CARACOLER v. intr. est dérivé de caracol n. m. ou caracole n. f. (av. 1598) « escargot » ; le mot s'est spécialisé en manège à propos d'une succession de voltes ou demi-voltes (1611) et en architecture pour un escalier en colimaçon (1675). Lui-même est emprunté à l'espagnol caracol, proprement « escargot » (1400), également employé en équitation (1604) et en architecture (XVIe s.). Ce mot est d'origine incertaine, peut-être issu par métathèse de cacalaou, cagarol (→ cagouille), attesté dans les dialectes du sud-est et du sud-ouest de la France et lui-même issu du croisement entre le latin conchylium « coquille » (→ conchylio-) et le grec kakhlêx « petit caillou du lit d'une rivière », d'origine probablement onomatopéique. On a aussi évoqué un dérivé de la racine préromane °kar- « coquille, écale » qui est à l'origine de carapace*.
❏  Le verbe procède de caracole en équitation et décrit un cheval, par métonymie son cavalier, qui exécute une succession de voltes et demi-voltes. Par extension, il est entré dans l'usage courant au sens de « aller à cheval de manière vive » puis de « courir en sautant, gambader », par la même évolution que cabrioler. L'extension est lexicalisée en français de Louisiane, où le verbe correspond à « s'agiter, danser, gesticuler ». ◆  Au figuré, une expression courante en français de France est caracoler en tête (en tête des sondages, etc.) « être largement en tête, sans effort », notamment en politique.
❏  CARACOLANT, ANTE est l'adjectivation du participe présent (XXe s.).
■  CARACOLADE n. f. (1850) et CARACOLEMENT n. m. (1877) correspondent au verbe, mais sont rares.
CARACTÈRE n. m., d'abord calateres au pluriel (v. 1100), puis karactere (1274) et carathere (1372), est emprunté au latin character attesté depuis Varron, « manière d'être propre à un style », puis « manière d'être, comportement » (IVe s.), également avec une valeur plus concrète « marque appliquée à un animal au fer rouge » (Ier s.), « marque d'un poids ou d'une monnaie » (IIIe s.), « signe de l'écriture » (fin IVe-déb. Ve s.) et, chez les auteurs chrétiens, « marque sacramentelle du baptême » (saint Augustin). Le mot latin est emprunté au grec kharaktêr qui, à partir du sens propre de « graveur » (spécialement « graveur de monnaies »), a pris par métonymie le sens de « signe gravé, empreinte, marque » et développé les valeurs abstraites et psychologiques passées en latin. Le mot est dérivé du verbe kharassein « aiguiser », au figuré « exciter », également « entailler, inciser », « inscrire », mot technique sans étymologie indoeuropéenne établie, peut-être à rapprocher du lituanien žeriù « gratter » (d'une racine commune °gher-). En français, le type savant a supplanté l'ancien français caracte, characte (XIIe s.), employé jusqu'au XVe s. au sens de « marque, signe », spécialement « charme, sortilège magique » et « signe d'écriture ».
❏  Le mot apparaît en judéochrétien au sens spécialisé de « signe magique » dont procèdent, par métonymie, ceux de « charme, sortilège » (1471) et, jusqu'à la langue classique, « talisman portant un signe magique » (XVIe s.), tous éteints aujourd'hui. Dans une autre acception concrète, caractère désigne une empreinte (1274), une image sur un sceau (1372), sens qui annoncent la valeur moderne de « signe d'écriture » (1550). Celle-ci connaît une grande expansion avec l'imprimerie et par extension donne immédiatement l'acception de « signe conventionnel dont on se sert dans certaines sciences » (1567).
■  Parallèlement, le mot est repris du latin chrétien dans sa spécialisation « marque spirituelle et ineffaçable qu'impriment les sacrements » (1389-1392). Il connaît une grande expansion au XVIIe s. lorsqu'il commence à désigner abstraitement le caractère distinctif d'une chose (1662, d'un sentiment). Ce sens prépare des emplois spéciaux dans les sciences de la nature (1704, en botanique) puis en sciences humaines ; en même temps, il donne lieu à un emploi dans le commentaire artistique, en peinture (1699) et en musique (1798, absolt).
■  Par une spécialisation importante, il est défini comme l'ensemble de traits dominants de la physionomie morale d'un homme (av. 1662, Pascal, bon, mauvais caractère). Il désigne en particulier la manière d'être morale (1686, Bossuet) d'où, par métonymie, les personnes envisagées sous l'angle de leur personnalité (1757, les grands caractères). Le siècle classique, qui est celui des moralistes, l'applique à la peinture des sentiments, des passions, des idées, des personnes dans un texte (Molière), le mot au pluriel servant de titre pour des œuvres littéraires (Les Caractères, La Bruyère). Ultérieurement, l'expression pièce de caractère (1751, Voltaire) est forgée pour un type de pièces se consacrant à l'analyse d'un caractère type. En emploi partitif, l'accent est mis sur la valeur d'« énergie, force d'une personne » (1736), par exemple dans avoir du caractère, force de caractère. Par une extension analogique, le mot est appliqué à la personnalité d'une collectivité, d'un pays (1748). La classification moderne des types de caractères psychologiques a été nommée caractérologie (ci-dessous).
❏  Caractère n'a directement produit en français que le mot tardif et d'usage didactique CARACTÉRIEL, IELLE adj. et n., attesté en 1841 et répandu au XXe s. dans le cadre de la psychologie du comportement ; il est substantivé en médecine (1951) pour désigner une personne présentant des troubles du comportement. ◆  En est dérivé CARACTÉRIELLEMENT adv. (1969, dans les dict.).
CARACTÉRISER v. tr. semble emprunté (1512) au grec kharakterizein « marquer d'une empreinte, d'un signe distinctif » (de kharaktêr), peut-être par l'intermédiaire du latin médiéval characterizare « faire connaître, signaler » (IXe s.). ◆  Le sens concret, « marquer d'un signe, d'une empreinte », avec la spécialisation « marquer d'un signe magique » (av. 1550), est rapidement sorti d'usage. Au XVIIe s. le mot a pris son sens moderne de « mettre en évidence le véritable trait distinctif d'une personne, d'une chose » (1680), également réalisé au pronominal se caractériser (1787).
■  Le participe passé CARACTÉRISÉ, ÉE est adjectivé de bonne heure avec le sens de « bien déterminé, évident » en qualifiant une chose (av. 1653, injures caractérisées) et une personne (av. 1784).
■  Le participe présent CARACTÉRISANT, ANTE adj. (1669) signifiait « qui confère un caractère propre ». Il a disparu au profit de caractéristique (ci-dessous) sauf en linguistique où certaines terminologies l'emploient comme substantif.
■  CARACTÉRISATION n. f. (1840) renvoie au fait et à la manière de caractériser, spécialement en linguistique.
■  CARACTÉRISABLE adj. (1935) est didactique.
CARACTÉRISTIQUE n. f. et adj., emprunt (1550) au grec kharakteristikos « qui sert à distinguer », dérivé de kharaktêr, s'est introduit comme substantif en grammaire pour nommer l'élément qui dénote le temps d'un verbe, la formation d'un mot, sens qui donne lieu à un emploi adjectivé (1694). ◆  Au XVIIIe s., le nom reçoit une autre acception technique en mathématiques (1751) et le sens courant de « ce qui caractérise une chose » (1779), sur lesquels se greffent des emplois adjectivés. ◆  CARACTÉRISTIQUEMENT adv. est attesté en 1791.
CARACTÉROLOGIE n. f., d'abord caractériologie (1909) repris et diffusé sous la forme caractérologie (1945), est un emprunt à l'allemand Charakterologie (1867), lui-même formé sur les éléments grecs kharaktêr et -logos (→ -logie) ; l'anglais a lui aussi repris characterology (1903) à l'allemand. ◆  Le mot désigne une branche de la psychologie ayant pour objet l'étude du caractère et des types de caractères.
■  En sont dérivés CARACTÉROLOGIQUE adj. (1945) et CARACTÉROLOGUE n. (1946, Mounier).
CARAFE n. f., d'abord caraffe (1558), est emprunté à l'italien caraffa (fin XVe s.) de même sens et d'origine obscure : le mot est peut-être emprunté à l'arabe du Maghreb qarrafa « bouteille très ventrue, pot à boire » ; cette hypothèse se heurtant toutefois au fait que l'espagnol garrafa est attesté bien après l'italien en 1570.
❏  Le mot, d'abord employé au figuré dans l'expression vieille Caraffe, désignant par calembour le pape Paul IV, Gian Pietro Carafa (qui régna de 1555 à 1559), est attesté depuis 1642 au sens propre. Il semble favoriser les emplois familiers, comme la locution rester en carafe (populaire, 1896) « rester court (d'un orateur) » d'où « rester en plan », qui vient probablement du sens argotique de carafe « bouche » (l'orateur restant bouche bée), tout comme fouetter de la carafe « avoir mauvaise haleine » (1878) ; Cf. goulot. Toujours en argot, il désigne la tête (1901) avec une idée de bêtise (quelle carafe !) commune à d'autres noms de récipients (gourde, cruche).
❏  Au sens de « petite carafe », CARAFON n. m., d'abord garafon (1677) puis carafon (1700), est bien dérivé de carafe, mais le sens classique de « grande carafe placée dans un seau garni de glace pour rafraîchir une boisson » laisse supposer un emprunt sémantique à l'italien caraffone, augmentatif (XVIe s.) de caraffa. Ni ce sens, ni son extension métonymique pour « seau de glace » (1771) n'ont vécu.
CARAÏBE adj. et n., d'abord caribe (1568 comme nom), puis caraïbe au XVIIe s. (1658), est un emprunt au mot amérindien (arawak) transcrit karib. Les Espagnols, premiers Européens sur les lieux, en ont tiré caribal (→ cannibale). Le mot s'applique à la mer des Antilles (mer caraïbe ou des Caraïbes) et à la zone des îles situées dans cette mer (la Caraïbe). Dans le contexte anthropologique, il concerne l'ethnie amérindienne qui peuplait cette zone et qui fut presque totalement exterminée (6 000 survivants en 1660). ◆  Le caraïbe ou karib n. m. désigne le groupe des langues amérindiennes de la région.
CARAILLE n. f., emprunt à l'hindi karahi, désigne en français mauricien un ustensile de cuisine en métal, de forme hémisphérique, à deux anses, utilisé pour les fritures.
CARAMBOLE n. f. (1610), d'abord carambolas (1602), terme de botanique, désigne un fruit jaune et côtelé, à section en étoile. Le mot est emprunté au portugais carambola (1563), probablement emprunté lui-même au marathe (langue de l'Inde) karambal.
❏  Il est courant en français de l'océan Indien, par exemple à l'île Maurice, où il est du masculin (un petit carambole). Confiture, achards de carambole. Par analogie de forme, carambole a désigné la boule de billard (1792), peut-être par emprunt à l'espagnol carambola (1578), lui-même repris comme terme de botanique au portugais et employé, à cause de la couleur du fruit, pour désigner les billes de billard (déb. XVIIe s.).
❏  CARAMBOLER v., d'abord écrit caramboller, terme de billard, signifie « toucher du même coup deux billes avec la sienne » (1792). Dès les premières attestations, il est employé au sens figuré de « heurter » en construction transitive, notamment en parlant de véhicules (dans se caramboler). ◆  Il a reçu en argot, par la métaphore courante du coup, le sens de « posséder sexuellement » (1881) ; on trouve aussi se faire caramboler (1877).
Le nom d'arbre CARAMBOLIER n. m. (1783) est dérivé du nom du fruit (connu en français de l'océan Indien).
■  Caramboler a produit CARAMBOLAGE n. m. (1812), s'appliquant au billard puis à des heurts de véhicules, notamment des heurts déclenchés en série.
Les mots d'argot CARAMBOUILLAGE n. m. (1900), CARAMBOUILLE n. f. (1918) et CARAMBOUILLER v. tr. (1928), relatifs à l'escroquerie consistant à revendre au plus vite une marchandise que l'on n'a pas payée, représentent des altérations de carambole, dans la locution argotique vol à la carambole (1878) « vol à l'étalage », par comparaison entre le mouvement des boules de billard et celui des marchandises passant de complice en complice. La finale s'explique probablement par celle de fripouille*, fouiller*, tripatouiller*.
CARAMEL n. m. est emprunté (1680), via l'espagnol caramel ou caramelo (1601), au portugais caramelo qui, outre son sens culinaire, signifie « glaçon » (XVIe s.). Ce mot est probablement issu du bas latin calamellus (→ chalumeau), diminutif de calamus « roseau » (→ calame), à cause de l'analogie de forme entre le sucre durci, la stalactite de glace et la tige de roseau.
❏  Le mot désigne la substance obtenue en chauffant le sucre, utilisée comme remède contre le rhume avant de devenir matière première pour la confiserie, d'où par métonymie le sens de « bonbon » apparu au XIXe s. (caramel mou). Il a également fourni un nom de couleur aussi en apposition (ou adj. inv.). Au sens de « confiserie », le mot parfois écrit caramelle, s'emploie aussi au féminin en français de Belgique et du Luxembourg. Cet usage est critiqué.
❏  CARAMÉLISER v. (1825, se caraméliser à propos du suc des viandes) signifie « transformer en caramel » ; il a produit CARAMÉLISATION n. f. (1832) et CARAMÉLISÉ, ÉE adj.
CARAMÉLÉ, ÉE adj. est l'adjectif tiré (1877) de CARAMÉLER v. tr. (1735), évincé par caraméliser ; il signifie « qui a l'apparence, la couleur ou le goût du caramel ».
? CARANGUE n. f. est tiré du latin zoologique caranx, d'origine obscure, et désigne un poisson des eaux profondes, au corps comprimé, d'assez grande taille et dont la chair est estimée. Le mot, en français de l'océan Indien, du Pacifique (notamment en Nouvelle-Calédonie), s'applique couramment à plusieurs espèces.
CARAPACE n. f. est emprunté (1688) à l'espagnol carapacho de même sens (XVIe s.), quelquefois altéré en caparacho, peut-être d'après capa « manteau » (→ cape), d'origine incertaine : il serait dérivé du préroman °karapp- issu de la racine °kar(r)- « écale » dont la variante °kal- est à l'origine de l'espagnol galapago « tortue » (→ calebasse). On a aussi proposé d'y voir une métathèse du provençal caparasso « sorte de manteau » (→ caparaçon).
❏  Le mot a longtemps désigné le plastron de la tortue avant de s'appliquer par extension au test dur qui recouvre tout ou partie du corps de certains animaux. Accueilli en 1835 par le Dictionnaire de l'Académie, il s'est répandu tardivement dans l'usage commun avec des emplois analogiques et figurés (1874).
? CARAPATER v. intr., d'abord carapatter (1867), est d'origine incertaine, peut-être composé du radical de l'argot se carrer « se cacher » (1835), lui-même dérivé du moyen français carre « coin » (XVe s.), déverbal de carrer* « donner une forme carrée », et de patte* avec la désinence -er. P. Guiraud préfère le rattacher à l'argot carapata, carapate, carapatin n. m. (1850) « marinier d'eau douce » et « fantassin de ligne » (1878), habituellement considérés comme dérivés du verbe, et à la locution adverbiale de carre, en carre « de côté, de travers », la finale étant à rapprocher de patte, en tout état de cause. Le cheminement sémantique partirait de l'idée de « se sauver, s'enfuir sans être vu » vers l'idée de « courir ».
❏  Le mot est d'abord employé à la forme pronominale se carapater « s'enfuir, se sauver, jouer des pattes », puis intransitivement « se sauver » d'où « courir ». Un sens du pronominal, « se cacher » (1878), a disparu.
? CARAQUE n., attesté en français chez A. Daudet (1897) est un emprunt à l'occitan languedocien caracou, d'origine inconnue, pour désigner dans le Languedoc et dans plusieurs régions du sud de la France une personne de l'ethnie rom, comme le provençal boumian (de bohémien). Le mot est le plus souvent péjoratif.
CARAT n. m., également quarais (1360), caras (1367) en moyen français, est emprunté (1355) à l'italien carato (1278 à Venise), déjà en latin médiéval caratus (1264), emprunté lui-même à l'arabe qīrāṭ « graine de caroubier » et « petit poids » (24e partie du denier à La Mecque). Le mot arabe, comme le bas latin correspondant ceratium, est emprunté au grec keration « petite corne, antenne de langouste » d'où « petit poids » et « fruit du caroubier ». Ce mot est dérivé de keras « corne » (→ kératine).
❏  Terme d'orfèvrerie désignant l'unité de poids employée pour l'estimation des pierres, de l'or, carat a donné lieu à des locutions familières : à vingt-quatre carats « parfait », souvent ironique, fait allusion à la quantité de carats contenue par l'or absolument pur, d'où trente-six carats « au-delà du possible ». ◆  En argot, le terme est l'un des nombreux synonymes d'année (1901), rare employé isolément, plus courant dans des locutions, le dernier carat étant « la dernière limite » et prendre du carat (1930) signifiant « prendre de l'âge ».
CARAVANE n. f., d'abord carvane (v. 1195 ; caravana en latin médiéval, 1160) puis caravane (1657), a été emprunté à la faveur des croisades, par l'intermédiaire de l'arabe, au persan kārwān « file de chameaux, troupe de voyageurs » (→ caravansérail).
❏  Le mot, qui désigne une file de voyageurs (presque toujours en contexte oriental), est employé par extension à propos d'une troupe de gens allant de compagnie (1657), d'animaux se déplaçant en groupe.
■  Le sens de « véhicule équipé pour servir de logement » (1930) est emprunté à l'anglais caravan, lui-même pris au français et attesté au sens de « voiture couverte servant de transport des voyageurs » (1674), puis de « roulotte de forains » (1824) et enfin de « roulotte de plaisance » (1886). En ce sens, le mot est distinct de roulotte en France mais se confond avec lui au Québec.
❏  CARAVANIER, IÈRE adj. et n. désigne celui qui conduit les bêtes de somme dans une caravane (1613). ◆  Au XXe s., il est adjectivé (1911) et, sous l'influence de l'anglicisme caravane, prend le sens de « adepte du caravaning » (1960).
CARAVANING n. m. est emprunté (1932, caravanning) d'un mot anglais (1885) issu de caravan. Critiqué, il doit son succès à l'influence de l'anglicisme de sens voisin camping.
CARAVANSÉRAIL n. m., d'abord carvansera (1432), puis au XVIIe s. caravasserail (1606) et caravansérail (1673), d'après sérail*, est emprunté au persan kārwān-sarāy « abri pour voyageurs en Orient ». Le mot est composé de kārwān (→ caravane) et de sarāy « palais, grande maison, cour » (→ sérail).
❏  Importé par les relations de voyages en Orient, caravansérail désigne un vaste enclos entouré de corps de bâtiment où le voyageur en Orient trouve un abri. Par extension, il est employé à propos d'un lieu fréquenté par un grand nombre d'étrangers (1807, Mme de Staël) et d'un lieu agité.
CARAVELLE n. f., d'abord caruelle (1438), carvelle (1462) puis caravelle (1495-1496), est emprunté au portugais caravela « bateau léger à quatre mâts », depuis 1255 « bateau de pêche », également « bateau équipé pour les voyages outre-mer » (1447). Lui-même est le diminutif de caravo emprunté au latin tardif carabus « barque recouverte de peaux » (VIe s.), issu par métaphore de carabus « langouste » (→ carabe). Philippe le Bon avait fait construire la première caravelle française par des Portugais à Sluis (ouest de la Hollande) en 1438-1440.
❏  La caravelle fut essentiellement le bateau des grandes découvertes aux XVe-XVIe s. et le mot évoque encore cette époque, notamment les trois navires de la première expédition de Colomb. ◆  Son nom a été donné à un avion à réaction moyen-courrier français en service dans les années 1950-1970.
CARBET n. m., mot d'origine amérindienne (tupi du nord-est du Brésil, langues caraïbes), transporté aux Antilles françaises, est passé en français dès le début du XVIIe s. (1614).
❏  Le mot, en français des Antilles, de la Guyane, désigne une grande case traditionnelle, commune à plusieurs familles. Par extension, se dit d'un abri, d'un hangar pour les embarcations, les engins de pêche.
CARBO- premier élément, tiré du latin carbo « charbon », sert aussi à former les noms de composés chimiques où sont présents du carbone ou un anhydride carbonique (→ carbone).
❏  CARBOCHIMIE n. f., de carbo- au sens de « charbon », désigne (1959) la partie de l'industrie chimique et de la chimie concernant la transformation de la houille et de ses dérivés, par exemple la cokéfaction, la gazéification, les distillations... Il a un dérivé, CARBOCHIMIQUE adj.
■  CARBOHÉMOGLOBINE n. f. désigne en physiologie (depuis le milieu du XXe s., en français) la combinaison de gaz carbonique et d'hémoglobine qui se forme dans les globules rouges et, décomposée dans les poumons, libère le gaz carbonique.
■  CARBOXYLE n. m. formé (1890) de carbo-, oxygène et -yle, désigne le groupement monovalent —COOH, qui caractérise les acides organiques. Son dérivé CARBOXYLIQUE adj. qualifie les groupes de composés du carboxyle. CARBOXYLASE n. f. formé avec l'élément -ase (vers 1950) est le nom de l'enzyme qui catalyse la fixation de gaz carbonique sur un composé organique. ◆  DÉCARBOXYLASE n. f. (attesté en 1946) dénomme l'enzyme qui catalyse la perte de groupes carboxyliques. Cette perte est appelée DÉCARBOXYLATION n. f., terme attesté dès 1911.
CARBONADE ou CARBONNADE n. f. est un emprunt (1534), soit, dans la langue générale, à l'italien carbonata, soit, dans les pays occitans, à cette langue sous la forme carbonada. Ce sont des dérivés de carbone (italien et occitan) correspondant au mot charbon, d'où venaient les termes correspondants en pays d'oil, charbonnade (XIIIe s., après charbonnée, fin XIe s.).
❏  Le mot a plusieurs significations, selon les époques et les régions. Sa valeur initiale est « préparation de viande grillée sur des charbons ». Cette valeur s'est conservée dans le sud-ouest de la France, où carbonade désigne surtout une grillade de porc. En Provence (1747), le mot s'est appliqué à un ragoût de mouton ; dans le Languedoc et le Bordelais (1823) à un ragoût de veau. Dans l'usage rural des Cévennes, carbonade dénomme le ragoût du porc fraîchement tué et le repas de fête à l'occasion de l'abattage. ◆  Dans le nord de la France et en Belgique, le mot est usuel à propos d'un plat de bœuf braisé, cuit à l'étouffée, parfois mouillé de bière.
❏ voir CHARBON et dérivés ; CARBONE.
CARBONARO (au pluriel CARBONARI) est le mot italien correspondant à charbonnier, de carbone « charbon », devenu international pour désigner un membre de société secrète combattant pour l'indépendance italienne et se réfugiant dans des huttes de charbonniers. Le mot est employé en français à partir de 1818, avec pour dérivé CARBONARISME n. m. (1818).
■  À LA CARBONARA loc. adv. représente un nouvel emprunt culinaire à l'italien, à propos d'une préparation à la crème fraîche et aux lardons accompagnant certaines pâtes et censée être une recette provenant des charbonniers. Tagliatelles à la carbonara ; ou en apposition, carbonara (n. f., nom de la préparation).
CARBONE n. m. est emprunté (1787) au latin carbo, carbonis « charbon de bois, produit de la combustion », terme technique ayant donné charbon* par voie non savante. Le rapprochement du gotique hauri « charbon » et du vieux slave hyrr « feu » (permettant de supposer une origine indoeuropéenne) est lointain et n'explique pas le b.
❏  Le mot dénomme un corps simple métalloïde très répandu dans la nature à l'état combiné et qui se trouve dans tous les corps vivants. Le syntagme carbone 14 (XXe s.) réfère spécialement à un isotope radioactif du carbone présent dans tous les tissus vivants et utilisé pour la datation des matériaux archéologiques et géologiques.
■  Le composé papier carbone (1914), elliptiquement carbone, est calqué sur l'anglais carbon paper (1895) pour désigner un papier chargé d'une couche de couleur et destiné à obtenir des doubles.
❏  Les premiers dérivés de carbone apparaissent dans la nouvelle nomenclature chimique de Lavoisier, Guyton de Morveau, et al. CARBONÉ, ÉE adj. (1787).
CARBONATE n. m. désigne un sel ou un ester de l'acide carbonique. Il a des dérivés et des préfixés usuels. CARBONIQUE adj. (1787, nomenclature de Lavoisier) qualifie les corps résultant de la combinaison du carbone et de l'oxygène. Anhydride ou gaz carbonique (CO2). Neige carbonique ou CARBOGLACE n. f. (1935, nom déposé) désigne le dioxyde de carbone solidifié, employé comme réfrigérant.
CARBONATÉ, ÉE adj. (1801) et CARBONATER v. tr. (1845), a lui-même produit CARBONATATION n. f. (1874) et CARBONATEUR n. m. (1886). ◆  HYDROCARBONATE n. m. (1809) dénomme un carbonate hydraté.
BICARBONATE n. m. (1825) « carbonate double » (avec bi-* « deux fois ») est devenu usuel du fait de l'usage pharmaceutique du bicarbonate de soude (absolument bicarbonate). ◆  Un autre préfixé est HYDROCARBONÉ, ÉE adj. (1834).
CARBONYLE n. m. (1855) dénomme un radical bivalent comportant du carbone et de l'oxygène. Dans métal carbonyle, où le mot est adjectif ou apposition, l'expression désigne le composé d'un métal avec l'oxyde de carbone.
D'usage moins technique, CARBONISER v. tr. (1803) est probablement plus ancien puisque CARBONISATION n. f. est attesté chez Lavoisier en 1789. Tous deux se sont répandus en parlant de l'action de modifier ou de détruire par le feu (1825 en cuisine), d'où un emploi familier pour « brûler » ou « cuire à l'excès », en synonymie avec brûler, cramer et des valeurs populaires « déconsidérer, noircir » (1928), « rater une occasion ».
CARBONIFÈRE adj. (1838), substantivé en géologie pour désigner une époque de la fin de l'ère primaire où se sont formés de grands bassins houillers, et CARBONEUX, EUSE adj. datent du XIXe siècle.
RADIOCARBONE n. m. désigne (1936), d'après l'anglais, un isotope radioactif du carbone, dit aussi carbone 14, utilisé depuis 1949 à la datation de substances découvertes par l'archéologie, méthode appelée en anglais radio-carbone dating.
❏ voir CARBURE.