L
CLERC n. m., d'abord clerjes (v. 980) puis clerc (1050), est issu du latin chrétien clericus « membre du clergé », puis en latin médiéval « lettré » (fin XIe s.-déb. XIIe s.), les membres du clergé étant quasiment les seuls à savoir lire et écrire. Il est emprunté au grec klêrikos de même sens, dérivé de klerôs (lui-même emprunté par le latin chrétien clerus) « héritage, lot tiré au sort », « charge, fonction religieuse » et surtout, dans le vocabulaire des chrétiens, « clergé ». La spécialisation religieuse met donc l'accent sur la désignation par le sort pour exercer une fonction (Actes des Apôtres, I, 26) ; on a aussi évoqué le fait que le mot traduit l'hébreu na῾ ălāh par lequel Dieu se désigne comme l'unique « héritage » des Lévites, tribu sacerdotale d'Israël à qui, pour cette raison, n'a pas été attribué de territoire comme aux autres tribus. Klêros peut désigner originellement l'objet tiré au sort et évoque un mot celtique qui signifie « pierre, morceau de bois », attesté par l'ancien irlandais clār, le gallois claur ; mais cette origine est hypothétique.
❏
Le mot désigne celui qui est entré dans l'état ecclésiastique, qui a reçu des ordres sacrés. Par allusion au fait que la culture lettrée a été transmise par les clercs, il désigne un intellectuel, de nos jours dans la langue littéraire ou par référence à l'ouvrage de Julien Benda, La Trahison des clercs (1927), dans un débat critique sur le rôle des intellectuels.
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Il s'est spécialisé en droit dans le domaine de la procédure, comme appellation d'un employé travaillant dans l'étude d'un officier public ou ministériel (1275), souvent en emploi déterminé : clerc de notaire, courant, clerc de procureur, etc.
❏
CLERGÉ n. m., d'abord
clergiez (au pluriel v. 1120), est l'adaptation du latin chrétien
clericatus « état de clerc » et, collectivement, « ensemble des clercs » (1056), de
clericus.
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Il est passé en français avec cette valeur collective et a influé sur les règles de formation des dérivés de
clerc : clerçon (1130-1150) « jeune séminariste » et « enfant de chœur » (v. 1350) a été modifié en
CLERGEON n. m. (1545).
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CLERGIE n. f. (1155) a été directement dérivé de
clerc avec le
g de
clergé pour désigner le savoir digne d'un clerc et la condition d'ecclésiastique. Les deux mots ont régressé dans l'usage et ne s'emploient guère qu'en allusion au passé.
◈
CLÉRICAL, ALE, AUX adj. est emprunté (1374) au latin chrétien
clericalis « relatif au clergé » et, en ce sens, a évincé les mots hérités
clergil (v. 1150) et
clerjal (v. 1240) ; il a développé au
XIXe s. le sens de « favorable au clergé, à son influence » (1815) avec une valeur péjorative renforcée avec l'apparition d'
anticlérical.
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Le débat sur l'action du clergé dans la vie politique française est à l'origine des dérivés CLÉRICALISER v. tr. (1873), CLÉRICALISME n. m. (1855, cité comme néologisme et attribué à des journalistes belges) et surtout ANTICLÉRICAL, ALE, AUX adj. (1866), d'où ANTICLÉRICALISME n. m. (1869, écrit avec un trait d'union). Ces mots, ainsi que le concept auquel ils correspondent, ont eu une grande importance dans le contexte de la lutte entre tradition chrétienne et républicanisme laïc, à la fin du XIXe s. et au XXe siècle.
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CLÉRICATURE n. f. est emprunté (1429) au latin médiéval
clericatura, « dignité de clerc » (1174), et désigne la condition des ecclésiastiques. Il exprime également (1781) l'état ou la condition des clercs de notaire ou d'officier ministériel, quelquefois avec une valeur métonymique « ensemble de ces officiers ».
1 CLIC, comme clac (→ claquer) est une onomatopée anciennement attestée par écrit (1475), néanmoins après le verbe cliquer*.
❏
Le mot évoque un claquement sec, parfois en alternance avec clac (→ claquer).
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Il a été repris de l'anglais comme nom masculin, pour désigner la pression sur la touche ou le bouton pertinent d'un ordinateur.
❏
Le composé
CLIC CLAC, onomatopée ancienne (1480), désigne un claquement sec répété et alterné.
■
DOUBLE-CLIC, désigne l'opération qui consiste à cliquer deux fois ; les deux verbes cliquer* et double-cliquer correspondant aux deux substantifs.
2 CLIC ou CLICK n. m., d'abord écrit klik (1866) désigne en phonétique un son produit par une double occlusion du passage buccal. Ces sons ont valeur de phonèmes dans les langues à clics, comme le hottentot et les langues apparentées (la chanteuse Miriam Makeba, appartenant à l'ethnie zouloue Xosa, en a fourni des exemples démonstratifs).
1 CLICHER v. tr., introduit tardivement (1803), est d'origine incertaine, peut-être d'une onomatopée klitch- exprimant le bruit de la matrice s'abattant sur le métal en fusion. L'étymon moyen allemand klitsch « masse molle », lui-même d'origine onomatopéique, quoique moins probable, n'est pas à écarter.
❏
Ce terme technique de typographie signifie « fabriquer l'empreinte d'une forme en y coulant un métal fusible permettant d'obtenir une planche solide ». Au cours du XIXe s., il a pris le sens figuré de « copier, décalquer » (1866), l'accent étant mis soit sur le caractère définitif de l'image fixée, soit sur le caractère de copie sans originalité.
❏
Le verbe est d'un moindre usage que son participe passé substantivé
CLICHÉ n. m. (1809), terme de typographie quasiment éliminé par le sens qu'il a pris en photographie, « image négative obtenue à la chambre noire » (1865). Le sens figuré de « phrase ou idée rebattue » (1869,
Le Figaro, cité par P. Larousse) procède du sens initial en typographie ; sa vitalité se mesure au nouveau type d'emplois qu'il connaît en apposition à un substantif :
phrase, discours cliché.
■
Du terme de typographie sont également dérivés CLICHAGE n. m. (1809), CLICHEUR n. et adj. m. (1835) et CLICHERIE n. f. (1866). Les deux premiers sont passés dans le vocabulaire technique des mines, d'après le wallon cliche « loquet », d'origine onomatopéique (→ cliquer) et à rapprocher de clenche*.
◈
Au même ensemble expressif se rattache le verbe homonyme
2 CLICHER v. intr. (1836), terme de phonétique évoquant l'idée de prononcer de façon défectueuse les sifflantes ou les chuintantes, d'où le substantif d'action
CLICHEMENT n. m. (1838).
CLIENT, CLIENTE n. (1437), d'abord sous la forme dérivée clienton (1345), est emprunté au latin cliens, terme politique qui désignait le plébéien se plaçant sous la protection d'un patricien appelé patronus (→ patron). Le mot latin désignait aussi un individu ou un peuple vassal chez les Celtes ; à basse époque, il avait pris le sens de « vassal » et de « personne de la domesticité du maître » (XIe s.). Son origine est inconnue, peut-être étrusque ; on a aussi supposé qu'il serait le participe d'un thème racine du groupe de clinare (→ incliner).
❏
Le mot désigne d'abord la personne qui confie ses intérêts à un homme de loi puis aussi, par extension, à un patricien (1845). Le XVIe s. a réintroduit par emprunt le sens politique de « personne se mettant sous la protection d'un grand, moyennant son aide » (1538), spécialement en histoire romaine (1543). L'idée de rétribution a pris le pas sur celle de protection jusqu'à l'éliminer dans le sens commercial moderne (1826 ; XXe s., en économie) ; tout au plus client connote-t-il encore une idée de « fidélité » (1832) dans être client (chez un commerçant), être un bon client. En ce sens, le mot a évincé pratique et chaland. Notons que, historiquement à Rome, c'était le patronus qui se fournissait chez ses protégés, les clientes ; et c'est pourquoi l'anglais désigne encore par patron (à côté de customer) le client. Un sémantisme analogue est réalisé en français d'Afrique subsaharienne et de Madagascar, où client peut se dire du marchand habituel, là où on dirait en France fournisseur.
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Dans l'usage familier, être client pour... correspond à « avoir envie de, vouloir », notamment en emploi négatif.
❏
CLIENTÈLE n. f. est emprunté (1352) au latin
clientela « état de client » et « ensemble des clients d'un
patronus », employé à l'époque médiévale au sens de « vassalité, ensemble des vassaux » (1021-1024), « ensemble des domestiques d'un seigneur » (1136) et aussi « ensemble des amis » (671-709).
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Le mot a suivi la même évolution que client, prenant au XIXe s. son sens commercial : « ensemble des clients d'un commerçant ou d'un établissement auquel ils sont souvent fidèles » (1832). Cependant, son emploi dans le domaine juridique et, dans une certaine mesure, médical, mobilise la connotation étymologique de protection. Plus nettement encore, l'emploi du mot en politique, à propos des partisans d'un parti, d'un homme politique, réactive le sens d'« ensemble de ceux qui sont soumis à la protection d'un puissant » (1516).
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De là CLIENTÉLISME n. m. (mil. XXe s. att. 1972), mot péjoratif pour « pratiques politiques de relations personnelles intéressées ».
?
CLIGNER v., d'abord clignier (1155) , clingnier (v. 1175), clinier (v. 1180), est d'origine incertaine, peut-être d'un latin vulgaire °cludiniare, de °cludinare « fermer à demi les yeux », lui-même dérivé de cludere, variante de claudere (→ clore). L'évolution ui > i s'expliquerait par l'influence de mots issus de clinare (→ incliner) ou plus probablement de guigner*. Sans exclure un croisement avec une forme °cludicare (reconstituée d'après le provençal clucar), P. Guiraud préfère rattacher cligner à °cliniare, altération de clinare « abaisser », l'idée d'un abaissement momentané étant plus juste ici que celle d'une fermeture.
❏
Le verbe, d'abord employé dans l'ancienne construction clignier à qqn « lui faire signe en clignant des yeux », n'est guère employé qu'en parlant des yeux, des paupières, plutôt en construction intransitive (1180, clinier de l'uiel) que transitive (1175, clingnier les iauz). Par analogie, il est employé à propos d'une source lumineuse qui s'allume et s'éteint par intermittence (1873).
❏
Le diminutif
CLIGNOTER v., d'abord
cluneiter (apr. 1250) et
clingneter (
XIIIe s.), a été repris et répandu à la fin du
XVe s. sous sa forme actuelle. Le mot, qui assume le rôle de doublet fréquentatif de
cligner, a lui aussi développé le sens analogique de « scintiller » en parlant d'une source lumineuse (1869).
■
CLIGNOTEMENT n. m. (1546) lui sert de nom d'action, y compris dans un emploi analogique (1823, au figuré clignotement de l'existence).
■
CLIGNOTANT, ANTE p. prés. a été adjectivé puis substantivé (v. 1950) par ellipse pour le syntagme feu clignotant, là où le français de Belgique emploie CLIGNOTEUR n. m. (1948).
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Clignotant n. m. est passé en économie avec le sens figuré de « signal de dépassement d'une valeur qui annonce un danger » (1965).
◈
CLIGNEMENT n. m., autre dérivé de
cligner, d'abord
cloignement (fin
XIIIe s.-déb.
XIVe s.) et
clinement (v. 1320), s'est répandu à partir du
XVIe s. où, sous sa forme actuelle (1578), il exprime le mouvement rapide de la paupière. Par analogie, il se dit pour « fait de s'allumer et de s'éteindre alternativement », en parlant d'une source lumineuse (1921).
◈
CLIN n. m. (v. 1450
cling d'œil), déverbal de
cligner, est uniquement employé dans le syntagme lexicalisé
clin d'œil. Le sens de « mouvement d'un œil qui cligne » a été pris comme étalon d'un laps de temps très court (v. 1530) et comme symbole d'un signe d'intelligence, au propre et au figuré, quelquefois en apposition à un substantif.
CLIMAT n. m. est emprunté (v. 1278) au latin clima « inclinaison de la calotte céleste » d'où « partie du ciel », par extension « latitude », « région, contrée », mot désignant spécialement les quatre points cardinaux. Le mot latin est le calque du grec hellénistique klima, proprement « inclinaison » (conservé en grec moderne avec le sens actuel), de klinein « pencher, incliner, coucher », mot ayant des correspondants dans plusieurs langues indoeuropéennes, dont le latin clinare (→ incliner) et le grec klinein (→ clinique).
❏
Jusqu'au
XVIIIe s., l'usage du mot en français est proche de l'emploi extensif du grec et du latin :
climat désigne une zone terrestre déterminée par des facteurs géographiques comme sa situation par rapport aux corps célestes, et considérée sous l'angle des conditions atmosphériques (v. 1314). Plus généralement, il a le sens de « région » (fin
XIVe s.) voire, par extension, de « pays » (av. 1558), sens aujourd'hui archaïque ou littéraire. Ainsi, la théorie des climats , essentielle dans les sciences sociales du
XVIIIe s., est géographique et non pas météorologique. Au
XVIe s., il prend également le sens abstrait de « manière d'être, disposition », transposition sur le plan psychologique du sens étymologique « inclinaison ». Enfin, jusqu'au
XVIIe s., il s'est appliqué à une ancienne mesure agraire, sens hérité du bas latin.
■
Sa définition moderne en géographie pour désigner l'ensemble des conditions atmosphériques et météorologiques d'un lieu (1789, Mme de Staël) a fait passer la notion de lieu derrière celle d'atmosphère ; à son tour, elle a donné un emploi métonymique, « région où règne un climat donné », qui s'est confondu avec le sens ancien, d'où ses connotations archaïques et littéraires.
◆
Par le même type d'extension figurée qu'atmosphère et probablement sous l'influence du verbe acclimater, climat se dit aussi d'une ambiance morale (av. 1869) et d'un ensemble de conditions, spécialement en politique (v. 1940).
❏
La dérivation est tardive. Le premier mot formé,
ACCLIMATER v. tr. (1775, Buffon), procède encore du sens général de « milieu considéré sous l'angle de ses conditions biologiques ». Introduit en biologie, il a rapidement pris un sens figuré : « accoutumer à de nouvelles conditions de pensée, de vie » (1782), lequel a dû favoriser l'émergence du sens figuré de
climat au
XIXe siècle.
■
Les dérivés du verbe sont d'un usage plus didactique, tant ACCLIMATEMENT n. m. (1801, proposé par S. Mercier comme néologisme), en partie évincé par ACCLIMATATION n. f. (1832) dans des syntagmes comme jardin, parc (zoologique) d'acclimatation, que ACCLIMATABLE adj. (1845) et ACCLIMATEUR n. m. (1862).
◈
CLIMATOLOGIE n. f. (1834), avec ses dérivés
CLIMATOLOGIQUE adj. (1838),
CLIMATOLOGUE (1952) ou
CLIMATOLOGISTE n. (v. 1950), signale l'étude des climats comme objet de science à côté de
météorologie.
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CLIMATIQUE adj. (v. 1870-1880), apparu après l'anglais climatic (av. 1828) « relatif au climat », a supplanté climatorial, signalé et condamné par Littré, et climatérique (ci-dessous). Avec le sens spécial de « qui jouit d'un climat bienfaisant » (1912, station climatique), il a produit CLIMATISME n. m., relevé en mars 1947 lors des États généraux du thermalisme et du climatisme.
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CLIMATISER v. tr. (av. 1935) et CLIMATISATION n. f. (v. 1920) puis CLIMATISEUR n. m. (1955) sont apparus en relation avec les techniques dites, par anglicisme, de conditionnement d'air. Ainsi l'expression figurée air conditioned nightmare, appliquée à la vie américaine, a été traduite par cauchemar climatisé.
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L'abréviation CLIM n. f. (1985) est courante pour climatisation.
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CLIMATÉRIQUE adj. et n. f., emprunt savant (1554) au dérivé grec
klimaktêrikos, de
klimaktêr « échelon, degré », se dit des années de la vie humaine échelonnées selon les multiples de 7 et de 9 (49
e, 63
e année dite
grande climatérique) et, par extension, d'une période critique de la vie. Repris (1812) comme adjectif de
climat, le mot, critiqué par Littré, a été éliminé dans ce sens.
■
CLIMATÈRE n. m., emprunt (1546) au latin climacter, lui-même emprunté au grec klimaktêr, dérivé de klima (ci-dessus), désigne une étape critique de la vie humaine. Le mot est encore plus rare et didactique que climatérique.
◈
Le préfixé
MICROCLIMAT n. m. (1943) s'applique au climat d'une zone restreinte, lorsqu'il est différent de celui de la région.
PALÉOCLIMAT n. m. s'emploie en géologie, en paléontologie
(→ paléo-).
CLINIQUE adj. et n. f. est emprunté (1586) au latin clinicus, adjectif également employé sous la forme substantivée clinice « médecine exercée près du lit d'un malade ». Les mots latins sont calqués sur le grec klinikos « qui concerne le lit », substantivé au masculin à propos du médecin qui examine le malade au lit et au féminin klinikê (tekhnê) « médecine exercée au chevet du malade ». Klinikos est dérivé de klinê « lit », lui-même de klinein « pencher, incliner » (→ climat, incliner).
❏
Au début du XVIIe s., l'adjectif qualifie la personne qui, étant malade, garde le lit, et le substantif, parallèlement, désigne la médecine pratiquée au chevet du malade (1626). Ce sens est passé à l'adjectif, dans médecine clinique (1696) et examen ou signe clinique avec la valeur de « qui s'établit d'après l'observation directe du malade et non par la théorie ».
◆
Le substantif a pris son sens moderne au XIXe s., désignant l'enseignement donné par un professeur près du lit des malades (1808) d'où, par métonymie, l'emploi de une clinique pour l'établissement où est donné cet enseignement (1814), dans chef de clinique (1829), et, surtout, du point de vue du patient, l'établissement où le malade reçoit des soins (1890), sens devenu très courant en France avec la répartition entre hôpital (public) et clinique (privée).
❏
Les dérivés appartiennent au vocabulaire didactique élaboré au
XIXe siècle.
CLINICIEN, IENNE adj. et n. (1838) se dit du médecin,
CLINIQUEMENT adv. (1852) signifie « par l'examen clinique » et « du point de vue clinique, médical », et
CLINICAT n. m. (1866) « fonction de chef de clinique ».
◈
POLYCLINIQUE n. f. (1864), « clinique soignant plusieurs
(→ poly-*) types de malade », procède du sens le plus courant de
clinique n. f. et est plus ou moins confondu avec
POLICLINIQUE n. f. , littéralement « clinique de la ville » (du grec
polis « cité »,
→ police).
CLINQUANT, ANTE adj. et n. m. est une variante nasalisée (1454, clincant) de cliquant (1306), participe présent adjectivé de cliquer* « produire un son clair et métallique ».
❏
Dès le XVe s., par un transfert substituant la représentation visuelle à la sensation auditive, observé dans clicquant « brillant » (XVe s.), le mot désigne une lamelle d'or ou d'argent utilisée dans l'ornement d'habit.
◆
Par l'intermédiaire de la distinction vrai clinquant-faux clinquant, ce dernier syntagme désignant un métal simplement doré ou argenté, il a pris au XVIIe s. le sens dépréciatif de « mauvaise imitation de métaux précieux » (1680). Par transposition au figuré, il est passé dans l'usage général à propos d'un éclat faux, tapageur et trompeur (1677). Ce sens péjoratif, aujourd'hui dominant, est réalisé à son tour par l'adjectif (1844).
❏ voir
QUINCAILLIER.
1 CLIP n. m. est emprunté (1932) à l'anglo-américain clip « bijou muni d'un fermoir à ressort », sens spécialisé de l'anglais clip (v. 1470) « pince, agrafe ». Ce mot est le déverbal de to clip, du vieil anglais clyppan (v. 825) « étreindre, encercler », ayant développé de nombreuses acceptions techniques. Ce dernier se rattache à un germanique °kluppjan qui a des correspondants, en dehors des langues germaniques, dans le vieux slave razglobiti « presser », le lituanien glóbti « embrasser », et doit donc être indoeuropéen.
❏
Le mot a été lancé avec la mode des broches montées sur pince dans les années 1930. Il a été repris dans le vocabulaire technique de la médecine pour désigner une agrafe chirurgicale.
❏
Avec sa spécialisation technique, il a donné CLIPPER v. tr. (v. 1950) « serrer, tenir avec des clips ».
◆
Une variante CLIPER, se cliper a fait son apparition dans le style journalistique (1989) au sens de « (se) fixer comme par un clip ».
2 CLIP n. m. est emprunté (v. 1980 ? ; attesté 1983) à l'anglo-américain clip ou également video-clip, spécialisation, née de la rencontre de la musique rock et de la technique vidéo, du sens « extrait de film » (1958). Ce dernier est un emploi particulier du sens de « coupure, extrait » (1830), clip désignant d'abord les ciseaux, les cisailles (1681, pour la laine des moutons) et exprimant l'action de couper, de tailler (1825). Ce nom est le déverbal de to clip « couper aux ciseaux, tondre la laine », apparu sous la forme clippen (v. 1200) dans le nord de l'Angleterre, probablement de l'ancien norrois klippa (d'où norvégien, suédois klippa, danois klippe). Ce mot est probablement d'origine onomatopéique, avec transfert de la notion primitive de « faire un bruit sec », attestée par le bas allemand klippen, à celle d'« action produisant un bruit sec, par exemple en maniant des cisailles ».
❏
Le mot, d'abord et surtout employé dans les syntagmes clip vidéo et vidéoclip, désigne un court film vidéo utilisant des effets spéciaux et réalisé pour promouvoir une chanson, un groupe musical. Il s'est rapidement diffusé par la télévision, investissant le style journalistique dans des domaines autres que la musique (clip politique), également en apposition et en emploi adjectif (1987), par exemple dans esthétique clip.
❏ voir
CLIPPER.
CLIPPER n. m. est emprunté (1835) à l'anglo-américain clipper, nom d'un voilier de fort tonnage à vitesse élevée et aux formes minces, créé spécialement à Baltimore pour le commerce du thé et du coton. C'est une spécialisation, par allusion au fait que ce voilier fend les flots (1823) de clipper, nom d'agent (v. 1330) correspondant à to clip « tondre, couper » (→ 2 clip), employé au figuré pour « couper court » d'où « battre rapidement des ailes » et « se mouvoir rapidement, filer » (1838).
❏
Le mot, tant avec son sens d'emprunt qu'avec ses extensions, « canot de plaisance de forme effilée » (1854) et, par analogie, « avion de transport transocéanique » (1939), est d'un usage technique et a vieilli lorsqu'il ne s'agit pas d'évoquer le passé.
+
CLIQUER v. intr. est formé (1306) sur le radical expressif klikk- évoquant un bruit sec (→ clinquant). D'après les dérivés, ce verbe devait être employé dès le début du XIIIe siècle. Son radical existe sous des variantes vocaliques (→ claque) et consonantiques (→ clapper, clapoter), y compris dans d'autres langues, notamment germaniques (→ 2 clip).
❏
Le verbe, signifiant « émettre un bruit sec », n'était plus employé, sinon régionalement ou par archaïsme, mais a produit une importante dérivation.
◆
Il a été repris par anglicisme (de to click, du même radical) en informatique comme verbe correspondant au substantif clic*, le composé DOUBLE-CLIQUER, anglicisme syntaxique, correspondant au double-clic. Dans le même contexte, CLIQUABLE adj. qualifie la zone de l'écran où l'on peut cliquer.
❏
Dès le
XIIIe s., plusieurs dérivés apparaissent qui sont demeurés dans l'usage.
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CLIQUETTE n. f. (v. 1230, clikete) désigne un petit instrument à percussion utilisé par les lépreux au moyen âge pour signaler leur présence (Cf. crécelle) puis par les marchands ambulants et les musiciens, ainsi qu'un instrument utilisé lors des offices liturgiques. Concurrencé par claquette, le mot est employé par les pêcheurs à propos d'une pierre trouée servant à lester leurs filets (1723) et, dans certaines régions, à propos du petit levier servant à fixer une persienne.
■
Le masculin CLIQUET n. m. (v. 1280), apparu sous la forme clicet dans l'ancienne locution tout de clicet « sur le champ », et employé en ancien français au sens de « clenche » (v. 1290), a pris au XVIIIe s. deux sens techniques, désignant une petite pièce empêchant une roue de tourner en arrière (1752) et, par allusion au bruit sec du ressort, le système de fermoir d'un bracelet (1771).
■
CLIQUETER v. intr., d'abord cliketer (v. 1230), diminutif de cliquer, signifiait « agiter une cliquette de lépreux » et, par extension, « produire un petit bruit sec, bref, léger et aigu souvent répété ».
■
En sont dérivés CLIQUETIS n. m. (apr. 1250, cliketis) dont le sens propre « succession de bruits métalliques, secs et brefs » a donné la valeur figurée de « bruit de mots » (1752), CLIQUÈTEMENT ou CLIQUETTEMENT n. m. (XVe s.), dont l'usage s'est raréfié à partir du XVIIe s., et l'adjectif CLIQUETANT, ANTE (1555), tiré du participe présent.
◈
CLIQUE n. f., apparu à l'époque classique (1694) avec le sens abstrait de « société fermée de gens », est probablement le déverbal de
cliquer « retentir », par allusion aux rumeurs et intrigues qui caractérisent ces coteries : il ne semble pas nécessaire d'en faire une transposition de sens de l'ancien français
clique « loquet » par allusion au caractère fermé de ces cercles. Quoi qu'il en soit, ce nom est détaché et démotivé par rapport aux autres mots de la série. La valeur péjorative du mot s'est affirmée en politique où
clique désigne un groupe d'intérêts peu estimable.
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Le sens concret, « ensemble des clairons et des sonneries d'une troupe » (1863), est une réactivation de la valeur onomatopéique du radical.
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En français de Suisse, sans péjoration, le mot s'emploie à propos d'un groupe déguisé accompagné de musiciens, lors de festivités ou de carnavals (les cliques bâloises).
◈
Le préfixé verbal
DÉCLIQUER v. tr. (v. 1225) serait dérivé de l'ancien français
clique « loquet », « détente », avec le préfixe
des-, dé- et une désinence verbale. Archaïque ou sorti d'usage aux sens de « décocher, envoyer des armes de trait », « asséner (un coup) » (fin
XIVe s.), par figure « faire entendre, faire résonner » (1330-1332) et « faire connaître, avouer » (1360-1370), il a pris, sous l'influence de son déverbal
déclic, le sens de « déclencher le mécanisme d'un canon » (fin
XIVe s.).
■
Le déverbal DÉCLIC n. m., après une attestation isolée dans déclic de langue (v. 1510) avec l'idée de « bavarder, caqueter », toujours virtuelle dans ce groupe de mots, est repris au XVIIe s. avec le sens concret de « crochet ou ressort dont le jeu met un mécanisme en action » (1699). Il a développé par métonymie les sens de « jeu, mouvement de cette pièce » (1838) et de « bruit ainsi produit » (1896). Par métaphore, il est employé abstraitement dans le domaine du comportement humain pour « cause qui déclenche une réaction ».
❏ voir
CLIC.
CLITORIS n. m. est emprunté (1611) au grec kleitoris, terme d'anatomie féminine. Ce mot, qui présente la finale rare -toris, est une forme créée plus ou moins arbitrairement, rapprochée par Chantraine de klein « fermer », dénominatif de kleis « barre, verrou », « clef », auquel le latin clavis (→ clef) pourrait être emprunté.
❏
Le mot, désignant l'organe érectile situé à la jonction supérieure des grandes lèvres de la vulve, s'est répandu dans l'usage, quelquefois sous les abréviations argotiques et familières clito (1972), antérieurement cli-cli (1953) et, d'après l'anglais, clit.
❏
CLITORIDIEN, IENNE adj. (1764) « relatif au clitoris » a évincé
clitorien, ienne (1824) et s'est répandu avec le sens spécial de « dont la sexualité clitoridienne est développée », également substantivé au féminin.
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CLITORIDECTOMIE n. f., composé avec -ectomie « ablation », désigne (mil. XXe s.) l'excision du clitoris (syn. courant : excision).
CLIVER v. tr., d'abord attesté au participe passé clivé chez le médecin bourguignon F. Bretin (1582) et repris au XVIIIe s. (1723), est emprunté au néerlandais klieven « fendre », la Hollande possédant depuis le XIVe s. une industrie diamantaire florissante. Le mot néerlandais, antérieurement clieven, clûven, correspond à l'anglais to cleave et à l'allemand klieben, au suédois klyfva et au danois klöve. Ces mots appartiennent à un radical germanique °kleub̸-, °klaub̸- qui se rattache lui-même à une racine indoeuropéenne °gleubh- représentée dans le grec gluphein « couper au couteau », « creuser en taillant » (→ -glyphe).
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Le mot est introduit au XVIIIe s. comme terme de minéralogie avec le sens de « fendre un minerai cristallisé dans le sens de ses couches lamellaires ». Il est passé dans l'usage soutenu avec le sens figuré de « scinder (un tout) en parties » (XXe s.).
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CLIVAGE n. m., enregistré par l'Encyclopédie (1753) comme terme de diamantaire, a été repris en médecine et en biologie. Par figure, il exprime (1932) la faculté, le fait de pouvoir être scindé en différentes parties, spécialement en psychanalyse (clivage du moi).
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CLIVABLE adj. (1838) et CLIVEUR n. m. (1892) se bornent à un usage technique, en minéralogie et en chirurgie.
CLOAQUE n. m. est emprunté (v. 1355) au latin cloaca « égout » — le grand égout de Rome s'appelait la cloaca maxima — quelquefois au figuré « ventre » (→ cataclysme). Le mot se rattache très probablement à une racine °kleu- représentée par le grec kluzein « baigner, rincer », l'ancien haut allemand hlūtar « pur, propre » et, en celtique, le gallois clir « propre ».
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Repris avec le sens de « réceptacle pour les eaux sales et les immondices », le mot a pris par extension le sens péjoratif de « chose sale, endroit sale » (1569) et dès le XVIe s. avec la valeur figurée de « corruption, souillure ».
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Par analogie, il est employé en anatomie animale comme dénomination de la poche située à l'extrémité du tube intestinal, chez certains vertébrés inférieurs (1746-1748).
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CLOACAL, ALE, AUX adj. (1838) est un terme didactique d'anatomie animale.
L +
1 CLOCHE n. f. est hérité (av. 1150) du bas latin clocca, attesté en 550 dans le domaine anglais et importé sur le continent par les moines irlandais évangélisateurs de l'Europe. Le mot, formé sur une racine celtique (ancien irlandais cloc de même sens), doit correspondre à une onomatopée apparentée à klak-, klik-. Il a remplacé le représentant du latin campana dans les parlers du Nord et dans plusieurs régions du Sud (→ campanile, campanule).
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Nom d'un instrument à percussion important dans la culture par son usage religieux,
cloche a donné plusieurs locutions usuelles
(sonner les cloches), notamment de sens figuré
(son de cloche).
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Par analogie de forme, le mot désigne divers objets creux qui recouvrent, protègent (1538), en particulier une coupe de forme hémisphérique que l'on met sur les melons et autres plantes fragiles (1675), et dans
cloche à fromage (
XIXe s.) un couvercle sous lequel on place le fromage.
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En français de Belgique,
cloche se dit pour « ampoule sur la peau ». D'autres emplois particuliers d'ordre technique (1678,
cloche à plongeur) ou courant tel le sens « chapeau évasé sur les bords » (1904) aussi
chapeau cloche. Robe cloche, jupe cloche (1895), sont demeurés vivants.
Par comparaison, cloche fait son entrée dans le Dictionnaire comique de Leroux (1718), appliqué à des gens indécis, à qui l'on fait dire ce que l'on veut, qui fait allusion au mouvement de va-et-vient et à l'idée de balancer « hésiter ». Telle pourrait être l'origine du sens argotique puis familier de « personne stupide et incapable » (1872), à rapprocher de l'expression avoir la cloche fêlée « être fou » où cloche a le sens de « tête » (1819). Cependant, certains rapportent le sens de « personne incapable » à l'homonyme cloche, déverbal de clocher*.
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2 CLOCHER n. m., d'abord
clochier (1160-1170), dérivé de
cloche d'après le latin médiéval
cloccarium (v. 800), désigne, avec un sens local, la partie élevée d'une église qui contient les cloches. Par une métonymie référant au fait que le clocher est l'emblème par excellence du village, du bourg, il a inspiré la locution
esprit de clocher « esprit attaché exclusivement à ce qui concerne son milieu local ».
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CLOCHETTE n. f., d'abord
clochete (déb.
XIIIe s.), réalise le sens propre de « petite cloche » et, par analogie, fournit une dénomination pour plusieurs espèces de fleurs dont la corolle évoque une petite cloche (1611).
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Son dérivé verbal CLOCHETER v. intr. (fin XIIIe s.) a eu en ancien et moyen français le sens de « sonner, en parlant de la cloche », « faire tinter une clochette » (1379) ; sa reprise en 1853 (G. Sand) n'a pas suffi à diffuser le mot.
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Son dérivé CLOCHETEUR n. m., d'abord cloqueteur (1326) a désigné le sonneur qui autrefois précédait le convoi funèbre en agitant une clochette. Le mot, sorti d'usage et repris au XIXe s., s'applique quelquefois au mannequin d'horlogerie qui vient aux heures frapper un timbre (1863, Gautier).
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Clochette a également servi de base pour former CLOCHETON n. m. (v. 1700), bien que le sens de ce mot, « petit clocher », en fasse sémantiquement le diminutif de clocher.
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À son tour clocheton a donné CLOCHETONNÉ, ÉE adj. (1859) à la description architecturale et littéraire.
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2 CLOCHER v. (1547), « annoncer à son de cloche », et son dérivé
CLOCHEMENT n. m. (1637) n'ont pas réussi à s'implanter, peut-être gênés par l'existence du verbe homonyme
1 clocher*.
❏ voir
CLOQUE.