L
BAILLE n. f. est issu (1325) par évolution phonétique du bas latin bajula « récipient (qui sert à porter qqch.) », féminin du latin classique bajulus « porteur », dont le dérivé verbal a donné le verbe bailler* « donner ».
❏
Le mot désigne un baquet servant à divers usages, notamment en marine. De là en argot de marins, le sens de « mauvais bateau » et en argot scolaire la Baille « l'École navale » (v. 1865).
◆
Par métonymie, le mot désigne aussi l'eau en argot maritime (1767) puis, entré dans l'usage familier général, la mer (où l'on risque de tomber, de se noyer).
L
BAILLER v. tr., également baillier dans les premiers textes (v. 1130-1160), est issu d'un latin bajulare « porter sur le dos » (Plaute) d'où, en latin médiéval, « exercer une fonction » (VIIe-VIIIe s.). Ce mot est dérivé de bajulus « portefaix », d'étymologie obscure, dont le féminin bas latin bajula signifie « chose qui porte » (→ baille).
❏
Le mot, très courant en ancien français, signifiait « porter » jusqu'au XIIIe s., et, avec changement de point de vue, « recevoir, accepter » et « saisir » (v. 1130-1160). Jusqu'au XIIIe s., il avait aussi, à côté de baillir (v. 1050), le sens de « gouverner » (→ bailli).
◆
La valeur de « donner » (v. 1130-1160), qui ne semble pas avoir existé en latin, s'est développée dans l'aire gallo-romane seule comme une extension de celle de « porter ». En raison de la vitalité de donner et de ses nombreux dérivés, ce verbe a décliné dès le XVIIe s., y compris avec un complément désignant des coups (1534) : Vaugelas le taxe déjà de « vieilli », Richelet (1680) signale qu'il n'est pas du bel usage sauf en termes de pratique (procédure). Son usage, restreint à quelques locutions, s'est maintenu en droit avec le sens de « mettre à disposition » et de « donner à bail » (1373), avant de vieillir à son tour ; il n'est vivant que dans la locution la bailler belle à qqn (1594), expansion de en bailler (1545), « duper qqn par de belles promesses, lui en faire accroire ».
❏
BAIL, BAUX n. m., déverbal de
bailler, a perdu la plupart de ses sens. Il a signifié en ancien français « gestion, administration » (av. 1160) puis « garde, tutelle » (v. 1250) ; ce sens, encore signalé comme terme de coutume par Furetière (1690), est sorti d'usage. Quant au sens général, « action de donner, de remettre » (1304), il s'est éteint au
XVIe siècle.
◆
Seule la valeur juridique de « contrat par lequel on laisse à qqn la jouissance d'une chose pour un prix et pour un temps » (1264) est encore vivante, mais complètement détachée du verbe qui lui a donné naissance. Le mot s'emploie seul et dans des syntagmes désignant diverses espèces de contrats de ce type. Cependant, dans quelques provinces comme l'ancien Dauphiné, il est resté synonyme de « don », dans des formules comme
bail en payement, bail au rabais. Il se dit couramment de l'acte de location d'un logement et, par métonymie, du loyer, de la somme due.
◆
Un sens figuré, « engagement avec qqn ou qqch. pour un temps », s'est employé à l'époque classique, dans
bail d'amour (av. 1654),
bail de vie et de santé (1676), avec la valeur de « long laps de temps » reprise au
XIXe s. dans d'autres contextes (
c'est un beau bail, 1829, plus tard
ça fait un bail que..., compris comme une métaphore du sens juridique).
◈
BAILLÉE n. f., d'abord
bailliée (v. 1225),
baallée (1277) avant
baillée (1432), est la substantivation du participe passé féminin de
bailler. Les acceptions de « pouvoir, empire », rares par rapport à
baillie (v. 1050), et de « action de donner » (1277) ont disparu.
◈
BAILLEUR, BAILLERESSE n., réfection (
XVIe s.) de
balleour (1321) et
baylleor (1337), est un terme juridique désignant une personne qui donne à bail ; ultérieurement, il est passé dans le langage commercial dans l'expression
bailleur de fonds (1835), toujours employée.
◆
Le sens général, « celui qui donne » (
XVe s.), est sorti d'usage, y compris dans sa spécialisation au jeu de paume (av. 1510) correspondant à
serveur et dans
bailleur de bourdes (1694) « moqueur, trompeur ».
❏ voir
BAILLI.
L
BÂILLER v. intr., d'abord bäaillier (v. 1119) puis bâiller (XVIIe s.), est issu du latin populaire bataculare / bataclare, attesté dans une glose du Xe siècle. Ce mot est dérivé de °bataculum, bataclum, « action d'ouvrir involontairement la bouche sous l'effet du sommeil, de la faim », lui-même dérivé de batare qui a donné bayer*, béer* et qui relève d'une onomatopée bat-, imitant le bruit du bâillement.
❏
Le mot signifie « ouvrir la bouche sous l'effet de la faim (v. 1119), du sommeil, de la fatigue, de l'ennui » (bâiller comme une huître, 1831), d'où au figuré « s'ennuyer » (1666), sens que l'on retrouve dans l'usage transitif que Chateaubriand fait du verbe dans bâiller sa vie.
◆
Le fait que, dès l'ancien français, bâiller est fréquemment attesté au sens figuré de « soupirer après qqch. » (1231) a probablement contribué à sa confusion ultérieure et à son interchangeabilité avec bayer*, puis à la disparition quasi totale de celui-ci.
◆
Par analogie, bâiller exprime l'idée d'être entrouvert, mal fermé ou mal ajusté (1678-1879), notamment à propos d'une porte. Cf. ci-dessous entrebâiller.
❏
Le dérivé
BÂILLEMENT n. m. (v. 1120) désigne l'action de bâiller et, par analogie, l'action, l'état de ce qui est entrouvert (1840).
■
BÂILLANT, ANTE adj., participe présent de bâiller, s'emploie adjectivement (XIIe s.) avec les sens correspondants de « qui bâille » et « qui est entrouvert ».
■
BÂILLEUR, EUSE n. (1690) se dit d'une personne qui bâille.
◈
Un autre dérivé senti comme détaché et autonome,
BÂILLON n. m. (1462), désigne proprement un objet que l'on met sur la bouche et qui la tient ouverte tout en empêchant de parler ou de crier, ce qui équivaut à une fermeture. Son emploi métaphorique ou figuré pour « obstacle à la liberté d'expression » est enregistré par Furetière en 1690.
■
Bâillon a produit BÂILLONNER v. tr. (1530) « museler » d'où, au figuré, « réduire au silence par la censure » (1796, Le Néologiste français), qui, à son tour, a donné BÂILLONNEMENT n. m. attesté tardivement (1842) avec son sens figuré en politique.
■
DÉBÂILLONNER v. tr. (1842) « enlever le bâillon de (qqn) », s'emploie au figuré pour « rendre sa liberté d'expression à (un groupe, un pays) ».
◈
Le préfixé
ENTREBÂILLER v. tr. (v. 1465) signifie « entrouvrir légèrement », et, à la forme pronominale
s'entrebâiller (1859) « s'entrouvrir légèrement ».
■
En sont dérivés ENTREBÂILLEMENT n. m. (fin XVIe s.), ENTREBÂILLURE n. f. (1877) d'usage plus rare, et ENTREBÂILLEUR n. m. (v. 1950), nom d'une pièce de métal qui limite en le bloquant l'entrebâillement de la porte.
BAILLI n. m. est le déverbal (av. 1160) de l'ancien verbe
baillir « administrer, gouverner » (v. 1050), lui-même dérivé de l'ancien français
bail « celui qui dirige, qui administre », « gouverneur, régent » (1207) et « tuteur » (1288). Ce mot est issu du latin
bajulus qui, à partir du sens classique de « porte-faix »
(→ baille, bailler), a développé les sens abstraits de « tuteur » (
VIIe s.) et de « gouverneur » (v. 937) attesté chez les auteurs médiévaux dans des contextes religieux. Le mot français pourrait être directement emprunté au latin.
■
Baillif, attesté jusqu'au XVIIe s., est la forme régulière du cas régime singulier, le sujet étant baillis (en picard, baillius) ; de baillis a été tiré un nouveau cas régime bailli d'après les participes passés en -is/-i (comme cueillis / cueilli), une fois que ceux-ci ont remplacé les formes en -iz/-it (du latin -itus/-itum) ; après la disparition normale du cas sujet, la forme bailli a été généralisée.
❏
Le mot désignait sous l'Ancien Régime l'officier royal au nom duquel la justice se rendait dans l'étendue d'un certain ressort. Le dictionnaire de l'Académie, en 1694, l'enregistre aussi comme nom d'une dignité (supérieure à celle de commandeur) dans l'ordre de Malte.
■
De nos jours, le mot s'emploie en histoire et se dit encore en parlant de certains magistrats d'Allemagne, de Suisse, préposés à l'exécution des lois (1835), et de certains magistrats britanniques.
❏
Le dérivé
BAILLIAGE n. m. (av. 1266), précédé par la forme du latin médiéval
bailliagia « autorité du bailli » (v. 1184), a perdu avant le
XVe s. le sens de « régence, tutelle ».
◆
Il se rapporte aux institutions de l'Ancien Régime et désigne l'étendue de pays sous la juridiction d'un bailli (1312) et cette juridiction (1680). Il désigne la dignité de bailli dans l'Ordre de Malte (1794) et la partie de territoire confiée à un bailli suisse ou allemand (1794).
■
Il a pour dérivé l'adjectif BAILLIAGER, ÈRE (1611) « relatif à un bailliage ».
◈
BAILLIVE n. f. est le féminin (v. 1278) de
baillif, ancienne forme de
bailli, et désigne l'épouse d'un bailli.
L
BAIN n. m. est issu (v. 1080) d'un latin parlé °baneum, altération du latin classique balineum ou balneum « fait de se baigner, lieu dans lequel on se baigne », et, d'abord au pluriel, « établissement où l'on vient se baigner ». Ce mot, venu concurrencer lavatrina (→ latrine), est un emprunt ancien au grec to balaneion « établissement de bain », surtout au pluriel to balaneia « bains », usité en prose (la poésie employant loutra). Le mot grec est dérivé de balaneus « garçon de bains », mot attique, non attesté avant Aristophane et Platon, sans correspondant dans les autres langues indoeuropéennes. Ou bien ce mot est emprunté à une langue égéenne avec la technique du bain chaud dans une baignoire, mais l'attestation assez tardive ne plaide pas pour cette hypothèse, ou bien il a été créé en grec et l'on se demande alors s'il a un rapport avec balanos « gland ». Étant donné que balanos désigne toute espèce de verrou ou de cheville, on peut imaginer que balaneus serait dérivé d'un °balanos désignant la cheville bouchant le trou d'une baignoire, dans le terme balaneiomphalos « qui a un renflement au milieu », appliqué à la fermeture de baignoire, omphalos désignant à la fois le ventre d'une coupe et la valve d'une baignoire.
◆
En français moderne, bain est senti comme une sorte de déverbal irrégulier de baigner, alors que baigner vient d'un dérivé latin de balneum.
❏
Le pluriel bains a longtemps servi à désigner l'endroit du palais ou de la maison où l'on se baigne (v. 1080), usage qui n'a disparu qu'après l'apparition de la locution salle de bains (→ salle).
◆
Bains désigne aussi (fin XIe s.) l'établissement public où l'on se baigne et, par extension, le lieu où l'on prend des bains de mer, où l'on suit une cure thermale (1680).
◆
Le singulier bain se dit de l'action de se plonger dans l'eau et du liquide dans lequel on se plonge (v. 1155). D'après le sens élargi de se baigner et baigner en français d'Afrique, bain s'emploie pour l'action de se laver à grande eau, en s'aspergeant, en se douchant.
◆
Par une métonymie usuelle, le mot désigne le récipient dans lequel on se plonge (1525) ainsi qu'un endroit aménagé pour la baignade (1680). Bain tourbillon, en français québécois, correspond à jacuzzi.
◆
Bains-douches a désigné en France un établissement public où l'on peut prendre des bains et des douches. Le mot s'emploie en français du Maghreb, comme synonyme de hammam (auquel correspond en français central bain de vapeur).
◆
Bain sauna* (français québécois).
◆
Son usage technique pour désigner une préparation liquide dans laquelle on plonge un corps pour le transformer ou une substance par l'intermédiaire de laquelle on chauffe un récipient, est répertorié par Furetière (1690) mais déjà attesté au XVIe s. dans le terme bain-marie (ci-dessous).
◆
La locution usuelle bain de soleil* participe à l'idée métaphorique d'une « exposition du corps à un élément naturel », mais est plus tardive (1860).
◆
La langue moderne emploie bain avec des valeurs métaphoriques (en locution bain de) et figurées, par exemple dans les locutions être, se mettre dans le bain, qui s'est d'abord rapportée à une situation difficile, compromettante, et dans bain de foule (1960), la métaphore étant la même que celle de plonger, immersion.
❏
Le terme BAIN-MARIE n. m., d'abord baing marie dans un texte du XVIe s. (daté de 1516 selon certains), est composé de bain et de Marie, nom d'une alchimiste appelée aussi Marie-la-Juive. Balneum Mariae est attesté en latin médiéval au début du XIVe siècle. Ce personnage était parfois identifié à la sœur de Moïse et d'Aaron, la prophétesse Miriam (Exode, XV, 20), parfois à l'auteur de traités d'alchimie portant le même nom. On a supposé qu'il pourrait s'agir de l'intégration symbolique de la Vierge Marie à la mystique ésotérique des alchimistes, succédant à la tradition égyptienne du mythe d'Isis.
◆
Le mot, d'abord terme d'alchimie, s'est répandu dans l'usage courant notamment en cuisine.
❏ voir
BAGNE, BAIGNER, BALNÉAIRE.
BAÏONNETTE n. f., d'abord bayonette (1572), est dérivé de Bayonne, nom de la sous-préfecture actuelle du département des Pyrénées-Atlantiques, ville qui possédait aux XVIe et XVIIe s. des fabriques d'armes et de coutellerie.
❏
Le mot désigne une arme blanche que l'on fixe au bout du fusil pour le combat au corps à corps ; par analogie, on appelle aussi baïonnette un assemblage de pièces rappelant le mode de fixation de l'arme, par exemple dans ampoule, douille à baïonnette (XXe s.).
❏ voir
MAYONNAISE.
L
1 BAISER v. tr. est issu (v. 980) du latin basiare, employé aussi bien à propos du baiser amoureux que du baiser de politesse ou de respect. Ce mot est dérivé de basium, d'abord employé avec une valeur érotique à côté d'osculum (proprement « petite bouche ») et, pour cette raison, évité par les auteurs classiques, puis seul passé dans les langues romanes. Basium, étant donné sa date d'apparition relativement tardive en latin, pourrait être un emprunt (on a évoqué une origine celtique). C'est Catulle qui semble l'avoir introduit dans la langue écrite.
❏
Le mot exprime l'idée d'appliquer ses lèvres sur la partie d'un être ou d'une chose en signe d'affection ou de respect. En français, il est d'abord attesté à propos du baiser entre le Christ et ses disciples, en particulier du baiser de Judas.
◆
Son emploi dans un contexte amoureux (XIIe s.), en construction transitive et absolue (1461), a conduit à un emploi érotique par euphémisme pour « posséder charnellement ». Cet emploi est attesté aux XVIe et XVIIe s., notamment chez les burlesques, mais il est alors ambigu, le sens « décent » étant encore très usuel. Néanmoins, le « baiserai-je, mon père ? », dans Molière, faisait déjà rire. L'emploi érotique a conduit au remplacement de baiser au sens initial par embrasser*.
◆
Par extension de l'idée de posséder charnellement, baiser a pris le sens figuré de « tromper », propre au langage familier, une fois attesté au début du XVIe s., et repris depuis 1881, surtout employé au passif par allusion au partenaire passif d'un rapport homosexuel et comme substitut à d'autres verbes, posséder, avoir et, explicitement, enculer.
◆
Au figuré, en français de la Réunion, baiser le rhum, l'arak : en boire en excès (d'où baiseur de rhum).
❏
2 BAISER n. m., d'abord écrit
baisair (v. 980), substantivation de l'infinitif du verbe
baiser, désigne l'action d'appliquer ses lèvres sur une partie d'un être ou d'une chose en signe d'affection, de respect, d'amour. Longtemps jugé prétentieux et concurrencé par des formes régionales, il n'a pas subi la même érotisation que le verbe et a conservé sa vitalité au sens initial, le français moderne utilisant le couple
embrasser-baiser. En français actuel, il est concurrencé par
bise, bisou, lorsque le contexte n'est pas érotique.
■
BAISEMENT n. m. (fin XIIe s.), ancien substantif d'action exprimant en général l'action de baiser, est surtout employé dans un contexte liturgique.
◈
BAISEMAIN n. m., soudé en un mot dès son apparition (1306), est apparu dans un contexte féodal pour l'hommage du vassal au suzerain. Il a désigné ensuite la cérémonie d'étiquette consistant à baiser la main du roi (1573).
◆
De nos jours, il désigne encore le geste de politesse d'un homme envers une femme (v. 1588), geste qui a toujours été limité aux classes supérieures de la société.
■
BAISE-PIED n. m., fait (1896) sur le modèle de baisemain pour désigner le type de baiser liturgique consistant à effleurer des lèvres le pied du pape en guise de respect, est à peu près inusité. Un composé figuré BAISE-LA-PIASTRE n. et adj. inv. est attesté en 1882 au Québec, avec piastre* (piasse) au sens d'« argent », pour « avare, personne avide d'argent ».
◈
BAISEUR, EUSE adj. et n., autrefois dit d'une personne qui aime à donner des baisers (déb.
XIVe s. au masculin ; 1680 au féminin), y compris en emploi adjectif (1571), a développé les mêmes connotations érotiques familières que
baiser, les emplois initiaux disparaissant au profit d'
embrasseur.
■
BAISOTER v. tr., écrit baizoter par Ronsard (1556), a vieilli, même avec la valeur érotique de « faire l'amour d'une façon médiocre et routinière » plus ou moins remplacé par baisouiller.
■
BAISURE n. f. (XVIe s.) est un terme technique désignant, par analogie, la marque faite sur un pain par un autre en le « baisant », en le touchant.
◈
Le participe présent de
baiser, BAISANT, ANTE, se rencontre en emploi adjectivé (1869) avec la valeur érotique et familière de « qui baise » et, par extension, « qui excite le désir » au propre et au figuré ; il est concurrencé par
bandant.
■
Le participe passé BAISÉ, ÉE, employé adjectivement avec différentes valeurs correspondant à celles du verbe, est substantivé dans le terme familier MAL-BAISÉ, ÉE n. (v. 1970) qui se dit d'une personne frustrée dans sa vie sexuelle, en général d'une femme.
■
BAISABLE adj. (XIXe s.) qualifie familièrement une personne susceptible d'éveiller le désir sexuel ; il est surtout employé négativement.
■
BAISE n. f. (fin XIXe s.), comme la plupart des dérivés tardifs de baiser, concerne le sens érotique ; distinct sémantiquement de baiser n. m., il désigne la pratique de l'amour physique, sauf régionalement (Nord, Belgique) où il est synonyme de « petit baiser affectueux », sens assumé par bise, bisou (ci-dessous) en français de France actuel. Il s'emploie souvent avec d'autres déverbaux, comme la bouffe, pour désigner les plaisirs des sens.
■
BAISE-EN-VILLE n. m., lexicalisation de la locution (il, elle) baise en ville (1934), est une appellation familière pour un sac de voyage pouvant contenir ce qu'il faut pour passer la nuit hors de chez soi.
■
Le sens érotique du verbe se retrouve enfin dans des composés comme BAISODROME n. m., composé plaisant (Cf. -drome) pour « lieu réservé aux ébats amoureux ».
◈
BISER v. tr. est probablement emprunté (1866) à une forme dialectale de l'Ouest,
biser « embrasser », laquelle est une altération du représentant du latin
basiare sous l'influence de verbes comme
bicher (dérivé de
bec* au sens de « baiser »).
■
Le mot, synonyme familier de baiser, a eu moins de succès que son dérivé régressif 1 BISE n. f. (1911 ; antérieur, Cf. bisou), très usuel dans faire la bise à qqn, se faire la bise, des bises.
■
À son tour, celui-ci a donné BISOU n. m. (av. 1901), dont le suffixe -ou est probablement l'équivalent provençal moderne de l'ancien suffixe provençal -on (du latin -one) ; les deux mots, bise et bisou, sont des synonymes familiers très usuels de baiser (surtout bisou, mot à la mode apr. 1960).
L +
BAISSER v., d'abord baissier (1080), est issu d'un latin populaire °bassiare, attesté dans les langues romanes en opposition à °altiare (→ hausser), dérivé de l'adjectif bas latin bassus (→ bas).
❏
Le verbe, employé transitivement, signifie « incliner (une partie du corps) vers le sol » et « descendre, mettre plus bas » (v. 1150, en marine), « diminuer la force, l'intensité de (son) » (v. 1175) et, par analogie, « baisser l'intensité de (une source lumineuse) ».
◆
Son emploi figuré au sens de « diminuer, rendre moins fort (un sentiment) » (v. 1170) est sorti d'usage.
◆
Se baisser, « se rendre moins haut » (1432), est le premier emploi pronominal attesté.
■
Parallèlement, dès le XIIe s., le verbe se construit intransitivement pour « diminuer de hauteur », « décliner » (1180-1200) et, au figuré, d'un son ou d'une lumière, « diminuer d'intensité ».
◆
Depuis le XVIIe s., il s'emploie abstraitement pour « perdre de sa vigueur physique ou intellectuelle » et, en termes de commerce, en parlant d'une valeur ou d'un prix qui diminue (1695), sens dont le pendant transitif, « diminuer le prix de (une marchandise) », apparaît au XIXe s. (1835).
❏
BAISSIÈRE n. f. (1160-1174) a désigné une dépression de terrain, sens sorti d'usage au
XVe s., mais repris dans le sens technique de « dépression retenant l'eau de pluie dans une terre labourée » (1838). Le mot désigne aussi le vin, le cidre, la bière qui reste au fond du tonneau (1307).
■
BAISSEMENT n. m., substantif d'action, a exprimé d'abord la dégradation, la diminution (1165-1170) puis l'action de baisser (1539) ; il s'est quasiment éteint sous la concurrence du déverbal baisse et, surtout d'abaissement (ci-dessous).
■
BAISSE n. f., d'abord besse (1250), a désigné jusqu'au XVIIe s., éliminant aux XVe-XVIe s. baissière, un lieu bas, souvent marécageux, sens dont procède la valeur dialectale de « lieu bas, vallon », en poitevin.
◆
Une autre acception, « action de baisser le niveau, de faire descendre à un niveau plus bas » (1577), a pris des valeurs spéciales à propos du niveau des eaux et, abstraitement, d'une température, d'une intensité sonore.
◆
Le mot s'emploie aussi en finances pour « diminution de prix, de valeur des effets cotés en Bourse » (1736), d'où la locution jouer à la baisse (1798), et, en commerce, « diminution de prix (d'une denrée ou d'une marchandise) » (1835).
■
BAISSER n. m. (le, un baisser), anciennement baissier (1404), substantif tiré de l'infinitif, a désigné l'action de descendre le cours d'une rivière avant de prendre le sens de « action d'abaisser » (1606) avec lequel il se rencontre dans quelques contextes. Il est beaucoup moins courant que lever n. m.
■
BAISSIER n. m. (1829), terme de Bourse, désigne le spéculateur qui escompte une baisse.
■
BAISSEUR n. m. (1936), « personne qui baisse », est employé techniquement en peausserie pour désigner l'écharneur à la machine qui amincit les peaux.
◈
Baisser est rapidement doublé par le préfixé
ABAISSER v., d'abord
abaissier (v. 1120), qui n'a pas gardé les valeurs intransitives, « descendre » (encore au
XVIIe s.) et « diminuer de ton, d'intensité » (v. 1155), probablement en raison de leur double emploi avec celles du verbe simple.
◆
Ses emplois transitifs actuels apparaissent dès l'ancien français : « pencher, incliner vers le bas » (v. 1170) et, au figuré, « humilier » (v. 1155), ainsi qu'à la forme pronominale,
s'abaisser.
◆
Ce verbe signifiait aussi « apaiser, éteindre » au propre et au figuré (1148), « rabattre une somme sur un prix » (
XIIe s.) et « soumettre » (
XIIe s.), sens sortis d'usage de même que « amaigrir » (
XIVe s.) et « obliger à se modérer en (qqch.) » (
XIVe s.), plus rares. L'emploi de
s'abaisser en marine, à propos du vent qui se calme (1210-1230), jugé contraire au bon usage, est remplacé par
diminuer.
◆
Le sens classique, « s'exprimer avec beaucoup ou trop de simplicité » (
XVIIe s.), qui procède du sens figuré moderne, ne semble plus en usage après le
XVIIIe s., bien qu'il soit répertorié par quelques dictionnaires ultérieurs.
◆
Du sens propre de « faire descendre » proviennent plusieurs acceptions techniques :
abaisser l'oiseau (1690) se dit en fauconnerie pour « alléger la nourriture de l'oiseau, pour qu'il vole bien » ;
abaisser une branche (1690) en horticulture « la couper près du tronc ».
◆
Le mot a été repris en mathématiques dans
abaisser une équation « la réduire au moindre degré dont elle est susceptible » (1751) et
abaisser un chiffre (dans une opération).
◆
D'après
abaisse (ci-dessous), il s'est spécialisé en cuisine pour « aplatir (la pâte) avec un rouleau de bois » (1751).
■
ABAISSEMENT n. m., substantif d'action dérivé d'abaisser (apr. 1170), s'est d'abord employé au sens moral de « état de ce qui est bas et mérite la réprobation ». Le sens concret est d'abord relevé en topographie, désignant l'endroit où le sol s'abaisse (XIIe-XIIIe s.) et l'état de ce qui est abaissé (XVIe s.). Cette acception générale subsiste au XVIIe s. et se répand, sans être aussi usitée que le sens figuré, mais avec des spécialisations en chirurgie (1680), algèbre (1751), astronomie (1751) et héraldique (1751).
■
ABAISSE n. f., déverbal d'abaisser (XVe s.), entre dans le vocabulaire culinaire pour désigner la pâte amincie au rouleau.
■
ABAISSÉ, ÉE est l'adjectivation (1690) du participe passé d'abaisser et s'emploie dans les mêmes acceptions. En outre, en blason, il qualifie une pièce de l'écu quand elle se trouve au-dessous de sa position ordinaire (1690) et, en botanique, la lèvre inférieure d'une corolle labiée quand elle forme un angle presque droit avec le tube (1845).
■
ABAISSEUR, EUSE adj. et n. m. se dit en anatomie d'un muscle servant à abaisser une partie du corps (1690) et désigne un instrument qui abaisse (fin XIXe s.).
■
ABAISSANT, ANTE, participe présent adjectivé, n'a que le sens moral de « qui humilie » (1845).
■
L'élément verbal abaisse fournit le premier élément de ABAISSE-LANGUE n. m. inv. (1841) « instrument servant à abaisser la langue pour examiner la gorge ».
◈
Dès le
XIIe s.,
abaisser a un préfixé en
re- (intensif)
RABAISSER v. tr. (v. 1160,
rabaissier). Ce verbe est apparu avec les sens de « rendre moins élevé, moins fort » (v. 1160), et « baisser davantage, mettre à un niveau moins élevé » (v. 1175).
◆
Son emploi abstrait, dépréciatif, au sens de « ramener à un état inférieur » (1667) et de « mettre au-dessous de sa valeur réelle » remontent au
XVIIe s. mais
se rabaisser « baisser de valeur », paraît très antérieur (fin
XIIe s.).
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Le déverbal RABAIS n. m., d'abord rabbez (1397), désigne une diminution sur le prix d'une marchandise, et s'emploie dans la locution familière au rabais (1639), y compris avec une valeur figurée, « de mauvaise qualité ». Le mot est alors démotivé, senti comme séparé de son origine.
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RABAISSEMENT n. m. (v. 1500), comme le verbe, est plus usuel avec le sens figuré de « action de dénigrer » qu'avec le sens concret (1869).
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RABAISSEUR, EUSE adj. (1611) et le participe présent adjectivé RABAISSANT, ANTE (XXe s.) procèdent du sens moral.
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Un autre préfixé est
SURBAISSER v. tr. (1690 après
surbaissé), terme technique d'architecture pour « donner à (un arc) une hauteur inférieure à la moitié de la largeur » puis « réduire considérablement la hauteur de (une voiture) ».
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En sont dérivés l'adjectif SURBAISSÉ, ÉE (1568) et SURBAISSEMENT n. m. (1691), dans les mêmes emplois.
BAITCHAI n. m. (prononcé bètchè) est un mot dialectal du Jura, d'origine incertaine, peut-être en rapport avec l'ancien français bechier, du latin beccus, au sens de « cloche fêlée » et « tesson ». Le mot est connu dans le Jura suisse, en français, pour « charivari de carnaval ». Sonner le baitchai « faire un vacarme discordant (souvent, d'une cloche) ».
BAÏTKA ou BAÏTHKA n. m. ou f. est un emprunt à l'hindi, employé en français de l'île Maurice, pour un bâtiment réservé aux activités culturelles hindouistes, et des réunions qui s'y tiennent (les participants d'un, d'une baïtka).
BAKCHICH n. m., d'abord écrit bakschisch (1828) puis bacchich (1858) et bakchich (1877), est emprunté au turc bakšīš « pourboire, don », lui-même du persan bahšīš, dérivé du verbe bähšīdän « donner ». Le mot turc s'est répandu en arabe.
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Le mot, d'abord relevé dans le Voyage en Orient de Nerval et chez les écrivains orientalisants du XIXe s. (Th. Gautier), s'est répandu au XXe s., désignant un pourboire dans les pays d'Orient et, en général, une somme d'argent payée pour obtenir illégalement qqch., un pot de vin.
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Le dérivé BAKCHICHER v. tr. s'emploie en français de Djibouti pour « faire une aumône à (qqn) » et « chercher à corrompre par un bakchich ».
BAKÉLITE n. f. est formé (1907) avec le suffixe -ite sur le radical du nom de l'inventeur L. H. Bakeland, chimiste né en Belgique en 1863 et mort aux États-Unis en 1944.
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Nom de marque déposée, le mot désigne une résine synthétique imitant l'ambre, utilisée comme isolant et dans la fabrication d'objets.
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En est dérivé BAKÉLISER v. tr. (1928) « enduire de bakélite » d'où BAKÉLISATION n. f. (1933) et BAKÉLISAGE n. m., plus rare.
BAKLAVA n. m., attesté comme mot étranger en 1853, est un emprunt au turc.
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Le mot désigne, comme en turc, une pâtisserie en pâte feuilletée, au miel et aux amandes, typique de la Méditerranée orientale et méridionale.
BAL n. m. est le déverbal (1150-1200) de l'ancien et moyen français BALLER (v. 1165) « danser », « remuer, se balancer » (av. 1249). Ce verbe est sorti d'usage vers la fin du XVIIe siècle. Baller est issu du bas latin ballare « danser » (saint Augustin), qui se rattache par le sens au grec ballizein « se trémousser, danser », mais dont la forme interdit l'hypothèse d'un emprunt direct ; le mot latin est plus près de ballein « lancer, jeter » dont ballizein semble être un dérivé et un doublet secondaire (on lui attribue aussi le sens de « lancer des projectiles »). Ballein se rattache à une racine indoeuropéenne °gweli-/°gwlei que l'on retrouve dans le sanskrit ud-gurna- « soulevé », le gw donnant un b dans plusieurs langues, dont le latin.
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Bal a été synonyme de « danse » jusqu'au XVIe siècle. Par métonymie, il a pris sa valeur actuelle de « réunion dansante » (1228), s'appliquant aussi au lieu où l'on se réunit pour danser (1794). Selon les coutumes et les styles de danse mondaine ou sociale, le mot donne lieu à des syntagmes (bal public, bal masqué, bal musette ; carnet de bal, etc.) et à des locutions parfois figurées, comme conduire le bal « mener, diriger (une action) ».
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BALLANT, ANTE, participe présent adjectivé de baller, qualifie des bras qui pendent. Il est substantivé (un ballant, n. m.) pour désigner techniquement, en marine, la partie lâche d'un cordage (1687), puis aussi, plus généralement, un mouvement d'oscillation, de balancement (1835).
❏ voir
BALADIN, BALISTE, BALIVERNE, BALLADE, BALLERINE, BALLET, BAYADÈRE, BRIMBALLER (et BRINQUEBALER) et aussi ACCABLER, DIABLE, EMBLÈME, PARLER, PROBLÈME.
BALADER et dérivés → BALLADE
BALADIN, INE n. est probablement dérivé (av. 1545) de ballade* avec le suffixe -in, peut-être par analogie avec l'ancien français galopin* « messager, garçon de course » (XIVe s.). L'hypothèse d'un emprunt au provençal baladin est intéressante, étant donné le sens de « danse » de l'ancien provençal balada (sens non attesté pour le français ballade), mais elle fait difficulté en l'absence d'attestations en provençal avant Mistral (sous les formes balarin, baladin, balandrin).
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Le mot a désigné jusqu'au XVIIe s. un danseur d'intermèdes dans les théâtres ambulants, sens qui s'est définitivement éteint avec l'apparition des troupes de comédiens.
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Par extension, il s'est appliqué à un comédien ambulant, à un amuseur public (1547) et a pris le sens figuré de « mauvais plaisant, sot » (1680), sorti d'usage. De nos jours, il évoque le folklore sympathique des comédiens ambulants.
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Le dérivé BALADINAGE n. m. (1754), d'abord employé comme terme de chorégraphie pour désigner une danse faite de sauts, a désigné, au figuré et d'après badinage (→ badin), une plaisanterie sotte (v. 1750).
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Signalé comme néologisme en 1838 avec le sens de « métier de baladin », il est aujourd'hui sorti d'usage.
BALADIYA, BALADIA n. f., emprunt à l'arabe, désigne en français du Maghreb, officiellement en Algérie, une commune, le bâtiment de la municipalité.
BALAFON n. m., quelquefois balafo (1698) est emprunté à un mot malinké (variété de mandingue, langue nigéro-sénégalaise), balafo, composé de bala « instrument de musique » et du verbe fo « dire, parler » et « jouer d'un instrument ».
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Le mot, relevé au XVIIe s. comme terme exotique pour désigner le joueur de bala, employé par Hugo (Bug Jargal), s'est répandu au XXe s., grâce aux écrivains de la négritude et à la musicologie, comme nom d'un instrument à percussion africain formé de lames et de calebasses creuses formant caisse de résonance.
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Le mot étant devenu en français le nom de l'instrument, on en a dérivé (XXe s.) BALAFONNIER ou BALAFONISTE n. (ce dernier étant seul utilisé en français d'Afrique) pour désigner le joueur de balafon.
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On trouve aussi balafongiste, de la variante balafong.