L
BÂTON n. m., d'abord bastun (1080), baston (1172-1175), écrit baton (1440) puis bâton (1680), est issu d'un latin populaire basto (attesté ensuite en 1070), lui-même dérivé du bas latin bastum, « morceau de bois long et allongé » (IVe s.), qui a supplanté le mot classique baculus dont un diminutif a donné bacille*. Bastum est probablement, comme le °bastum qui a donné bât*, le substantif verbal du bas latin °bastare « porter » (→ baste), le bâton étant ce qui porte, ce qui soutient. La formation du dérivé basto dès le latin est probablement due au désir d'éviter l'homonymie entre le nom du bât et celui du bâton.
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Le mot désigne un long morceau de bois que l'on peut tenir à la main et faire servir à divers usages (frapper, se déplacer). Dès les premiers textes, il s'emploie à propos d'un symbole de l'autorité, du commandement (1080), comme plus tard dans bâton de maréchal (1680), au figuré, « couronnement de la carrière de qqn » (1832) ; le bâton du chef d'orchestre, appelé autrefois bâton de mesure (1771), a cédé la place à la baguette. Avec une fonction d'appui, de soutien physique et moral (1200-1225), le nom s'emploie dans les syntagmes bâton de vieillesse (XIIIe s., au propre et au figuré) toujours en usage et bâton blanc (1440), canne faite d'une branche écorcée qui symbolise l'état de mendiant, de pèlerin, d'aveugle jusqu'à nos jours où il est remplacé par canne blanche.
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Cette fonction de support est réalisée spécialement en sports, tant en ski (dès le XVIIe s., dans une relation de voyage en Laponie ; repris en 1904) qu'en alpinisme (1787). Au Québec, on parle de bâton de base-ball (nommé ailleurs batte), bâton de hockey (dit aussi un hockey), « à long manche et palette faisant un angle », de bâton de golf (club).
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Avec une fonction d'agression, de punition, bâton a autrefois désigné une arme en escrime (1882) et, par métonymie, ce type de sport.
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D'un autre usage, celui des escamoteurs, vient la locution tour de bâton, attestée chez Saint-Simon au sens figuré de « profit secret, illicite » (fin XVIIe s.) et altérée en retour de bâton « réaction imprévue en sens opposé », par amalgame avec retour de manivelle. Le syntagme bâton de chaise « montant servant à porter les chaises à porteurs » a produit la locution mener une vie de bâton de chaise, passée de l'idée de « déplacement incessant » à celle de « vie agitée, désordonnée » (1894).
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Par extension, le mot désigne une forme linéaire, rappelant un bâton : dès la fin du XIIIe s., il s'applique en blason à une bande verticale, emploi dans lequel on voit l'origine de l'expression à bâtons rompus (1605) : « à la façon de bâtons entremêlés » d'où « par des propos décousus », sens enregistré par Furetière (1690). Ultérieurement, la locution a pu être interprétée d'après l'acception du mot en architecture (1710), spécialement dans bâtons rompus (1811) « baguettes brisées servant de motif décoratif », voire par allusion à une batterie de tambour dite à bâtons rompus (XIXe s.).
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Un de ces emplois concrets est à l'origine de la locution figurée usuelle mettre des bâtons dans les roues « freiner, gêner » (1807).
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Également par analogie, bâton, après barre*, désigne le trait que tracent des enfants qui apprennent à écrire et, dans la figuration graphique moderne de valeurs numériques, une bande représentant une donnée statistique.
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D'autres emplois analogiques existent, par exemple en Afrique, pour « cigarette », bâton de manioc se disant pour « cylindre de pâte de manioc enveloppé dans une feuille de bananier ».
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En français de Belgique, du Luxembourg, bâton de chocolat.
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D'une manière générale, le mot peut s'appliquer à des objets de petite taille, cylindriques (comme bâtonnet) [un bâton de colle].
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BÂTONNET n. m. (
bastonet, v. 1130), « symbole du pouvoir », repris sous la forme
bastounet (déb.
XIIIe s.) « petit bâton », s'est spécialisé comme terme de jeu (1396) ; il a pris vers 1900 des acceptions spécialisées dans la description anatomique (1906) et biologique (1906). En français d'Afrique,
bâtonnet dentaire, « cure-dent ».
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BÂTONNER v. tr., d'abord bastuner (1174), a d'abord signifié au figuré « harceler », sorti d'usage dès le XIIIe siècle. Le sens propre de « donner des coups de bâton » (déb. XIIIe s.), rare, et le sens analogique de « rayer un texte en y traçant des bâtons » (1740 ; Cf. barrer), disparu, n'ont pas réussi à imposer le verbe dans l'usage contemporain. Cependant la forme ancienne BASTONNER, probablement soutenue par bastonnade*, est attestée pour battre et, au figuré, « faire un grand effet » (ça bastonne).
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De là l'argot BASTON n. f. « bagarre », largement diffusé après 1970, déverbal de bastonner ou apocope de bastonnade (ci-dessous). BASTONNER v. intr. s'emploie aussi pour « se bagarrer collectivement » (en impersonnel : ça bastonnait dur).
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Le dérivé BÂTONNABLE adj. (av. 1660) s'est dit de celui qui mérite de recevoir des coups de bâton ; il a disparu.
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BÂTONNIER n. m. (1200-1225) a désigné celui qui donne des coups de bâton jusqu'au XVe siècle. Il s'est spécialisé avec la valeur symbolique de bâton pour désigner celui qui porte le bâton d'une confrérie (1332), désignant de nos jours, depuis le XVIIe s., l'avocat élu par ses confrères pour les représenter (1680).
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BÂTONNAT n. m. « mandat de bâtonnier » en a été formé (1832) avec son sens moderne par changement de suffixe.
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BÂTONNISTE n. (1820), nom donné à celui qui combat au bâton, fait des tours d'adresse avec un bâton, est demeuré rare.
◈
BASTONNADE n. f. est emprunté (1482), soit à l'italien
bastonata (1348-1353), soit à l'espagnol
bastonada (
XIIIe s.), soit à l'ancien provençal
bastonada (1343). Tous ces mots sont dérivés du correspondant du français
bâton. Bloch et Wartburg penchent pour un emprunt à l'italien en rapprochant ce mot des termes du vocabulaire militaire emprunté à l'italien à la même époque ; mais
bastonnade ne semble pas appartenir à ce vocabulaire.
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Le mot désigne une volée de coups de bâton, notamment administrée par châtiment et, dans les bagnes, celui qui consistait à frapper un forçat au moyen d'une corde goudronnée (1836).
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Par extension, il est employé en argot à propos d'une violente bagarre (1926). Cf. ci-dessus baston.
BATRACIEN, IENNE n. m. et adj. est dérivé savamment (1806) d'un radical batrac-, tiré du grec batrakhos « grenouille », avec le suffixe -ien. Ce mot, qui a de nombreuses variantes s'expliquant par des traitements phonétiques divers, des étymologies populaires, voire l'action d'un tabou linguistique, est d'origine incertaine, peut-être à rapprocher du latin botrax, nom du lézard à côté de lacertus (→ lézard).
❏
Ce terme de classification zoologique (les batraciens) désigne un ordre d'animaux à sang froid, à peau nue et humide, dont le type est la grenouille et qui a parfois été inclus dans l'ordre des reptiles.
◆
Il est quelquefois employé adjectivement, avec la valeur figurée de « qui tient de la grenouille, du crapaud ».
BATTELLEMENT n. m., enregistré en 1690 par Furetière, est d'origine incertaine. On l'a rapproché de l'ancien français bataillier « fortifier, garnir de remparts » (v. 1200), lui-même dérivé de batailles, emploi spécialisé du pluriel de bataille* pour « meurtrières » (v. 1165). Cette hypothèse est consolidée par l'anglais qui atteste battlement, au sens de « créneaux » (1325, batelment), à la même époque que l'ancien battled, repris comme participe passé à l'ancien français bataillier, batailler.
❏
Le mot n'a plus de rapport avec l'architecture militaire. Il désigne aujourd'hui le double rang de tuiles à l'extrémité d'un toit par où les eaux s'écoulent.
BATTLE-DRESS n. m. est emprunté au cours de la Seconde Guerre mondiale (v. 1943) à l'anglo-américain battle-dress, mot alors récent (1938) désignant une tenue de combat constituée d'un blouson et d'un pantalon. Le mot est composé de battle « bataille », terme emprunté à l'ancien français bataille*, et de dress « tenue », d'abord « façon de se conduire », déverbal de to dress, lequel est emprunté (XIVe s.) au français dresser*. Dans l'armée anglaise, on a dit fatigue-dress, l'anglais fatigue (du français fatigue) recouvrant la corvée militaire ; cette même tenue américaine, en toile, portait le nom de denims (→ denim).
❏
Le mot, difficile à intégrer dans le système phonétique du français, n'a eu qu'un succès relatif ; on lui préfère l'expression tenue de combat (recommandation officielle).
L +
BATTRE v. est issu (1050) du latin impérial battere (IIe s.), de battuere, mot rare dans les textes mais déjà chez Plaute au sens de « frapper le visage de qqn », d'où « frapper qqch. à coups répétés » et « frapper dans une intention hostile » en parlant des gladiateurs. Le mot, peu fréquent jusqu'au VIe s., a probablement été surtout technique pour « frapper le blé » (mil. IVe s.), « la monnaie, le métal » (VIIe-VIIIe s.), sens passés dans les langues romanes. Bien qu'il rappelle des mots celtiques, son étymologie est inconnue.
❏
Le verbe s'emploie avec un complément désignant une chose au sens de « frapper à coups répétés », à la fois dans le langage courant et dans des emplois techniques, ceci dès l'ancien français. Il exprime l'action de fabriquer la monnaie en la frappant avec un marteau (1080), notamment dans
battre monnaie (v. 1190), et de frapper sur un métal en forgeant (1250-1300), emploi dont viennent les locutions figurées
battre le fer tant qu'il est chaud et
battre froid à qqn « lui témoigner de la froideur », pour
battre le fer à froid. Il s'emploie aussi dans
battre le blé, le grain (mil.
XIIIe s.). Avec l'idée supplémentaire de « frapper pour agiter, mélanger », il se dit en vénerie dans
battre les buissons (v. 1155), au figuré « chercher en tous lieux » et, en parlant du gibier fatigué,
battre l'eau.
◆
D'après ce type de locutions, il développe le sens spatial de « fouiller, parcourir », dans les locutions
battre le pavé et
battre la campagne, surtout employées de nos jours avec un sens figuré, respectivement « marcher sans but, errer » (1606) et « déraisonner, divaguer ».
◆
Une autre locution figurée,
battre les oreilles « fatiguer, assourdir » (
avoir les oreilles battues, XVe s.), indique le lien entre
battre et la notion de bruit, de son, également réalisé par la locution
battre le tambour. Avec la même valeur, où
battre correspond à « jouer (d'un instrument à percussion) », dans
battre le tam-tam, etc., le français de l'océan Indien dit
battre la ravane (le grand tambour de séga) et par analogie
battre la langue « parler pour ne rien dire ».
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Parallèlement, dès l'ancien français, battre s'emploie avec un complément désignant une personne au sens de « frapper (qqn) à coups répétés » (1165-1170) ; se battre s'emploie avec l'idée plus abstraite de « livrer combat » (1607), tandis que battre qqn prend, dans certains contextes, le sens d'« infliger une défaite à » (1606) au propre et au figuré ; de là par métonymie battre un record (1882).
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L'emploi du mot avec un sujet désignant une chose correspond à « heurter à coups répétés » (v. 1165) et « produire, éprouver des mouvements répétés » (v. 1165, en parlant du cœur). D'où, aussi à propos du cœur, « avoir des palpitations, une accélération du rythme normal », et le sens de « s'ouvrir et se fermer en heurtant » (portes, volets).
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S'en battre (avec le nom d'une partie « honteuse » du corps) « être totalement indifférent, s'en ficher, s'en foutre ». S'en battre les fesses (mil. XVIIe s.), s'en battre les couilles, etc.
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La locution battre son plein, qui se dit proprement de la mer lorsqu'elle est haute, est couramment employée au sens figuré d'« être à son point culminant, à son apogée » (les deux valeurs sont attestées mil. XIXe s.).
❏
BATTEMENT n. m. a désigné en ancien et moyen français l'action d'infliger des coups à qqn (v. 1120).
◆
De nos jours, il se dit de choses qui battent à intervalles, d'un choc répété provoqué par des coups (1556), d'un mouvement d'allée et venue périodique et bruyant. Il signifie en particulier « action de battre des mains » (1559,
battement des mains), « mouvement alternatif de contraction et de dilatation (du cœur) » (1669). En escrime, le mot s'applique à un coup de l'épée contre celle de l'adversaire (1686) et, en danse, à un mouvement de la jambe (1710).
◆
Par extension, il a pris le sens d'« intervalle temporel » sans doute à cause des battements d'un balancier, d'une pendule.
■
BATTANT, ANTE adj. et n. m., du participe présent, a été employé adverbialement en ancien français au sens de « rapidement » (v. 1165-1170), la notion de promptitude étant issue de celle de heurt, avec des verbes de mouvement. Il reste une trace de son ancien emploi adjectif pour « frais, neuf » (v. 1165-1170) dans l'expression battant neuf (1690).
◆
Au sens passif, « que l'on bat » (apr. 1578) l'adjectif ne s'est maintenu que dans l'expression tambour battant (1690), passée du sens abstrait classique de « au vu et au su de tout le monde » (en annonçant au son du tambour) au sens moderne de « rapidement, ronde ment » (1833), allusion militaire à la charge.
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Le mot est substantivé au XIIIe s., d'abord pour désigner diverses pièces d'instruments ou de machines qui viennent battre sur une autre (v. 1279, « traquet de moulin »). Il désigne en particulier un objet qui retombe en frappant (1380), seul et dans battant de cloche (1680).
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Au XVIIe s., il se dit de la partie d'un panneau double mobile sur ses gonds (1680), par exemple dans battant de porte, ouvrir à doubles battants, et, en marine, de la longueur de la partie du pavillon qui bat librement au gré du vent (1690).
◆
Ultérieurement, l'argot en fait une désignation du cœur et, par glissement, de l'estomac (1872).
◆
Son emploi, à propos d'un sportif combatif (1907) et, par extension, d'une personnalité très combative (1967), s'explique par l'influence de l'anglais battling « combattant », appliqué par exemple à un boxeur. Battling est le participe présent de to battle « combattre », qui est lui-même le dénominatif de battle, mot emprunté à l'ancien français bataille*.
◆
À partir des emplois de battre pour la mer, battant s'emploie à la Réunion (le battant des lames), à Maurice (...de la lame) pour le niveau supérieur de la mer, sur une plage.
■
BATTURE n. f., ancien substantif d'action de battre (fin XIIe s.) supplanté par battement, a disparu. Le mot désigne des rochers situés un peu au-dessous de la surface de l'eau (1529) et au Canada (1672, écrit bature) la zone découverte par la marée basse.
■
BATTERIE n. f., d'abord « prix reçu pour avoir battu le grain » (1204), s'est développé ensuite selon deux valeurs du verbe : d'après battre le métal, il désigne l'ensemble des ustensiles en métal battu dont on se sert pour la cuisine (1294). Batterie de cuisine se dit au figuré d'un ensemble de décorations, comparées à des casseroles (1901). D'après le sens guerrier du verbe, le nom désigne une réunion de pièces d'artillerie destinées à battre une position ennemie (XVe s.), d'où en batterie (av. 1627), et par extension, les moyens employés pour arriver à ses fins (1559) et, par métonymie, une compagnie d'artillerie et son matériel (1835). Ces deux sens de base exprimant la notion commune d'« ensemble d'objets semblables » ont joué tous les deux dans l'apparition de sens dérivés, en électricité (1752), aussi batterie d'accumulateurs (→ accumulateur), le mot étant distinct de pile, sauf par anglicisme (battery) et se spécialisant à propos de l'automobile, de téléphone ou d'appareil de photo numérique (recharger la batterie). En psychologie (XXe s.), batterie de tests.
◆
D'après battre le tambour, batterie désigne la manière de battre cet instrument (1603) et, par extension, de frapper les cordes d'une guitare (av. 1650) d'où, par métonymie, une suite de notes détachées en arpèges (av. 1788). Il signifie spécialement et par métonymie « ensemble des instruments à percussion d'un orchestre » (1936, batterie de jazz).
■
BATTEUR, EUSE n. « celui, celle qui bat » est apparu au sens de « celui qui bat le blé » (1204 au figuré), puis « ouvrier chargé de battre une matière première pour la transformer » (1268-1271). Il entre dans des expressions correspondant à une locution verbale, comme batteur de pavé « celui qui parcourt les rues » (1526).
◆
De son emploi en musique, pour un percussionniste (1877, batteur de cymbales), procède son sens de « musicien qui joue de la batterie dans un orchestre » (1953), en rapport avec batterie. Batteur, en jazz, est en concurrence avec l'anglicisme drummer. En français d'Afrique, de l'océan Indien, batteur s'emploie pour « joueur de tambour, tam-tam, ravane (à Maurice) ».
◆
Son emploi dans les sports à batte, cricket, base-ball, hockey (XXe s.), est peut-être redevable à l'anglais batter, de to bat au cricket (l'anglais disait batsman dès 1765).
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Batteur désigne également un appareil, un mécanisme servant à battre, spécialement en agriculture au féminin batteuse (1860) et dans l'usage courant à propos d'un appareil ménager (1877), par exemple batteur à œufs.
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Le déverbal BATTE n. f. (XIIIe s.) a d'abord désigné une clenche de loquet, sens sorti d'usage au XIVe siècle.
◆
Il s'emploie pour « instrument servant à battre » (1471), utilisé par la blanchisseuse (1680) et dans certains jeux de balle (1752).
◆
Il sert également de substantif d'action à battre avec le sens technique d'« action de battre l'or » (1838) ; Cf. ci-dessous battée.
■
Un autre nom d'instrument, BATTOIR n. m. apparaît lui aussi au début du XIIIe s. sous la forme batoier « palette servant à battre le linge ». Par l'intermédiaire d'une locution comparative des mains comme des battoirs (1755), il est employé familièrement au sens de « grosse main » (1825 en argot).
■
BATTABLE adj. (XIIIe s.), « qui peut être battu », s'est peu répandu à la différence de son antonyme IMBATTABLE adj. (1806, inbattable) « qui ne peut être battu » en parlant d'une personne et, par extension, d'un record de sport (1909).
■
BATTAGE n. m. (1329) ne réalise le sens d'« action de battre » que dans quelques spécialisations, en agriculture (jusqu'au XVe s. ; puis à partir du XVIIIe s.) et dans des domaines techniques (1847). Il faut probablement partir de la locution battre la grosse caisse (parades, charlatans) pour expliquer le sens familier de « publicité tapageuse, exagérée » (1866), « supercherie » en argot (1848).
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D'autres dérivés apparaissent en moyen français et en français classique.
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BAT n. m., déverbal masculin de battre (1565), a eu le sens de « ce qui bat l'air, l'eau » (en parlant d'un oiseau, d'un poisson), sorti d'usage, puis a désigné par métonymie l'extrémité de la queue d'un poisson.
■
BATTUE n. f., du participe passé féminin de battre, n'a conservé son ancien sens d'« action de battre, de fouiller » (XVe-XVIe s.) qu'en vénerie (1690), puis dans toutes les formes de chasse.
■
BATTÉE n. f., d'abord batée (1680), est un mot technique désignant la quantité de matériau que l'on peut battre en une fois (1680, en reliure). Il sert aussi de dénomination, par opposition à battant (usuel), pour la partie sur laquelle bat une porte (1838).
■
BATÉE n. f. s'est spécialisé (1863) pour le récipient dans lequel on lave les terres aurifères ; Cf. ci-dessus batte.
◈
BATTURE n. f., terme de marins, s'emploie en français du Canada pour la partie du rivage découverte à marée basse (
estran en français de France).
◈
BATTITURE n. f. est un emprunt technique (1573) à l'italien
battitura « coup » (
XIVe s.), spécialement employé à propos des fragments incandescents qui jaillissent du métal que l'on travaille (av. 1571), dérivé de
battere (→ battre). Le mot est le plus souvent au pluriel.
◈
EMBATTRE v. tr., préfixé ancien (
XIIe s.), signifie spécialement « entourer » (une roue, sa jante) d'un cercle de métal.
◆
Il a pour dérivé
EMBATTAGE n. m. (1556).
◈
REBATTRE v., attesté une première fois au
XIIe s. puis à partir du
XIVe s., réalise la valeur itérative de « battre de nouveau, à plusieurs reprises » surtout dans quelques emplois techniques (vénerie, héraldique).
◆
Il s'est répandu dans l'usage courant avec le sens figuré de « répéter inlassablement et de façon fastidieuse » (1559), notamment dans
rebattre les oreilles à qqn (1713) qui tend à supplanter
battre les oreilles.
◆
Le participe passé adjectif
REBATTU, UE s'applique à ce qui a été répété trop souvent, de manière fastidieuse, et est devenu un lieu commun
(argument, raisonnement... rebattu).
◆
Les autres dérivés de
rebattre sont tous techniques.
◆
REBATTEMENT n. m. (1690) est un terme d'héraldique désignant la répétition des pièces ou des partitions de l'écu. Il se dit en technique automobile du défaut de fonctionnement de l'échappement d'un moteur à explosion (
XXe s.).
◆
Le déverbal
REBAT n. m., que le moyen français connaissait avec le sens de « reflet (image rebattue) » (v. 1550), a été repris au
XXe s. à propos d'une tournée de surveillance de douaniers (v. 1950).
◆
REBATTOIR n. m. (1818) désigne l'outil qui rebat les carreaux de céramique et le ciseau pour tailler des ardoises (v. 1950).
◆
REBATTAGE n. m., d'abord « action de polir un boulet » (1869), a pris au
XXe s. divers sens techniques spécialisés.
◆
REBATTEUSE n. f. (v. 1950) est le nom de la machine qui donne leur forme définitive aux briques.
◈
COURBATU, UE adj., composé de
court (Cf. à bras raccourcis), se dit (mil.
XIIIe s.) d'un cheval fourbu, harassé, puis d'une personne qui ressent une lassitude musculaire dans tout le corps.
◆
COURBATURE n. f. (1588) s'applique depuis le début du
XVIIe s. aux chevaux et aux humains courbatus ; il est devenu très courant. Son dérivé
COURBATURER v. tr. (1835) a produit par son participe passé un adjectif
COURBATURÉ, ÉE (1875 dans Zola) qui concurrence
courbatu, terme académique.
❏ voir
ABATTRE, BATAILLE, BATIFOLER, BATISTE, BATTELLEMENT, BATTLE-DRESS, COMBATTRE, DÉBATTRE ; S'ÉBATTRE, FLANC (BAT-FLANC).
G
BAU n. m., réfection de balc (v. 1200), également baul (1396) et bauch (1414) en ancien et moyen français, est issu du francique °balk « poutre » qui correspond à l'ancien norrois bøḷkr « cloison, séparation », l'anglo-saxon balc, l'ancien saxon et l'ancien haut allemand balko (allemand Balken). Un emprunt plus ancien au germanique est improbable, l'italien balco (XIVe s.) [→ balcon], et l'espagnol bao (XVIe s.) étant empruntés au français.
❏
Le mot était employé pour désigner une traverse de bois, en particulier la poutre d'un plafond (1396). Il s'est conservé comme terme de marine désignant la traverse d'un bâtiment qui maintient l'écartement des murailles et soutient les bordages des ponts. La locution de bau (1414) s'applique à la mesure de la largeur d'un navire.
❏
BAUQUIÈRE n. f. (1579) est dérivé de
bau en marine pour désigner la ceinture intérieure d'un navire formée de pièces soutenant les baux par leur extrémité.
◈
Bau est beaucoup moins usuel que ses dérivés verbaux préfixés, dont le lien étymologique au nom, demeuré d'ailleurs en partie obscur, n'est plus perçu.
❏ voir
DÉBAUCHER, ÉBAUCHER, EMBAUCHER ; BALCON.
G
BAUDET n. m., d'abord nom propre (1534) puis nom commun (1547), est dérivé avec le suffixe -et de l'adjectif ancien français balt (1080), baut (v. 1174), baud (v. 1178) « impudique », spécialisation du sens de base « joyeux, plein d'ardeur » qui a aussi donné la valeur péjorative de « hautain, fier, présomptueux ». Cet adjectif est lui-même issu du francique °bald « hardi, fier », correspondant à l'anglo-saxon beald « courageux », ancien saxon, ancien haut allemand bald « hardi, vif » (anglais bold, allemand bald), moyen néerlandais bout (néerlandais boud), mots appartenant à une même racine germanique. Baud, encore répertorié en 1611 par Cotgrave, est sorti d'usage ; il vit cependant dans un emploi spécialisé en vénerie chien baut (1374-1376) puis BAUD n. m. (1549), désignant une variété de chien courant. Le sens donné à baudet se comprend par le caractère d'impudicité, de sexualité exposée, traditionnellement attribué à l'âne.
❏
D'abord attesté chez Rabelais comme surnom injurieux pour un homme,
baudet sert de dénomination familière de l'âne (1547) et s'emploie dans les locutions
crier haro sur le baudet (Cf. haro), être chargé comme un baudet. Le mot réactive sa valeur étymologique en désignant plus spécialement l'âne mâle envisagé comme étalon.
■
Par une évolution analogue à celle de chevalet, poutre, etc., il est passé dans le langage technique où, après avoir désigné un lit à sangles (1653), il se dit du tréteau du scieur de bois (1676).
❏
De BAUDOUIN n. m., emploi comme nom commun du prénom Baudouin, pour désigner l'âne, on a dérivé BAUDOUINER v. intr. (1564) « s'accoupler », en parlant de l'âne, verbe archaïque.
❏ voir
ÉBAUDIR.
?
BAUDRIER n. m. est très probablement l'altération (1387), par substitution de suffixe, de l'ancien français baldrei, baudré « large bande de cuir supportant l'épée » (v. 1160) et « ceinture de femme » (v. 1150), lui-même d'origine obscure de même que l'ancien provençal baldrei (1150-1200), baudrat (v. 1170). Le mot se rattache peut-être au latin balteus « bande de cuir soutenant l'épée », présumé d'origine étrusque par Varron, qui aurait été altéré en passant dans le domaine germanique. Un emprunt de l'ancien français au francique °balterâd, lui-même repris du latin balteus passé dans le domaine germanique probablement avant l'invasion franque (d'où les emprunts ancien norrois belti, anglo-saxon belt, ancien haut allemand belz), n'explique pas le -d- de baudré. L'hypothèse d'un emprunt de l'ancien français à l'ancien haut allemand balderich, attesté sous la forme palderich dès le XIIe s., semble à écarter, l'allemand étant probablement emprunté à l'ancien français. P. Guiraud préfère expliquer baudrier d'après la base baud- suggérant un objet gonflé : le mot serait dérivé d'un verbe °baudrer issu d'un latin populaire °ballitare « envelopper » dans lequel l'r est soit adventice, soit le représentant d'un dérivé °ballitulare ; baudrier serait alors formé d'après ventrière, sur badré « ceinturon » et « partie du corps entouré par la ceinture ».
❏
Le mot, d'abord employé à propos d'une lanière de cuir (servant à sonner les cloches), désigne une bande de cuir ou d'étoffe passée en écharpe et servant à porter une épée ou un sabre (XVe s.).
◆
Baudrier d'Orion (1690) désigne trois étoiles de la constellation d'Orion et baudrier de Neptune (1834) une plante.
❏ voir
BAUDRUCHE.
BAUDROIE n. f., d'abord écrit baudroy (XVIe s.), encore baudroye chez Cuvier, puis baudroie (1751), est emprunté au provençal baudroi, nom d'un poisson de l'Atlantique et de la Méditerranée, remarquable par la grosseur de sa gueule et sa voracité. Le mot provençal, attesté dès 1452 sous la forme boudron et de nos jours sous les formes buldroy (1861), baoüdroï (1860), baudroi (1879), est d'origine douteuse : on l'a rapproché tantôt du germanique °brod « bouillon » (→ brouet), tantôt de la racine baldr-, baudr- de mots provençaux relatifs à la boue, allusion au fait que le poisson se tient dans les fonds vaseux. Aucune des deux hypothèses ne satisfait, et celle d'une base en baud- exprimant le gonflement (Cf. baudrier, baudruche) n'est pas à écarter.
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BAUDRUCHE n. f. (1752), d'abord bodruche (Furetière, 1690), est d'origine inconnue. Littré y voit une forme allongée de baudrée « vieux morceau de cuir » (→ baudrier) ; il cite l'hypothèse de M. Jaubert qui tire baudruche du mot dialectal baudru (Berry), employé pour qualifier une bête à cornes ventrue et il propose de faire de baudru une variante de baudré « en forme de bourse ». L'hypothèse de P. Guiraud tourne autour des mêmes mots (baudrier, baudroie) en postulant une formation sur une base morphologique baud- ou baudr- évoquant une chose enflée, gonflée.
❏
Le mot désigne la membrane du péritoine de bœuf ou de mouton préparée en pellicule translucide et servant à divers usages, dont la fabrication d'objets gonflables. Par extension, il se dit d'une pellicule de caoutchouc, par exemple dans ballon de baudruche, d'où une baudruche. Par métaphore, il induit l'idée d'un manque de consistance, surtout dans la locution en baudruche.
❏
Flaubert atteste l'existence de cette valeur avec l'adjectif dérivé BAUDRUCHARD (1860), qui n'a pas vécu.
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BAUGE n. f., attesté depuis la fin du XVe s. (1482), est d'origine incertaine, peut-être variante de bauche (XIVe s.) et bauke (XIIIe s.), forme du Nord-Est : « torchis, mortier fait de terre grasse et de paille, servant à la confection des planchers, des murs de clôture et quelquefois des maisons ». Selon Wartburg, ce mot se rattacherait au gaulois °balcos, « fort », que l'on restitue d'après l'irlandais balc de même sens, d'où « croûte que forme la terre séchée », sens attesté en irlandais. Un rapprochement avec bache « foin des marais », terme de Suisse romande, emprunt au provençal moderne bauco, balco « foin grossier », fait difficulté des points de vue géographique et chronologique ; on serait passé de « foin » à « torchis ».
❏
Le sens de « hutte en torchis » a disparu, sauf dans les dialectes.
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Le mot ne désigne plus que le gîte fangeux de certains animaux (1489), en particulier du sanglier (1561) ; de là, son emploi figuré péjoratif en parlant d'un habitat très sale (1808).
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En maçonnerie, d'après le sens initial, il désigne un mortier de terre grasse et de paille dont on enduit les murs extérieurs des habitations (1606), en concurrence avec torchis.
❏
Le dérivé
BAUGER v. « se retirer dans sa bauge », en parlant du sanglier est à la fois pronominal,
se bauger (1553 Ronsard), repris au
XIXe s. (1834), et intransitif (
XIXe s.). Au figuré,
se bauger « se mettre à l'abri », est littéraire.
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BAUGÉE n. f. est tardif (1852) et peu usité pour « gîte d'un porc ou d'un sanglier ».
BAUHINIA ou BAUHINIE n. f. (1751), nom tiré de celui du botaniste Bauhin, désigne un arbre, un arbrisseau (Papilionacées) poussant dans les régions tropicales dont plusieurs espèces sont décoratives.
L
BAUME n. m. (XIIIe s.), d'abord basme (v. 1150), forme la plus fréquente jusqu'au XVIe s., est issu du latin balsamum (→ balsamique), terme de botanique désignant un arbrisseau odoriférant (Pline) et, par métonymie, surtout au pluriel, la substance résineuse sécrétée par certaines plantes (Virgile). À basse époque, le mot désigne l'onguent préparé avec cette substance (VIIe s.), d'où au figuré ce qui est agréable, apaisant. Le mot latin est emprunté au grec balsamon, nom d'un arbre, de la résine qu'on en tire, et ultérieurement, de la menthe coq, lui-même probablement emprunté à une langue sémitique (hébreu bāšām, arabe bašām).
❏
Le mot est d'abord employé au sens d'« onguent propre à guérir les blessures », puis au figuré pour « chose agréable » (1532) et « ce qui calme, adoucit les peines » (1683).
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Au sens latin de « substance résineuse coulant de certains végétaux » (XIIe-XIIIe s.), le mot désigne aussi la plante (1267-1268) et, en particulier une sorte de menthe (1680) ; mais ces acceptions restent techniques.
❏
Le composé
EMBAUMER v., anciennement
embasmer (v. 1155), a d'abord le sens de « conserver (un cadavre) » en le traitant avec des substances balsamiques ; de là, au figuré, « perpétuer l'existence de (qqch.) » (av. 1778), d'emploi littéraire.
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D'après
baume « substance odoriférante », il signifie « remplir (un lieu) d'une odeur douce et agréable » (fin
XIIIe s.), également en emploi absolu (1841) et avec un complément désignant l'odeur répandue (déb.
XXe s.).
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Les dérivés du verbe, EMBAUMEMENT n. m., d'abord embalsement (XIIIe s.), et EMBAUMEUR, EUSE n. (1556) ne concernent que le sens funéraire.
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BAUMIER n. m., d'abord
basmier (v. 1200) a été formé sur le radical de
basme, baume en remplacement de
balsamier (1165-1170), lui-même dérivé savamment du radical du latin
balsamum pour désigner l'arbre à baume.
Baumier n'est pas attesté du
XVIe au
XVIIIe s., où il est réenregistré par Trévoux sous sa forme actuelle (1752).
❏ voir
BALSAMITE (et BALSAMIQUE, BALSAMINE).
BAUXITE n. f., d'abord beauxite (1837) puis, correctement, bauxite (1928), est dérivé du nom des Baux-de-Provence, près d'Arles (Bouches-du-Rhône), où cette roche alumineuse fut découverte et analysée pour la première fois par l'ingénieur des mines F. Berthier en 1821.
❏
Le mot s'applique à un minerai d'aluminium.
BAVAROISE n. f. est l'emploi spécialisé en gastronomie du féminin bavarois, oise (1660), lui-même dérivé de Bavaria, forme médiévale de Bavière. Le mot désigne littéralement le pays des Bavarii et vient du germanique Bai-warioz dont le premier élément se rattache au nom de la tribu Boii (→ bohême). Le second élément est issu du germanique °warjan « défendre, protéger » (→ guérir). Le sens étymologique est « pays des défenseurs et des combattants ».
❏
Le mot a désigné une infusion de thé aromatisé (souvent additionné de lait) et sucrée avec du sirop de capillaire, celle-ci ayant été mise à la mode au café Procope par les princes de Bavière.
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Par une évolution ou une reprise inexpliquée, un entremets froid sucré et parfumé, d'abord appelé fromage bavarois (1828), substantivé en BAVAROIS n. m. (1815), s'est appelé bavaroise de gelée (1867).
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Bavaroise désigne aujourd'hui un entremets différent, comportant des œufs.
L +
BAVE n. f., réfection du XVe s. (v. 1460) d'après baver, de beve (déb. XIVe s.), continue le latin populaire °baba, mot onomatopéique exprimant le babil des petits enfants accompagné de salive, et appartenant lui-même à un radical expressif bab- évoquant le mouvement des lèvres (→ babiller, babine).
❏
Le sens de « salive », bien qu'attesté dès les premiers textes, a mis longtemps à supplanter le sens étymologique de « babil, bavardage, loquacité », dominant aux XVe et XVIe s., répertorié par Furetière en 1690 et encore par Trévoux en 1771, et toujours vivant par les dérivés (Cf. ci-dessous).
◆
Par extension, le mot se dit du liquide gluant que sécrètent certains mollusques (1690) et de la salive d'autres animaux.
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Par métaphore et probablement par l'intermédiaire d'expressions comme bave de crapaud, il s'applique péjorativement à des propos médisants (1840).
❏
BAVEUX, EUSE adj. et n., d'abord
bavus (déb.
XIIe s.), qualifie une chose ou un être animé qui bave et, par analogie, décrit en médecine l'organe d'où suinte un liquide purulent (v. 1560). Il a développé d'autres emplois spéciaux comme
omelette baveuse « peu cuite » (1690) ou
lettres baveuses (1835).
◆
L'idée de babillage se réalise avec l'acception de bavard médisant (1456), sortie d'usage à la fin du
XVIe s. et reprise au
XIXe s., senti alors comme une extension métaphorique du sens de « qui bave » ; l'argot l'a substantivé
(n. m.) en parlant d'une personne qui parle beaucoup (1870),
(Cf. ci-dessous bavard), et pour désigner un journal (attesté 1946).
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BAVETTE n. f. (
XIIIe s.) désigne la pièce de linge sur laquelle l'enfant peut baver et, par extension, le plastron de cuir du boyaudier (1751) et le haut d'un tablier (1767).
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Par analogie de fonction, il a pris quelques acceptions techniques, en architecture « bande de plomb qui recouvre les bords des chéneaux sur un toit » (1639) et, par ailleurs, « pièce destinée à recueillir ou à refouler un liquide ».
◆
Par analogie de forme, il s'emploie comme dénomination d'une pièce de boucherie (1866,
bavette d'aloyau).
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La valeur initiale, liée à la parole, se retrouve dans le sens de « bavardage abondant » dans la locution familière
tailler une bavette (1690).
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BAVER v. apparaît avec le sens de « laisser couler de la bave » (déb.
XIVe s.), mais prend très vite celui de « bavarder » (v. 1450), courant au
XVIe s., conservé dans les parlers régionaux et repris par l'argot (1754).
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Le sens d'« émettre de la bave » a donné par extension celui de « ne pas couler droit » ou « suinter » (pour un liquide) (1680) et, par métaphore et reprise de la valeur « parole médisante », celui de « médire, calomnier » (1850).
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Baver de... correspond familièrement à « éprouver visiblement (un sentiment fort, une émotion) » et
en baver a eu le sens figuré d'« être ébahi » (1883), puis de « souffrir » (1915) qui l'a remplacé ; mais on dit dans le premier emploi
(en) baver d'admiration. En baver des ronds de chapeaux est attesté en 1911.
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Le verbe a produit des dérivés. BAVURE n. f., d'abord baavure (v. 1300), apparu au sens de « bave abondante », est resté rare jusqu'au XVIIIe s. où il a pris le sens technique de « trace laissée sur les objets moulés par les joints des pièces du moule » (1752).
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De là viennent les valeurs figurées de sans bavure « impeccablement » (1866) et récemment de bavure (policière) « erreur grave, voire tragique » (v. 1950).
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BAVIÈRE n. f. attesté sous la forme bavère (déb. XIVe s.) au sens de « bavette », disparu au XVIIe s., a désigné une pièce d'armurerie protégeant le cou et le menton (v. 1355).
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BAVEUR, EUSE n. (déb. XIVe s.) « bavard, » sorti d'usage, est repris périodiquement.
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Le féminin BAVEUSE n. f. fournit le nom régional (Provence) d'un poisson toujours couvert d'une sécrétion (1542), également appelé bavèque, bavesque.
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BAVERIE n. f. (v. 1450) « bavardage », est sorti d'usage au XVIIe siècle.
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BAVOIR n. m. (v. 1450) a commencé par désigner un lieu où l'on bavarde.
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Sorti d'usage en ce sens au XVIIe s., il a été repris avec le sens de « bavette d'enfant » (1717), où il tend à se substituer à bavette.
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Baver a aussi produit deux verbes suffixés. BAVASSER v. intr., employé depuis Montaigne au sens de « bavarder » (1584), a subi le déclin de ce contenu notionnel, dans toute la série, en français d'Europe, alors qu'il est demeuré usuel au Québec (synonyme partiel : placoter).
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Il a été repris dans l'usage familier avec des dérivés, BAVASSON n. m. et BAVASSEUR, EUSE adj. et n. « bavard » ; BAVASSAGE n. m. surtout en français du Canada, « bavardage médisant » ; BAVASSEUX, EUSE n., forme rurale de bavasseur, courant au Québec pour « bavard intarissable » et pour « médisant ».
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1 BAVOCHER v. intr. (1676) est un mot du vocabulaire de la gravure et de l'imprimerie pour « déborder sur les traits ».
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En est dérivé BAVOCHURE n. f. (1680) dans les mêmes emplois.
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2 BAVOCHER v. intr., employé par Céline au sens de « bavarder » (1936), est une nouvelle création expressive sur le radical de baver, variante de bavasser.
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Le dérivé verbal BAVOTER v. (1930) concerne en particulier l'articulation informe du nourrisson accompagnée de bave.
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Le sens initial de « babil » a produit
BAVARD, ARDE n. (1532) et
adj. (1559) pour désigner et qualifier une personne qui parle abondamment. Le mot est, par sa fréquence et son sens, démotivé par rapport à
bave et
baver.
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Il a quelques emplois familiers, pour « indiscret » (1577) et « avocat » (1842-1843, en argot),
Cf. ci-dessus le baveux.
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BAVARDER v. intr. (1539) signifie « parler abondamment » et s'emploie avec la valeur péjorative de « commettre une indiscrétion » (1690). Il est usuel pour « échanger des propos sans grande importance », alors sans péjoration aucune.
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En sont issus BAVARDERIE n. f. (1574), BAVARDISE n. f. (1562), archaïques.
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Un autre dérivé, BAVARDAGE n. m. (1746), au double sens de « propos de bavard » et d'« action de bavarder » (1798), est courant.
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Bavard et ses dérivés forment un sous-ensemble autonome.
BAVOLET n. m. est composé (1556), parallèlement au moyen français bavoler « voler bas » et bavol « vol bas », de l'adverbe bas* et de l'ancien français volet « voile » et « partie flottante d'une coiffe » (déb. XIVe s.), dérivé de voler*.
❏
Le mot, attesté une fois au XVIe s. au sens de « drapeau » (en association avec bannière), désigne une coiffure de paysanne emboîtant la tête et ornée d'un volant (fin XVIe s.) d'où, par métonymie, ce volant.
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Il a servi à désigner le tablier de côté protégeant la carrosserie d'une voiture contre les éclaboussures, peut-être par influence de baver, bavure.
❏
BAVOLETTE n. f., « paysanne portant le bavolet » et, par extension, « paysanne » (1637) est dérivé de bavolet par l'intermédiaire d'une variante féminine employée, semble-t-il, comme nom de coiffure (XVIe s.). Il est sorti d'usage.
BAXTER n. m., nom déposé tiré d'un nom propre, s'emploie en français de Belgique et du Luxembourg pour « flacon de sérum pour perfusion », et, par extension, « perfusion » (être sous baxter).
BAYADÈRE n. f. et adj., d'abord écrit balhadera (1638) puis balliadère (1770) et bayadère (1782), est emprunté, d'abord par l'intermédiaire d'un texte néerlandais, au portugais balhadeira (1577), antérieurement bailhadeyra (1525) « danseuse professionnelle de l'Inde ». Ce mot est dérivé de balhar, forme dialectale de bailar « danser » (→ baller, à bal). Le mot français est à l'origine des correspondants dans les langues européennes : allemand Bajadere, anglais bayadere, italien baiadèra, espagnol bayadera.
❏
Le mot, introduit en français dans L'Histoire de la navigation de J. H. de Linschsten Hollandais aux Indes Orientales, désigne anciennement une danseuse indienne et, de nos jours, une danseuse sacrée de l'Inde. Par allusion au costume de ces danseuses, il s'emploie adjectivement en apposition à un nom d'étoffe ou de vêtement à larges rayures multicolores (XIXe s.).