BOSON n. m. est tiré du nom du physicien indien Satyendranath Bose, auteur d'une importante statistique du rayonnement (Bose-Einstein) et de la découverte de ces particules, et de l'élément -on.
❏  Le mot désigne (1958) une particule d'abord hypothétique, de spin entier ou nul (ex. les photons, les mésons M et K), régie par la statistique de Bose-Einstein.
BOSS n. m. est emprunté (1869 ; 1855 en français du Canada [emprunts indépendants]) à l'anglo-américain boss, antérieurement base (v. 1649), bass (1653), d'abord employé par les ouvriers en parlant de leur contremaître, puis généralisé à tous ceux qui emploient et donnent des ordres, également comme terme d'adresse (1839). Le mot est emprunté au néerlandais baas « maître », antérieurement « oncle », supposé être apparenté à l'allemand base « cousine » (de l'ancien haut allemand base « tante »). Le mot est d'abord argotique en anglais (1822).
❏  Boss a été utilisé en français pour parler d'un chef d'équipe d'atelier aux États-Unis et, par emprunt d'un autre sens, du chef d'un parti politique américain (1883).
■  Il semble ne s'être répandu que vers le milieu du XXe s. pour désigner plaisamment les patrons en général, sans se départir d'une connotation américaine (on dit fréquemment big boss « grand patron »). ◆  En français d'Haïti, boss désigne un artisan spécialisé, et s'emploie devant le nom d'un ouvrier (boss untel).
❏  Avec son sens politique, boss a donné BOSSISME n. m. (1917) qui ne s'est pas répandu. ◆  Un verbe 3 BOSSER, emprunté à l'anglais to boss, signifie en français québécois « diriger, commander ».
BOSSA NOVA n. f. est un emprunt au portugais brésilien, où l'expression signifie mot à mot « la nouvelle vague », de bossa « grosse vague » → bosse.
❏  L'expression désigne dans de nombreuses langues — en français au début des années 1960 — un style de musique brésilienne pour la danse.
L + 1 BOSSE n. f. est issu (v. 1160) d'un type latin populaire °bottia, postulé par l'italien boccia « bouton de fleur » et l'ancien provençal bossa « tumeur, renflement ». Lui-même est d'origine obscure : P. Guiraud propose de le rattacher avec d'autres mots (bot, 1 botte, 2 botte, boucher, bouchon, bouter, bouton, bouteille) à un radical bott- désignant des objets renflés. L'hypothèse d'un étymon francique °bottja « pousse », dérivé du francique °botan « frapper, battre » (→ bouter), semble à écarter, étant donné l'existence ancienne du roumain bot « boule », aucun mot germanique ancien (a fortiori francique) ne figurant dans le fonds lexical roumain. Quant à l'hypothèse d'une forme °buttia, en rapport avec le bas latin buttis désignant un récipient, elle n'est à retenir que pour le franco-provençal bosse « fût » et le terme d'artillerie désignant une grenade incendiaire constituée d'une boule de verre emplie de poudre (1694).
❏  Dès les premiers textes, le sens de base est celui de « déformation, protubérance », celle-ci étant constatée sur le corps humain, soit comme une gibbosité naturelle (1174-1184), soit comme une enflure accidentelle due à un choc (v. 1278). Ce dernier sens a donné quelques locutions figurées dont souhaiter plaies et bosses « être d'humeur batailleuse » (1679). ◆  Par extension, bosse se dit d'une saillie sur une surface plane (1409-1410), sens qui a suscité un certain nombre d'emplois spéciaux : en serrurerie (1409-1410), en architecture et sculpture (1558), donnant lieu aux dénominations ronde-bosse (d'abord bosse ronde, 1558) et demi-bosse (1579) qui n'est connue que des spécialistes. ◆  Bosse est repris en arts décoratifs (orfèvrerie), en termes de jeux (d'abord au jeu de paume) et de peinture, tous emplois répertoriés en 1690 par Furetière.
■  Le mot s'est aussi appliqué à une protubérance normale chez certains animaux, dromadaire (1690), chameau, zébu, cachalot.
■  Les protubérances du crâne, appelées bosses, sont, dans la théorie de Gall (déb. XIXe s.), liées à des aptitudes ; de là avoir la bosse de... « être doué pour ».
❏  Les principaux dérivés sont attestés avant la fin du XIIe siècle.
■  BOSSU, UE adj. et n. (v. 1170) qualifie et désigne (fin XIIIe s.) la personne qui a une bosse. Une relation entre les bossus et la chance, ainsi que la gaieté (Cf. se payer une bosse de rire), est établie dans le folklore, plusieurs locutions, par exemple rire comme un bossu, gai comme un bossu, s'y rattachent. ◆  Le mot qualifie moins souvent un animal ayant une bosse ; substantivé, il a désigné le lièvre (n. m.) et bossue (n. f.) la baleine, un certain coquillage, et il est encore plus rare appliqué à une chose déformée par des bosses (1231) ; de cet emploi vient un verbe dérivé. ◆  BOSSUER v. (1564) « déformer par des bosses », est d'usage technique ou littéraire. ◆  Il a lui-même pour dérivé BOSSUAGE n. m. (1852, Nerval).
■  Bossu a donné la formation argotique BOSCOT, OTTE ou BOSCO, OTE adj. et n. (av. 1800), de nos jours vieillie en français d'Europe, mais vivante en français acadien de Louisiane, ainsi que son dérivé créole BOSCOYO n. m., « personne contrefaite », et, par figure, « rejeton de cyprès ».
1 BOSSER v., d'abord attesté au participe passé adjectivé bocié (v. 1170), a changé sa désinence de -ier en -er et signifie proprement « présenter des bosses ».
■  Le sens argotique, puis familier de « travailler » (1878), s'explique peut-être comme une extension du sens de « se courber » attesté dans les dialectes de l'Ouest, par un développement « se courber sur un travail » d'où « travailler dur ». Cependant, un emprunt à un vocabulaire spécialisé, beaux-arts (ronde-bosse), marine (ci-dessous 2 bosser) ne sont pas exclus, mais il faudrait pour en juger connaître les conditions sociales de la diffusion du mot. Le sens propre de « faire des bosses à (qqn) » s'est conservé en français québécois, à côté de bosseler (bosser son pare-chocs, un pare-chocs tout bossé).
■  Au sens initial, le verbe a donné BOSSAGE n. m. (1627), terme technique de sens concret, en orfèvrerie, en menuiserie (1628) et en architecture (1640).
■  Avec le sens familier de « travailler », le verbe a servi à former BOSSEUR, EUSE n. et adj. (1908) « gros travailleur ».
BOSSELER v. tr. (1170-1191), autre verbe dérivé de bosse avec le suffixe -eler, rend compte du fait de déformer accidentellement par des bosses et de travailler, de sculpter en bosse (av. 1643).
■  Ses dérivés, surtout techniques, participent essentiellement du second sens, que ce soit BOSSELURE n. f. (v. 1560, en orfèvrerie), BOSSELAGE n. m. (1718) ou BOSSELLEMENT n. m. (1822).
■  BOSSELARD n. m. (1880), ancien terme d'argot pour le chapeau haut-de-forme, fait probablement allusion aux bosses que peut recevoir ce genre de coiffe ; il pourrait venir de bosseler par croisement avec bosco « haut-de-forme » (1861), également attesté au sens de « shako » (1869), et lui-même à rapprocher de boisseau* qui désignait ces mêmes coiffures en argot. L'étymologie de ce mot fait supposer une extension de sens de boscot « bossu » ou, de manière plus aventureuse, une déformation dialectale de boisseau (Centre, Ouest).
DÉBOSSELER v. tr., préfixé de bosseler, s'emploie (1807) pour « supprimer les bosses de (une surface métallique) ». D'où DÉBOSSELAGE n. m., nom de l'opération, et DÉBOSSELEUR, EUSE n., attesté en 1982 en français du Canada, pour « spécialiste de la réparation des carrosseries d'automobile » (là où on emploie carrossier, tôlier en français de France).
1 BOSSETTE n. f., diminutif de bosse (v. 1195), « petite bosse » et (1352) « ornement en ronde-bosse », semble sorti d'usage après 1611 pour être repris au XIXe s. avec une spécialisation technique, désignant également un clou d'ornement à tête ouvragée employé en tapisserie et en ébénisterie.
■  Son dérivé, le nom d'ouvrier BOSSETIER n. m. (1488), employé à propos d'un cloutier et d'un verrier soufflant le verre en bosse, n'a pas été repris.
■  BOSSOIR n. m. (1678), autre dérivé de bosse désignant la pièce saillante placée à la proue d'un navire pour manœuvrer l'ancre, a donné par analogie un nom argotique des seins (bossoirs, 1831), sorti d'usage.
2 BOSSE n. f. (1516), d'origine incertaine, semble se rattacher à 1 bosse* par allusion à la forme des nœuds. C'est un terme technique de marine désignant le cordage utilisé pour saisir solidement qqch.
■  Il a pour dérivé 2 BOSSER v. tr. (1516) « fixer, retenir (qqch.) avec des bosses et, par extension, des chaînes ».
EMBOSSER v. tr. (1752), « maintenir (un bateau) à l'ancre » au moyen de câbles et d'ancres, s'emploie aussi au pronominal s'embosser (1770), par extension « s'installer dans une position stable », au concret (1870) et à l'abstrait (déb. XXe s.), emploi vieilli.
■  Le dérivé EMBOSSAGE n. m. (1792) se limite à l'usage technique de marine.
❏ voir BOSSA NOVA, CABOCHE, CABOSSER.
2 BOSSETTE n. f. est emprunté à un mot dialectal (boussette à Genève, bosèta), de bosa « tonneau ». Attesté en latin médiéval (bosseto, 1376) et en français (1592 à Lausanne), le mot a désigné un grand tonneau servant à transporter le raisin récolté vers le pressoir. Il est archaïque dès le début du XXe siècle.
BOSTON n. m., attesté depuis 1800, précédé par wisk bostonien (1785), est tiré de Boston, nom de la ville américaine qui donna son nom à un jeu de cartes pendant le siège par les Anglais lors de la guerre d'Indépendance (1775-1776).
❏  Le nom du jeu, proche du whist, est attesté plus tôt en français qu'en anglais.
■  Le mot désigne aussi une danse, sorte de valse lente, et sa musique, en vogue au début du XXe siècle.
❏  Boston a produit BOSTONNER v. intr. (1837), « jouer au boston », emploi sorti d'usage avec le jeu, puis « danser le boston ».
? BOT, BOTE adj. (1165-1170), est d'origine incertaine, probablement apparenté au francique bó̩t « crapaud » (av. 1105). Les sens de « gros, émoussé » et « animal gros et court » se retrouvent dans d'autres langues romanes, et d'autre part la notion de « court, émoussé », est relevée dans diverses langues germaniques. Ces faits suggèrent à Wartburg l'hypothèse d'un étymon germanique bŭtt « émoussé ». Cette hypothèse se heurte toutefois à la difficulté pour expliquer les formes françaises à partir du ŭ et au caractère contestable du sens attribué au germanique en raison de l'apparition tardive du mot français de même sens, l'adjectif bot « mal arrondi » (1611). Certains attribuent à l'ensemble de ces mots une origine onomatopéique, mais il serait étonnant que des formations expressives similaires se soient produites dans des aires si éloignées. L'hypothèse d'une racine °bǫ́tt d'origine inconnue ne fait que reporter la difficulté.
❏  Le mot est attesté une première fois dans le dernier tiers du XIIe s., avec un sens incertain, soit « personne qui a le pied bot », soit « nabot », selon les éditions des manuscrits. Il est repris à partir de 1552, essentiellement dans pied bot.
❏ voir 1 BOTTE, CABOTIN, SABOT ; RABOT.
BOTANIQUE adj. et n. f. est emprunté tardivement (1611) au grec botanikos « qui concerne les plantes, les herbes », employé au féminin dans la dénomination botanikê paradosis (Dioscoride) à propos de la science des plantes. Le mot, très lié à la médecine, qualifie aussi comme nom masculin le médecin qui traite par les plantes ainsi que le remède à base de plantes. Il est dérivé de botanê dans son sens générique de « plante ». Botanê, à l'origine, désigne la plante dans sa vocation nourricière, l'herbe à paître, le fourrage, à la différence de phuton qui a donné l'élément savant phyto-*. Il est dérivé de boton, « bête d'un troupeau », qui appartient lui-même à la famille de boskein, « faire paître, nourrir (des animaux) », par extension « nourrir ». Ce mot assez obscur a été rapproché du lituanien gúotas « troupeau », dans un groupe qui pourrait peut-être intégrer le nom du bœuf, bous (→ boulimie). Le développement du mot en grec, la date relativement tardive de l'emprunt par le français, reflètent le lent dégagement du concept scientifique moderne : l'orientation médicale, voire agronomique du concept chez les Anciens a été prolongée au moyen âge par les Arabes, les Byzantins et les Occidentaux. Ce n'est qu'à la Renaissance avec le renouveau des études classiques et, surtout, la découverte de nouvelles espèces végétales par les voyageurs, que la science en gestation commence lentement à émerger.
❏  L'adjectif qualifie ce qui se rapporte aux végétaux et à leur étude ; le nom, enregistré par Richelet (1680), désigne la science ayant pour objet l'étude des végétaux. La mutation de la définition de cette science des plantes, longtemps considérée comme une partie de la médecine et de la pharmacie (de même que zoologie apparaît d'abord en pharmacologie), intervient dans la seconde moitié du XVIIIe s., à la suite des encyclopédistes et des travaux du grand botaniste suédois Linné. De classificatrice, la botanique après Lamarck, de Candolle, etc. est devenue l'étude des organismes végétaux, partie essentielle de la biologie à côté de la zoologie (mot encore plus tardif).
❏  Botanique a produit BOTANISTE n. (1676, Journal des Savants), dont le sens reste articulé sur botanique n. f., BOTANISER v. intr. (1801), synonyme moins courant d'herboriser, et BOTANIQUEMENT adv. (1816, de Candolle).
■  BOTANOPHILE adj. et n., introduit par Rousseau (1773, Lettres sur la botanique) est sorti d'usage.
? 1 BOTTE n. f., d'abord bote (fin XIIe s.), graphie encore attestée en 1680, puis botte (XVIe s.), est d'origine inconnue. L'hypothèse la plus communément admise est celle d'une formation sur le radical de bot*. Elle est appuyée par le fait que le mot désigne en ancien français une chaussure haute, grossière, couvrant une partie de la jambe, semble-t-il portée par les moines. Selon P. Guiraud, le mot conjuguerait les deux valeurs du radical bott- : « gonflé, émoussé » et « tronqué ». Désignant une chaussure haute, le mot a pris la place de l'ancien français huese (→ houseau), d'origine germanique ; les Romains, d'ailleurs, ne connaissaient pas de chaussure de ce type.
❏  Nom d'une chaussure montante dont la coupe a évolué selon les coutumes et les usages (botte militaire, de cheval, de chasse, d'égoutier, etc.), le mot entre dans de nombreuses locutions : après l'ancien français qui jurait par ses bottes (Renart), le XVIe et le XVIIe s. ont apporté y laisser ses bottes : « être tué » (1584), expression militaire disparue ; sont encore comprises et citées, encore qu'archaïques, à propos de bottes « sans à propos » (1636), graisser ses bottes « se préparer à partir ou à mourir » (1690). ◆  Le vocabulaire du manège a fourni les locutions aller à la botte (1680) et serrer la botte (1835), dans lesquelles botte est pris par métonymie pour « jambe du cavalier » ; la première est passée dans l'usage avec le sens figuré d'« être facilement mordant » (1718). Lécher* les bottes (de, à qqn) exprime la servilité (ci-dessous lèche-bottes). Les bottes de sept lieues du Chat botté (XVIIe s., Perrault) furent un symbole de vitesse. ◆  En français québécois, le mot peut désigner une chaussure, même basse (botte de marche, botte d'hiver).
■  Botte a eu le sens de « personne très petite » (1798) d'après haut comme une botte, comme trois bottes.
■  Avec la valeur métonymique de « pied chaussé d'une botte », botte est entré dans la locution coup de botte spécialement employée en sports (Cf. botter), et dans des locutions du type être sous la botte de, à la botte de, allusion aux bottes militaires, décrivant une situation de pouvoir oppressant. Bruit de bottes, allusion aux militaires bottés, correspond à « risque de guerre ». En avoir plein les bottes, être fatigué par une longue marche, a pris au figuré (1907, Henri France) la valeur de « en avoir assez ». Être droit dans ses bottes signifie « avoir du courage, de la détermination » et vient sans doute du milieu de l'équitation.
■  Par analogie d'aspect avec tel ou tel caractère de la botte, le mot a désigné en vénerie un étui allongé pour le fusil (1680), puis le large collier de cuir d'un limier et, en chirurgie, une gaine protégeant un membre fracturé.
❏  Le dérivé BOTTER v. tr. est attesté une fois en ancien français (av. 1225) puis en 1539, et ne s'est pas maintenu au sens de « chausser » en général. L'acception « fabriquer, vendre des bottes » (1690) a disparu aussi ; celle de « mettre des bottes » est surtout réalisée à la forme pronominale se botter (1694). ◆  Le sens « épouser la forme du pied », en parlant d'une botte (1866) est à l'origine de l'emploi figuré et familier pour « convenir, plaire » (1856), notamment dans ça me botte. ◆  L'idée de « donner un coup de pied », attestée tardivement (1867), est surtout réalisée dans les sports de ballon (1906) concurrencée par l'anglicisme shooter, et dans le contexte du coup de pied : botter les fesses, le cul, le train à, de qqn. ◆  Par extension, le verbe s'emploie en français d'Afrique pour « frapper, maltraiter physiquement » (il s'est fait botter). ◆  Le verbe s'emploie aussi intransitivement pour « mettre, emporter de la boue, de la neige à ses pieds » (autrefois à la forme pronominale, 1690) et, par métonymie, « être de nature à adhérer aux jambes » (1798).
■  BOTTÉ, ÉE, le participe passé, est adjectivé (XVIe s.) avec le sens de « chaussé de bottes ». De là, par exemple, le nom du personnage de conte de fées popularisé par Perrault, Le Chat botté, et la locution familière et vieillie avoir l'air d'un singe botté « être mal à l'aise » (1798). ◆  Avec le sens de « qui est frappé », il est substantivé en sports où il sert à apprécier la manière de botter d'un joueur (1908).
■  C'est encore en sports qu'il a donné BOTTEUR n. m. (1924, rugby).
BOTTINE n. f. (1367) a désigné autrefois une petite botte de cuir ou de tissu, avant de céder ce sens à botillon et de s'appliquer à une chaussure montante fermée par des boutons (1870). Il s'emploie en orthopédie à propos d'un genre spécial de botte courte à courroies (1814). ◆  En français québécois, le mot entre dans des expressions figurées, comme esprit de bottine « humour épais, grossier », avoir les deux pieds dans la même bottine « être empoté » (comme en France, dans le même sabot), patiner sur la bottine « marcher mal, maladroitement ».
■  BOTTINER v. tr. (v. 1950), mot familier pour « demander de l'argent avec insistance », n'est pas bien expliqué ; ce pourrait être le diminutif de botter au sens de « frapper » par équivalence synonymique avec taper. Plus vraisemblable est une dérivation de coup de bottine, lui-même issu de coup de botte « demande d'argent » (1953, Esnault, qui le rattache à pousser la botte [1828] où il s'agirait de 3 botte).
1 BOTTIER, IÈRE n. m. et adj., après une attestation isolée fin XVe s., a été reformé au XVIIIe s. (1751), désignant le fabricant et marchand de bottes et de bottines. Ce sens spécifique s'est perdu au profit du sens plus général de « chausseur sur mesure » (1909), le mot étant adjectivé comme terme de cordonnerie pour qualifier un type de talon.
1 BOTILLON n. m. (1863) semble avoir désigné une sorte de bottine avant de se dire d'une petite botte s'arrêtant au-dessus de la cheville (1894).
DÉBOTTER v. tr., étant donné la date précoce de son attestation (fin XIIe s.), n'est probablement pas le dérivé préfixé de botter, mais celui de botte. D'après le sens de « retirer les bottes », son participe passé débotté a été substantivé. ◆  DÉBOTTÉ n. m. désigne historiquement le moment où le roi retirait ses bottes et sert à former la locution moderne au débotté (1701) « au moment où l'on arrive », d'où « à l'improviste ».
TIRE-BOTTES n. m. (1690) désigne un instrument pour mettre les bottes et aussi une planchette aidant à se débotter.
■  LÈCHE-BOTTES n., mot familier dit par péjoration de celui qui flatte une personne (1901), correspond à la locution lécher les bottes à qqn.
■  DEMI-BOTTE n. f. (1820) désigne une botte à tige plus basse.
L'anglicisme BOOTS n. m. pl. (1966) concurrence bottillon pour désigner, non des bottes courtes, mais des chaussures de ville montantes sans laçage.
❏ voir 2 BOTTE, SABOT, SNOW-BOOT.
2 BOTTE n. f. est emprunté (XIIe s.) au moyen néerlandais bote, « touffe, gerbe de lin », à rattacher au verbe néerlandais boten « battre », l'idée de base étant celle d'une quantité de végétaux battue par le fléau et liée ensemble. L'étymon bas allemand bôte est moins probable, étant donné la rareté des emprunts du français à cette langue et l'aire géographique des premières attestations (domaine picard). Le verbe néerlandais se rattache à un groupe germanique qui a donné au français bouter*.
❏  Le mot, d'abord employé au figuré avec le sens de « part, paquet », désigne surtout un assemblage de végétaux de même nature dont les tiges sont liées ensemble. Par extension, il est employé à propos d'une certaine quantité d'écheveaux (soie, chanvre) assemblés et liés (1316). ◆  Le pluriel bottes a pris le sens général de « grande quantité (de qqch.) » (XVIe s.), acception vieillie en dehors de la locution (il n'y en a) pas des bottes « pas beaucoup ».
■  L'emploi spécial du mot dans l'argot de Polytechnique, à propos des élèves sortis dans les premiers rangs et pouvant bénéficier des carrières les plus prisées (1860), vient peut-être de ce que ces élèves formaient un ensemble, un paquet ; cependant, selon certains (dont Esnault), cet emploi se rattacherait à 1 botte, d'après l'emploi de ce mot, vers 1840-1870, pour désigner la chaussure mondaine des bals et soirées par opposition à la pantoufle, symbole de la vie bourgeoise moins « vernie ». Ce double motif serait activé dans l'opposition des deux mots à l'X (Cf. aussi pantoufler) ; la botte serait alors le groupe valorisé, d'où être dans la botte ; cette explication semble moins vraisemblable que la première. ◆  Par extension, botte a désigné l'ensemble des deux majors et des deux « fourriers » d'une promotion de Polytechnique (1894).
❏  BOTTELETTE n. f., d'abord boteleite (1268) puis bottelette (1399) « petite botte », a cessé d'être attesté entre 1412 et 1838 ; il est peu employé.
BOTTELER v. tr., d'abord boteler (1328), est dérivé de botte par l'intermédiaire de son ancien diminutif botel, boteau « petite botte » (v. 1382). ◆  Le verbe, terme d'agriculture exprimant l'action de lier en bottes, a produit quelques dérivés d'usage technique tels BOTTELAGE n. m. (1351), BOTTELEUR, EUSE n. (1391) et, formés en français moderne, BOTTELOIR n. m. (1838), BOTTELEUSE n. f. (1897).
■  Le dérivé verbal EMBOTTELER v. tr. (1600), « mettre en bottes », fait double usage avec botteler.
2 BOTTILLON n. m. (1838) est employé en agriculture avec le même sens que bottelette.
■  BOTTELÉE n. f. (1869) désigne un ensemble de végétaux liés en bottes et, par extension, une grande quantité d'objets divers, tout comme BOTTÉE n. f. (1910), encore plus tardif.
■  2 BOTTIER n. m. (1894) procède de botte comme terme d'argot de Polytechnique pour désigner l'élève qui sort dans la botte.
❏ voir 3 BOTTE.
3 BOTTE n. f., terme d'escrime (1590), est emprunté à l'italien botta, « coup » (fin XVe s.), qui peut être considéré comme le déverbal de l'ancien italien bottare « frapper, secouer, battre » (1200-1300). Ce mot, peu attesté toutefois dans les textes littéraires, est emprunté à l'ancien français boter, devenu bouter*.
❏  Le mot désigne un coup porté à l'adversaire avec le fleuret ou l'épée ; il est courant dans des syntagmes comme botte secrète (aussi au figuré), porter une, la botte. Il s'est répandu dans l'usage courant avec le sens figuré d'« attaque vive et imprévue » (1690). ◆  Pousser la botte a signifié en argot « demander de l'argent » ; de là peut-être bottiner (→ 1 botte).
❏ voir 2 BOTTE.
BOTTIN n. m. est l'emploi comme nom commun (1867) du nom de Sébastien Bottin (1754-1853), administrateur et statisticien français, ancien moine devenu secrétaire général de préfecture sous la Révolution, et à qui l'on doit les premiers répertoires professionnels (Annuaire statistique du Bas-Rhin en 1797, poursuite de l'Almanach du Commerce de Paris de 1819 à 1853).
❏  Le mot désigne un répertoire donnant des listes de noms classés par professions et habitats ; le « Bottin » initial était divisé en trois parties : Paris, Départements, Étranger. Par extension, le mot s'applique à un annuaire concernant une catégorie sociale, par exemple dans bottin mondain. Le mot est déposé comme marque et c'est par abus qu'on l'emploie pour « annuaire des abonnés au téléphone ».
BOTULISME n. m. est dérivé savamment (1879) du radical du latin impérial botulus « boudin » (→ boyau), le germe de cette intoxication se développant dans les intestins. Le mot, attesté en anglais en 1878, serait un emprunt à l'allemand Botulismus, formé en latin scientifique.
❏  Botulisme désigne une intoxication alimentaire due à un microbe anaérobie qui se développe dans les charcuteries ou viandes avariées et les conserves mal stérilisées.
❏  BOTULIQUE adj. (1878), tiré de botulisme, et BOTULINIQUE adj. du latin scientifique bacillus botulinus, qualifient le bacille du botulisme.
BOUBOU n. m. est emprunté (1867) au malinké, forme du mandingue, langue nigéro-sénégalaise (groupe du Centre) où bubu désigne un singe et, par métonymie, sa peau.
❏  Le mot désigne un vêtement traditionnel africain, long et ample, porté par les hommes et parfois par les femmes. Il est très courant en français d'Afrique, avec plusieurs nuances, soit pour la tunique longue, soit pour le vêtement court et ample porté par les hommes sur un pantalon. Grand boubou : boubou de cérémonie. Boubou basin*. Voir aussi caftan.
G + BOUC n. m., d'abord buc (v. 1120), également boc, bou en ancien français, est probablement issu d'un gaulois °bucco que l'on déduit des langues celtiques : irlandais bocc, cymrique (gallois) bwch, breton bouc'h. Cette étymologie est appuyée par l'aire géographique du mot : Gaule, nord de l'Espagne et de l'Italie actuelle ; on le trouve en effet dans l'ancien provençal boc, l'ancien catalan boch (1249), l'aragonais boque, l'italien septentrional bucco, le suisse romand dialectal bouk, bok. Elle est aussi appuyée par l'origine celtique de noms de mâles d'animaux domestiques tels que mouton et la disparition complète en gallo-roman du masculin latin caper dont le féminin capra a donné chèvre*. Il n'est pas impossible que le gallo-roman °buccus, latin médiéval buccus (VIe s.), ait ultérieurement bénéficié de l'influence du francique °buk, de même sens, avec lequel il se serait confondu.
❏  Le mot, attesté au XIIe s. à la fois dans un psautier et dans un bestiaire (v. 1121), désigne le mâle de la chèvre ; il développe dès le moyen français des valeurs figurées péjoratives, comme injure et comme désignation du mari trompé, où le folklore rejoint la tradition chrétienne.
■  Par référence au rite du Lévitique (XVI) selon lequel, chaque année, la communauté d'Israël transférait symboliquement ses impuretés sur un bouc qui était lâché dans le désert, la locution bouc émissaire (du latin caper emissarius) est employée dans le langage religieux (1690). Par extension, elle s'est étendue à propos d'une personne sur laquelle on fait retomber les fautes des autres (av. 1755) ; ultérieurement, elle a fourni aux ethnologues et d'abord à Frazer (1918) le concept désignant l'ensemble des rites d'expiation dont use une communauté.
■  Le syntagme barbe de bouc (1690) a été abrégé en bouc (1881) pour « barbe taillée en pointe » et a été substantivé en barbe-de-bouc, nom populaire d'une plante, espèce de spirée.
❏  1 BOUQUET n. m., diminutif de bouc (v. 1121) est l'ancien nom du petit bouc repris par analogie en vénerie à propos du lapin mâle (1701). ◆  Par allusion aux « barbes » de l'animal, il fournit le nom d'une grosse crevette rose (1859), sens avec lequel il a produit BOUQUETON n. m., nom régional d'un filet pour pêcher ces crevettes.
Le second dérivé de bouc est aujourd'hui complètement démotivé.
■  1 BOUCHER, ÈRE n., d'abord bochier (1180-1190) puis bouchier (fin XIIe s. au féminin bouchiere), boucier (v. 1270), est en effet dérivé de bouc avec le suffixe -ier réduit ultérieurement à -er à cause de la palatale ch-. Cette dérivation, contestée par P. Guiraud, semble pourtant confirmée par la comparaison du bas latin °buccarius (buchariorium en 990) et de l'italien beccàio de même sens, dérivé de bécco « bouc », le rôle de ce personnage étant proprement, à l'origine, d'abattre le bouc. Une hypothèse selon laquelle °buccarius serait un croisement de bucola, adaptation du grec bouthutês « qui immole les bœufs » d'après le latin sacricola « prêtre qui assiste au sacrifice », et de macellarius « boucher », ne repose pas sur des bases solides. ◆  Reste que le bouc et en général les caprins ne constituent pas une base de nourriture carnée durant le haut moyen âge. Le sens de « personne chargée de tuer les animaux destinés à la consommation » a donné celui de « marchand de viande » (v. 1220) de par la réunion de ces deux tâches avant le XIXe s. (Cf. ci-dessous boucherie). ◆  Dès l'ancien français, le mot a pris le sens figuré de « bourreau » (v. 1270), et, depuis l'époque classique, s'est dit d'un chirurgien maladroit (1668, La Fontaine), sens à peu près sortis d'usage. Le mot s'emploie encore pour « homme cruel et sanguinaire » (1616).
■  BOUCHERIE n. f. (v. 1220, boucerie) désignait le lieu où l'on abattait les animaux destinés à l'alimentation (v. 1268) ; ce sens, glosé comme « impropre » par Nicot qui préconise tuerie (1606) a disparu au profit d'abattoir*, mot récent. ◆  Boucherie ne désigne plus que le lieu où l'on vend la viande des bestiaux (v. 1220), avec une distinction progressive entre boucherie, charcuterie, volailler, qui spécialise le mot pour les viandes de bovins et de mouton, avec une extension pour boucherie chevaline. Un usage régional, en Suisse et au Canada, donne au mot la valeur active de « fait d'abattre, de dépecer et de traiter un animal d'élevage pour la consommation » (1764). Ce sens s'est spécialisé en français de Suisse à propos de l'abattage du porc à la ferme (faire boucherie). Ces emplois existent aussi dans l'ouest de la France et sont passés au Canada. On peut penser à un emploi rural de tout le français d'Europe, conservé à l'ouest et dans le centre-est de la France. ◆  Par figure du sens initial du mot, il signifie « carnage, massacre » (1414).
■  BOUCHOYER v. tr. (1561) se dit en Franche-Comté, en Suisse, pour « dépecer (un porc) et en préparer la viande ».
■  BOUCHOYADE n. f., spécialisé en Suisse à propos du porc, coexiste avec BOUCHOYAGE n. m., le premier désignant la viande fraîche de porc, le second l'abattage.
■  2 BOUCHER, ÈRE adj. (1941) fournit récemment un adjectif concurrent de la locution de boucherie, par exemple dans viande bouchère.
1 BOUQUIN n. m., d'abord boucquin en emploi adjectif (1544), n'est plus guère utilisé comme nom du vieux bouc.
■  En est dérivé 1 BOUQUINER v. intr. recueilli par Cotgrave au sens ancien d'« avoir des mœurs de bouc » et employé de nos jours en parlant du mâle de la chèvre, de la lapine, qui couvre la femelle (1655), avec le nom correspondant BOUQUINAGE n. m. (1700).
■  BOUCAGE n. m., terme de botanique désignant une plante de la famille des Ombellifères (1701), doit sa dénomination à son odeur forte.
■  BOUCAUD ou BOUCOT n. m., par le même cheminement sémantique que crevette (« chevrette »), s'emploie régionalement pour « crevette grise » (XXe s.).
■  La variante diminutive 2 BOUQUET n. m. (1751) est entrée dans l'usage courant pour désigner de grosses crevettes roses très appréciées. ◆  Boucaud et bouquet « petit bouc » sont parallèles à crevette « petite chèvre », mais tout aussi démotivés.
❏ voir BOQUER, 2 BOUCAN, BOUQUETIN.
1 BOUCAN n. m. est emprunté (1578) au tupi mokaém, « gril de bois », par une variante, bokaem, p, m et b alternant souvent à l'initiale en tupi et en guarani, et la seconde syllabe de ce mot se prononçant de façon nasalisée.
❏  Ce terme de voyage désigne le gril sur lequel les Indiens d'Amérique décrits par J. de Léry (Histoire d'un voyage fait en la terre du Brésil) et ceux des îles Caraïbes (1666, Dictionnaire français-caraïbe) fument les viandes et les poissons. Par métonymie, il a désigné la cabane dans laquelle on procédait à cette opération (1666) et la viande ou le poisson fumés, et par extension, une cabane en branchages. ◆  Probablement d'après le dérivé boucaner, il a désigné un pâté de tortue cuit sous la braise (boucan de tortue, 1722). ◆  En français de Nouvelle-Calédonie, le mot s'emploie pour « maléfice, poison », dans le contexte de la sorcellerie kanak. L'antidote s'appelle CONTREBOUCAN n. m.
❏  Le dérivé 1 BOUCANER v. (1575) signifie d'abord « fumer (de la viande, du poisson) sur un boucan ». ◆  Par extension, il est employé avec le sens de « dessécher et colorer la peau » en peausserie et dans l'usage général. Par métonymie, il signifie « aller à la chasse aux bêtes sauvages pour en avoir la viande et la fumer ». ◆  D'après boucanier (ci-dessous), il a pris la valeur générale de « mener la vie de ces aventuriers ». En français de Nouvelle-Calédonie, comme intransitif, « sentir mauvais, puer ». ◆  Au Québec, « dégager de la fumée ou de la vapeur ».
■  Outre le participe passé BOUCANÉ, ÉE employé adjectivement au propre (XVIe s.) et au figuré pour « hâlé, desséché », boucaner a produit BOUCANERIE n. f. (1578) « lieu où l'on boucane la viande » et BOUCANAGE n. m., rares sauf dans des contextes spéciaux.
■  Un autre dérivé de boucan, BOUCANIER n. m. (1654), se disait des aventuriers coureurs de bois de Saint-Domingue qui chassaient les bœufs sauvages pour en boucaner la viande. Par extension, et peut-être sous l'influence de boucaner « faire le bouc » (→ 2 boucan), le mot s'est appliqué aux pirates qui au XVIIe s. écumaient les mers de l'Amérique et des Antilles ainsi qu'à leurs bateaux.
■  BOUCANE n. f. (1777) est en usage en français du Canada, de Louisiane, pour « fumée », et aussi « vapeur d'eau », « brouillard » (en Louisiane).
? 2 BOUCAN n. m., attesté relativement tard (v. 1624), est d'origine douteuse. C'est peut-être le déverbal d'un ancien verbe boucaner « imiter le bouc », verbe attesté de 1549 à 1663, qui eut également au XVIIIe s., le sens de « fréquenter les mauvais lieux » (1701, Furetière). Ce verbe est lui-même dérivé de bouc*, peut-être par l'intermédiaire d'un dialectal boucan, « bouc », attesté dans l'Allier, le Puy-de-Dôme, la Creuse. Cette étymologie, proposée par Wartburg, est la plus vraisemblable, le bouc étant souvent pris comme le symbole de la débauche. Une évolution sémantique à l'intérieur du français, à partir de 1 boucan* « gril à fumer la viande », par le sens de « cabane où l'on fait fumer la viande », ne tient pas compte du verbe boucaner. Elle est soutenue par P. Guiraud qui rattache boucan pour le sens à bordel, taule, cabane, mots désignant de petites maisons rustiques faisant office de mauvais lieu. ◆  Enfin, l'hypothèse faisant remonter boucan au latin Vulcanus « Vulcain » par l'intermédiaire de l'ancien français boucan « enfer », emprunt à l'italien Bulcano, forme semi-populaire de Vulcano (→ volcan), manque de fondement.
❏  Le sens du mot est passé de « lieu de débauche » à « vacarme » (1797), les lieux de débauche étant souvent bruyants (Cf. les sens figurés de bordel).
❏  2 BOUCANER v. tr. (1808) « faire du tapage à propos de qqch. » est argotique puis familier ; il prolonge l'ancien verbe boucaner.
■  Le féminin BOUCANIÈRE n. f. (av. 1741) signifiait « prostituée » au XVIIIe siècle.
L BOUCHE n. f., d'abord buce (v. 1050), puis boche (v. 1150), est issu du latin bucca « bouche » et, au pluriel, « joues, mâchoires ». Ce mot, d'origine celtique et sans correspondants hors du latin, s'est substitué dans la langue populaire à gena « joue », sens du roumain bucă, et surtout à os « bouche » (→ oral). Cette substitution a aussi donné naissance à l'italien bocca, à l'espagnol et à l'ancien provençal boca ; elle est due à l'expressivité du mot (Cf. ancien français bec* « bouche ») plutôt qu'à un effet de l'homonymie : os, oris « visage » a en effet disparu dès l'époque préromane.
❏  Le sens de « cavité buccale (chez l'homme et chez certains animaux) », qui est le sens de base, a donné une phraséologie abondante dans laquelle bouche renvoie surtout à la bouche comme siège du goût et organe de la parole. À côté de locutions sorties d'usage, comme être fort en bouche employée à propos d'un cheval qui n'obéit pas au mors, puis au figuré, bonne bouche, qui signifiait au XVIe s. « bon propos », a été absorbé par la locution garder pour la bonne bouche « pour être mangé, savouré » ou encore « pour être dit en dernier » (1578, pour faire la bonne bouche). Mettre en bouche, mise en bouche, se disent, comme amuse-bouche, d'un hors-d'œuvre appétissant, et au figuré, de ce qui met en appétit, donne une envie. Faire la petite bouche reste usuel pour « considérer avec mépris ». En 1690, Furetière répertorie bouche cousue « sans parler » et Saint Jean bouche d'or, d'abord péjoratif pour « indiscret », puis « personne au franc-parler ». Bouche, dans à bouche que veux-tu, exprime la profusion (1649) dans des expressions comme vivre, embrasser à bouche que veux-tu. L'expression de bouche à oreille, d'une confidence faite sans intermédiaire, a produit le composé BOUCHE À OREILLE n. m. « transmission directe (d'informations, de rumeurs), sans intermédiaire technique ». ◆  De toutes les extensions métonymiques de bouche, seul le sens de « personne à nourrir » (1660 ; bouches inutiles, mil. XVIIe s.) a subsisté (avoir plusieurs bouches à nourrir).
■  Par analogie, le mot désigne dès le XIIe s. l'orifice d'une cavité (v. 1150), spécialement l'embouchure d'un fleuve (fin XIIe s.), puis l'orifice d'une pièce d'artillerie (1690). Divers syntagmes, comme bouche d'égout, correspondent à cet emploi.
❏  BOUCHÉE n. f., réfection de buchiee (v. 1120), désigne la quantité d'aliments que l'on met dans la bouche en une fois, sens dont procèdent les locutions figurées n'en faire qu'une bouchée (1690), pour une bouchée de pain « pour une somme infime », mettre les bouchées doubles « redoubler d'efforts ». En français québécois prendre une bouchée « manger rapidement » (en France, manger un morceau). ◆  Par métonymie, il désigne diverses pâtisseries originellement de petite taille, par exemple dans bouchée des dames (1810), disparu, puis bouchée à la reine (1808) « petit vol-au-vent ».
■  BOUCHETTE n. f., d'abord bochete (1160) « petite bouche mignonne », est sorti d'usage, après avoir été en vogue au XVIe siècle. BOUCHIÈRE n. f. « croûte ou gerçure aux lèvres » continue en français de Suisse (1790) le moyen français bouchiere « éruption de boutons autour de la bouche ». Il a des variantes régionales en France (boucharde, bouchure, etc.) de la région de Lyon à la Suisse.
■  BOUCHE-À-BOUCHE n. m. a été employé en ancien français sous la forme adverbiale bouce a bouce « bouche contre bouche » (1150-1200), et, par traduction du latin ore ad os, au sens de « face à face » (av. 1174). ◆  Il a été repris récemment comme substantif pour désigner un procédé de respiration artificielle (1956).
■  ARRIÈRE-BOUCHE n. f. (1805) s'emploie en anatomie et en physiologie.
■  À BOUCHETON loc. adv. est dérivé (1418) de la locution à bouchons par intercalation de l'infixe -et- (Cf. à croupetons). Cette locution venait de bouche au sens de « le visage, la bouche contre terre » (XIIIe s.). La locution est encore en usage dans les dialectes bourguignon et champenois pour « à plat ventre » et, en français même, dans le vocabulaire technique de la céramique en parlant de pièces creuses posées l'une sur l'autre par leurs bords (1852) ; Cf. aboucher, ci-dessous.
ABOUCHER v. tr., d'abord abocher (XIIIe s.), s'est employé au pronominal pour « se prosterner bouche contre terre, approcher la bouche, le visage, se pencher en avant », ceci jusqu'au début du XVIIe siècle. Employé une fois dans un contexte guerrier au sens de « se rencontrer pour un combat » (apr. 1225), le verbe actif est passé au sens de « mettre en rapport, provoquer une entrevue » (XVIIe s.) et le pronominal s'aboucher au sens de « s'entretenir » (XVIe s.), qui a pris une valeur péjorative au XXe siècle. ◆  Le sens de « faire communiquer bouche contre bouche », attesté dans le dictionnaire d'ancien français de Godefroy mais sans datation, a été repris au XVIIe s. dans le vocabulaire technique, en anatomie (1680) et en arts et métiers à propos de tuyaux (1690). ◆  La valeur figurée d'« aboutir, déboucher », attestée une fois à la fin du XIVe s., est reprise au XXe s. par effet stylistique.
■  Le dérivé ABOUCHEMENT n. m. (XVIe s.) correspond au verbe : son sens figuré, « entretien, face à face », est devenu péjoratif dans l'usage moderne où il est littéraire et rare. ◆  Le sens propre de « jonction bouche à bouche » est attesté en anatomie (1680) et en termes de métier (1835).
■  ABOUCHEUR n. m. (1860) semble un néologisme péjoratif risqué par les Goncourt en parlant d'un homme qui met en rapport des personnes afin de conclure une affaire.
1 EMBOUCHER v. tr. est d'abord attesté au participe passé emboukié qualifiant un blé de qualité inférieure ou détérioré. Le verbe actif (1273) a eu en moyen français le sens figuré d'« endoctriner » (av. 1493). ◆  Il prend sa valeur moderne vers le milieu du XVIe s. : il signifie alors « mettre à la bouche l'extrémité de (un instrument à vent) » et en termes de manège « mettre le mors à sa monture » (av. 1559). ◆  D'après un des sens analogiques de bouche, il s'emploie aussi pour « pénétrer dans la bouche d'un fleuve » en parlant d'un bateau (av. 1674) d'où s'emboucher « s'engager dans une passe étroite » (1890).
■  EMBOUCHURE n. f. (v. 1360) fait concurrence à bouche pour désigner la partie d'un cours d'eau par où les eaux se jettent dans un lac ou dans la mer. Ultérieurement, il s'est appliqué à la partie d'un récipient pour l'évacuation et la réception du liquide qu'il contient (1668), à la partie du mors dans la bouche du cheval (1690). Le mot désigne en particulier la partie d'un instrument à vent que l'on embouche (déb. XVIIIe s.), emploi usuel. ◆  Par analogie avec la rivière, il se dit de la partie d'une voie qui s'élargit avant d'aboutir à une place (1862).
■  EMBOUCHÉ, ÉE, le participe passé d'emboucher, est adjectivé dans l'expression mal embouché, qui qualifie familièrement une personne n'ayant que des paroles grossières à la bouche (1573). ◆  Ce sens coexiste avec un emploi descriptif en héraldique (1690).
■  Un autre verbe emboucher (→ 2 emboucher) senti comme formé avec bouche est en fait une altération d'un verbe dialectal embaucher.
2 DÉBOUCHER v. intr. (1640) « sortir d'un lieu resserré, apparaître brusquement » (d'une chose) se dit aussi d'un être vivant, d'un véhicule en mouvement. ◆  Par extension, il s'applique à une voie qui aboutit dans un lieu plus large, à un cours d'eau qui se déverse dans un cours d'eau plus important, dans un lac ou dans la mer (1870), correspondant ainsi à embouchure. Dans le domaine abstrait, déboucher sur signifie « aboutir à » (XXe s.).
■  Son participe passé substantivé, DÉBOUCHÉ n. m. (1723), s'emploie au propre et au figuré, dès la première moitié du XVIIIe s. ; il s'applique dès l'origine au commerce.
Il convient enfin de rattacher à l'étymon latin bucca le substantif 2 BOUQUIN n. m. attesté semble-t-il au XVe s. et, de manière certaine, en 1532 dans l'expression cornet à bouquin. La forme du mot pose néanmoins problème et, pour expliquer le son k, il semble qu'une dérivation de la forme normanno-picarde de bouche soit préférable à un emprunt à l'italien bocchino « petite bouche », ce dernier n'étant employé en musique qu'au XIXe siècle. ◆  Le mot, ainsi que cornet à bouquin, a désigné l'embouchure d'une petite trompe de chasse et, par métonymie, une corne de chasse. Il a vieilli, y compris avec la valeur analogique d'« embouchure d'une pipe » (1833).
❏ voir BOUCHOT, BOUCLE, 3 BOUQUET, BUCCAL, 2 EMBOUCHER.
BOUCHER v. tr. est dérivé (v. 1278) avec la désinence verbale de l'infinitif, de l'ancien français bousche, « poignée de paille, fagot », lui-même attesté seulement depuis 1461 au sens de « botte de chanvre » et dans la première moitié du XIVe s. par son dérivé bouchon*, mais qui doit être antérieur au verbe, si cette hypothèse est exacte. Bousche est issu d'un latin populaire °bosca « broussailles, faisceau de branches », pluriel neutre qui a dû coexister avec le pluriel masculin bosci (→ bois).
❏  Le sens propre, « obstruer au moyen d'une poignée de paille », s'est immédiatement étendu à « fermer (un orifice) en y introduisant qqch. ». L'accent est parfois mis sur la finalité de l'action, avec l'idée de « rendre impraticable en obstruant ». Le sens de l'ancienne construction boucher qqn « lui voiler la vue, lui bander les yeux » (XVIe s.) est repris dans boucher la vue « empêcher de voir » (1694) qui est resté vivant. ◆  La même valeur se retrouve, mais avec une valeur concrète du verbe, dans se boucher les yeux et se boucher les oreilles (v. 1610), lesquelles rendent compte de l'état d'esprit où l'on refuse la vérité, l'évidence. ◆  La locution familière en boucher un coin (fin XIXe s.) signifie d'abord « rendre muet d'étonnement » (Cf. fermer la bouche à qqn) avant de devenir simplement synonyme d'« étonner ».
❏  BOUCHEMENT n. m. (1549) « action de boucher une ouverture », rare avant 1867, ne s'est pas répandu.
■  BOUCHURE n. f., d'abord boucheure (1600) au sens concret « ce qui bouche (un trou) », s'est spécialisé à propos d'une haie (1701). ◆  Il vit encore dans le centre de la France avec ce sens (« haie, souvent haie vive, entourant un champ ») voisin de celui du moyen français BOUCHETURE n. f. « ce qui bouche un terrain », terme coutumier pour ce qui empêche les bêtes de passer (1481). Bouchure, pour « clôture », est vivant en français acadien.
■  BOUCHEUR n. m., employé adjectivement pour « obturateur » dans la description anatomique (1550, Paré) a disparu. Il a été repris pour désigner l'ouvrier chargé de fabriquer les bouchons, de procéder au bouchage des bouteilles (1867).
■  Le féminin BOUCHEUSE désigne un appareil.
■  BOUCHOIR n. m., d'abord bouchouer (1553), mot technique, désigne la plaque métallique à poignée servant à boucher l'ouverture d'un four.
■  BOUCHÉ, ÉE adj., du participe passé, a développé le sens figuré de « borné, obtus » (1690, esprit bouché) sous l'influence d'emplois figurés voisins, mais non correspondants, du verbe. ◆  Par métonymie, il caractérise aujourd'hui familièrement une personne inintelligente (av. 1755). Il est remplacé par bouché à l'émeri.
■  BOUCHAGE n. m., apparu tardivement avec l'acception technique et métonymique de « terre détrempée servant à fermer le trou de coulée dans les hauts fourneaux » (1751), ne semble employé que depuis le XIXe s. comme substantif d'action, « fait de boucher (une ouverture) » (1838). Dans cet emploi, il a éliminé bouchement (ci-dessus).
Le verbe, sous la forme bouche-, sert d'élément pour former des composés.
■  BOUCHE-TROU n. m. lorsqu'il est attesté en 1688, désigne le dernier enfant d'une femme. ◆  Au XVIIIe s. il se dit d'un élément pictural pour masquer un vide de la composition (1765, Diderot), au théâtre, en parlant d'une pièce médiocre (1781), puis d'un acteur de second ordre qui remplit un manque (1807). ◆  Ce n'est qu'au XIXe s. qu'il s'est répandu dans l'usage général en parlant d'une chose (1829) puis d'une personne (1834) inutiles.
■  BOUCHE-PORES n. m. inv. (1924) est le nom d'une préparation pour boucher les pores du bois.
■  BOUCHE-BOUTEILLES n. m. inv. (1925) fait concurrence à boucheuse, féminin de boucheur.
Le verbe a aussi servi à former deux préfixés.
■  1 DÉBOUCHER v. tr. (fin XIIIe s.) « dégager ce qui est obstrué », signifie aussi, par rapprochement avec bouchon*, « ôter le bouchon de » (1596). ◆  Déboucher qqn au sens figuré de « lui ouvrir l'esprit » (1845) a disparu alors que bouché, dans ce contexte, est usuel.
■  Le verbe a produit deux substantifs d'action concrets : DÉBOUCHEMENT n. m. (1611) et, ultérieurement, DÉBOUCHAGE n. m. (1870) pour « action d'ouvrir une bouteille », ainsi que DÉBOUCHOIR n. m., nom d'un outil de lapidaire (1754), enregistré par P. Larousse dans un sens général.
REBOUCHER v. tr., l'autre dérivé verbal de boucher, est attesté depuis 1412 avec le sens itératif de « boucher à nouveau » ; un sens spécial est « obturer (un puits) avec un bouchon de ciment » (1690).
■  Le verbe a pour dérivé REBOUCHAGE n. m. (1836), surtout employé techniquement en peinture à propos de l'obturation d'un puits (v. 1950).
❏ voir BOUCHON (pour la deuxième acception).
BOUCHER, BOUCHERIE → BOUC