans le Gargantua de Rabelais (1532) : « de petits engins automates, c'est-à-dire soi mouvans eux-mêmes ». Il ne se trouve plus au XVIe s. et réapparaît comme nom (1611), puis au XVIIIe s. comme nom et adjectif, se spécialisant pour désigner ou qualifier un appareil imitant les mouvements d'un être vivant, et non plus tout mécanisme intérieur. Employé au figuré au XVIIe s. (1669, Pascal, pour qualifier un être humain), le mot est courant depuis Descartes. Sa vogue au XVIIIe s. étant attestée par une série de dérivés : automatique, automatisme, mot créé par Réaumur (mort en 1757), automatiser ; tous trois au sens cartésien, caractérisant les mouvements physiologiques sans participation de la volonté.
◆
En français moderne, automate s'emploie soit au sens du XVIIIe s. (collection d'automates anciens), soit en relation avec les dérivés modernes et avec robot*.
◆
Le mot (apparu dans ce sens en 1968) est assez rare en France, mais très courant en français de Suisse pour « distributeur automatique (de denrées, de tickets, de billets de banque) ». En Suisse et au Luxembourg, l'influence de l'allemand qui dit Automat, est probable. En France, on parle plutôt de distributeur.
❏
AUTOMATIQUE adj., d'abord physiologique (1751), ne devient technique qu'au
XIXe s. (1859, dans un texte concernant les métiers à tisser inventés au
XVIIIe s.), puis reçoit une valeur figurée (1878).
◆
Avec l'évolution des techniques, l'adjectif entre dans de nombreux syntagmes, tel
téléphone automatique (1903), et devient substantif dans divers contextes :
l'automatique « téléphone automatique »,
un automatique « pistolet automatique »,
une automatique « montre, voiture à changement de vitesses automatique », etc.
◆
Enfin l'adjectif, du sens figuré « qui s'accomplit de manière régulière et déterminée, inévitable », est passé dans l'usage familier au sens d'« inévitable » et même d'« absolument normal »
(Cf. logique).
■
Le dérivé AUTOMATIQUEMENT adv. (1801) est particulièrement fréquent dans ce dernier sens (mil. XXe s.).
■
AUTOMATICITÉ n. f. (1906) est resté didactique.
■
Le préfixé SEMI-AUTOMATIQUE adj. (1896) s'emploie notamment en armement, à propos d'armes à feu en partie automatiques.
◈
AUTOMATISME n. m., apparu au milieu du
XVIIIe s. (av. 1757, Réaumur), continue à s'employer en physiologie et en psychologie :
automatisme mental (v. 1926, Clérambault). Mais, depuis le début du
XIXe s. (1803), il désigne surtout un fonctionnement automatique de machine.
■
AUTOMATISER v. tr. est d'abord didactique (mil. XVIIIe s., Diderot) et s'applique aux personnes que l'on rend « automates », au sens de Pascal.
◆
L'emploi moderne au sens de « rendre automatique » doit être postérieur à l'usage technique de cet adjectif (mil. XIXe s.).
■
Le dérivé AUTOMATISATION n. f. n'est attesté (1875) que dans ce sens ; il a été récemment concurrencé par un emprunt à l'anglais (1955), AUTOMATION n. f., qui semble sorti de mode avec l'évolution rapide des techniques de l'automatisme, dont la terminologie s'est renouvelée (informatique, robotique, etc.).
■
AUTOMATISABLE adj. (mil. XXe s.) est moins usuel que AUTOMATISÉ, ÉE adj.
◈
AUTOMATISTE n. s'applique aux membres d'un groupe de peintres québécois (dont P. E. Borduas, J.-P. Riopelle) au début des années 1940, prônant une peinture spontanée et libre.
AUTOMÉDON n. m. est l'emploi plaisant (1776) du nom du cocher d'Achille dans l'Iliade. Celui-ci signifie littéralement « qui pense par lui-même », de 1 auto-* et du patronyme Medôn, dérivé de medein « mesurer, régler », « méditer, penser ». Ce verbe est apparenté au latin meditari (→ méditer) modus (→ mode) et repose comme lui sur une racine indoeuropéenne °med- « prendre des mesures appropriées ».
❏
Le mot a été à la mode au XIXe s., par plaisanterie, pour désigner un cocher. À la fin du siècle, il a pu être rapproché plaisamment de automobile, mais il est sorti d'usage au XXe siècle.
❏ voir
MÉDUSE.
AUTOMNE n. m. est emprunté (1231) au latin autumnus, nom et adjectif d'origine étrusque probable, mais que les Anciens rapprochaient du verbe augere « croître », donc du groupe de augmenter, auteur.
❏
Le nom de cette saison est apparu en ancien français relativement tard (XIIe-XIIIe s. ; Cf. ci-dessous automnal) : on employait gain (temps de la récolte).
◆
De l'idée de « récolte », appuyée par le rapprochement avec augere, on est passé à celle de « déclin », avec les sens figurés (1405, à propos de la vie humaine ; 1735, Voltaire, plus généralement).
❏
AUTOMNAL, ALE, AUX adj. est un emprunt (1119) au dérivé latin automnalis ; à la différence du substantif, il n'est pas entré dans l'usage courant, mais est fréquent dans le style didactique et littéraire.
AUTOMOBILE adj. et n. f., mot promis à un brillant avenir, apparaît modestement comme adjectif (1861), formé de 1 auto-* et de l'adjectif mobile*, d'après locomobile, à côté de automoteur, plus ancien.
❏
Signalé dans le
Grand Dictionnaire de Pierre Larousse (1866) comme adjectif pour « qui se meut de soi-même », il a un sens voisin de
automatique ; il est alors question de
barrages automobiles.
■
C'est par voiture automobile (1876) que le mot, lié à l'apparition des moteurs à explosion utilisés sur des véhicules à roues, prend son essor (à noter que l'adjectif hippomobile est formé à partir de automobile, en 1897). L'adjectif s'emploie immédiatement (1895) à propos de cette activité (sport, industrie automobile).
◆
Par ailleurs, l'abréviation un auto (1896), puis une AUTO, devient courante autour de 1900, le mot voiture, normalement appliqué aux véhicules à traction animale, restant ambigu. L'adjectif, en dehors de voiture automobile, n'est guère employé que dans canot automobile. Un automobile cesse de se dire vers 1920 ; vers la même époque un auto, qui concurrence depuis 1896 automobile, cède la place à une auto, et la forme complète une automobile devient marquée (technique ou littéraire, voire académique) par rapport à auto, sauf dans Automobile-Club (nom propre), et dans l'emploi adjectif (ci-dessus).
■
Si la carrière lexicale de automobile est importante, le mot, et même son aphérèse auto, est devenu de moins en moins usuel, notamment après 1950, voiture, du fait de la disparition quasi totale des véhicules hippomobiles, étant le mot le plus banal.
◆
Auto demeure, semble-t-il, plus usuel en Suisse et au Québec, où il a été fortement concurrencé par char (aujourd'hui plutôt rural ou populaire), qu'en France. Auto s'emploie dans les milieux de la course automobile, ainsi que dans des emplois dérivés : les autos tamponneuses des foires, les petites autos (« maquettes d'automobiles »).
❏
Les dérivés apparaissent avec l'essor des véhicules à moteur.
■
AUTOMOBILISME n. m. (1895) a vieilli pour « technique, conduite des automobiles » et s'est spécialisé pour « sport automobile », alors que AUTOMOBILISTE n. (1897) désigne toujours le conducteur de voiture automobile.
■
AUTOMOBILISABLE adj. (1925) se dit d'une route adaptée à la circulation des automobiles, comme synonyme rare de carrossable.
◈
De
automobile vient un nouvel élément
2 AUTO-, fort productif.
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AUTOCAR n. m. (1896, en Belgique) est en concurrence avec car pour désigner un véhicule de transport collectif hors des villes.
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Le dérivé AUTOCARISTE n. m. (1962) « personne qui exploite une compagnie d'autocars », est rare, sauf en français de Belgique, où il désigne le conducteur.
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AUTOBUS n. m. s'est formé spontanément sur la finale de omnibus* lorsque la Compagnie des omnibus (à chevaux) de Paris lança le 15 mai 1906 les omnibus automobiles. L'argot des employés de la Compagnie passa immédiatement dans l'usage. Le mot est resté usuel, concurrencé par bus ; à Paris notamment, autobus et métro résument à eux seuls presque tous les transports urbains collectifs.
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En français de Belgique, le mot s'applique aussi aux véhicules appelés en France autocars ou cars.
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Au Canada, autobus ou bus scolaire traduit l'anglais school bus.
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BUS n. m., formé sur autobus (1881) est resté usuel, parallèlement à d'autres abréviations, comme métro.
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AUTO-ÉCOLE n. f. (1906) est resté usuel pour désigner les écoles de conduite qui préparent des candidats au permis de conduire.
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Une série de termes concernent les routes et pistes pour automobiles : AUTODROME n. m. (1896, à côté d'un fugitif automobilodrome ; de -drome) désigne une piste fermée pour courses ou essais ; le mot a vieilli ; AUTOSTRADE n. f., emprunt (1925) à l'italien autostrada, de strada « route », s'est peu employé en français de France, sauf en parlant de l'Italie, faute de telles routes spécialement aménagées en France.
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Le mot, sauf en Belgique, a presque été éliminé par AUTOROUTE n. f., apparu assez tôt (1927) et peu usité à l'époque (on parlait plutôt d'autostrades), sauf à propos des États-Unis et de l'Allemagne. Le mot s'est diffusé naturellement avec la construction en France de routes protégées, larges, réservées à la circulation automobile (1966) ; employé d'abord à propos de l'Allemagne, pour traduire Autobahn, puis des États-Unis, pour highway, il s'est répandu à partir des années 1960, avec la construction d'autoroutes en France (autoroute de l'Ouest, partant de Paris), il est devenu très courant, avec quelques syntagmes (autoroute à péage ; bretelle d'autoroute...), et un dérivé AUTOROUTIER, IÈRE adj. (1957), assez didactique. AUTOGARE n. f. s'emploie en français d'Afrique pour « gare routière ».
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Le nouvel élément a été exploité aussi par l'armée : AUTOCHIR n. f. « ambulance chirurgicale automobile » en 1914-1918, qui n'a pas vécu ; AUTOCHENILLE n. f. (1922), véhicule automobile dont le train arrière est chenillé.
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L'autonomie de cet élément se marque par la variété des seconds éléments et la négligence à l'égard des ambiguïtés possibles : AUTOPOMPE n. f. (1928), « camion automobile équipé d'une pompe à incendie » (et non pas « pompe automatique ») ; AUTORAIL n. m. (1928), « véhicule automoteur sur rail », usuel ; AUTORADIO n. m. (1956), « poste de radio pour automobile » ; AUTO-COUCHETTES adj. (1962), dans train auto-couchettes.
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AUTO-STOP n. m. (1938) est un composé hybride qui n'a rien d'anglais (où l'on emploie
hitch-hiking), avec le verbe anglais
to stop « arrêter » ; il est concurrencé par l'aphérèse
faire du stop (→ stop).
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Le dérivé AUTOSTOPPEUR, EUSE n. (1953) est usuel.
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AUTO-PATROUILLE n. f. se dit au Québec d'une voiture de police.
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Formé avec le verbe
porter, PORTE-AUTOS adj., qualifie un véhicule (camion, wagon) pour le transport des automobiles. Le mot est attesté en 1967.
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LAVE-AUTO, composé de
laver attesté en 1970 en français du Québec (pour remplacer l'anglicisme
car-wash) désigne une station de lavage automatique pour automobile. Le mot est aussi employé en français de France (années 1990).
AUTONOME adj. est emprunté (1751) au grec autonomos « qui est régi par ses propres lois », de autos (→ 1 auto-) et de nomos « loi » (→ -nome, -nomie).
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C'est d'abord en français un terme d'Antiquité grecque ; puis (1815, à propos de Kant) un mot de philosophie, appliqué aux personnes. Le sens général et moderne, probablement induit par autonomie, ne semble pas antérieur à 1850, d'abord dans des emplois didactiques.
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L'adjectif devient usuel au XXe s., notamment dans le contexte politique et social (Cf. ci-dessous autonomie).
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AUTONOMIE n. f. est antérieur (1596), mais n'est guère utilisé avant le milieu du XVIIIe siècle ; il est emprunté au dérivé grec autonomia et concerne en français l'histoire ancienne, puis (1815) la philosophie kantienne (autonomie de la volonté) ; d'où une valeur psychologique (« liberté, indépendance ») au milieu du XIXe siècle.
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C'est aussi l'époque où le mot s'applique à la politique moderne, en relation avec indépendance (→ dépendre), concept distinct, comme l'atteste le dérivé AUTONOMISTE adj. et n. (1868). Ces emplois se répandent après 1871, et notamment vers 1910-1911, à propos de l'Alsace-Lorraine, annexée à l'Allemagne puis (1918) à la France.
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AUTONOMISME n. m., attesté chez Lafargue en 1881, est rare ensuite (1926, dans une traduction de Lénine).
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Au XXe s., tant les mouvements régionalistes que nationalistes, par exemple lors de la décolonisation, ont donné à ces mots de nombreuses occasions d'emploi.