DÉBÈQUETER, DÉBECTER → BEC
DÉBILE adj. et n. est emprunté (v. 1265) au latin debilis « faible, infirme, estropié », en parlant du corps ou de l'une de ses parties. Tite-Live le joint à d'autres adjectifs exprimant l'infirmité, tels claudus (→ claudication), mancus (→ manchot). Il s'agit d'un composé dont le second terme, à b- initial caractéristique des mots populaires, est à rapprocher du sanskrit bálam « force », bátiyān « plus fort », et du vieux slave bolii « plus grand » (russe moderne bolche, Cf. bolchevik). Le mot n'existe pas en védique ; il est de ceux que le sanskrit a pu prendre à des parlers autres que ceux sur lesquels repose le védique.
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Débile a supplanté la forme populaire deible, deble (1180, dans endieble) ; il a conservé le sens latin mais, au cours du XIXe s., a subi un rétrécissement de sens pour désigner presque exclusivement une déficience intellectuelle. Sa définition moderne en termes cliniques est attestée depuis le début du XXe siècle.
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Plus récemment (v. 1960), il s'est largement répandu dans la langue parlée, avec un sens voisin de imbécile, crétin, idiot, s'appliquant aux choses (un film débile, etc.) comme aux personnes, avec une valeur proche de nul, autre adjectif à la mode, et opposé à génial.
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La plupart des dictionnaires attestent l'adverbe
DÉBILEMENT « mollement, d'une manière débile » (fin
XVe s.), pourtant très rare dans la langue moderne (une seule attestation dans le corpus du
T. L. F., chez Laforgue, 1887).
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Au début du XIVe s., sont apparus DÉBILITATION n. f. (1304), emprunté au latin debilitatio, DÉBILITÉ n. f. (1308), emprunt au latin debilitas « faiblesse, infirmité » et récemment « idiotie, crétinisme ; nullité » ; enfin DÉBILITER v. tr. (1308), autre emprunt au latin debilitare « estropier, réduire à l'impuissance », tous dérivés de debilis.
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À la différence du couple débile-débilité, débiliter, son participe adjectivé DÉBILITANT, ANTE et débilitation sont restés proches du sens latin.
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DÉBILOS (s prononcé) est un synonyme de débile, adj.
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1 DÉBINER v. tr., d'usage familier (1790), est d'origine obscure. Le moyen français atteste rebineur « qui se rétracte » en 1571, mais le rapport n'est pas établi. Wartburg voit dans débiner un composé de biner* issu de °binare, en supposant le même type de développement sémantique que dans le cas de bêcher « dire du mal de qqn ». P. Guiraud part lui aussi de dé- et biner mais prend biner au sens régional de « s'accoupler », rattaché au latin bis « deux (fois) », et attesté dans abiner « accoupler » et rebiner « faire s'accoupler une seconde fois ». L'idée première est pour lui celle de se séparer, de se désolidariser d'un complice en parlant.
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Débiner est d'abord employé avec le sens de « dénoncer », et comme intransitif de « passer aux aveux, cesser de se défendre », disparu de nos jours. L'usage moderne réalise uniquement le sens transitif de « dénigrer (qqn) » (1821) et par extension « délivrer le secret de qqch. » (1867), par exemple dans la locution débiner le truc, ce dernier emploi ayant vieilli, puis disparu.
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En sont issus
DÉBINAGE n. m. (1836), d'abord en usage parmi les voleurs pour « aveu », repris pour « dénigrement », et
DÉBINEUR, EUSE n. et adj. (1875).
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Les rapports existant entre débiner et l'homonyme de construction pronominale SE DÉBINER (v. 1850) « prendre la fuite », sont incertains. En se référant à se biner (1771), on peut rattacher le pronominal à un ancien français s'en binner « s'en aller secrètement » (XIIIe s., bignier), d'origine inconnue. P. Guiraud ne sépare pas se débiner de débiner puisqu'il postule un sens initial « désaccoupler » d'où « séparer ».
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En l'état actuel des connaissances, les relations qu'il entretient avec un autre verbe 2 DÉBINER v. intr. « être dans la misère » (1808) et son déverbal DÉBINE n. f. (1808) « misère », toujours vivants dans l'usage familier, sont aussi peu clairs.
2 DÉBIT n. m. est emprunté (1675) au latin debitum « dette », participe passé neutre substantivé de debere (→ devoir) dont le pluriel debita a donné dette*.
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À la différence du mot latin, également employé avec le sens figuré d'« obligation », débit est exclusivement un terme de comptabilité, le sens figuré étant réservé à dette.
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Son dénominatif
2 DÉBITER v. tr., « porter au débit d'un compte », est employé depuis 1723. Comme l'homonyme dérivé de
1 débiter (→ ci-dessus) signifie « vente », toute vente correspondant à un dû pour l'acheteur, le mot est aujourd'hui senti comme appartenant à cette famille étymologiquement différente.
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1 DÉBITEUR, TRICE adj. et n. est emprunté (1238) au latin
debitor « celui qui a contracté une dette » (au propre et au figuré), dérivé de
debere (→ devoir). Le mot, emprunté avec le sens propre, s'est imposé aux dépens de l'ancien français
detor, de formation populaire, attesté de la première moitié du
XIIe s. à la fin du
XIIIe siècle. Il a développé le sens figuré de « personne redevable de qqch. » et s'emploie comme adjectif. Ce n'est qu'au
XVIIe s. qu'un autre emprunt au latin
(→ 2 débit) élargira le lexique de ce domaine de la dette.
1 DÉBITER v. tr. est dérivé (1330-1332) de bitte* « billot de bois sur lequel on enroule les câbles », au moyen du préfixe dé- et de la désinence verbale -er.
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Débiter signifie « découper le bois en pièces » (étymologiquement pour faire des billots ou bittes) d'où, par extension, « détailler (une matière) en vue de sa vente, de son utilisation » (1556). Il s'est spécialisé dans le commerce, signifiant « vendre au détail » (1464).
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Un siècle et demi plus tard (av. 1615) est apparu un sens figuré, « raconter, détailler en récitant » : loin d'avoir la valeur péjorative actuelle, il était alors accompagné d'un adverbe de qualité avec le sens de « dire (bien ou mal) ce qu'on raconte, réciter (agréablement ou pas) » ; ainsi, Furetière enregistre la locution débiter des nouvelles « les apprendre, les publier ».
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Au cours du XIXe s., le verbe a pris au concret le sens de « produire d'une manière continue », spécialement en parlant d'un fluide (1838).
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Son déverbal
1 DÉBIT n. m. (1565) a dès les premiers textes le sens de « vente au détail », désignant plus particulièrement l'écoulement plus ou moins rapide d'une marchandise vendue au détail (1666). Par métonymie, il désigne plus couramment un établissement où l'on vend au détail (1822), surtout dans
débit de boissons, de tabac... En relation avec
débiter, il se dit pour « action d'exposer, de raconter qqch. » (av. 1615), de nos jours soit péjoratif, soit pour caractériser la rapidité de l'élocution. Le sens propre, « action de découper le bois en grumes », n'est enregistré qu'au
XVIIIe s. (Trévoux, 1771) ; au cours du
XIXe s., parallèlement au verbe, ce substantif a pris le sens de « quantité produite par unité de temps » (1838).
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2 DÉBITEUR, EUSE n., créé avec le sens de « commerçant qui vend au détail » (1611), qui a disparu, s'est surtout employé au sens figuré de « celui qui raconte des nouvelles » (1690) avec une nuance péjorative. La concurrence de 1 débiteur a contribué à son vieillissement.
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DÉBITAGE n. m. (1611), lui aussi formé pour désigner la vente au détail, a laissé ce sens à débit, se réservant celui d'« action de découper en pièces » (1794).
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Le participe présent DÉBITANT, ANTE est substantivé (1730) pour désigner le tenancier d'un débit de tabac ou de boissons.
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DÉBITABLE adj. est employé (1861) pour qualifier une matière qui peut être débitée (souvent dans le vocabulaire de la description scientifique).
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Une altération phonétique de
débiter et de ses dérivés s'est lexicalisée en français d'Afrique subsaharienne, où l'on emploie (Sénégal)
DIBITERIE n. f. pour « commerce où l'on prépare et vend de la viande grillée ».
DÉBLATÉRER v. intr. est emprunté tardivement (1744 au Canada, sans doute bien antérieur à l'oral) au latin deblaterare « dire en bavardant, à tort et à travers », composé de de- et blaterare « babiller, bavarder », dit du cri du chameau (→ blatérer), d'un oiseau.
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Construit avec un complément prépositionnel ou employé absolument, déblatérer, qui signifie familièrement « parler avec violence et abondance contre qqn ou qqch. », est quelquefois employé avec un complément d'objet interne direct.
DÉBONNAIRE adj., d'abord réfection graphique (v. 1176, debonaire) de deboneres (v. 1170), résulte de la soudure de de bon aire (1080), aire* étant pris au sens d'« origine, souche ».
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Le mot qualifie à l'origine celui qui est de bonne souche, noble, sens aujourd'hui éteint. Comme noble, il s'est orienté vers une valeur psychologique, glissant vers le sens de « bon, bienveillant » (1176, associé à dolz, ancienne forme de doux), peut-être déjà par une interprétation en de bon air. Par affaiblissement, il qualifie plus particulièrement une personne accommodante, facile à vivre, quelquefois avec la nuance péjorative de « sot », « faible » (1643). Cette évolution s'explique par le vieillissement de aire et la confusion possible avec air* « apparence ».
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L'adjectif a produit
DÉBONNAIRETÉ n. f., d'abord
débonereté (v. 1170), qui a perdu son sens propre de « noblesse » au profit du sens psychologique dérivé de « bonté » (1249), quelquefois péjorativement (1580, associé à
mollesse).
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DÉBONNAIREMENT adv., attesté depuis v. 1176, est rare.
DÉBRAILLER v. tr. est dérivé (1508-1518) au moyen du préfixe dé-* et de la désinence -er des verbes du premier groupe, de l'ancien français braiel (écrit brail au XIVe s. dans Godefroy) « ceinture ». Braiel, dérivé de braie*, signifie proprement « ceinture retenant les braies ».
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Le verbe est surtout employé au participe passé, et ce dès les premières attestations, DÉBRAILLÉ, ÉE adj. qualifiant une personne dont la ceinture retenant les braies est dénouée d'où, par extension, un vêtement retroussé ou en désordre. Au XIXe s., le verbe a développé le sens figuré de « faire perdre toute réserve à (qqn) » et se débrailler celui de « se laisser aller », mais le participe passé adjectivé (1837) et substantivé (1854) continue à être plus usuel. Dans plusieurs régions, par exemple en Auvergne, se débrailler a conservé le sens étymologique, « se déculotter ».
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On a formé sur débrailler le nom correspondant DÉBRAILLEMENT n. m. (1828-1829, Vidocq) et sa variante DÉBRAILLAGE n. m. (1932, Céline).