AUTOPSIE n. f. est emprunté (1573) au grec autopsia « action de voir par soi-même », de autos (→ 1 auto-) et de -opsia, lui-même de opsis « vue » (→ optique).
❏  Le passage du sens général (grec) à celui d'« examen d'un cadavre » (en français) n'est pas clair : le premier emploi du mot est absolu, mais on a longtemps parlé d'autopsie cadavérique pour « examen », comme de dissection (attesté 1530) cadavérique, et le premier a pu servir d'euphémisme, s'agissant d'une pratique souvent condamnée. ◆  L'emprunt (1751) du sens grec en religion (« état contemplatif ») n'a pas eu de suite, mais l'emploi figuré, pour « examen approfondi » d'abord métaphorique de l'autopsie des cadavres (1827, Hugo), est relativement usuel.
❏  Le mot a un dérivé, AUTOPSIER v. tr. (1857, Flaubert in T. L. F.).
AUTORITÉ n. f. est un emprunt ancien (1119, auctorité) au latin auctoritas, dérivé de auctor, désignant le fait d'être auctor, c'est-à-dire fondateur, instigateur, conseiller, garant, vendeur, possesseur (toutes valeurs propres au latin) et aussi auteur, responsable d'une œuvre (→ auteur). Parmi les sens du mot auctoritas, on relève « pouvoir d'imposer l'obéissance » et « crédit d'un écrivain, d'un texte », et notamment, en latin d'Église, d'un texte révélé.
❏  Ces valeurs se retrouvent, appliquées aux textes sacrés, dans les premiers emplois connus de autorité : « texte de l'Écriture » ; « pouvoir d'imposer l'obéissance » (1174) ; « force de ce qui est jugé ou décidé » (XIIIe s.). Au XIIIe s. aussi, le mot s'applique à la force d'une référence ; cette valeur s'est conservée en espagnol, où autoridad correspond à « citation servant de modèle, d'exemple ». Au XVIe s. (1559, Amyot), il se dit de la considération dont jouit une personne, indice d'une supériorité morale.
■  La spécialisation politique (« organe du pouvoir ») date de la langue classique (mil. XVIIe s.) ; l'emploi au pluriel, pour désigner des magistrats, des hauts fonctionnaires, apparaît à la fin du XVIIIe s. (1790, Turgot). L'expression d'autorité (mil. XVIIe s.) a donné au XIXe s. (1830) la locution argotique d'autor « obligatoirement, forcément ». ◆  Le sens dominant de autorité « droit de commander, d'imposer l'obéissance » est exploité dans le dérivé autoritaire.
❏  AUTORITAIRE adj. (1863) s'applique au pouvoir politique, puis aux attitudes psychologiques (chez Zola, 1873).
■  La vitalité du mot est prouvée par ses dérivés : AUTORITAIREMENT adv. (1875), AUTORITARISME n. m. (1870) et AUTORITARISTE adj. (1900).
AUTORISER v. tr. correspond à un autre aspect du sémantisme latin ; il est emprunté (XIIIe s., autorizer), d'abord sous la forme latinisante actorizer (fin XIIe s.), au latin médiéval auctorizare « confirmer », dérivé de auctor au sens juridique de « garant » ; le latin classique connaissait auctorare. En ancien français, actorisier, auctorizer (-issier) signifie à la fois « approuver officiellement », « donner autorité à (qqch.) » et « certifier, prouver » (XIIIe s.).
■  Le sens moderne dominant, « permettre », apparaît en moyen français (1439), d'abord à propos des choses (autoriser qqch.), puis des personnes (autoriser qqn à), d'où le pronominal s'autoriser à, s'autoriser qqch. ◆  Un autre emploi pronominal, s'autoriser de qqch. « prétexter », appartient à la langue classique mais est encore connu.
■  Le participe AUTORISÉ, ÉE adj. (XIIIe s.) a signifié « qui jouit d'une grande autorité », encore au XVIIe s., puis « qui est digne de créance » (avis autorisé). ◆  Ses valeurs les plus courantes sont aujourd'hui « qui a reçu autorisation », « qui est permis » et, des personnes, « qui a autorité » (un porte-parole autorisé).
■  Le dérivé AUTORISATION n. f. (auctorization, 1419 ; authorisation, 1593), terme juridique et courant, désigne par métonymie l'acte, l'écrit qui autorise.
❏ voir OCTROYER.
AUTOUR → TOUR
L AUTRE adj. et pron. est issu (fin Xe s., altre) du latin alter, à l'accusatif alterum, d'abord comme pronom, puis (v. 1040, altra) comme adjectif. Le latin, avec le suffixe °-tero (Cf. uter, ul-te-rior, ci-te-rior), procède du même radical al- que alius, alienus (→ alias, alibi, aliéner et, du grec allos, allo-). Cette combinaison est indoeuropéenne (Cf. grec hateros, heteros en attique et ionien [→ hétéro-] ; gotique anthar, sanskrit anyáḥ), sauf en ce qui concerne le l, qui est italique. Alter est pronom (« le deuxième élément ; autrui ») et adjectif, avec plusieurs valeurs qui seront reprises en français.
❏  Le français altre se manifeste comme pronom au Xe s. (« le reste »), puis s'emploie (fin Xe s.) dans l'altre « le deuxième, le suivant », d'où (fin XVe s.) les aultres « le prochain ». ◆  Comme adjectifs, altra et altre s'emploient dès 1040 (Alexis) comme épithète et attribut (estre altre « différent »). Cet usage donne lieu à des locutions : d'altre (d'autre) part (1080), autre chose (1220) ; un autre soi-même (Oresme, 1370). Après les pronoms personnels nous, vous, l'adj. ne fait que les renforcer. Normal en français d'Europe, cet emploi est plus courant au Canada, où l'on dit aussi eux autres. ◆  Le pronom est lui aussi riche en phraséologie : comme dirait l'autre (1613 ; 1579, comme dit l'autre), entre autres, l'un et l'autre, l'un ou l'autre, bien représentés en langue classique. L'autre, en usage familier (fréquent en français d'Afrique) est une manière péjorative de désigner quelqu'un sans le nommer. ◆  Sans autre s'est employé en moyen français (XIVe s.) pour « sans rien ajouter ; certainement ». Rare en France et en Belgique, l'expression est usuelle en Suisse, avec de nombreuses valeurs selon le contexte (« tout simplement », « sans difficulté », « rapidement, sans précaution », « soudain »).
❏  Autre a aussi servi à former des composés très usuels.
AUTREFOIS adv., d'abord autre feice (v. 1170-1180), puis autrefeiz, a signifié en ancien français « dans le futur ». Cette valeur sera éliminée par une autrefois (déb. XIIIe s.), car autre fois, soudé plus tard, s'est spécialisé (v. 1200) pour « dans le passé ». ◆  Il est attesté comme nom (1845) pour « temps passé » ; on dit encore régionalement (Sud-Ouest) une autrefois pour « autrefois ».
AUTREMENT adv. signifie d'abord (1080) « sinon », puis (mil. XIIe s.) « d'une autre façon ». ◆  L'expression il n'est pas autrement intelligent « pas beaucoup » (1690) peut résulter d'une confusion avec outrément « de manière excessive, outrée », devenu archaïque.
❏ voir ADULTÈRE, ALTERCATION, ALTÉRER, ALTÉRITÉ, ALTERNER, ALTRUISME, AUTRUI, SUBALTERNE.
AUTRUCHE n. f. est à la fois l'altération et la réfection étymologique de formes anciennes, ostruces (1130-jusqu'au XVIe s.), puis ostriche (2e quart du XIIIe s.), le premier étant emprunté au latin populaire °austruthio, °austruthia, de av(is) « oiseau » (→ avi-, oie) struthio. Ce dernier, classique (Pline), était emprunté au grec strouthion, diminutif de strouthos, qui, avec certains adjectifs, peut désigner de gros oiseaux comme l'autruche, mais signifie initialement « moineau » et appartient au même ensemble indoeuropéen, avec des variations de forme, que le latin turdus « grive », le russe drozd « merle », l'allemand Drossel.
❏  La graphie austruce avec au- est étymologique (XVe s.), mais le son et la graphie -uche (austruche, 1515 ; autruche, 1556), qui reproduisent ceux de ostriche, peuvent avoir été suscités, selon Arveiller, par l'italien struzzo, aboutissement italien de struthio. ◆  Les légendes et observations antiques sur cet oiseau sont à l'origine de l'expression avoir un estomac d'autruche (1627) « avoir un estomac capable de tout digérer ». ◆  Des syntagmes usuels sont œuf d'autruche, plume d'autruche, ce dernier désignant une réalité culturelle importante dans la mode féminine (fin XIXe-déb. XXe s.). ◆  Le figuré « homme grand et stupide » n'a pas vécu longtemps, et le figuré moderne être une autruche correspond à faire l'autruche, pratiquer la politique de l'autruche « refuser de voir le danger, la réalité » (attestés XXe s., après la comparaison se cacher la tête comme l'autruche, 1866 Amiel ; Cf. déjà l'imprudence de l'autruche, 1826 chez Balzac).
❏  Le dérivé AUTRUCHON n. m., réfection de ostruçon (1374) « petit de l'autruche », est rare.
■  AUTRUCHERIE n. f. (1890) désigne une ferme d'élevage d'autruches.
L AUTRUI pron. est le cas régime (altrui, 1080) de altre, autre*, et correspond au latin °alterui, datif populaire (pour alteri) d'après cui « auquel » (→ qui).
❏  Le mot a en français son sens moderne dès l'origine, mais l'altrui signifie aussi (1262-jusqu'au déb. XVIIe s.) « le bien du prochain ».
❏  Un dernier composé, altresi, le plus ancien (Serments de Strasbourg), a été éliminé par aussi*.
❏ voir ALTRUISME.
? AUVENT n. m., si l'on n'accepte pas l'hypothèse simple, mais non corroborée, de P. Guiraud, qui fait venir le mot de au-devant, d'un latin populaire °ante-abante (→ avant), est d'origine obscure. Apparu vers 1300, après le latin médiéval auventus (1160), il est rapproché de l'ancien provençal amban, anvan, du latin médiéval antevanna (1209), lui-même d'origine incertaine. Depuis Du Cange, on le faisait venir de ante vannum (de vannum « van »), hypothèse peu vraisemblable, puis d'un radical germanique. Pour Jakob Jud, le mot procède du gaulois °ande (particule intensive) et banno « corne », à cause des cornes propitiatoires ornant le fronton des maisons gauloises, la finale de auvent étant due à l'influence de vent et l'élément an ayant été mal compris, puis remplacé par au- (Bloch et Wartburg). ◆  Ces étymologies assez hypothétiques concernent le provençal auvan et une variante anvant ; or, l'ancien provençal signifie essentiellement « entour, périphérie », d'où « retranchement » et « parapet de fortification », et correspond très mal, sémantiquement, au français auvent, même si le languedocien connaît embans pour « avancée d'une boutique ».
❏  Le mot désigne un petit toit en avancée. Il est courant en emploi concret. Ses spécialisations (techniques) et les figures (les mains en auvent) sont peu nombreuses. Cependant, en français d'Afrique, le mot est usuel pour une petite construction légère, un abri.
AUXILIAIRE adj. et n. est un emprunt de la Renaissance (1512) au latin auxiliaris adj. ou auxiliarius adj. et n., dérivés de auxilium « secours ». Ce dernier, comme auctor, auctoritas, augur (→ augure, auteur, autorité), vient du radical verbal de augere (→ augmenter) « croître » et « faire croître », et signifie à l'origine « accroissement de forces, renfort ». La dérivation, connue dès l'antiquité (Varron), s'explique difficilement, peut-être par auxilia, pluriel neutre d'un adjectif °auxilis, d'où on aurait tiré par analogie un substantif auxilium.
❏  Les premiers emplois français sont des latinismes, concernant des troupes envoyées en renfort. ◆  C'est au XVIIe s. que l'adjectif entre dans l'usage général, probablement d'abord en contexte juridique et aussi dans la terminologie grammaticale (verbe auxiliaire, 1680, d'où un auxiliaire, in Académie 1835). Dans ce contexte, le préfixé SEMI-AUXILIAIRE adj. et n. m. (mil. XXe s.) s'applique à des verbes pouvant servir d'auxiliaires, avec un infinitif (aller, devoir, faire, laisser...). ◆  Auxiliaire s'applique aux choses, aux personnes (entrant dans des désignations de fonction : maître auxiliaire, etc.) et il est substantivé, notamment pour « employé recruté à titre provisoire ».
❏  Les dérivés AUXILIAIREMENT adv. (1866) et AUXILIARIAT n. m. (1941) sont rares ou didactiques, mais le second s'emploie administrativement pour « fonction d'auxiliaire ».
AUXILIATEUR, TRICE n., mot de religion, est emprunté (v. 1450 ; 1530, au féminin) au latin auxiliator (féminin auxiliatrix, IIIe-IVe s.), dérivé de auxilium. L'adjectif qualifie un saint, la Vierge qui porte secours.
AUXINE n. f. est un mot scientifique « international », créé en allemand (Auxin) par Kögl et Haagen Smit en 1931 pour désigner la substance découverte en 1927 par Went. Le mot est formé à partir du grec auxein « augmenter, accroître » (qui correspond au latin augere ; → augmenter) et du suffixe -ine (-in en allemand et en anglais).
❏  Le mot désigne une hormone végétale qui constitue un facteur de croissance.
❏  Il a pour dérivé AUXINIQUE adj. et pour composés AUXINOLOGIE n. f., mots entrés dans les dictionnaires en 1969, HÉTÉROAUXINE n. f.
AVA n. m. est un emprunt à une langue polynésienne et désigne en français tahitien une boisson alcoolisée obtenue par la fermentation de lait de coco et d'une racine de poivrier (comme le vin de palme en Afrique).
? AVACHIR v. tr., malgré les apparences, n'est peut-être pas un composé tout simple de vache, mais le résultat dialectal, passé assez tard en langue écrite (1395, « qu'il ne s'avachise trop », Christine de Pisan), d'un francique °wajkjan, restitué par l'ancien haut allemand weikjan « amollir » (Cf. fribourgeois agwetchi, liégeois awatchi). Mais le mot a dû être très vite senti comme apparenté à vache, d'autant que certains contextes ruraux s'y prêtaient (franco-provençal arazi, avezi « assouplir le pis de la vache avant de la traire »).
❏  Au XVIe s., le verbe prend au pronominal sa valeur figurée moderne « perdre son énergie, sa force » (1539, R. Estienne à propos du langage). Au sens concret, le pronominal et surtout le participe passé sont plus fréquents que le verbe, qui signifie alors « faire perdre sa tenue, rendre mou et informe ».
❏  Les deux participes, AVACHI, IE adj. (1542) et AVACHISSANT, ANTE adj. (1867, Goncourt), sont usuels, le second se bornant à des emplois abstraits, psychologiques.
■  Le dérivé AVACHISSEMENT n. m. (1851) s'emploie au concret et surtout au sens psychologique moderne.
+ 1 AVAL n. m. est composé de à* et de val*, sur le même modèle que son contraire amont.
❏  D'abord adverbe (1080), puis en fonction de préposition (v. 1160, aval le vent), et en locution adverbiale (en aval, v. 1260), le mot devient substantif (1534), en parlant d'un cours d'eau et au figuré (XXe s.). ◆  En aval s'emploie au figuré, comme aval n. m., pour « (à un) stade ultérieur ».
❏  Le dérivé 1 AVALER v. tr. est d'abord cohérent avec l'adjectif : il signifie (1080) « descendre (notamment un cours d'eau) ». Ce sens est devenu archaïque ou technique, de même que ses extensions, pour « abattre, faire tomber » (XIIe-XVIIIe s.), plus longtemps conservées au participe passé (des joues avalées) ; puis « creuser (une fosse, une mine) » (1783).
■  Une seule acception est restée dans l'usage courant, rendant les autres valeurs marginales, c'est « faire descendre par le gosier » (fin XIIe s.), que sa fréquence a détachée de son origine dans la conscience des locuteurs, lui permettant de produire des sens figurés où l'idée concrète de « descente » est éliminée. ◆  Avaler qqch. signifie « accepter, supporter » (XVe s.), d'où diverses locutions familières, telles dur à avaler, avaler la pilule, etc., et la valeur spécialisée dans faire avaler qqch. à qqn (1666, Molière) « faire supporter », ou encore (1835) « faire croire ».
Les dérivés se répartissent selon les deux principaux sens.
■  Pour « aller vers l'aval, descendre » : 1 AVALEMENT n. m. « descente » (1190), mot repris à la fin du XIXe s. chez les symbolistes comme substantif de avalé « pendant » ; 1 AVALOIR n. m. (1272), terme de pêche ; AVALOIRE n. f. (XIIIe s., avaleoire) « pièce de harnais qui descend » ; AVALAGE n. m. « action de descendre » (1415) et d'abord (1280) « droit sur un bateau qui avale » ; AVALAISON n. f. (avaleson, 1235) ou AVALASSE n. f. (1511) « torrent qui descend des montagnes », emploi qui a dû influencer avalanche*. Le mot s'emploie notamment en français de la Réunion pour une inondation survenant après de fortes pluies. ◆  Outre ces mots et l'adjectif participal AVALANT, ANTE adj. (1415) puis n. m. (1672), pour « (personne) qui descend une rivière », on peut encore citer AVALURE n. f. (1678), terme d'hippiatrie pour « corne qui descend autour du sabot d'un cheval ».
■  Pour le sens de « déglutir » : AVALABLE adj. (v. 1355), 2 AVALEMENT n. m. (1539) « action d'avaler », rare, AVALEUR n. m. (v. 1510) « glouton », aujourd'hui dans des expressions comme avaleur de sabres, et concurrencé pendant quelques années par AVALE-TOUT n. m. (1881, chez Louise Michel).
■  2 AVALOIR n. m., « gosier d'un glouton » (1615), a pris une valeur technique pour « partie d'un conduit de cheminée qui avale les gaz ».
❏ voir AVALANCHE, RAVALER.
? 2 AVAL n. m., « engagement à payer » (1673), n'a probablement pas de rapport avec val. L'hypothèse d'un emprunt à l'italien avallo ou à l'arabe h̥awālā « lettre de change, mandat », fait problème : le mot italien semble récent et pourrait être lui-même pris au français, et la date de aval en français rend peu probable un emprunt à l'arabe. On a aussi supposé un abrègement graphique de à valoir, mais cet abrègement, compatible avec bailler, donner son aval, supposerait un transfert (par oubli de l'origine) ou une substantivation de à valoir, qui n'est attestée que récemment dans bon pour aval, que J. Savary glosait « pour faire valoir ».
❏  Le mot désigne un engagement par lequel une personne, le donneur d'aval, s'oblige à payer un effet de commerce en cas de défaillance d'une autre personne. Il se dit par extension pour « caution » (déb. XXe s.).
❏  Le dérivé 2 AVALER v. tr. (1690), éliminé par l'homonymie, a été remplacé par AVALISER v. tr. (1875), qui s'emploie aussi (déb. XXe s.) pour « cautionner ».
■  Ce verbe a pour dérivé AVALISEUR n. m. (attesté 1934) qui remplace un dérivé de aval, AVALISTE adj. et n. (1846).
AVALANCHE n. f. est emprunté au franco-provençal alpin avalanche (1487, à Fribourg), lui-même croisement de avaler « descendre, dégringoler » (→ 1 aval et ses dérivés, dont avalaison, avalasse) et du terme alpin lavanche, qui correspond à l'ancien provençal lavanca, peut-être avec métathèse : la lavanche, l'avalanche. La forme lavanche, lavange est d'ailleurs la première attestée (1572), avant avallanche (1611) qui élimine au XIXe s. avalange. Ce type alpin °lavanca présente un suffixe prélatin (ligure) -anca, fréquent dans les Alpes ; le radical pourrait être lié au latin labina « éboulement », de labi « glisser » (Cf. lavino « rocher qui dévale », en Dauphiné ; → labile, laps). On a aussi proposé lave* et (Dauzat) le gaulois °lauza « pierre plate » (→ lauze), qui ne conviennent guère.
❏  En français, le mot a conservé sa valeur initiale, diffusée par la fréquentation de la haute montagne avec l'alpinisme et les sports d'hiver, avec des syntagmes comme couloir d'avalanche. ◆  Il a pris (mil. XIXe s.) des valeurs métaphoriques, dans une avalanche d'injures, de coups, etc.
❏  Le dérivé AVALANCHEUX, EUSE adj. est attesté en 1927.
L AVANCER v. provient d'un latin populaire °abantiare, dérivé du bas latin abante (→ avant), de ab et du latin classique ante (→ anté-).
❏  Le verbe apparaît au pronominal (1155 ; v. 1120 in F. e. w.) et au transitif (avancier « faire progresser », v. 1170, Roman de Rou ; puis « accélérer », 1223). ◆  Dès le XIIIe s., apparaît une valeur spatiale pour « faire venir en avant » (1278), puis (intransitif) « faire saillie », aussi au pronominal s'avancer (1559). ◆  En moyen français, le verbe prend aussi une valeur temporelle, « hâter » (v. 1400), et dans avancer une date (v. 1550). ◆  Une spécialisation financière « prêter (de l'argent à qqn) » (1469) vient de cette acception temporelle, par influence du dérivé avancement (ci-dessous). ◆  L'emploi intransitif (XIIIe s.) est lui aussi spatial et temporel : « se produire plus tôt », spécialement à propos d'un instrument pour la mesure du temps, opposé à retarder. De là, il avance pour « sa montre avance » (1830).
■  Pour le transitif, d'autres valeurs apparues en ancien français se sont conservées : « proposer (qqch.) comme véritable » (1299), « faire progresser (un travail) » (v. 1220).
❏  Le participe passé AVANCÉ, ÉE adj. (attesté 1507) a lui aussi des emplois spatiaux (1690, poste avancé) et temporels (un âge avancé), aussi en parlant d'êtres vivants (avancé en âge, Montaigne). L'adjectif, d'après le sens temporel, a pris la valeur spéciale d'« un peu gâté » par exemple dans viande avancée (1835). ◆  Cet aspect péjoratif du mot, par exemple dans me voilà bien avancé ! (1726), coexiste avec l'idée méliorative de « qui manifeste un progrès » (idées avancées, La Rochefoucauld).
Le déverbal AVANCE n. f. apparaît avec le sens assez imprécis d'« avantage » (XIVe s.), puis prend (1478) le sens financier correspondant au verbe et à avancement, antérieur dans ce sens et éliminé par avance. Le sens initial s'est conservé dans l'expression négative il n'y a pas d'avance à (et infinitif), courante en français de Belgique (aussi c'est pas d'avance, au Québec). ◆  La valeur temporelle correspond aussi à la locution d'avance (1580), à en avance, à l'avance, par avance (depuis l'usage classique) et à prendre de l'avance (fin XVIIe s.). ◆  Le sens spatial se réalise dans « action d'aller de l'avant » (1468) et par métonymie « saillie » (1473). ◆  D'autres expressions sont propres au français de Suisse : faire d'avance (1694) devenu faire de l'avance « avancer » (en français général prendre de l'avance) ; avoir de l'avance, connu aussi en Auvergne, « avancer rapidement ». ◆  Au Québec, être d'avance « rapide, efficace ». ◆  Au pluriel, faire des avances (à qqn) [1662] s'est spécialisé rapidement dans le domaine amoureux et s'emploie au figuré pour « chercher à plaire ».
AVANCEMENT n. m. a vieilli dans la plupart de ses emplois anciens : « marche en avant » (1174), « prêt financier » (1290) et « partie en saillie » (mil. XVIe s.) ; on a vu que avance et avancée avaient en partie remplacé ces emplois. ◆  Avancement désigne surtout aujourd'hui, par figure du sens spatial, le fait d'accomplir des progrès, de s'élever dans une hiérarchie ; ce sens semble dater du XVIIIe s. (1762) et a succédé à celui d'« enrichissement » (1690).
AVANCÉE n. f. est toujours spatial, signifiant « action d'avant, d'aller en avant » et par métonymie « ce qui avance, est en avant » (1771, en fortification).
❏ voir DEVANCER.
AVANIE n. f. semble un emprunt (1557) à l'italien avania. Une première attestation isolée de aveinie (1287) doit correspondre à un autre mot, préfixé de l'ancien français venie « pénitence », du latin venia (→ véniel). L'italien avania (déb. XIVe s.) est lui-même emprunté au grec médiéval abania « calomnie, délation », qui semble provenir de l'arabe ḫawān « traître », peut-être par le turc. Ces mots, aux XIVe-XVIe s., désignent précisément un impôt forcé imposé par les Turcs aux infidèles ; ce sens est attesté chez des voyageurs au Levant, au moins jusqu'à Chateaubriand et Lamartine. Avania avait pris en italien, dès Machiavel, la valeur figurée de « vexation, abus de pouvoir ».
❏  En français, le sens figuré, « humiliation », est attesté en 1713 ; il est devenu le seul en usage, et la valeur d'origine est oubliée.
L + AVANT prép. et adv. est issu du latin impérial abante, composé de ab- (→ à) et du latin classique ante « avant » et « devant » (→ anté-).
❏  Avant, abanz est d'abord (mil. Xe s.) un adverbe temporel, « auparavant », et spatial (2e moitié Xe s.) ; la locution avant que étant plus tardive (1258). Par avant (XIIIe s.) a précédé auparavant (ci-dessous). ◆  En avant, temporel (Xe s.), emploi qui a vieilli, est devenu spatial (XIe s.) et abstrait (mettre qqch. en avant, XVe s.) ; l'expression avait aussi en ancien français la valeur de préposition : en avant qqch. (1243). En avant spatial donne lieu aujourd'hui à l'expression fuite en avant. En avant, marche !, ordre militaire attesté au début du XIXe s., a été précédé par avant, marche ! (1531, R. Estienne). ◆  Au sens spatial, avant était concurrencé en ancien français par davant (Xe s.), devant (XIe s.) ; → devant. ◆  L'ancien et le moyen français connaissent de nombreuses locutions sorties d'usage, par exemple en avant « ensuite », en avant de « plus que » (XIIe s.), d'où un en avant (v. 1190) « un avantage » ; avant mais « désormais » (v. 1200), si avant com (comme) ou si avant que « de sorte que » (1347) et « autant que ». Mettre avant signifiait au XIIIe s. « étaler (la marchandise) » (1260), « avancer (une proposition) » (1283) et venir avant « s'avancer » (XIe s.), sens pris aussi pour aller avant (1328). ◆  Il nous reste, avec ce verbe aller et avant substantivé, l'expression aller de l'avant, en marine (1736), puis au sens figuré (1835). En français québécois, prendre, avoir de l'avant « de l'avance », se dit d'une montre. ◆  Faire avant voulait dire (XIIIe-XIVe s.) « satisfaire (une obligation), régler, payer » et être avant de (XIIIe s.) « être en possession de ». En français de Suisse, ne plus pouvoir en avant,en avant a la valeur du verbe avancer, conserve un emploi de l'ancien français et correspond à l'ellipse d'un verbe après pouvoir (du type ne pouvoir dehors). L'expression signifie « ne plus pouvoir avancer » et « être épuisé » (Cf. n'en plus pouvoir).
AUPARAVANT adv. est formé (XIVe s.) de au et de la locution adverbiale par avant au sens de « dans un temps plus ancien », « avant » (1389), aussi dans auparavant que construit avec l'infinitif (1400), puis le subjonctif (1438), remplacé par auparavant que de (1626), tournures vieillies.
L'adverbe avant a été substantivé plusieurs fois.
■  AVANT n. m. a désigné une avance (1422), puis la partie antérieure d'un navire (1680), d'une chose (1678) et d'un espace ; enfin, d'après joueur avant (1888), un avant désigne (1901) le joueur d'une équipe placé près du centre du terrain et qui attaque, au football notamment, d'où le composé AVANT-CENTRE n. m. (1900). ◆  Ces emplois sont pour la plupart symétriques de ceux de arrière, notamment dans l'adjectivation (XXe s.) : les places avant (d'une voiture), la marche avant.
Au sens temporel, AVANT-MIDI n. m. s'emploie pour « matinée », en Belgique, au Québec (dans l'avant-midi).
❏  Outre auparavant (ci-dessus), avant a eu de nombreux dérivés, comme le verbe avanter « prétendre » (Cf. avancer), avantin n. m. (1567) « branche de vigne qui avance », sans compter l'ancien provençal aventier « entreprenant ».
■  Seul avantage et ses dérivés ont vécu jusqu'au français moderne. AVANTAGE n. m. est un dérivé suffixé en -age, signifiant d'abord (1160) « ce qui produit une différence en plus », « ce qui est en plus pour qqn », puis (v. 1175) « ce qui est profitable ». Plusieurs expressions sont déjà courantes dans la langue classique, comme tirer avantage de qqch., être à l'avantage de qqn. ◆  On enregistre ensuite des spécialisations juridiques, puis sportives en matière d'hippisme (1855), de tennis (1898).
■  Avantage, très vivant, a plusieurs dérivés. ◆  AVANTAGER v. tr. (XIIIe s., avantagier) signifie « accorder un avantage à » et aussi « donner la préférence à ». ◆  L'adjectif AVANTAGEUX, EUSE (1418), possède une spécialisation financière (affaire avantageuse), et connaît une extension pour « qui flatte, est favorable » (1527) et un sens devenu archaïque, « beau, agréable à voir », sauf avec la nuance péjorative de vanité (fin XVIe s.), par exemple dans prendre un air avantageux. ◆  L'adjectif a pour dérivé AVANTAGEUSEMENT adv. (v. 1422) qui signifie surtout « favorablement ».
La série négative, préfixée en dé-, est aussi très vivante.
■  DÉSAVANTAGE n. m. (1290) désigne ce qui défavorise et toute condition d'infériorité. ◆  Il a pour dérivés DÉSAVANTAGER v. tr. (1507), courant au participe passé adjectivé, et DÉSAVANTAGEUX, EUSE adj. (fin XVe s.), d'où l'adverbe DÉSAVANTAGEUSEMENT (1558).
D'avantage a signifié en moyen français « par un avantage », d'où « d'emblée » et « sans le mériter » ; mais c'est une autre valeur, « de plus », qui a produit DAVANTAGE adv. (fin XVe s., Commynes), construit avec que (XVIe s., Amyot) puis avec de (Malherbe) au sens d'« en plus grande quantité ; encore plus ».
Avant sert aussi à former de nombreux composés nominaux, avec les sens de « antérieur » et « le premier » dans le temps et l'espace (voir le second élément) ; certains composés : avant-coureur, avant-garde sont relativement démotivés.
❏ voir AVANCER, DEVANCER, DEVANT, DORÉNAVANT ; AÎNÉ, ANCÊTRE, ANCIEN, ANTÉCÉDENT, ANTÉRIEUR, ANTI-, ANTICIPER, ANTIQUE.
AVARE adj. et n. est emprunté (1527) au latin avarus, dérivé mal expliqué du verbe avere « désirer avidement », qui a aussi produit avidus (→ avide), audax (→ audace), ausare (→ oser). Avarus s'est spécialisé au sens d'« avide d'argent », sens retenu en français après l'ancien français aver, aboutissement normal de avarus.
❏  Aver, outre le sens actuel de avare (v. 1200, adj. ; substantif chez B. Latini, v. 1265), avait aussi la valeur de « peu disposé à » et de « pauvre » (v. 1200, terre avere de pain). Ces valeurs sont tardives (mil. XVIIe s.) pour la forme moderne avare et sont plutôt des métaphores du sens dominant ou du latinisme sémantique, pour « avide », « cupide » (Bossuet, La Bruyère). Au sens dominant, le mot, comme adjectif et comme nom, est particulièrement fréquent du XVIIe au XIXe s., où il correspond à un type humain caractéristique, hérité des Anciens (Plaute, inspirateur de Molière), et qui correspond à la thésaurisation des richesses. Cette valeur devient au XVIIe s. contraire à l'attitude d'efficacité économique de la bourgeoisie montante, tournée vers l'investissement ; cependant, l'avare reste un personnage caractéristique, lié au refus de charité chrétienne, au moins jusqu'à la seconde moitié du XIXe siècle. Sans être archaïque, le mot et la notion (Cf. avarice) perdent de leur importance ensuite.
❏  Le dérivé AVAREMENT adv. a signifié « avidement » (1554).
■  AVARICE n. f. est emprunté, d'abord sous la forme averice (1121), corrigée au XIIIe s. (1265, B. Latini), au dérivé latin avaritia. ◆  En ancien et moyen français, la référence est surtout religieuse. L'avarice est un péché capital avant d'être (XVIe-XVIIe s.) un vice, une attitude sociale, enfin un comportement pathologique (XIXe-XXe s.).
■  Le dérivé AVARICIEUX, IEUSE adj. (1283), substantivé (1370), est devenu archaïque ou plaisant ; il était plus fort et péjoratif que avare.
AVARIE n. f. est un emprunt ancien (v. 1200) au génois avaria, attesté en latin de Gênes (XIIe s.), répandu en latin médiéval de Méditerranée (Provence, 1210 ; Catalogne, 1258). Le mot italien avaria est attesté au sens de « perte » à peu près en même temps que le catalan (XIIIe s.). En génois comme en français, le mot apparaît dans le contexte oriental : dans la colonie génoise de Constantinople et à Jérusalem ; c'est un emprunt à l'arabe ῾awāriyya, dérivé de ῾awār « défaut ».
❏  Avarie désigne à l'origine l'action de jeter par-dessus bord les marchandises, lorsque le navire est menacé de naufrage, et, en droit, l'évaluation de la perte. Puis (1498) le mot s'applique aux frais résultants. ◆  L'extension au sens moderne, « dommages du bâtiment et de la marchandise », se fait vers la fin du XVIe siècle. Le XIXe s. connaît une autre extension aux personnes, « accident, blessure », aux choses pour « accident » et surtout aux véhicules, voitures puis avions, par le transfert général du vocabulaire de la marine à celui des transports, vers la fin du XIXe s. (Cf. démarrer, en panne, etc.).
❏  Le dérivé AVARIER v. tr. est d'abord (1723) un terme de marine ; ses extensions sont surtout vivantes au pronominal (1807) et au participe passé : marchandises avariées. Un sens spécial, humain, concerne l'avarie majeure que constitue la syphilis (Les Avariés, œuvre de Brieux, 1905) ; il a vieilli.
■  L'argot connaît aussi AVARO n. m. « accident, ennui » (1874, chez les typographes), lui aussi archaïque.
AVATAR n. m. est emprunté (1800) au sanskrit avatāra, proprement « descente », d'où en religion « incarnation, descente (d'un dieu) sur terre ». Le mot était connu en Europe (1672, en néerlandais autaar ; anglais avatar, 1784) et son extension pour « métamorphose » apparaît dans une traduction de l'anglais (Lettres de Walter Scott, 1822).
❏  L'influence probable de aventure et plus tard, argotiquement, de avanie, jointe à l'ignorance de l'origine, a conféré au mot, toujours employé didactiquement au sens hindouiste d'« incarnation, réincarnation », la valeur familière de « mésaventure, malheur », probablement vers la fin du XIXe s. (1916, chez Barbusse). ◆  Le mot a pris, d'après l'anglais, la valeur d'« entité qui en représente une autre » ; il est courant en informatique.