COMBINER v. tr. est emprunté (fin XIIIe s.) au bas latin combinare « unir deux choses ensemble », de cum, com- (→ co-) et de bini « par deux, paire » (→ binaire).
❏
L'ancien sens intransitif, « être à deux », s'est effacé au cours du moyen âge au profit du sens transitif actuel « assembler deux ou plusieurs éléments » (v. 1370), concernant un assemblage dans un ordre déterminé, puis aussi, par extension, un assemblage d'éléments variés (1690). Le XVIIIe s. a vu la spécialisation du mot en chimie (1762) et son usage s'étendre à des objets abstraits tels que preuves, incidents, raisonnements (1740).
◆
À la même époque, l'accent étant mis sur le but de l'opération, combiner a reçu, avec un objet désignant une entreprise, une réalisation complexe, la valeur d'« organiser minutieusement » (av. 1789), parfois avec une valeur négative (combiner un mauvais coup).
❏
Les dérivés de
combiner ne sont pas antérieurs au
XVIIIe siècle.
COMBINÉ, ÉE adj. apparaît dans un contexte militaire (1752).
◆
Le mot est repris comme nom masculin pour désigner un appareil téléphonique combinant micro et récepteur (1905). Cet emploi est propre au français de France ; on dit en Belgique, en Suisse,
carnet de téléphone, au Québec,
acoustique. Tout ce vocabulaire tend à vieillir avec l'évolution technique.
◆
Combiné s'est appliqué plus tard, à un vêtement (1960).
◆
Ce nom désigne en sport une épreuve complexe (1924), notamment en ski
(combiné alpin), en parachutisme.
■
COMBINATEUR, TRICE adj. et n. m. (av. 1741) est sorti d'usage, mais a été repris en électricité pour désigner un appareil de commutation effectuant des combinaisons de circuits.
■
COMBINATOIRE adj. et n. f. est apparu (1732) pour qualifier et désigner ce qui met en œuvre des combinaisons d'éléments, surtout en mathématiques, en logique (logique combinatoire), en linguistique.
◈
COMBINARD, ARDE adj. et n. est dérivé (1920), avec le suffixe péjoratif
-ard, de
combiner « organiser à son profit », d'après
combinaison, combine.
◈
COMBINAISON n. f. est l'altération (1669) de l'ancien
combination, lui-même emprunté au bas latin
combinatio « association de deux choses ».
◆
Son sens particulier de « sous-vêtement d'une seule pièce » (1895 en France ; 1890 en français du Canada) est dû à l'anglais
combination (garment) [1884]. Depuis 1920, il sert aussi à désigner un vêtement de travail ou de combat d'une seule pièce.
◆
L'abréviation familière
COMBINE n. f. (fin
XIXe s.) assume le double sens de « moyen astucieux » et de « combinaison (vêtement) ».
◈
COMBINAT n. m. (1935) est probablement l'adaptation du russe
kombinat, formé sur le correspondant russe du verbe
combiner, kombinirovat', pour désigner dans l'ancienne U.R.S.S. le groupement de firmes ou centres industriels ayant des activités complémentaires.
◈
Enfin,
combinaison et
combine sont doublés par l'italianisme
COMBINAZIONE n. f. au sens de « manœuvres compliquées et intéressées ».
L
1 COMBLE n. m. est issu, d'abord sous la forme cumble (v. 1160), du latin cumulus « tas, quantité qui dépasse la mesure », au figuré « surplus » et « couronnement, apogée », sens auquel il est synonyme de culmen (→ culminer), mot auquel le sens de « sommet, faîte » semble emprunté. Cumulus a pris par extension le sens de « amas, levée de terre entre deux sillons », souvent en association avec tumulus (→ tumulus).
❏
Rare au sens concret de « surcroît d'une mesure », comble est surtout vivant au sens abstrait de « maximum, degré le plus haut » (apr. 1150), dans la locution le comble de et (dès 1160) dans a cumble « excessivement, outre mesure ». Dans ces valeurs (c'est le comble, un comble !), le mot présente uniquement une valeur péjorative.
◆
D'un emploi tardif de cumulus à la place de culmen « faîte, sommet », il tient le sens concret de « construction surmontant un édifice et en supportant le toit » (1260).
◆
Plus couramment, au singulier ou au pluriel, il désigne la partie la plus haute d'un bâtiment (1811), loger sous les combles signifiant « loger sous les toits ». Cette acception a fourni la locution de fond en comble (1680), réfection de de comble en fons (XVIe s., av. 1574), dont la formation rappelle de la cave au grenier et qui a pris rapidement le sens figuré de « complètement » (1589). L'emploi figuré du mot, au sens de « plus haut point », propre au style littéraire, n'est pas très distinct de celui de « mesure remplie ».
❏ voir
COLMATER, COMBLER, CUMULER, CUMULUS.
L
COMBLER v. tr. est issu (v. 1150) du latin cumulare (→ cumuler) « entasser, accumuler », « remplir en entassant » et « fournir (qqn) en abondance », lui-même dérivé de cumulus (→ comble).
❏
Le sens propre, « remplir (une mesure, un récipient) jusque par-dessus bord », a vieilli et s'est mieux maintenu dans un emploi figuré de la locution combler la mesure (v. 1583-1590).
◆
Dès l'ancien français, le mot exprime l'idée figurée de « donner en profusion (qqch.) » dans le participe passé adjectivé comblé (1165-1170), l'emploi correspondant du verbe n'étant attesté qu'en 1564 dans sa construction actuelle combler qqn de. Le sens propre concerne le fait de remplir entièrement (et non par-dessus bord) une cavité, en emploi pronominal (apr. 1250) et transitif (1441), emploi étendu plus tard à un récipient.
❏
2 COMBLE adj. (v. 1200), « rempli jusqu'au bord », a cédé son emploi figuré, attesté dès les premiers textes, au participe passé adjectivé
COMBLÉ. De nos jours, il est surtout usuel au sens hyperbolique de « plein à craquer » (1817) en parlant d'un espace clos, salle, moyen de transport collectif.
◆
Par analogie, le syntagme
pied comble (1393) désigne en médecine vétérinaire un sabot dont la sole porte seule à l'appui.
■
COMBLEMENT n. m. (1515) est le substantif d'action de combler.
COMBUSTION n. f. est emprunté (v. 1180) au bas latin combustio « action de brûler par le feu », dérivé de comburere « brûler complètement », verbe composé de cum, com- (→ co-) et de urere, qu'il a tendu à supplanter. Ce mot, peu représenté dans les langues romanes, a des correspondants en grec, en sanskrit et dans quelques formes nominales germaniques et doit donc se rattacher à une racine indoeuropéenne.
❏
Le sens d'« incendie » a cédé la place à celui d'« action de brûler complètement » (1625), didactique ou littéraire, spécialement en chimie en parlant de la combinaison d'un corps avec l'oxygène (1753).
◆
Le sens figuré de « désordre, effervescence » (1559) appartient au style soutenu.
❏
COMBUSTIBLE adj. et n., dérivé (
XVe s.) du radical de
combustion, qualifie ce qui a la propriété de brûler, spécialement en chimie, et, au figuré, ce qui est prompt à s'enflammer (1762, Rousseau).
◆
Substantivé (1793), il désigne une substance qui a la propriété d'entrer en combustion et de dégager de la chaleur utilisable. Il est alors très courant, connotant ce qui est nécessaire à un fonctionnement.
■
Le mot a servi à former INCOMBUSTIBLE adj. (1361 ; rare av. le XVIIIe s.) et COMBUSTIBILITÉ n. f. (XVIe s.).
◈
PRÉCOMBUSTION n. f., attesté en français dans les années 1940, est peut-être pris à l'anglais, où le composé est formé dès 1923. C'est le nom donné à la phase du cycle d'un moteur Diesel précédant l'entrée en combustion du combustible.
■
POSTCOMBUSTION n. f. (1955) est apparu à propos des turboréacteurs, pour la combustion du carburant par l'oxygène émis par les gaz incomplètement brûlés, qui augmente le rendement. Le mot s'applique aussi au traitement des gaz d'échappement d'un moteur à explosion.
◈
COMBURANT, ANTE adj. et n. m. est le participe présent adjectivé de l'ancien français
comburir « brûler entièrement » (av. 950), lequel représente, avec changement de désinence, le latin
comburere.
■
Un autre représentant du verbe latin, COMBURER v. tr. (1416-1422), a été employé en moyen français à la voix passive puis, au XVIe s., en constructions transitive et intransitive ; il a été repris au XIXe s. en chimie (1866) et dans la langue littéraire par latinisme.
■
Comburant est attesté une seule fois en ancien français (av. 1314), qualifiant ce qui a pour effet de brûler, dans un contexte médical. Il est réintroduit en chimie (1789, Lavoisier), par emprunt au participe présent latin comburens, à propos d'un corps qui, en se combinant à un autre corps, permet la combustion de celui-ci. Le mot, à la différence de combustible, est demeuré didactique.
❏ voir
BUSTE.
COMÉDIE n. f. est emprunté au latin comoedia « pièce de théâtre » et « genre théâtral » (en particulier comique), lui-même du grec kômôdia. Celui-ci est dérivé, par kômôdos « chanteur dans une fête », de kômos qui désignait une procession burlesque et obscène lors des fêtes dionysiaques et qui pourrait, au sens premier de « troupe », se rattacher à la racine indoeuropéenne °kei-.
❏
D'abord employé par Oresme dans une traduction du latin, la Politique d'Aristote (1370), comédie n'entre dans l'usage que par traduction de l'italien et du latin publié en Italie (1536, les six comédies de Térence, Octavien de Saint-Gelais). Le mot est adopté lorsque du Bellay écrit la Défense et Illustration, en 1549. En histoire du théâtre, comédie italienne désigne spécialement l'ensemble des troupes italiennes qui jouaient en France, de 1548 à 1697 (première expulsion), puis de 1716 à 1779 (seconde expulsion).
◆
Le mot a souvent le sens général de « pièce de théâtre (sans considération de genre) », usuel au XVIIe siècle. On a gardé trace de cette valeur générale avec le sens spatial de « théâtre » (XVIIe s.), par exemple dans Comédie-Française, et au sens figuré de « spectacle », puis « attitude feinte » (jouer la comédie). Le sens plus précis de « pièce divertissante représentant des personnages de moyenne et basse condition » est apparu en 1552 (Jodelle), par opposition à tragédie, puis aussi à drame.
◆
Depuis le XVIIe s., comédie désigne le genre théâtral comique et entre dans nombre de syntagmes figés désignant des genres particuliers (récemment, comédie musicale, aussi au cinéma, concurrencé par l'anglicisme un musical) et de composés (→ tragicomédie, à l'art. tragédie) ou d'emprunts (→ commedia dell'arte).
❏
Le dérivé COMÉDIEN, IENNE adj. et n. (v. 1500, comediain) est attesté avec le sens figuré de « personne qui feint » depuis 1673 et employé comme adjectif depuis 1687. À la différence de comédie, il a conservé au sens propre, dans un usage un peu snob ou professionnel, la valeur large d'« acteur de théâtre ou de cinéma ».
❏ voir
COMÉDIE-BALLET*, COMIQUE.
COMÉDON n. m. est l'adaptation, par transposition métaphorique (1858), du latin comedo, -onis « mangeur », de comedere « manger » (→ comestible), cette matière sébacée étant réputée « manger » la peau.
❏
Ce terme est le synonyme du mot usuel point noir.
❏
Le composé TIRE-COMÉDON n. m. date du XXe siècle.
COMESTIBLE adj. et n. est emprunté (XVe s.) au latin médiéval comestibilis « qui peut être mangé par l'homme » (IXe s.), également substantif (1217), dérivé de comestum, supin de comedere « manger ». Ce dernier est la forme renforcée de esse « manger », d'une racine indoeuropéenne °ed- « mâcher », à laquelle se rattachent l'anglais to eat, le russe estj, l'allemand essen. Le verbe latin, concurrencé par les formes mandere et manducare plus régulières (→ manducation, manger), s'est maintenu en espagnol et en portugais (comer).
❏
L'adjectif est usuel ; le substantif qui en est tiré (1501, pluriel), rare jusqu'au XVIIIe s., subit la concurrence du mot courant aliment ; son emploi dans les enseignes de magasins a régressé au profit d'alimentation.
❏ voir
COMÉDON.
COMÈTE n. f. est emprunté (v. 1140) au latin cometes, lui-même emprunté au grec komêtês « comète », proprement « chevelu », adjectif substantivé dérivé de komê « chevelure », la comète apparaissant, avec sa traînée lumineuse, comme un astre chevelu. Komê est d'origine obscure.
❏
Le mot est d'abord lié à des valeurs symboliques : l'astre, d'apparition et d'aspect irréguliers, entraîne depuis l'Antiquité des sentiments de crainte et suscite les mauvais présages. L'année où l'on observe une comète très lumineuse (appelée année de la comète) est censée être exceptionnelle. En 1742, l'apparition de la comète de Halley, très lumineuse, donna lieu à une mode à la comète. Ce même phénomène donne naissance au jeu de cartes dit comète, par allusion à une longue suite de cartes comparées à la « queue » de l'astre (métaphore qui tend à se substituer à « chevelure »), et, en 1811, à des crus fameux dits vins de la comète. L'expression figurée tirer des plans sur la comète est attestée depuis 1896.
◆
Par analogie, ce nom a reçu des acceptions spéciales en héraldique (1690), en passementerie où il désigne un ruban étroit satiné (1800) et en reliure où il dénomme une tranchefile artificielle (1896).
❏
Le dérivé COMÉTAIRE adj., attesté depuis 1749 (Buffon), reste d'usage très didactique.
COMICE n. m. est emprunté (v. 1355) au latin comitium « endroit où le peuple se réunissait en assemblée à Rome » et, au pluriel comitia, « assemblée générale du peuple romain ». Le mot est une formation indépendante expliquée par °com- (→ co-) avec un suffixe inspiré du verbe ire « aller » (→ aller). Il fait partie du groupe de comes (→ conte), comitas (→ comité).
❏
Introduit par Bersuire comme terme d'antiquité romaine, le mot a servi, sous la Révolution (1789, Sieyès), à désigner la réunion des électeurs pour nommer les membres des assemblées délibérantes. Le sens vivant de « réunion de cultivateurs d'une région pour travailler au perfectionnement de l'agriculture » est attesté depuis 1760 ; son importance au XIXe s. est illustrée dans le célèbre épisode des comices agricoles de Madame Bovary (1857).
❏
L'adjectif COMITIAL, IALE, IAUX a été introduit lui aussi par Bersuire (v. 1355) par emprunt au latin comitialis « relatif aux comices », spécialement dans les syntagmes dies comitialis et, en médecine, morbus comitialis « épilepsie ». Il est didactique et peu usité. L'ancienne expression mal comitial « épilepsie » (1576), calquée du latin, vient de ce que l'on ajournait les comices, à Rome, quand qqn y était frappé d'épilepsie.
COMING OUT, emprunt à une expression anglaise virtuelle, de to come out « révéler » (mot à mot « venir dehors ») et l'élément francisé -ing, est à la mode depuis 1994.
❏
Le mot s'applique à la révélation publique par quelqu'un de son homosexualité.
COMIQUE adj. et n. a été emprunté au XIVe s. au latin comicus « relatif au théâtre », spécialement « relatif à la comédie », lui-même emprunté au grec kômikos de même sens, dérivé de kômos (→ comédie).
❏
Le sens d'emprunt, « relatif au théâtre » et « qui écrit du théâtre », a vieilli : il était usuel au XVIIe s. où le Roman comique de Scarron décrit la vie d'une troupe de comédiens. Il a été éliminé par l'acception restreinte de « relatif à la comédie ». Par métonymie, le nom un, le comique désigne à la fois un auteur de comédie (1580), un acteur dont le rôle suscite le rire (1680) et le genre ou style théâtral qui s'y emploie (1669).
◆
Pris par extension hors du contexte artistique, il signifie « ce qui prête à rire » et est adjectivé depuis 1680. Il est devenu un quasi-synonyme de amusant, drôle et, resubstantivé, signifie « personnage risible, peu sérieux ».
❏ voir
COMÉDIE.
COMITÉ n. m., d'abord écrit committé (1652) puis comité (1710), est la francisation de l'anglais committee, lui-même soit issu de to commit au sens de « confier », soit emprunté directement à l'ancien participe passé français de commettre* : committé. Le mot anglais a d'abord été employé en droit au sens de « commis » (1495) puis en politique au sens de « réunion d'un petit nombre de gens choisis pour délibérer d'une question » (1621), d'où « ce petit groupe choisi ».
❏
Le mot anglais a pénétré en français avec ce dernier sens, voisin de celui de commission, de même origine, mais d'abord réservé à un contexte anglais. Il s'est répandu au milieu du XVIIIe s. (comité secret, 1750), puis sous la Révolution, entrant dans de nombreux syntagmes (Comité de salut public, 1792). La perte inexpliquée des deux m fait qu'on ne le rattache plus à sa famille d'origine (commis, commission, commissaire...), ce qui ne l'empêche pas de s'appliquer à de nouveaux domaines, au théâtre (comité de lecture, 1799 ; absolt comité, 1782, ensuite dans l'édition), dans les entreprises (comité d'entreprise, 1945) et d'avoir un sens figuré usuel de « petit groupe » (en petit comité), apparu en même temps que l'emploi politique (1710).
❏
SOUS-COMITÉ n. m., attesté à partir de 1793, reste administratif.
L +
COMMANDER v. est issu (v. 980) du latin °commandare, réfection, d'après mandare « charger, confier » (→ mander), du latin commendare « confier » et « charger », et aussi « commander ». Le mot est formé de cum (→ co-) et de mandare (→ mander).
❏
Le verbe a perdu au XVIe s. le sens de « confier », et celui de « recommander », passé à ce préfixé (ci-dessous). Seule l'acception d'« ordonner » (v. 980) s'est développée, modulée selon la construction : transitivement, le verbe est employé spécialement en contexte militaire depuis le XVIe s. au sens latin de « diriger, donner des ordres à » (1573), puis aussi « dominer (un lieu) » (1653).
◆
Son sens commercial de « demander la livraison de (une marchandise) » est attesté depuis 1675 et renforcé par le dérivé commande. En construction intransitive, commander régit seulement la préposition à (et non plus sur, attestée par l'usage classique) ; depuis le XVIe s. (1564), il se construit avec un nom de membre physique ou de sentiment pour complément, au sens de « maîtriser ».
❏
COMMANDEMENT n. m., « action de donner un ou des ordres » et « ordre donné » (1050), s'est spécialisé en terme militaire (« ordre », d'où
à mon commandement...), « pouvoir du commandant » (déb.
XVIIe s.) et en théologie (v. 1175,
les commandementz Dei [→ de Dieu]). Une valeur juridique, « ordre de payer », apparaît au
XVIe s. (1549).
■
COMMANDEUR n. m. (1260 ; 1160, commandere « chef ») désigne historiquement le chevalier d'un ordre militaire pourvu d'une COMMANDERIE n. f. (1387).
◆
Dans l'histoire de l'esclavage dans les « îles » (Antilles, Réunion...), le mot désigne le contremaître qui surveillait les esclaves d'une plantation.
◈
Le déverbal
COMMANDE n. f. (1213) a éliminé son doublet masculin
command n. m. (1050), spécialisé en droit (1262).
Commande a eu la valeur concrète de « chose confiée à qqn » d'après l'ancien sens du verbe et de son étymon latin.
◆
Il s'est maintenu en droit commercial, mais a changé de sens (1680) pour désigner l'ordre de fournir une marchandise moyennant paiement, selon le sens récemment pris par le verbe et correspondant aux nécessités de la terminologie du commerce, activité en extension à cette époque. Le langage usuel utilise le mot en un sens vague, proche de
commandement « ordre », surtout dans des locutions
sur commande « à la demande » ou
de commande « prescrit » (1671).
◈
Le participe présent a été substantivé en
COMMANDANT n. m. (1661) « chef d'un parti » puis (1674) « chef militaire ». Dans l'organisation moderne de l'armée,
commandant s'est spécialisé pour désigner le chef de bataillon, supérieur à l'officier dit
commandant de compagnie (au sens général de
commandant) dont le grade est celui de
capitaine*.
◆
En revanche, dans la marine,
commandant désigne simplement celui qui commande, l'officier responsable d'un navire.
◈
Par préfixation,
commander a servi à former deux verbes usuels.
■
RECOMMANDER v. tr. apparaît (fin Xe s.) dans un sens intensif, « livrer (une personne) à qqn » où commander correspond à un sens du latin. Dès le XIIe s. (v. 1174), le verbe signifie « désigner, indiquer à l'attention, souvent en soulignant les mérites, les qualités », d'où « vanter les qualités de (qqn, qqch.) » (1280) et, avec un sujet nom de chose, « rendre (qqn) digne d'estime » (v. 1370), d'où se recommander par (une qualité) [1588]. Se recommander à qqn (v. 1280) correspond à « demander sa bienveillance ». Se recommander de qqn (1611) signifie « invoquer son appui ».
◆
Par ailleurs, depuis le XIe s. (1080), le verbe correspond à « demander avec insistance à qqn », d'où « conseiller de » avec de et l'infinitif. Il s'est spécialisé dans le vocabulaire des postes (1893) pour « faire poster avec des garanties de remise au destinataire », surtout au participe passé adjectivé (lettre recommandée) et substantivé (un recommandé).
■
Le dérivé RECOMMANDATION n. f. (1150), substantif d'action, désigne aussi les paroles qui recommandent qqn ou qqch., et un avis, un conseil (1340). En droit, il s'est spécialisé pour un « acte d'opposition à la mise en liberté d'un créancier » (1690), valeur cohérente avec l'emploi le plus ancien du verbe et qui a disparu. Le mot désigne aussi (1904) la procédure par laquelle on recommande un envoi postal.
■
RECOMMANDABLE adj. (1450) qualifie ce qui est digne d'être recommandé, estimé, notamment en emploi négatif (peu, pas très recommandable) en parlant des personnes.
■
RECOMMANDATAIRE n. m., terme de droit (1803), concernait la contrainte par corps.
◈
DÉCOMMANDER v. tr. a été formé en ancien français (v. 1330) au sens d'« annuler (un ordre) », qui a disparu. Sorti d'usage depuis l'époque classique, le verbe a été reformé au
XIXe s. (1832) pour « annuler une commande », en commerce, puis « annuler ou différer (une invitation) » et « annuler l'invitation de (qqn) », d'où
se décommander.
■
Le dérivé DÉCOMMANDE n. f. (v. 1900) est rare.
◈
COMMANDITE n. f. est emprunté (1673), avec fausse coupe et agglutination de l'article, à l'italien
accomandita, attesté au
XVIe s. (av. 1571), terme de commerce plus ancien, au moins en latin médiéval
accomanditum (1326). Le mot est le participe passé de
accomandare « confier », dérivé préfixé de
comandare, qui correspond à
commander.
◆
Ce nom désigne une société commerciale comprenant des associés gestionnaires, responsables solidairement et personnellement et, d'autre part, un ou plusieurs bailleurs de fonds, ainsi que la forme d'une telle société, par exemple dans
société en commandite.
■
Le dérivé COMMANDITER v. tr. est d'abord attesté (1809) au participe passé commandité, plus ou moins suscité par commanditaire, puis à l'actif (1836) ; il signifie « pourvoir en capitaux » et plus couramment « financer (une entreprise) », « pourvoir en capitaux (une personne) » et, familièrement (1874), « entretenir (une maîtresse) », sens archaïque.
■
Un autre dérivé COMMANDITAIRE n. est antérieur (1752) et signifie « bailleur de fonds » dans une commandite, terme technique diffusé avec la valeur plus générale de « personne qui finance ». C'est le mot qui a été choisi par l'Office de la langue française du Québec pour remplacer l'anglicisme sponsor, ainsi que le verbe commanditer pour sponsoriser.
❏ voir
COMMANDO.
COMMANDO n. m. est emprunté (1902) à l'anglais commando, employé depuis 1824 pour désigner une unité tactique de l'armée boer d'Afrique du Sud, pendant la guerre contre l'expédition britannique (1899-1902). Par extension, le mot anglais a désigné une petite troupe de militaires entraînés en vue d'une mission précise et difficile. Il est emprunté à l'afrikaans, qui le tient du portugais comando « commandement » (de commandar [→ commander]), mot qui désignait une petite troupe de Portugais exécutant des expéditions parmi les populations indigènes.
❏
Le mot a été introduit au sens originel, « corps de troupe d'une centaine d'hommes dans les armées des Boers ». Pendant la Seconde Guerre mondiale, il a été réemprunté à l'anglais par l'intermédiaire des armées alliées, anglaise et américaine, en parlant d'un petit groupe de choc entraîné pour exécuter une mission dangereuse (1945). Par extension, il s'applique (1914) à un petit groupe d'intervention.
L
COMME adv. et conj. est issu dès le IXe s. du latin quomodo, adverbe de manière composé de l'ablatif de l'adjectif quis (→ chacun, quidam) et de modus (→ mode), employé chez les auteurs classiques pour introduire une interrogation directe ou indirecte, une exclamation, pour « de quelle manière », et pour introduire une relative au sens de « ainsi que, de la manière dont... ». Dès le Ier s., quomodo concurrence ut (→ ut), velut, sicut puis, en langue populaire, peut introduire un complément en apposition. De l'emploi comparatif procède, par une comparaison d'égalité appliquée à un rapport de simultanéité, l'emploi temporel et, de ce dernier, l'emploi causal. En effet, quomodo causal exprime une situation d'où dérive un fait qui n'existerait pas sans elle et cela peut-être dès Quintilien. La forme française primitive cum, com est directement issue de quomodo par l'intermédiaire de formes tardives comodo, como, attestées dans les inscriptions. Cume, come est dû soit à l'analogie de mots comme or, ore ; encor, encore ; onc, onque, soit plutôt à l'adjonction d'un e, du latin et (→ et) dans quomodo et : cette dernière hypothèse est seule capable d'expliquer l'italien come.
❏
Le mot possède la plupart de ses fonctions, par héritage de la syntaxe latine, avant le XIIe siècle. Il a longtemps servi d'adverbe de manière introduisant une interrogation directe (v. 980) et indirecte (v. 980) avant de vieillir, d'être proscrit par Vaugelas et d'être supplanté vers la fin du XVIIe s. par comment. La langue moderne a gardé une trace de cet emploi dans les locutions adverbiales Dieu sait comme, il faut voir comme.
◆
Comme s'est en revanche bien maintenu comme adverbe d'intensité en emploi exclamatif (v. 1080) et en modifiant le sens d'un adjectif ou d'un substantif attribut (v. 980).
◆
Il est également très précoce comme conjonction et adverbe exprimant la comparaison (842), introduisant notamment une comparative hypothétique (v. 881), souvent en association avec si (1165-1170). Son emploi introduisant le second membre d'une comparaison (v. 1080), encore toléré par Vaugelas, disparaît au XVIIIe siècle.
◆
Comme exprime aussi la manière (v. 980), spécialement dans les locutions comme qui dirait « en quelque sorte » (1559 ; av. 1421, comme nous dirions) et comme quoi (1466) qui a d'abord signifié « comment » et « disant que » avant de prendre un sens causal, « d'où il s'ensuit que ». Comme que comme, se dit en Franche-Comté pour « de toutes façons, en tout état de cause ».
◆
L'emploi de comme avec une valeur temporelle est lui aussi très ancien (v. 980). Il n'en va pas de même de son emploi causal, relevé dans le Roman de la Rose (v. 1278), mais rare avant le XVe siècle.
◆
Comme ci (→ 2 ci) comme ça « à peu près » a pu provoquer la formation de couci-couça*.
❏
COMMENT adv. (1080), composé de l'ancienne forme com, cum avec le suffixe -ment, a longtemps concurrencé comme dans l'interrogation directe et indirecte avant de le supplanter (voir ci-dessus). L'ancienne locution conjonctive comment que (v. 1080) a elle-même été remplacée par de quelque façon que. L'emploi de comment seul pour exprimer l'étonnement est attesté au XIIe s. (v. 1175).
◆
Plusieurs interrogations de politesse utilisent l'adverbe : comment va ? (XIVe s.) est aujourd'hui familier ; comment ça va-t'il, ça va-t'y ? (1749), comment ça va ? (1845, Flaubert) à côté de comment allez-vous ? comment tu vas ?, vas-tu ?
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Quelques emplois substantivés (v. 1500) se rencontrent, essentiellement dans des constructions lexicalisées (le pourquoi et le comment, le quand et le comment).
❏ voir
COMBIEN.
COMMEDIA DELL'ARTE n. f. est l'emprunt, au début du XVIIe s., d'un mot italien apparu au XVIe s., qui signifie « comédie de fantaisie » (→ art, comédie) par une valeur spécialisée de arte « art », parce que les acteurs de ce genre théâtral improvisaient sur un canevas fixé.
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Très populaire en France au XVIIe s., la commedia dell'arte a été progressivement naturalisée en comédie* italienne, et ses trouvailles intégrées par des auteurs de comédie (Molière). Le mot connaît en français un regain de faveur, avec les expériences théâtrales de la seconde moitié du XXe siècle.
COMMÉMORER v. tr. est emprunté (XIVe s.) au latin commemorare « mentionner, rappeler, évoquer », de cum, com- (→ co-) et de memorare (→ mémorable).
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Le verbe, introduit par Bersuire avec son sens moderne « marquer par une cérémonie le souvenir de (qqn, qqch.) », demeure un latinisme rare et sort d'usage, avant d'être repris pendant la période révolutionnaire et post-révolutionnaire (1797, Chateaubriand), en partie d'après commémoration et commémoratif (ci-dessous).
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COMMÉMORATION n. f. (
XIIIe s.), emprunté au dérivé latin
commemoratio avec son sens chrétien de « cérémonie en souvenir d'un saint ou d'un événement religieux », est attesté avec un sens plus général depuis 1581 mais demeure essentiellement un terme de religion, avant de se diffuser avec
commémorer, pendant la Révolution.
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Son doublet religieux de même origine, COMMÉMORAISON n. f. est attesté depuis 1671 (une première fois en 1386).
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COMMÉMORATIF, IVE adj., d'abord religieux (1598), est sorti d'usage puis a été repris au XVIIIe s. comme terme de médecine (1741) et comme terme religieux (1771). Il correspond aussi au sens général du verbe (1808), après sa reprise pendant la Révolution.
L
COMMENCER v. est issu (Xe s.) du latin populaire °cominitiare, de cum (→ co-) et de initiare (→ initier) qui, du sens d'« initier », est passé à basse époque (IVe s.) à celui de « débuter ». Cette évolution correspond au vieillissement de incipere « commencer » (d'où le roumain incep).
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Repris avec le sens de « débuter », le mot est employé transitivement (commencer qqch.) et avec des prépositions (à, 1080 ; de, 1580 ; par, 1601). La distinction entre commencer de (action qui dure) et commencer à (action ponctuelle) s'est effacée au XVIIe s., malgré Vaugelas. Le verbe tolérait autrefois un complément animé ; ainsi, commencer un chien signifiait « entreprendre son dressage ». L'emploi avec un sujet inanimé est généralement intransitif (av. 1317). La grande fréquence du verbe, comme antonyme de finir, résiste à la concurrence de débuter.
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Le dérivé
COMMENCEMENT n. m. (1119) est aussi usuel que le verbe et demeure l'antonyme normal de
fin, en concurrence avec
début. Dans la phraséologie,
au commencement est courant,
le commencement de la fin familier.
Les commencements se dit spécialement (1538) des premières leçons, des rudiments.
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COMMENÇANT, ANTE adj. (1470) est substantivé en parlant des personnes, mais subit la concurrence de débutant.
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Formé par préfixation,
RECOMMENCER v. tr. (1080,
recomencer), aussi
recommencier en ancien français (
XIIe s.), signifie « reprendre au début », puis (v. 1283) « commencer de nouveau (ce que l'on avait interrompu ou rejeté) ». L'emploi intransitif, le plus ancien, correspond à « exister, se produire de nouveau (d'un processus interrompu) », puis (1670) « avoir un nouveau commencement (du temps, du jour qui se lève...) », moins usuel.
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Le verbe a pour dérivé RECOMMENCEMENT n. m. (1546), assez littéraire, et RECOMMENÇANT, ANTE adj. (XIXe s. ; av. 1848, Chateaubriand).
COMMENSAL, ALE, AUX n., surtout au pluriel (1418) est, en français, le seul représentant (à travers son composé en cum [→ co-] commensalis « compagnon de table ») du latin mensa « table », évincé par le représentant de tabula (→ table) mais conservé dans l'espagnol et le portugais mesa et dans le roumain masa. À l'origine, mensa a dû désigner un gâteau sacré, rond, découpé en quartiers et sur lequel on disposait les offrandes aux dieux. En passant dans la langue commune, il aurait pris le sens de « support pour les aliments » puis « table » et, par suite, « repas ». L'origine du mot est inconnue, le rapport avec metiri (→ mesure, mesurer), souvent avancé, étant incertain.
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Le mot qualifie et, comme nom (1420), désigne la personne qui mange à la même table. Il est entré dans l'expression commensal de la maison (1679, La Fontaine), aujourd'hui archaïque, et est très littéraire dans tous ses emplois.
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COMMENSALITÉ n. f. (1549), nom de qualité, est quasiment inusité, à la différence de COMMENSALISME n. m. (1874), terme de biologie désignant le partage des mêmes aliments par deux organismes d'espèces différentes.