COCHENILLE n. f. est emprunté (1578), d'abord sous la forme cossenille (1567) modifiée d'après cosse, à l'espagnol cochinilla (1555) « principe colorant fourni par un insecte vivant sur un cactus, le nopal » et « insecte dont on extrait ce principe » (XVIe s.). Ce mot est probablement la transposition de sens de cochinilla « cloporte » (1611) à cause d'une certaine ressemblance entre cet animal et la cochenille femelle. Cochinilla est un diminutif de cochino (→ cochon) par transposition du nom d'un animal d'élevage familier à un petit animal, comme c'est aussi le cas pour crevette, bien que la choronologie des sens ne soit pas accordée. L'hypothèse du grec konkhulion « coquille », par le biais de l'espagnol, et celle du latin vulgaire °coccinilla, dérivé de coccum « cochenille » (précisément), sont moins recevables formellement.
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Le mot désigne en français l'insecte et surtout le principe colorant qui en est tiré.
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COCHENILLER v. (1671), « teindre avec la cochenille » d'où COCHENILLAGE n. m. (1723) « bain de teinture préparé avec la cochenille », appartiennent également à l'usage technique ancien.
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COCHON n. m. est d'origine obscure (1091), peut-être issu, avec suffixe -on, de l'onomatopée koš-kǒs (coch-) exprimant le grognement de l'animal et servant à l'appeler. La proposition d'un étymon bas latin cutio, -onis « cloporte » fait difficulté des points de vue phonétique et sémantique, la dénomination du cloporte (cochon de saint Antoine) étant plus facilement issue de celle du porc que l'inverse (→ cochenille).
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Le mot, d'abord attesté comme nom propre, désigne seulement le jeune porc en ancien français (v. 1278) — se distinguant ainsi de porc* — avant de prendre par extension le sens de « porc adulte » (1611).
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Le sens figuré de « personnage grossier, physiquement ou moralement » (fin XVIIe s.) est surtout réalisé par des locutions comparatives du type ...comme un cochon, et pris en charge par l'adjectif COCHON, ONNE (1611) qui dénote à la fois la saleté physique et un comportement sexuel réprouvé, aussi en parlant de choses (par ex. cinéma cochon « pornographique »). Cette valeur est assumée aussi par le nom, pour « personne très sale » et « personne salace, obscène, etc. », souvent en appellatif injurieux. Le féminin s'emploie plus souvent pour la saleté (petite cochonne !), le masculin avec les deux valeurs, distinguées par le contexte (petit cochon ! s'opposant à vieux cochon !). Dans ces emplois, cochon est en concurrence avec porc.
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En ancien français,
cochon a produit
COCHONNET n. m. (
XIIIe s.) dont le sens de « cochon de lait » a été repris par
porcelet, et qui garde des sens analogiques réalisant l'idée d'une petite boule ronde, désignant couramment une petite boule servant de but au jeu de boules (1542).
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4 COCHE n. f., d'abord
coiche (
XIVe s.), a vieilli au profit de
truie comme dénomination de la femelle du cochon.
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1 COCHONNER v. intr. signifie (1403) « mettre bas, en parlant de la truie ». Le verbe est rare dans ce sens, à cause de l'homonyme figuré et transitif (ci-dessous).
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COCHONNÉE n. f. (1642), « portée d'une truie », correspond à ce verbe ; comme lui, il est rare.
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COCHONNAILLE n. f. (1788), mot familier, désigne, en général au pluriel, des charcuteries, avec une connotation aujourd'hui positive d'abondance et de saveur ; le mot est usuel dans la restauration simple, rurale.
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Les valeurs figurées et péjoratives de
cochon ont produit depuis le début du
XIXe s. plusieurs dérivés.
2 COCHONNER v. tr. signifie (1808) « salir » et surtout « faire salement (qqch.) ».
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COCHONNERIE n. f. est plus ancien (1688) au sens d'« action indécente, obscène » ; le sens propre, « élevage des porcs » (fin XVIIe s., Vauban), n'a pas vécu. Le mot, qui s'est surtout répandu au XIXe s., est rare au sens de « malpropreté », mais usuel pour « petite chose sale », et alors fréquent en antiphrase (c'est bon, ces petites cochonneries !).
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Il est doublé plaisamment par un dérivé irrégulier de cochon, d'après la finale de méchanceté et avec influence de saleté : COCHONCETÉ n. f. (1878) « caractère sale ou obscène » et aussi « cochonnerie ».
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COCHONNEMENT adv. (1834) et COCHONNIER n. m. (1890) ont disparu de l'usage.
COCKER n. m. est emprunté (1863) à l'anglais cocker (déb. XIXe s.) « race de chien qui chasse la bécasse » (woodcock), de cocking « chasse à la bécasse » (XVIIe s.), lui-même dérivé de cock « coq » (→ coq) ou de son composé woodcock, littéralement « coq des bois » d'où « bécasse ».
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Le mot désigne un petit chien de chasse de la race des épagneuls, apprécié comme animal de compagnie.
COCKNEY n. a été emprunté (1750) à l'anglais cockney, antérieurement cokeney, cokenay, de cock (→ coq) et -ey altération de egg « œuf », proprement « œuf de coq ». Le mot a d'abord été un nom enfantin pour l'œuf de poule (XIVe s.), comme coco* en français. Il est devenu une désignation affective pour l'enfant choyé ; puis il a désigné un homosexuel, un mignon (XVIe s.) et enfin un habitant natif de Londres : le citadin efféminé étant opposé au robuste paysan (fin XVIe s.). Cette appellation péjorative, probablement extérieure, a été reprise par les Londoniens et s'est appliquée aux gens du peuple, dans la métropole, notamment caractérisés par leurs manières et leur langage.
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Le français a repris le mot, répandu au XIXe s., pour une personne née à Londres mais en mettant l'accent sur l'aspect populaire (de façon comparable à titi, Parigot) et, surtout, sur la manière de parler. De là, par métonymie, l'emploi de cockney pour la langue, y compris comme adjectif (parler cockney, accent cockney).
COCKPIT n. m. est emprunté (1878) à l'anglais cockpit, mot désignant à l'origine une arène de combats de coqs (XVIe s.) et composé de cock (→ coq) et de pit « trou, fossé ». Ce dernier remonte, par un représentant germanique, au latin puteus qui a donné le français puits*. Cockpit est passé en anglais dans le domaine de la marine à propos de la partie du faux pont réservée aux jeunes officiers où l'on soignait les blessés pendant les combats (1706) ; puis il a désigné la partie creuse (en forme de fosse) d'une embarcation où l'on s'assied (seulement attesté en 1887). L'extension au domaine de l'aviation (1915) a été facilitée par le fait que l'habitacle des avions était originellement à ciel ouvert, comme dans les embarcations légères.
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Le mot apparaît en français en 1878 dans la revue Le Yacht, désignant le creux dans le pont d'un navire de plaisance. Son emploi en aviation (v. 1939) résiste à la concurrence de l'équivalent poste de pilotage proposé pour le remplacer (1959, Défense de la langue française).
COCKTAIL n. m. est emprunté (1755, puis 1836) à l'anglais cocktail, formé de cock (→ coq) et de tail « queue », qui a d'abord désigné un cheval auquel on a coupé un muscle de la queue de façon à ce qu'elle se redresse comme celle d'un coq (av. 1800). Cette opération, appelée en français anglaiser, n'étant jamais pratiquée sur des chevaux de pure race, le mot en est venu à désigner un cheval de course bâtard (1808) puis, par analogie, un homme de noblesse incertaine (1854). L'idée de bâtardise a donné celle de « mélange » et le sens de « boisson alcoolisée composée de substances différentes » apparaît aux États-Unis dès 1806.
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Le mot, d'abord attesté isolément chez l'abbé Prévost, grand traducteur de l'anglais, au sens d'« homme abâtardi », n'a retenu de l'anglais que l'acception de « boisson composée d'un mélange de substances », attestée en 1836 mais surtout diffusée au XXe siècle. Par extension, il désigne diverses mixtures (au propre et au figuré) et s'emploie aussi pour une « réunion où l'on boit », sens typiquement français pour cocktail-party.
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L'appellation cocktail Molotov (1939) semble finlandaise ; elle vient du nom de l'homme politique russe V. Mikhaïlovitch Scriabine, dit Molotov, vice-président du Comité de défense nationale de l'U.R.S.S. pendant la Seconde Guerre mondiale, et désigne un projectile artisanal (bouteille renfermant un mélange très combustible) utilisé au combat.
1 COCO n. m. employé seul (1555) puis dans noix de coco (1610), est emprunté, par l'intermédiaire de l'italien et de l'espagnol, au portugais coco (1330), lequel serait issu, par métaphore (d'après l'aspect hirsute de la noix) de coco « croque-mitaine ». Il s'agit probablement d'une métaphore de l'ibéro-roman coco, désignation de divers fruits ronds, de même origine que coque*. On a dit coche (coque) en moyen français (1325).
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Le mot désigne un fruit exotique en forme de grosse noix ovoïde brunâtre renfermant un liquide sucré et blanchâtre
(lait de coco).
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Son emploi à propos d'une boisson à la réglisse et au citron (1775 ; populaire jusqu'au
XXe s.) est une extension du sens d'« eau-de-vie » (1718), parce que l'on fabriquait de l'eau-de-vie avec le suc vineux tiré des racines du jeune cocotier.
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Par analogie de forme,
coco est une désignation familière de la tête (1847) et de l'estomac.
En français d'Afrique, des Antilles, de la Réunion..., coco s'emploie seul pour « noix de coco », avec des expressions spécifiques : coco vert, coco sec (« mûr »), aux Antilles et en Guyane. Coco fesse (variété à grosses noix doubles) se dit dans l'océan Indien.
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Eau, crème de coco désigne le liquide plus ou moins crémeux contenu dans la noix ; lait de coco dénomme aussi la boisson faite de pulpe de noix de coco râpée et pressée. Gâteau de coco : gâteau à la noix de coco. Pain coco, en français de Polynésie, « gâteau à la noix de coco en forme de pain de mie ».
Au sens figuré de « tête », « crâne » (qu'on pourrait rattacher à 2 coco, mais qui, en français des pays tropicaux, évoque la noix), le mot est usuel en français d'Afrique et de l'océan Indien. Faire coco rasé (français de Madagascar), coco taillé (Afrique) : se raser le crâne (en français québécois : avoir, se faire faire un coco). Le mot, pour « tête », s'est en effet employé au Québec, surtout entre les années 1860 et le début du XXe s. ; il est aujourd'hui vieilli (alors qu'un autre emploi, du français de France, pour « personne bête et grossière » est toujours en usage). Ces emplois sont plutôt à rattacher à 2 coco.
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COCOTIER n. m. (1677) est la réfection, avec consonne d'appui, de l'ancien
cocoyer (1709) à côté de
coquier (1601), d'après le portugais
coquoeiro. Le mot a produit
COCOTERAIE n. f. (1929).
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COCOSE n. f. (1929), fait avec le suffixe de chimie organique -ose, désigne la graisse extraite de l'amande du coco, couramment appelée végétaline.
2 COCO n. m., attesté en 1863 mais certainement plus ancien, est une formation expressive qui représente probablement un redoublement onomatopéique (d'après le cri de la poule) de coque* « coquille d'œuf, œuf ». Il appartient, avec cocotte* « poule » et cocard*, à un groupe de mots expressifs représentés dans les langues romanes (italien cocco « œuf », XIVe s.).
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Le mot est employé par les adultes en s'adressant à de jeunes enfants pour désigner l'œuf de poule.
Le sens dépréciatif de « vilain personnage » (1792), parfois sous la forme joli coco, est probablement, en dépit de l'écart chronologique, un emploi antiphrastique de coco qui sert familièrement à s'adresser aux enfants (1808), puis à des adultes (appellatif à la mode, par ex. dans les milieux de la télévision, de la publicité, vers 1970). Cet emploi est en rapport avec celui de cocotte au féminin et coco correspond alors plus au sémantisme de « poulet » (Cf. ma poule, mon poulet) que d'« œuf ».
4 COCO n. f. → COCAÏNE (art. COCA)
COCOLER v. tr., d'abord attesté par écrit sous la forme coqueler (1641), représente une forme patoise de Suisse, du Dauphiné ; le verbe est clairement expliqué dans ce texte (« comme la poule fait des poussins ») par le sémantisme de coque et de coco « œuf », et la valeur figurée de couver en français standard. Il s'emploie en Suisse pour « choyer, dorloter ».
COCON n. m., d'abord coucon (1600, jusqu'à 1752) puis coccon (1653), est un emprunt au provençal coucoun « coque d'un œuf » et « enveloppe où une chenille, notamment de ver à soie magnan, se transforme en chrysalide », dérivé de coco « coque, coquille », de même origine que coque*.
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Le mot désigne l'enveloppe soyeuse que filent les chenilles de certains Lépidoptères et, par extension, celle d'autres animaux (araignées). Par métaphore, il est pris avec une idée de « douceur protectrice »
(se retirer dans son cocon) qui a fait la fortune, plus récemment, de l'anglicisme
COCOONING n. m. (v. 1988), lui-même dérivé d'un verbe tiré de
cocoon, emprunté (
XVIIe s.) à
cocon.
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Le langage populaire a fait de cocon une désignation de la tête, aujourd'hui archaïque, par attraction paronymique de 2 coco*.
COCOTTE n. f. est issu (1807), par changement de suffixe (et influence de l'homonyme), du moyen français cocasse, coquasse (1542 ; encore dans les parlers du Morvan et de l'Yonne), nom de divers récipients, qui est soit l'altération de l'ancien coquemar (1280) « bouilloire à anse », soit à rattacher à coque « coquille » (→ coque).
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Le mot désigne une petite marmite en fonte servant à faire mijoter les mets, employé en construction d'apposition avec valeur de complément circonstanciel (poulet-cocotte). Cocotte-minute, nom de marque déposée (XXe s.), est synonyme d'autocuiseur.
2 COCOTTE n. f. est un mot expressif (1789) formé sur l'onomatopée du cri de la poule (cot-cot !), déjà représentée en latin (→ coq), utilisé dans différentes acceptions selon un rapport direct avec le sens de « poule », par analogie de forme et allusion au cri, à l'aspect, à la peau, à la crête de l'animal, à des qualités ou défauts attribués à la poule.
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Le premier sens, « femme de mœurs légères », se greffe sur la valeur hypocoristique du terme comme nom enfantin de la poule (1808) et s'emploie en concurrence avec poule, aussi en appellatif (ma cocotte, aujourd'hui mis en rapport avec mon coco). Très usuel au XIXe s. et au début du XXe s., il tend à vieillir à partir des années 30.
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Par analogie de forme, le mot est employé à propos d'un pliage en papier (1842), surtout dans cocotte en papier.
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Le sens de « femme aux mœurs légères » a produit les dérivés éphémères
COCOTTERIE n. f. (1866),
COCOTTISME n. m. (1878) ainsi, probablement, que le verbe
COCOTTER v. intr. (1900) « sentir fort », d'après
sentir la cocotte « sentir le parfum fort et médiocre des femmes légères » ; la forme disparue
gogoter (1881) pourrait toutefois orienter sur une autre piste ; peut-être une altération de
gogue, goguenots « fosse d'aisances ». Dans ce cas, l'allusion au parfum des cocottes serait une remotivation
a posteriori.
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L'influence de
cocotte, peut-être celle de
chouchou pour le sens, est très probable sur
CHOCHOTTE n. f. et adj. (1901), appellation et désignation familières d'un homme efféminé, puis d'un homosexuel. Cependant, le mot est probablement surtout expressif, évoquant un chuchotement affecté.
3 COCOTTE n. f. est un dérivé (1886) de 1 coq, qui a servi à former plusieurs noms de végétaux, dont coquelicot, pour le cône des résineux (sapin, pin, épicéa au Canada), réalité qui porte en français plusieurs noms, pive, pigne (occitanisme). Le mot est connu en Lorraine, mais a dû s'employer dans l'ouest de la France, car il est vivant en français du Canada (ramasser des cocottes).