CARBURE n. m. est dérivé savamment (1787) du radical de carbone* avec le suffixe -ure.
❏  Boiste, en 1803, enregistrait le mot sous un double genre, le féminin se référant à la combinaison du carbone non oxygéné avec différentes bases et le masculin désignant concrètement un tel composé binaire. Le masculin s'est imposé, passant dans l'usage pour désigner spécialement le carbure de calcium utilisé dans les lampes (lampes à carbure).
■  Il est même passé en argot comme désignation métaphorique de l'argent.
❏  Carbure a produit la plupart de ses dérivés dans la première moitié du XIXe siècle.
■  CARBURÉ, ÉE adj. (1823) annonce la formation ultérieure de CARBURER v. (1853) dont le sens transitif de « combiner (un métal) avec du carbone », en métallurgie, tend à être supplanté par des emplois intransitifs secondaires : le mot est employé en parlant d'un moteur qui effectue le mélange gazeux nécessaire à son bon fonctionnement. Par extension, il est passé dans l'usage familier (1920, sports) au sens d'« aller (bien, mal) » et de « fonctionner ». Carburer à (suivi d'un nom de boisson alcoolisée) s'entend spécialement pour « boire habituellement (cette boisson) ».
■  Le participe présent CARBURANT adj. et n. m. (1857) est substantivé (1899) au sens de « combustible utilisé dans un moteur », d'où SUPERCARBURANT n. m. (1931), abrégé familièrement (1956) en SUPER n. m. (→ super). BIOCARBURANT n. m. désigne (1977) un carburant d'origine végétale (éthanol, ester de colza, de tournesol...).
CARBURATION n. f. (1866) et CARBURATEUR, TRICE adj. et n. (1866) sont également devenus courants, ce dernier à cause de l'utilisation de ce dispositif dans les moteurs d'automobiles. ◆  CARBURÉACTEUR n. m., mot-valise de carburant, n. m. et réacteur, désigne (1959) un combustible pour les réacteurs d'avions (le mot a été forgé pour remplacer l'anglais jet fuel).
■  BICARBURE n. m. (1825) appartient aujourd'hui à une terminologie chimique périmée.
■  HYDROCARBURE n. m. (1829), d'abord hydro-carbure, désigne un composé qui contient seulement de l'hydrogène et du carbone. Le mot est devenu usuel avec l'importance économique prise, depuis l'avènement du moteur à essence, par la série des hydrocarbures comprenant le pétrole et les huiles lourdes.
■  DÉCARBURER v. tr. (1839) « enlever à (un métal, notamment la fonte) le carbure qu'il contient », de même que ses dérivés DÉCARBURATION n. f. (1834), DÉCARBURANT, ANTE adj. et n. (v. 1870), qualifiant les substances ayant la propriété de décarburer les métaux, et DÉCARBURATEUR, TRICE adj. (XXe s.), relèvent d'un usage plus strictement technique.
CARCAJOU n. m., d'abord cacajou, 1685, caquajou, 1695, puis, avec un r, carcajoux, forme unique au singulier et au pluriel (1703), enfin carcajou (1695 au pluriel carcajous), est un mot du français du Canada, emprunté au montagnais, langue d'une ethnie algonquienne du nord-est du Canada.
❏  Le mot désigne un mammifère carnivore du nord de l'Amérique, au pelage brun marqué de deux bandes jaunâtres, possédant des glandes à sécrétion fétide (mustélidés ; voisin du glouton*). ◆  Ce nom, d'après l'anglais carcajou, pris au français au XVIIIe s., a désigné aussi un autre animal, le blaireau d'Amérique (Taxidea taxus). Le mot carcaiou avait été appliqué (vers 1675) à un renard, au Canada. ◆  Au figuré, d'après les caractéristiques de l'animal, le mot avait pris en français canadien le sens de « personne rusée et féroce ».
? CARCAN n. m., réfection (1172-1174) de charcanz (1100-1150), représente le latin médiéval carcan(n)um (IXe s.), également attesté dans le domaine anglais aux XIIe et XIIIe s. et d'origine inconnue. La répartition des formes charcan / carchan ne permet pas d'attribuer aux unes et aux autres une origine géographique précise ; les formes en cha- sont peut-être dues à une hyperfrancisation à partir des formes en ca- considérées comme normandes et picardes. Un rattachement à l'ancien haut allemand querca « gorge, cou » et spécialement à l'ancien norrois kverkband « mentonnière, jugulaire », de kverk « gorge » et band « lien » (→ bande), fait difficulté des points de vue chronologique et phonétique. L'étymon arabe ḫalḫal « anneau de la cheville », déjà éloigné phonétiquement, est peu vraisemblable du point de vue géographique, le mot n'étant pas attesté en provençal mais dans la partie nord du domaine d'oïl.
❏  Le mot désigne un collier de fer servant à attacher un condamné au pilori, puis par extension le collier de fer porté par les forçats (1867). Une analogie de forme est à l'origine d'emplois spécialisés en bijouterie pour désigner un collier (1468), emploi disparu, et en élevage un collier de bois mis au cou d'animaux pour les empêcher de passer à travers les haies (1832). ◆  Du sens de base vient un emploi abstrait comparable à celui de joug, par exemple dans le carcan de la discipline (attesté fin XIXe s., in T. L. F.).
? CARCASSE n. f., relativement tardif (1556), est d'origine obscure. Il vient peut-être de l'ancien nom masculin charcois (1188) « ossements » et par extension « corps », d'origine inconnue. Son rapprochement avec carquois est très hypothétique et peu vraisemblable. P. Guiraud propose un rapprochement avec le normanno-picard carquier « charger, transporter » (→ carcan), la carcasse étant proprement « ce qui charrie, transporte le corps », mais l'hypothèse est gratuite.
❏  Le mot, qui désigne d'abord les ossements, puis le corps mort d'un animal, d'un homme, est passé dans le vocabulaire alimentaire à propos de ce qui reste du corps de la volaille privé de ses cuisses et de ses ailes (1680, carcasse de poulet). Par extension, il désigne familièrement une personne décharnée (1680) et en général un corps humain (1696). ◆  Techniquement, il est employé pour désigner la charpente d'un navire (1704) et d'autres objets (immeuble, parapluie), seul le contexte indiquant s'ils sont considérés comme structures préalables ou comme débris, ruines.
❏  Soit par l'intermédiaire d'un dérivé peu courant et populaire CARCASSER v. intr. (en 1894, « avoir des accès de toux violents secouant toute la carcasse »), soit plutôt par une formation « parasynthétique » (premier élément de composition et suffixe verbal), on a formé le composé familier DÉCARCASSER v. tr. (1821), surtout à la forme pronominale se décarcasser dès les premières attestations, avec le sens figuré de « se démener ».
CARCÉRAL, ALE, AUX adj. est dérivé savamment (1959) du radical du latin carcer « prison » (→ incarcérer). Le bas latin avait déjà formé carceralis « propre à la prison » (VIe s.).
❏  La formation du mot comble une lacune due à l'absence d'adjectif dérivé de prison. Souvent omis dans les dictionnaires généraux de la seconde moitié du XXe s., carcéral a acquis une réelle vitalité depuis la discussion sur le régime pénitentiaire à l'occasion des incidents survenus dans certaines prisons vers 1973.
❏  Contrastant avec la vitalité de carcéral et de incarcérer*, CHARTRE n. f. (v. 980, cartre), héritier du latin carcer, a été progressivement évincé par prison. Furetière, signalant la locution tenir qqn en chartre privée « l'emprisonner dans un lieu autre que la prison publique », qualifie le mot de « vieux » (1690).
❏ voir INCARCÉRER.
CARDAMINE n. f. est emprunté (1545), peut-être par l'intermédiaire de la forme latinisée cardamine (408), au grec kardaminê (Ier s.), nom d'une plante herbacée de la famille des Crucifères désignant aussi le cresson de fontaines, et dérivé de kardamon « cresson alénois » (→ cardamome).
❏  Le mot, assez rare, conserve le sens de l'étymon.
CARDAMOME n. f., d'abord cardemome (v. 1170) puis cardamome (1210-1223), est emprunté au latin cardamomum (Pline). Lui-même est repris au grec tardif kardamômon « plante aromatique d'origine orientale », composé (avec superposition syllabique) de kardamon « cresson alénois », mot probablement emprunté, et de amômon « plante aromatique d'origine extrême-orientale », mot lui aussi emprunté et qui a donné amome*.
❏  Le mot désigne une plante du genre amome dont les fruits de même nom renferment des graines au goût poivré.
❏ voir CARDAMINE.
L CARDE n. f. est un terme originaire des dialectes du Nord (XIIIe s.) issu d'un type latin °carda, pluriel neutre collectif tiré du latin carduus « chardon » (→ chardon), l'objet désigné étant fait de plusieurs têtes de chardon. Il pourrait aussi être le déverbal de carder*. Cette origine picarde est confirmée par la géographie des premières attestations et par l'importance de l'industrie drapière en Flandre, au moyen âge. L'hypothèse d'un emprunt au provençal carda « chardon », déverbal de cardar « démêler les fibres textiles à l'aide de têtes de chardon », est infirmée pour des raisons géographiques et historiques, tout comme celle d'un emprunt à l'italien cardo.
❏  Le sens du mot a évolué avec les techniques de peignage des fibres textiles : longtemps employé à propos de la tête épineuse du chardon à foulon servant à cet usage (encore en 1601), il désigne aujourd'hui une brosse garnie de pointes métalliques recourbées (1366) et une machine (1835).
■  Le sens de « côte comestible des feuilles de certaines plantes comme la poirée ou l'artichaut-cardon » (1536) correspond à un homonyme apparenté, emprunté au provençal cardo de même sens (pourtant seulement attesté depuis Mistral), issu du latin carduus par l'intermédiaire d'une forme gallo-romane °carda. Par métonymie, carde est employé pour désigner la plante elle-même, la blette.
❏  CARDER v. tr., d'abord karder dans le nord de la France (XIIIe s.), signifie « démêler les fibres textiles » d'où, par métonymie, avec changement de nom d'objet, « nettoyer (un tissu) de ses poils trop longs ou trop courts ». Il donne lieu à quelques emplois métaphoriques, tantôt poétiques (1783-1784, carder les nuages) tantôt populaires (1899, carder le poil à qqn « battre » [Cf. les emplois figurés de frotter, savonner, etc.]). ◆  Le participe passé CARDÉ, ÉE est adjectivé (1394) et, elliptiquement, substantivé au féminin (1680) puis au masculin (1899) en parlant d'un tissu de laine dont les fibres, démêlées grossièrement, ne sont pas rectilignes.
■  CARDEUR, EUSE n. (1337), nom d'ouvrier, sert à nommer au féminin une machine à carder (1876) ; CARDERIE n. f. (1358), ancien nom de la laine cardée, a reculé comme substantif d'action (1397) au profit de CARDAGE n. m. (1404), lent à s'imposer avant le XVIIIe siècle. Carderie s'est maintenu au sens local pour « endroit où a lieu le cardage » (1827).
CARDÈRE n. f. (1775), qui désigne une sorte de chardon autrefois utilisé pour le cardage, se rattache probablement à la famille de chardon*, carde* bien que sa formation soit obscure : ce peut être une formation savante, due aux botanistes du XVIIIe s. à partir du latin carduus avec une finale mal éclaircie ; ou plutôt un emprunt au provençal cardayro de même sens, attesté dans la Creuse, la Dordogne, la Corrèze, et dérivé de cardar « carder » (XIVe s.) avec le suffixe -ayro (du latin -ator).
CARDIAQUE adj. et n. est emprunté (1372) au latin cardiacus « malade de l'estomac » puis (IVe-Ve s.) « relatif au cœur », employé spécialement comme nom et adjectif au sens de « malade du cœur » (Ve s.). Ce mot est emprunté au grec tardif kardiakos « relatif à l'estomac, au cœur », dérivé de kardia au double sens de « cœur » et « estomac », à rattacher à une racine indoeuropéenne °kērd (→ cœur).
❏  Le mot a repris au latin les sens relatifs au cœur. Il est substantivé comme nom d'un remède pour le cœur (1590), sens vieilli, et pour désigner une personne atteinte d'une maladie de cœur (1892).
❏  Du grec kardia ont été tirés l'élément préfixal cardia-, cardio- ainsi que l'élément suffixal -carde, -cardie indiquant une relation avec le cœur.
CARDIA-, CARDIO-, quoique assez utilisé au XIXe s. en histoire naturelle, a perdu sa vitalité dans ce domaine au XXe siècle. En revanche, il ne cesse de prendre une importance croissante, en relation avec les progrès de la médecine du cœur ; en médecine, les composés les plus usuels sont CARDIOLOGIE n. f. (1832 ; après cardialogie, 1762), CARDIOLOGUE n. (1920-1924), abrégé en CARDIO n. (1979), CARDIOPATHIE n. f. (1858), CARDIOGRAMME n. m. (1929). Il peut lui arriver d'occuper une position médiane (électrocardiogramme n. m. [→ électrique]).
L'élément final -CARDE, -CARDIE n'a pas autant de vitalité et se limite également à des termes du vocabulaire scientifique (en médecine et, avec le sens de « en forme de cœur », en zoologie).
❏ voir PÉRICARDE ; CARDIOTONIQUE (art. TON).
CARDIGAN n. m. est emprunté (1928 ; gilet cardigan, 1900 à Montréal) à un mot anglais attesté depuis 1868, tiré du nom du comte de Cardigan (1797-1868) connu pour ses exploits au cours de la guerre de Crimée, qui semble cependant avoir porté ce que l'on appelle en français un gilet.
■  La mode du cardigan, veste de laine tricotée, boutonnée par devant, se répandit pour les femmes après la guerre.
1 CARDINAL, ALE, AUX adj. est emprunté (1279) au latin cardinalis dérivé de cardo, inis « gond », « charnière », « pivot », « pôle (nord, sud) » puis « point cardinal » et « tournant, point principal », terme technique d'étymologie inconnue. L'adjectif, qui signifie proprement « qui sert de pivot », est également attesté au sens figuré de « autour duquel tout tourne » dans les syntagmes cardinales venti « vents cardinaux » (fin IVe s.), cardinales numeri « nombres cardinaux » (déb. VIe s.), cardinales virtutes « vertus cardinales » (379).
❏  Le sens figuré de « principal » est réalisé dans l'expression vertus cardinales qui désigne les quatre vertus chrétiennes considérées comme fondamentales dans les rapports des hommes entre eux. Il l'est ultérieurement dans autel cardinal, attesté en 1845 comme terme d'histoire ecclésiastique. ◆  Le sens géographique est introduit dès l'ancien français, d'abord dans le syntagme vent cardinal (1290) qui procède par métonymie de l'expression postérieurement attestée point cardinal (1680), devenue usuelle, pour désigner le nord, le sud, l'est et l'ouest. L'acception du mot en arithmétique, dans nombre cardinal, opposé à ordinal, est attestée depuis 1680. En dehors de ces emplois calqués sur le latin, le mot a développé une spécialisation en embryologie, qualifiant les veines du corps de l'embryon, au nombre de quatre (1865).
❏  2 CARDINAL, AUX n. m., d'abord chardenal (1172-1174), forme demi-savante attestée jusqu'au XIVe s., puis cardinal (1230-1250), est emprunté au latin ecclésiastique cardinalis, spécialisation figurée de l'adjectif classique (→ cardinal), employé pour qualifier certains dignitaires ecclésiastiques, spécialement un prêtre affecté d'une manière permanente à une église déterminée (VIe s.) ou un évêque « suburbicaire » (768-772). Cardinalis est substantivé au sens de « prélat choisi par le pape » (fin VIIIe s.).
■  Cardinal désigne en français un dignitaire ecclésiastique chargé d'élire et d'assister le pape dans le gouvernement des affaires de l'Église. Il a donné la locution descriptive à la cardinale (1534) et a reçu plusieurs acceptions analogiques par allusion à la couleur rouge de la robe du prélat : certaines sont sorties d'usage comme la désignation imagée de la décapitation (1534, faire cardinal) ou cette désignation euphémique des menstrues (1580, avoir son cardinal). ◆  Celles qui se sont imposées désignent des animaux de couleur rouge (un oiseau d'Amérique, 1694 ; un papillon diurne, 1809) ou des plantes (un glaïeul à fleurs rouges, 1832). Le nom de l'oiseau d'Amérique s'applique à un passereau huppé, à fort bec, de couleur rouge vif, alors qu'en français d'Afrique, le mot s'emploie à propos d'un autre passereau, l'Euplectes orix, dont le mâle présente un plumage rouge et noir en période de reproduction (nom savant : ignicolore). ◆  Sur le modèle du kir (au vin blanc), le cardinal (années 1980) est un vin rouge cassis.
■  Le dérivé CARDINALISER v. tr., d'abord écrit cardinalizer (1534), a dès le XVIe s. à la fois le sens figuré de « rendre rouge », vieilli en dehors d'emplois spéciaux et plaisants, et le sens propre de « faire cardinal » (1596).
CARDINALAT n. m. est emprunté (1508) au latin médiéval cardinalatus « dignité de cardinal » (av. 1115), de cardinalis.
CARDINALICE adj. est emprunté (1829) à l'italien cardinalizio « relatif aux cardinaux, à l'état de cardinal » (av. 1606), de cardinale, correspondant au français cardinal* avec le suffixe -izio.
❏ voir CHARNIÈRE.
CARDON n. m. est la forme picarde de chardon*, employée en ancien français comme nom de la tête de chardon utilisée pour carder la laine. Avec son sens moderne, le mot a été emprunté (1507) à l'ancien provençal cardo(n), attesté dans la seconde moitié du XIIIe s., lui-même issu du latin cardo (→ chardon).
❏  Le mot désigne une plante potagère du même genre que l'artichaut.
❏ voir CARDE.
L CARÊME n. m., d'abord quaresme (1119), est issu du latin populaire °quaresima, altération du latin classique quadragesima « quarantième » (→ quatre) dans sa spécialisation chrétienne de « quarantième jour (avant Pâques) », par ellipse pour quadragesima dies, d'après le grec ecclésiastique tessarakostê (hêmera).
❏  Le mot, dont le genre est resté indécis jusqu'au XVIe s., désigne la période de 46 jours de jeûne et d'abstinence entre mardi gras et Pâques. Par métonymie, il désigne le jeûne (1541), l'ensemble des sermons (av. 1622) faits pendant cette période. En français des pays chrétiens, le mot entre dans plusieurs expressions familières, ironiques comme amoureux de carême (1535), saint de carême (fin XVIe s.), face de carême (1668) « face amaigrie », tomber comme mars en carême « arriver inévitablement » (XIVe s.) et inversement arriver comme marée en carême « arriver fort à propos » (1762). En français d'Afrique (Maghreb et Afrique subsaharienne), et chez les Musulmans francophones, carême se dit du jeûne du ramadan*. En français de l'océan Indien, le mot s'applique à tout jeûne rituel, quelle que soit la religion. Garder le carême, casser le carême, « respecter ou non un jeûne prescrit ». ◆  Au sens temporel initial, carême s'emploie en français des Antilles à propos de la période chaude et sèche, de janvier à mai.
❏  CARÊME-PRENANT n. m., d'abord dans le syntagme feste caren-pernent (fin XIIe s.), est composé de carême et du participe présent de prendre*, prenant, au sens de « qui s'engage dans ». Le mot désigne strictement les trois jours de réjouissances précédant le début du carême. Familièrement, il désigne un personnage de carnaval (l'anatomie de Caresmeprenant, dans Rabelais), une personne grotesquement accoutrée (1670, Le Bourgeois gentilhomme), par allusion aux masques qui courent les rues pendant ces trois jours.
MI-CARÊME n. f. (1264), composé de mi-* « demi » et de carême, désigne le vingt-troisième jour après le mercredi des Cendres.
CARENCE n. f. est emprunté (v. 1450) au bas latin carentia « indigence, privation » (IIe-IVe s.), de carere « ne pas avoir, manquer de ». Le mot est sans étymologie connue, comme d'ordinaire pour le sens de « manquer » dans les langues indoeuropéennes.
❏  D'abord employé avec la nuance ancienne de « besoin », le mot a affirmé son sens moderne de « manque absolu, insuffisance » (XVe s.), spécialement en droit (1611, carence de biens, en parlant d'une succession), puis ultérieurement en médecine (carence alimentaire, v. 1920), et en psychologie de l'enfance au sens de « manque affectif ». Il se réfère en particulier à l'état d'une personne, d'une institution qui se dérobe devant ses obligations (1910).
❏  CARENCER v. tr. (1920-1924, sous la forme du p. p. dans le syntagme régime carencé) et CARENTIEL, IELLE adj. (1955) s'emploient surtout dans leur acception médicale.
CARÈNE n. f., d'abord carenne (1246), est emprunté, par le biais du latin médiéval carena, à l'ancien génois carena « partie immergée de la coque d'un bateau lorsqu'il est chargé ». Ce mot représente le latin carina, proprement « demi-coquille de noix », spécialisé par analogie de forme au sens de « coque de bateau », ceci dès les premières attestations, d'où par métonymie « vaisseau ». Le mot latin, sans étymologie sûre, rappelle le grec karuon « noix » (→ caryo-) et le sanskrit karakaḥ « noix de coco » qui suggèrent l'idée première de la coque. Le français a aussi emprunté directement au latin le type carine (déb. XIVe s.), vivant jusqu'au XVIIe s. et repris très momentanément en botanique (1753). Le type carene (1552) est pris à l'italien carena (XVe s.), mot génois.
❏  Le mot, d'abord employé de manière isolée pour « quille d'un navire », désigne plus généralement la coque immergée. Une extension métonymique lui a valu en poésie le sens de « navire ». Il a été transposé en aéronautique à propos de l'enveloppe d'un ballon dirigeable (1904).
■  Par analogie de forme, il désigne en botanique la pièce formée par les deux pétales inférieurs des fleurs de papilionacées (1753) et en zoologie le bréchet des oiseaux. ◆  Il a été transposé en aéronautique à propos de l'enveloppe d'un ballon dirigeable (1904).
❏  CARÉNER v. tr. (1643) signifie d'abord « nettoyer la carène de (un navire) » ; par analogie, il a reçu l'acception technique de « donner un profil aérodynamique à (une carrosserie) » (XXe s.). ◆  En est dérivé le substantif d'action CARÉNAGE n. m., d'abord écrit cranage (1640), qui, par métonymie, désigne le lieu où l'on carène les bâtiments (1678). Par analogie, le mot s'emploie à propos de la carrosserie aérodynamique d'une automobile (XXe s.). ◆  Le participe passé CARÉNÉ, ÉE est adjectivé avec les sens du verbe.
CARESSE n. f., d'abord charesse (1534) puis caresse (1545), est emprunté à l'italien carezza, dérivé de caro, cara « cher » (→ cher).
❏  L'histoire du mot en français est celle d'une spécialisation de sens : aux XVIe et XVIIe s., il recouvre l'idée d'une démonstration d'affection, de reconnaissance dans diverses circonstances de la vie, aussi bien par les gestes que par la parole. Il désigne aussi des flatteries verbales (1616). De nos jours, il évoque essentiellement la sensualité érotique (1606) — l'idée d'une caresse amicale est archaïque — parfois avec des connotations nettement sexuelles, en outre limitée aux attouchements de la main, alors qu'il incluait anciennement les baisers.
❏  CARESSER v. tr., attesté un siècle avant le nom (1450), est emprunté à l'italien carezzare « chérir », dérivé de carezza. ◆  Le verbe a évolué, à partir du XVIe s., comme le nom ; sa valeur première est voisine de cajoler, avec parfois une nuance péjorative pour « flatter, courtiser » (1538).
■  Sans valeur affective, ils sont employés avec une idée d'« effleurement » (se caresser la barbe) notamment au figuré (1671, pour le nom ; 1777, pour le verbe). Le verbe s'emploie également avec un complément de sens psychologique (1736) au sens d'« entretenir complaisamment » (caresser un projet). En emploi concret, il a pris, comme caresse, une valeur érotique.
Du verbe sont dérivés CARESSANT, ANTE adj. (1642), spécialisé avec la valeur psychologique de « tendre, affectueux, avec des manifestations physiques », et CARESSEUR, EUSE adj. et n. (1566), passé du sens de « qui aime bien qqn et témoigne de son affection », devenu archaïque, à « qui a l'habitude de caresser » (1857).
CARET n. m. est emprunté directement (1640) à une langue amérindienne du groupe caraïbe ; l'espagnol, qui n'a pas servi d'intermédiaire pour le français caret, est à l'origine de la forme car(r)ey réempruntée au XVIIIe siècle. Le français et l'espagnol carey ne peuvent être empruntés au malais, comme on l'a cru, en raison de la localisation géographique des premières attestations : c'est au contraire le mot caraïbe qui aurait été apporté aux Philippines par les Espagnols.
❏  Le mot désigne une tortue des mers du Sud recherchée pour ses œufs au goût délicat et fournissant une belle écaille.
CAREX n. m. est écrit une fois caret lors d'une tentative isolée de francisation du latin (1778), puis careiche (1803) avec une finale inexpliquée, peut-être sous l'influence de son synonyme populaire laîche, et enfin carex (1805, traduction de Linné). ◆  Le mot est emprunté au latin carex « laîche, herbe des marais », peut-être en rapport avec carduus (→ carde, chardon).
❏  Le mot désigne une plante de la famille des Cypéracées qui croît dans les sols marécageux et sablonneux.
CARGAISON n. f., d'abord carquaison (1554) puis cargaison (1611), est emprunté à l'ancien gascon cargueson (1516), dérivé de l'ancien provençal cargar « charger (un navire) » (1177), de même origine que charger*.
❏  Ce terme de marine est employé familièrement au sens de « grande quantité », comme collection, provision.
❏ voir CARGO.
CARGO n. m. est issu par abréviation (1907) de cargo-boat (1887), emprunté tel quel à l'anglais cargo-boat « navire de charge » (1859). Le premier élément est cargo « charge, fret » (1657), emprunté à l'espagnol cargo, déverbal de cargar « charger » (→ cargaison, charger). Le second est boat (→ bateau).
❏  Le mot, nom d'un navire de commerce servant au transport des marchandises, a servi à former AVION-CARGO n. m. (1948).