CHRÉTIEN, IENNE adj. et n. est l'adaptation, d'abord en christian (842), cristiien (881), crestien (1174-1187), du latin christianus (dès 64, sous Néron) « disciple du Christ », dérivé irrégulier de Christus « Christ », emprunté au grec khristos « oint » (→ christ).
❏  Le mot qualifie et désigne (1050) une personne qui professe la religion du Christ et qualifie ce qui est relatif au christianisme (881). Par extension, il a reçu la valeur générale de « homme, femme » (1174-1187).
❏  CHRÉTIENTÉ n. f., d'abord christïentét (1050) puis crestïantez (1165-1170), est dérivé de chrétien d'après le latin chrétien christianitas (IVe s.) « christianisme, ensemble des chrétiens ». Le mot a progressivement cédé son sens à christianisme, pour désigner les nations chrétiennes (1165-1170) et, spécialement, une communauté chrétienne en pays non chrétien.
■  CHRÉTIENNEMENT adv. (1546) a eu le sens figuré de « clairement » dans parler (plus) chrétiennement (1566).
Chrétien est entré en composition dans le nom d'une variété de poire, BONCHRÉTIEN (XVe s.), peut-être d'après le latin médiéval °(poma) panchresta, du grec pankhrêstos « (fruit) utile à tout », par confusion. ◆  Au XXe s. apparaissent les termes de politique DÉMOCRATE-CHRÉTIEN, IENNE adj. et n. (1901), DÉMOCRATIE-CHRÉTIENNE n. f. et SOCIAL-CHRÉTIEN adj. et n. (1945) [→ social à l'art. société]. CHRÉTIEN-DÉMOCRATE adj. et n., calque de Christlich Demokratische (Union) s'emploie pour « partisan ou membre du parti conservateur fondé en République fédérale allemande » par Conrad Adenauer (1949). Le sigle allemand C. D. U. n. f. se traduit par Union chrétienne-démocrate.
❏ voir CHRIST, CHRISTIANISME, CRÉTIN.
CHRISME n. m. est l'adaptation (1819) du latin savant chrismon (1681), réfection hellénisante du latin médiéval crismon « monogramme du Christ » (v. 1050). Ce dernier est la contraction du bas latin chresimon (milieu VIe s., Cassiodore), littéralement « ce qui est utile, profitable », employé pour désigner un sigle formé d'un khi grec (X) surmonté d'un rho grec (P), représenté ☧. Ce signe utilise les deux premières lettres de ce mot dans l'alphabet grec ; il se notait en marge d'un manuscrit pour signaler un passage remarquable. Le mot est emprunté au grec où il est le neutre substantivé de l'adjectif khrêsimos « utile, profitable » (encore en grec moderne), employé pour qualifier celui en qui ou ce en quoi on cherche et trouve secours. Khrêsimos appartient à un ensemble de mots reposant sur la base khrês- et concernant la prédiction (krêsmos « oracle », khrêstês « diseur d'oracles ») et à des mots se rapportant à la notion d'« usage » (khrêstos « utile » d'où « excellent, de valeur »). Cette base est d'origine incertaine. On évoque parfois un rattachement à la racine du latin hortari (→ exhorter).
❏  Le mot désigne le monogramme du Christ, car il correspond aux deux premières lettres du nom grec du Christ (X et P).
❏  On a relevé le dérivé CHRISMAL, ALE, AUX adj. « marqué du chrisme » chez un écrivain de la fin du XIXe s. (1893). Il ne s'est pas répandu.
CHRIST n. m. est l'emploi comme nom commun (1680) du nom propre Christ (881), emprunté au latin Christus (dès 100, Tacite). Ce mot est emprunté au grec Khristos employé spécialement dans le Nouveau Testament comme titre décerné à Jésus en raison de son intronisation royale lors de sa résurrection (Ac, II, 36), puis chez les pères de l'Église comme nom propre (sans article). Le mot grec est un adjectif verbal signifiant « propre à l'onction », « oint », servant dans l'Ancien Testament à traduire l'hébreu māšīaḥ (→ messie) désignant le roi, oint de Yahvé et, en un sens prophétique, le roi idéal attendu dans l'avenir. Il est dérivé de khriein « frotter, enduire, oindre d'huile (après le bain, pour les funérailles, pour une consécration) » et, en parlant d'un objet, « teinter » (→ chrême). Ce mot est d'origine inconnue.
❏  Employé comme nom commun, christ désigne une représentation de Jésus-Christ en iconographie. Il est également employé, dans la tradition judaïque, en parlant d'un envoyé de Dieu oint pour sauver le peuple.
❏  De christ ont été dérivés quelques termes du vocabulaire didactique : CHRISTOLOGIE n. f. (1836), CHRISTOPHANIE n. f. (1845), CHRISTOLÂTRIE n. f. (1846, Proudhon), aujourd'hui quasi inusités, et CHRISTIQUE adj. (av. 1892), peut-être emprunté à l'anglais christic (1874), « relatif au Christ, à la personne du Christ ».
ANTÉCHRIST n. m., d'abord antecrist (1085-1110), est emprunté au latin chrétien antechristus, réfection de antichristus (d'où la forme antichrist, chez Rabelais), par substitution de ante « avant » (→ anté-) à anti (→ anti-), le mot passant du sens « adversaire du Christ » à celui de « précurseur du Christ ». Le latin traduit le grec antikhristos, employé au pluriel dans les Épîtres de Jean à propos des chrétiens qui se détachent de la communauté parce qu'ils se refusent à admettre la pleine divinité du Christ ou la réalité de son incarnation. Diverses représentations, de l'ancienne eschatologie juive à la pensée des pères de l'Église, ont modelé différents personnages mythiques d'antéchrists individuels, historiques (l'Empire romain).
■  Le mot, d'abord relevé avec l'acception péjorative populaire de « méchant homme », est attesté parallèlement au XIIe s. avec ses acceptions didactiques « adversaire du Christ, apostat » (fin XIIe s.) et « esprit du mal devant apparaître à la fin des temps » (id.).
❏ voir CHRÉTIEN, CHRISTIANISME ; CRISSE.
CHRISTE-MARINE ou CRISTE-MARINE n. f., d'abord sur les formes crete et croite marine, au XVe s., formes modernes cr- en 1572, chr- avant 1611, sont des altérations (d'abord d'après crète, le h étant dû à la notation du grec au XVIe siècle) du khretmôs, khretmon qui a fourni, par le latin botanique la forme crithme.
❏  Le mot désigne deux plantes, une ombellifère, le crithme maritime, dont la tige confite est comestible, et une composacée, l'inule.
CHRISTIANISME n. m., attesté en ancien limousin sous la forme crestianesme (v. 1250) correspondant à un ancien français °crestianisme, a été repris au XVIe s. (attesté 1585) sous la graphie savante moderne. Il est emprunté au latin chrétien christianismus qui est pris au grec khristianismos (v. 250, Clément d'Alexandrie) « religion chrétienne fondée sur la personne et la parole de Jésus-Christ », de khristianos (→ chrétien).
❏  Le mot, repris avec le sens du mot latin, a produit l'antonyme ANTICHRISTIANISME n. m. (1593) « attitude hostile au christianisme ».
❏  CHRISTIANISER v. tr. est emprunté (1575) au latin chrétien christianizare « professer la religion chrétienne, être chrétien », verbe intransitif dérivé de christianus (→ chrétien).
■  Introduit au XVIe s. au sens intransitif de « devenir chrétien, pratiquer le christianisme », le mot s'est immédiatement converti au sens transitif moderne de « rendre chrétien » (1588).
Christianiser a produit très tard CHRISTIANISATION n. f. (1843), dont le correspondant anglais christianization est attesté en 1833.
■  En revanche, son antonyme DÉCHRISTIANISER v. tr. a une longue histoire. Formé sur le radical christian- de chrétien* et attesté sous la forme descristianes en 1174, il a été réintroduit sous sa forme actuelle pendant la Révolution française (1792), en pleine Terreur, dans le contexte de la lutte contre la religion de l'Ancien Régime. ◆  Après une longue éclipse, le verbe connaît un regain de faveur avec ses dérivés DÉCHRISTIANISATION n. f. (1876) et DÉCHRISTIANISATEUR, TRICE n. (1907).
CHRISTOPHINE n. f. semble être une forme féminine de Christophe, Cf. Joséphine, de Joseph.
❏  Le mot, d'usage courant en créole et en français des Antilles, désigne le fruit d'une plante cucurbitacée originaire du Mexique (son nom botanique, chayote, vient par l'espagnol du nahuatl), utilisé en cuisine. Synonymes : chayotte, et, dans l'océan Indien, chouchou et chouchoute.
+ CHROME n. m., d'abord écrit crome (1562), est emprunté, par l'intermédiaire du latin chroma, au grec khrôma « couleur du corps », « couleur » en général, puis aussi spécialement « couleur du style, figure » en rhétorique, et « modulation, mélodie, air », « composition musicale où l'on procède par demi-tons ». Khrôma est dérivé de khrôs « surface du corps humain, peau, chair » et, par métonymie, « teint, carnation » et « couleur » ; le mot est d'origine inconnue.
❏  Les deux sens techniques du grec repris successivement, « dièse » en musique (Cf. chromatique), puis « figure de rhétorique » (1753), ne se sont pas maintenus. ◆  Le mot s'est implanté en chimie à partir de 1797, proposé par Haüy comme dénomination d'un métal blanc grisâtre, brillant et dur. Par métonymie, il s'est répandu dans l'usage au XXe s. avec le sens d'« accessoire en métal chromé » (les chromes d'une voiture).
❏  Chrome a produit quelques termes de chimie tels CHROMIQUE adj. (1797) et CHROMATE n. m. (1797), d'où CHROMATÉ, ÉE adj. (1808), et le verbe CHROMER v. tr. (1927) « recouvrir d'une couche de chrome », « tanner aux sels de chrome », dont sont dérivés CHROMISATION n. f. (1924) et CHROMAGE n. m. (1927), mots techniques, à la différence de CHROMÉ, ÉE adj., usuel.
■  Le grec khrôma a fourni avec CHROMO-, -CHROME, -CHROMIE, qui concernent la notion de couleur, des éléments de composés savants, tels CHROMOLITHOGRAPHIE n. f. (1837), abrégé en CHROMO (1872, abusivement au masculin), répandu pour « image en couleurs d'un goût populaire, naïf ».
Les termes du vocabulaire musical CHROMATIQUE adj. (v. 1360) « qui procède par demi-tons successifs » et 1 CHROMATISME n. m. (1899) sont empruntés à des dérivés de khrôma au sens spécialisé de « ton musical », « genre de composition où l'on procède par demi-tons ». ◆  Dans le même sémantisme, des composés ont été formés, tels ACHROMATIQUE adj. (1764), qui qualifie un système optique dont la réponse est indépendante des radiations incidentes et aussi (1898) une formation biologique rebelle à la coloration, ACHROMATISME n. m. (1816) « état d'un système optique achromatique », ACHROMATOPSIE n. f. (1845 ; de -opsie) « non perception des couleurs » ; DICHROÏSME n. m. (1821, écrit dy-) et DICHROÏQUE adj. (1858) qui caractérisent les substances à coloration variable selon les conditions d'observation ; MONOCHROMATIQUE adj. (1838) « d'une seule fréquence de radiation », scientifisation de MONOCHROME adj. (1765) emprunt au grec monokhromos « d'une seule couleur » ; PANCHROMATIQUE adj. (1896), mot de photographie, « sensible à toutes les couleurs du spectre », abrégé en PANCHRO adj. (1955).
Un homonyme 2 CHROMATISME n. m. a été emprunté dans le domaine médical (1829) au grec khrômatismos « action de colorer ». Il s'est répandu en optique et en peinture.
CHROMOSOME n. m. (fin XIXe s.) est un emprunt à une formation scientifique allemande (par Waldeyer en 1888), tiré du grec khrômo- et -sôma « corps » (→ soma), les chromosomes, supports des gènes, absorbant électivement certaines matières colorantes. ◆  Le mot a produit CHROMOSOMIQUE adj. (1931), plus rarement doublé par CHROMOSOMIEN, IENNE adj. ◆  De nos jours, le sens scientifique de chromosome n'est plus lié à la notion de couleur, pas plus que chrome en chimie ou que la récente CHROMODYNAMIQUE n. f., emprunt à l'anglais où color « couleur » représente un caractère arbitrairement désigné des constituants ultimes de la matière.
CHRONIQUE n. f. est la réfection savante, d'après le latin (1536), des formes queronique (1213, peut-être 1138), cronike (1243), empruntées au latin chronica. Celui-ci est emprunté au grec khronika « annales, recueils de faits historiques présentés chronologiquement », forme de neutre pluriel de l'adjectif khronikos substantivé par ellipse d'un nom comme biblia « les livres » (→ biblio-). Ce mot, « qui concerne le temps ou une période de temps », est dérivé de khronos « temps » (→ chrono-).
❏  Ce nom, employé à la fois au singulier et au pluriel (ce dernier étant un rappel de son ancien statut de pluriel en grec et en latin), désigne un type de recueil de faits historiques rapportés dans l'ordre de leur succession (Cf. mémoires, avec une nuance différente). La chronique est par excellence la forme de l'histoire pour le moyen âge, d'abord écrite en latin, puis en langue vulgaire, vers ou prose. Après la première d'entre elles, qui porte seulement le titre Estoire des Angles (1138-1140) « Histoire des Anglais », elles se multiplient à partir des XIIe-XIIIe s. (Robert de Clari, Geoffroy de Villehardouin, Joinville, Froissart) pour décliner au XVe s., époque à laquelle Commynes dit faire œuvre de mémorialiste (→ mémoires), anticipant sur l'avènement de l'esprit critique et de l'histoire au XVIe siècle. ◆  Au XVIIe s., le mot prend un sens élargi, « ensemble de nouvelles vraies ou fausses qui se propagent en général oralement » dans chronique scandaleuse (1690). Ce sens, orienté vers la médisance, le ragot, est entré dans la phraséologie courante avec l'expression défrayer la chronique. ◆  C'est seulement au XIXe s. que chronique commence à s'appliquer à un article de journal (1812), — puis, au XXe s., à une émission de radio, de télévision — consacrée à certaines nouvelles (chronique littéraire 1834, théâtrale, politique) et à leur commentaire.
❏  CHRONIQUER v. intr. (v. 1350) a suivi les étapes de l'évolution de chronique : le sens de « rédiger sous forme de chronique » a été éliminé par le sens mondain de « écrire, publier des nouvelles défavorables sur qqn » (XVIe s.), à son tour rendu archaïque et supplanté par une autre acception : « écrire des chroniques pour un journal » (1874).
■  CHRONIQUEUR, EUSE n. (XIVe s.), dérivé du verbe, a suivi la même évolution sémantique depuis « auteur d'une chronique historique » jusqu'à son sens actuel en journalisme (1811).
CHRONIQUE adj. est emprunté (1314) au bas latin chronicus, spécialisé dans le vocabulaire médical (par exemple ulcère chronique), du grec khronikos. Par extension, il est employé dans un contexte fâcheux, avec une idée de longue durée (chômage chronique).
■  En sont tirés CHRONIQUEMENT adv. (1835 ; XIVe s., en astronomie) et le terme didactique CHRONICITÉ n. f. (1835), en médecine.
❏ voir ANACHRONISME, CHRONO-, SYNCHRONE.
CHRONO- est un élément préfixant tiré du grec khronos « temps » (par opposition à kairos, qui marque l'instant précis, délimité, et à aiôn, l'éternité). Défini par Platon comme « une représentation mobile de l'éternité », le khronos est en outre mesurable et divisible ; déterminé, il désigne usuellement le temps qui s'écoule, une durée définie, tout laps de temps, et s'emploie aussi comme nom d'unité rythmique, notamment au pluriel, dans le domaine musical et métrique. Il subsiste en grec moderne au pluriel neutre khronia avec le sens d'« années ». L'étymologie est inconnue, malgré diverses tentatives de rattachement à l'une ou l'autre des racines indoeuropéennes °gher- « saisir, tenir, contenir », ou l'hypothèse d'un rapprochement avec le terme avestique zrvan- « temps, durée ».
❏  En français, chrono- est essentiellement employé pour former des adjectifs et substantifs relevant du domaine scientifique. En histoire naturelle, il a surtout été vivant au XIXe siècle ; en revanche, il conserve au XXe s. sa vitalité en médecine, physique et technique, en relation avec les progrès effectués dans la mesure du temps, et, en psychologie, avec ceux d'une meilleure connaissance des affections mentales dans lesquelles la notion de temps joue un rôle.
❏  -chrone fonctionne aussi comme base nominale d'un certain nombre de composés du type synchrone* adj., base elle-même élargie ou suivie d'un suffixe (-ie, -ique, -isme) ; elle est souvent précédée d'un préfixe ou d'un élément préfixal tiré du grec (préposition, préfixe, adjectif, verbe).
Parmi les composés passés dans l'usage, CHRONOMÈTRE n. m. (1701), ancien terme de musique supplanté par métronome, s'est spécialisé (1753) en horlogerie pour désigner un appareil servant à mesurer le temps avec exactitude. Le mot est devenu usuel, abrégé familièrement en CHRONO (1937), surtout dans le langage sportif où il prend aussi le sens de « temps chronométré » et, couramment, dans des expressions du type n (km/h)chrono, en parlant d'une vitesse mesurée grâce au chronomètre.
■  Il a produit CHRONOMÉTRER v. tr. (1896) — d'où sont issus CHRONOMÉTRAGE n. m. (1907), CHRONOMÉTREUR, EUSE n. (1892) — et CHRONOMÉTRIE n. f. (1899), « fabrique de chronomètres ». Ce dernier a été formé didactiquement avec les éléments chrono- et -métrie* dès 1838 avec le sens de « science de la mesure du temps ».
CHRONOLOGIE n. f. (1579) a d'abord été formé en latin du XVIe s. (chronologia, 1532) avec les éléments chrono- et -logia (→ -logie). Le sens de « historiographie procédant selon l'ordre d'apparition historique des événements » est sorti de l'usage au XVIIIe s. au profit du sens spécialisé de « science auxiliaire de l'histoire qui établit les dates des événements » (1680). Par extension, le mot recouvre simplement la date et l'ordre des événements (1803) et, par métonymie, un ensemble d'activités accomplies ou à accomplir dans un laps de temps déterminé (1820, Michelet).
■  Le radical de chronologie a immédiatement produit CHRONOLOGISTE n. m. (1560), ancien synonyme de historien, chroniqueur, passé au sens d'« historien s'occupant de l'étude de la chronologie » (1637). ◆  Un concurrent CHRONOLOGUE n. m. (1605) se rencontre exceptionnellement.
■  CHRONOLOGIQUE adj. (1584, histoire chronologique), devenu usuel au sens d'« inscrit dans un temps mesurable, dans une successivité », a donné ultérieurement CHRONOLOGIQUEMENT adv. (1829, Cousin).
❏ voir ANACHRONISME, CHRONIQUE, SYNCHRONE.
CHRYSALIDE n. f. est emprunté (1593) au latin impérial chrysalis, -idis, transcription du grec khrusallis « chrysalide » et aussi « hanneton ». Ce mot est dérivé, par allusion aux reflets dorés de certaines nymphes, de khrusos « or ». Ce dernier, employé comme premier élément de nombreux composés, est un emprunt au sémitique (akkadien ḫurāṣu, ougarien ḫrṣ, hébreu ḥāruṣ), le phénicien ḥrṣ étant le modèle le plus vraisemblable. L'indoeuropéen a dû avoir pour l'or un nom ancien, représenté dans le latin aurum (→ or), mais remplacé par des formes issues de la racine °ghel- « avoir un éclat jaune » (→ chlore, colère) sur une grande partie du domaine.
❏  Le mot désigne la nymphe des lépidoptères dont l'état est intermédiaire entre celui de chenille et celui de papillon. Il est employé par métonymie pour l'enveloppe de la nymphe (1701) et, par métaphore, en parlant du développement d'un jeune adulte (1866) (sortir de sa chrysalide).
❏ voir CHRYSANTHÈME.
CHRYSANTHÈME n. m. est l'emprunt, sous la forme chrysantemon (1543) adaptée ultérieurement en chrysanthème (1755), du latin impérial chrysanthemum, qui transcrit le grec khrusanthemon. Celui-ci, littéralement « fleur d'or », est composé de khrusos « or » (→ chrysalide) et d'anthemon « fleur », formation parallèle à anthos (→ anthologie), les premiers spécimens connus de cette fleur étant jaunes.
❏  Le mot désigne une plante ornementale (Composacées), ainsi que sa fleur, à pétales rayonnants. Cette disposition a fait du chrysanthème le symbole solaire de la maison impériale japonaise, associé au Japon, comme en Chine, aux notions de plénitude et d'immortalité.
CHRYSO-, élément tiré du grec khrusos « or » (→ chrysalide, chrysanthème) a servi à former quelques mots didactiques.
■  CHRYSOLITHE n. f., écrit crisolite en ancien français (1212), chrysolite en 1598, est emprunté à un hellénisme latin, du composé grec khrusolithos, de lithos « pierre », pour une pierre précieuse de teinte dorée (péridot, topaze...). ◆  CHRYSOCALE ou CHRYSOCALQUE n. m., après la forme altérée crisocane (1372), qui suggère un composé latin (du grec khalkos « cuivre »), se dit d'un alliage de cuivre, étain et zinc imitant l'or. Les formes modernes sont attestées en 1823 et 1819. ◆  CHRYSOBÉRYL n. m. semble composé en français (1834) pour une pierre précieuse constituée par l'aluminate de béryllium naturel (synonyme plus courant : œil-de-chat).
CHTARBÉ, ÉE adj. est un mot populaire dérivé de l'argot chtar « coup », prononciation assourdie de j'tar, jetard (1927), resuffixation de jeton au sens de « coup ».
❏  Le mot s'entend, depuis les années 1980, pour qualifier une personne « frappée » de folie. Cf. cinglé, toqué.
CHTIMI adj. et n., aussi écrit CH'TIMI, est une expression dialectale de Picardie, d'origine discutée, soit « c'est-y (chti) à moi ? (mi) », soit « c'est à toi (ti) et moi », soit chti, de chétif* et mi « moi », comme dans « pauvre de moi ».
❏  Le mot, apparu en français au début du XXe siècle, qualifie et désigne un Français du Nord, de Picardie.
❏  L'abréviation CHTI ou CH'TI adj. et n. est devenue beaucoup plus courante. « Bienvenue chez les chtis », film à succès (2008). Adjectif : l'accent chti.
CHTONIEN, IENNE adj. est dérivé savamment (1819) du radical du grec khthonios « souterrain », surtout employé dans une acception religieuse et presque uniquement dans la langue poétique. Le mot est dérivé de khthôn, nom archaïque de la terre et de sa surface, anciennement senti comme la face extérieure du monde des puissances souterraines et des morts et, par là, comme ce monde, lui-même opposé au ciel. Ce mot, presque toujours poétique, repose sur un ancien thème en °m- et correspond au sanskrit ḳsámyạh « terrestre », au gallois dyn « homme » et, avec une dérivation en l, au latin humilis, de humus « terre » (→ humus).
❏  Le mot s'emploie pour qualifier les divinités infernales d'origine souterraine dans la mythologie grecque (par opposition à ouranien*).
❏ voir AUTOCHTONE.
CHTOUILLE n. f. est la prononciation assourdie de jetouille, de jeter « émettre une humeur pathologique » et suffixe -ouille.
❏  Ce mot argotique (1889), puis populaire, désigne la blennorragie.
C. H. U. est le sigle, épelé cé-ache-u, de Centre Hospitalier Universitaire.
❏  Le mot, devenu usuel, est apparu en 1958 ; il désigne les hôpitaux français où un enseignement de médecine est dispensé.
CHUCHOTER v. est une variante (enregistrée par Cotgrave en 1611) du plus ancien chucheter v. intr. (XIVe s.) qui, supplanté au sens de « parler à voix basse », s'est maintenu pour exprimer le cri du moineau (1752). Ce verbe est formé sur l'onomatopée chu- suggérant un murmure, un sifflement assourdi (→ chuinter, chut).
❏  Chuchoter, rare avant le début du XVIIIe s. (1718), revêt parfois, comme d'autres verbes de parole (Cf. bavarder, jaser, etc.) une connotation péjorative de médisance et s'emploie, par analogie, au sens de « bruire indistinctement ».
❏  La dérivation apparaît au XVIIIe s. avec CHUCHOTEUR, EUSE n. et adj. (1718), variante du plus ancien chucheteur (1690), CHUCHOTERIE n. f. (1718), CHUCHOTEMENT n. m. (1759) et CHUCHOTAGE n. m. (1782) ; seul chuchotement étant courant. ◆  CHUCHOTIS n. m. a été formé ultérieurement (1895) sur le modèle de gazouillis.
CHUINTER v. intr. est une formation expressive sur la base onomatopéique chu- suggérant un murmure, un sifflement assourdi (→ chuchoter, chut). Le mot semble introduit par Court de Gébelin : « Ce mot, inconnu jusqu'à nous, peint si parfaitement la prononciation du ch, que nous n'avons pu nous refuser à en enrichir la langue » (1776).
❏  Chuinter est employé à propos de la chouette qui pousse son cri, de la parole humaine et de choses (liquides, gaz, par exemple).
❏  En sont dérivés CHUINTANT, ANTE adj. (1819), surtout utilisé en phonétique pour qualifier certaines consonnes, et CHUINTEMENT n. m. (1873).
CHUM n. est un anglicisme très courant en français familier du Canada, prononcé tchomm. Le mot anglais est né de l'argot étudiant britannique, vers la fin du XVIIe s. (attesté en 1684), pour « ami proche », et « camarade de chambre ». Ce dernier sens pourrait expliquer l'origine du mot, l'initiale altérée de chambes fellow (1580).
■  Employé en anglo-canadien, chum est passé en français du Québec, où le mot est à peine familier, pour « ami, amie, copain, copine » (on dit parfois chum de fille, chum de gars, comme ami de fille, ami de garçon, pour préciser le sexe). Une valeur spéciale est « compagnon, compagne, petit ami, petite amie » (elle est venue avec son chum).