DORÉNAVANT adv., d'abord d'or en avant (v. 1170) est formé de or, ore (→ 1 OR), en* et avant*.
❏
L'adverbe a conservé sa valeur étymologique de « depuis [de] le moment présent [or] vers [en] l'avenir [avant] ». Écrit dorénavant, le mot semble rare au XVIIe s. (Richelet).
◆
À partir de dorénavant est une formule comique et gendarmesque.
L
DORER v. tr. est issu (1080) du bas latin deaurare « revêtir d'or », intensif en de, de aurare, de même sens, lui-même de aurum (→ or).
❏
Le verbe, de sens propre et figuré, a servi à former la locution familière dorer la pilule à qqn, qui fait allusion à l'ancienne pratique pharmaceutique consistant à revêtir les pilules d'or.
❏
Le participe passé
DORÉ, ÉE est adjectivé (1080) dans les emplois correspondant à ceux du verbe, mais l'usage actuel lui donne surtout le sens de « couvert d'une substance imitant l'or » ; l'expression
jeunesse dorée, qui exprime l'idée de richesse, s'est dite à l'origine de la jeunesse de la riche bourgeoisie qui, après Thermidor, participa à la réaction contre la Terreur.
■
Doré est substantivé (v. 1300) à propos d'un poisson osseux à écailles mordorées des mers d'Europe.
◆
En français du Canada, DORÉE n. f. et DORÉ n. m. (1805) désignent un autre poisson, d'eau douce, voisin de la perche, à chair estimée (1806 ; d'abord poisson doré, 1634).
■
Les expressions cresson doré, saxifrage doré ont donné naissance à un dérivé, DORINE n. f. (1786), désignant cette plante, peut-être d'après le prénom.
◈
Dorer a produit plusieurs dérivés.
DORURE n. f., d'abord
doreure (v. 1167), qui désigne la couche d'or que l'on fait se déposer sur ce qui est doré, est aussi un nom d'action (1771) concurrent de
dorage.
■
DOREUR, EUSE n. (v. 1292) est un nom de métier ; DOROIR n. m. (1680), un nom technique d'instrument utilisé en pâtisserie ; DORAGE n. m. (1752), le nom d'action, plus rare que dorure.
◈
En moyen français sont apparus les composés
DÉDORER v. tr. (1300 ; 1418 au participe passé, in
T. L. F.), de sens propre et figuré (1558), et
REDORER v. tr. (1322), lui aussi employé au figuré (
XIXe s.), notamment dans l'expression
redorer son blason.
◆
SURDORÉ, ÉE p.p.
adj. (1361) et
SURDORURE n. f. (1611) concernent une double application d'or.
❏ voir
DARIOLE.
DORIQUE adj. et n. m., est un emprunt de la Renaissance (v. 1538) au grec dorikos, en partie par le latin doricus, pris au grec Dorikos et dér. de Doris « la Doride ».
❏
Le mot signifie « relatif à la Doride », région du sud-ouest de l'Asie Mineure antique. Il s'est spécialisé pour désigner le plus ancien des trois ordres de l'architecture grecque, à colonnes cannelées sans bases (avant l'ionique et le corinthien).
◆
Au XVIe s., le mot qualifie un mode, en musique, mais la forme dorien a prévalu.
❏
DORIEN, IENNE adj. et n. (att. 1550 chez Ronsard) est dérivé du grec Doris, et signifie « relatif à la Doride », qualifiant un dialecte du grec ancien et s'appliquant à un mode du plain-chant (alors souvent substantivé : le dorien).
DORIS n. m. est emprunté (1874) à l'anglo-américain dory n. (1709) « petite embarcation avec laquelle le pêcheur de Terre-Neuve quitte le bateau pour aller pêcher ». Celui-ci est soit issu du nom d'un poisson, dory n. (1440), altération du français doré* n., soit emprunté à une langue indienne, le miskito, où dóri, dúri signifie « pirogue ».
❏
Le mot est attesté pour la première fois en français dans la Revue des Deux Mondes sous la forme dori ; il a pris sa forme actuelle probablement à la suite d'une confusion avec le nom d'un mollusque, doris (1778), tiré de Dôris, nom de la mère des Néréides en grec, fille de l'Océan et de Thétis, ou encore d'une confusion entre le pluriel et le singulier.
❏
Le français a forgé le dérivé DORISSIER n. m. (1919) « pêcheur de morue sur doris ».
DORLOTER v. tr. est le dénominatif (XIIIe s.) de l'ancien français dorelot ou dorenlot, dorlot, qui paraît être un emploi plaisant de l'ancien refrain dorelo (également dorenlot, deureuleu, doreleu, derelo), formation expressive ; le do- de dodo* peut aussi être évoqué. Dorelot désignait une grosse boucle de cheveux relevée sur le front (des hommes) ; il se disait plus généralement d'un ornement et, en termes de passementerie, d'un ruban, d'une frange. Par ailleurs, il avait aussi développé par métonymie le sens figuré de « mignon, favori, chéri ». Tous ces sens sont restés vivants jusqu'au XVIe s., puis dorelot, ses dérivés dorelotier et doreloterie (relatifs au métier de la passementerie) sont sortis d'usage, certains dialectes conservant dourelot pour un petit bonnet d'enfant souvent garni d'or ou d'argent (Franche-Comté).
❏
Seul le verbe s'est maintenu, perdant son sens propre de « friser les cheveux » et gardant une valeur figurée, « entourer de soins, choyer », déjà attestée au XIIIe siècle.
❏
Il a produit DORLOTEUR, EUSE adj. et n. (1611), DORLOTEMENT n. m. (1675) et DORLOTERIE n. f. (1892). Une nouvelle famille, sémantiquement distincte de l'ancienne, s'étant constituée, l'étymologie populaire tend à rapprocher dorloter de dormir*, comme en témoigne dorlotine n. f. « sorte de dormeuse » (1858), aujourd'hui archaïque.
L
DORMIR v. intr. est issu (1080) du latin dormire de même sens, dérivé d'une racine °der- qui n'est attestée, dans diverses langues indoeuropéennes, que sous des formes élargies : elle survit, par exemple, dans le vieux slave drěmljó « je sommeille », dans le grec darthanein « dormir », le védique dráti « il dort », le sanskrit classique drayate. Une autre racine indoeuropéenne de sens voisin °swap- survit en latin dans somnus « sommeil » (→ somme) et sopire « assoupir » (→ assoupir).
❏
Dormir signifie proprement « reposer dans le sommeil » ; il a développé le sens figuré de « rester inactif » (1409) et, en parlant de la nature, « rester immobile » (1559, Ronsard) et aussi de l'eau (Cf. ci-dessous dormant).
◆
Il a inspiré de nombreux proverbes et locutions comme dormir debout, qui dort dîne, répertoriés en 1690 par Furetière. Un bon lot d'expressions comparatives, telle dormir comme un loir, sont aussi enregistrées par Furetière. La locution ne dormir que d'un œil peut être considérée comme une expansion de l'ancienne locution ne dormir de l'ueil.
❏
Le participe présent
DORMANT, ANTE a été adjectivé dès le
XIIe s. au figuré (
eau dormante, 1112).
Dormant est employé dans un contexte technique pour qualifier (1366) un objet qui ne bouge pas, en particulier, en marine, la partie fixe d'un cordage (1678). Dans ce type d'emploi, il peut être substantivé (1690). Il est plus rare pour qualifier un être qui dort (
XVIIe s.), sauf dans certains contextes
(la légende des Sept Dormants).
■
Son emploi spécial en botanique, à propos d'un végétal qui ferme ses feuilles, ses pétales la nuit, a entraîné la création du nom correspondant, DORMANCE n. f. (XXe s.) qui existait déjà au XVe s. au sens général d'« action de dormir », lui-même sorti d'usage sauf en botanique, pour « état d'organes végétaux dont le développement est inhibé ». Le déverbal argotique, la DORME n. f. (1919 aux bataillons d'Afrique) lui a succédé.
■
Dormir a produit un autre adjectif avec DORMEUR, EUSE (1250), également substantivé pour désigner la personne qui dort beaucoup ou qui aime dormir.
◆
Dormeur n. m. est le nom régional (Bretagne, Normandie) du crabe comestible appelé ailleurs en France tourteau.
◆
Le féminin DORMEUSE est substantivé, spécialement comme terme d'ameublement (1845) et employé au pluriel (1871) pour des boucles d'oreilles qui se fixent à l'oreille par un écrou.
◆
Au sens humain, le mot désigne une femme qui dort. Il a une signification spéciale en français des Antilles, pour « voyante pratiquant l'hypnose », qui suppose un emploi actif du verbe, pour « faire dormir, endormir ».
■
Dormir a aussi produit quelques dérivés rares ou désuets, tels DORMOIR n. m. (1875) « endroit où repose le bétail », DORMETTE n. f. (1892) « petit somme » et les diminutifs DORMAILLER, DORMASSER, DORMICHONNER v. intr.
■
En revanche, il n'a donné aucun nom d'action (le latin ayant déjà recours à somnus, → somme).
◈
DORMITION n. f. est emprunté sous la forme adaptée
dormison (1450) refaite d'après le latin
dormitio « faculté de dormir », spécialement « mort de la Vierge » (av. 634). En français, le mot est réservé au sens théologique (1752), conservant seulement l'acception de « sommeil, inertie », d'usage littéraire.
■
Le vieux terme médical DORMITIF, IVE adj., dérivé savant (1544) du supin latin dormitum, dont Molière fait un usage ironique dans la vertu dormitive, s'emploie quelquefois au sens figuré ironique de « qui endort, soporifique ».
❏ voir
DORTOIR, ENDORMIR.
DORSAL, ALE, AUX adj., attesté depuis 1314, est soit dérivé du radical du latin dorsum (→ dos) avec le suffixe -al, soit emprunté au latin médiéval dorsalis, réfection du classique dorsualis, lui-même de dorsum.
❏
Le mot sert d'adjectif à dos, tant dans le langage anatomique que dans l'usage courant. Depuis Paré, il accompagne spécialement muscle (1550) et épine (1575) et se dit du dos de la main ou du pied (v. 1560). Au XXe s., il s'est spécialisé en géologie (1929). Il est substantivé au masculin en archéologie (1870), au féminin en géographie (« chaîne de montagnes »), par exemple dans la Dorsale congolaise, la Dorsale tunisienne, et dans le domaine technique.
❏
Son dérivé DORSALEMENT adv. (XXe s.) est employé en anatomie. Un certain nombre de composés scientifiques en DORSO- ont été créés dans les vocabulaires de la médecine, de l'anatomie (XXe s.) et de la phonétique, où il concerne, comme l'adjectif dorsal, le dos de la langue (dorso-palatal, dorso-vélaire, adj., XXe s.).
L
DORTOIR n. m. est issu (fin XIIe s.) du latin chrétien dormitorium « salle commune comportant plusieurs lits dans une collectivité », déjà employé en latin impérial avec le sens de « chambre à coucher ». C'est un dérivé du radical du supin (dormitum) de dormire (→ dormir).
❏
Le mot est passé en français avec le sens qu'il avait en latin chrétien ; récemment, il a pris le sens péjoratif de « localité dont la plupart des habitants ne sont chez eux que pour la nuit » (v. 1955), souvent dans cité, ville, banlieue dortoir.
DORYPHORE n. m. est emprunté (1752) au bas latin doryphorus « soldat portant une lance », emprunt au grec doruphoros, proprement « porte-lance », composé de -phoros « qui porte » (→ -phore) et doru « pique, lance ». Ce mot, employé d'abord en poésie où il signifie « arbre, bois » puis « bois d'une pique » et, par métonymie, « pique », garde ce dernier sens en grec classique et tardif. Il correspond parfaitement au sanskrit dā́ru, à l'avestique dāuru, au hittite taru- « bois », qui contiennent la même racine indoeuropéenne.
❏
Le mot a été emprunté en antiquités romaines.
■
Sa spécialisation en entomologie (1817, Cuvier) est l'adaptation du latin scientifique moderne doryphora, du grec doruphoros, parce que selon Cuvier, « l'arrière-sternum (de l'insecte) s'avance en forme de corne » (explication qui concerne d'autres espèces que celles qui s'attaquent aux feuilles de pommes de terre).
■
Pendant l'occupation de la France, le mot a servi familièrement à désigner les soldats allemands (1940-1945), en raison de leur nombre et du fait qu'ils étaient considérés comme des parasites. C'est la même raison qui le fait employer quelquefois pour désigner les touristes, du point de vue des autochtones.
L +
DOS n. m. est issu (1080) du latin populaire dossum, altération du latin dorsum (on relève également dorsus, dossus, et dossennus « le bossu, le gros dos » pour Polichinelle, personnage des Atellanes). Dorsum, qui désigne le dos (horizontal), l'échine et surtout la croupe des animaux, est un mot populaire employé par les esclaves dans Plaute et qui a supplanté le mot normal, tergus. Par analogie, il s'applique (comme le grec nôtos) à tout objet affectant la forme d'un dos horizontal et présentant une surface légèrement convexe. On ne lui connaît pas de meilleure étymologie que celle qui le rattache à deorsum, de de (→ de) et vorsum, variante de versum (→ vers) « en bas, vers le bas », le dos étant la partie du corps qui penche vers le bas. Le type dossum n'est dominant que dans la partie septentrionale des patois gallo-romans ; ceux du Midi (jusqu'au Berry) emploient reins et, surtout jusqu'au Poitou, échine, comme presque toute l'Italie.
❏
Le mot désigne la partie postérieure du corps humain et, comme en latin, la face supérieure du corps des animaux. Il a servi à former de nombreuses locutions dont
tourner le dos (v. 1155),
avoir qqn à dos, avoir bon dos (1680), plus familièrement
en avoir plein le dos (1809) qui continue
en avoir dans le dos (
XVIe s.), où
dos semble être un euphémisme pour
cul. Mettre qqch. sur le dos de qqn « l'en rendre responsable » (voir ci-dessous d'autres expressions pour cette idée).
◆
Une allusion au dos du maquereau fournit les expressions disparues
dos vert (1773),
dos d'azur (1864), aboutissant à l'emploi de
dos seul pour « proxénète », en usage de 1876 (Richepin) à 1920 environ (
les dos et leurs marmites, dans les chansons de Bruant).
◆
S'agissant du dos humain, des expressions sont spécifiques au français du Québec (
avoir le dos large « subir des responsabilités dont d'autres se sont déchargés »), au français de Belgique (
parler sur le dos de qqn « à son insu, derrière son dos »). Au Québec, on emploie
passer sur le dos (de qqn) pour « retomber sur (qqn) qui en est rendu responsable » (d'un méfait).
◆
En français d'Afrique,
faire le gros dos n'a pas le sens du français de France (« se protéger en effaçant les épaules ») mais vaut pour « faire l'important, se pavaner ».
■
Par analogie, il se dit de ce qui, par sa forme, sa destination, offre une ressemblance avec un dos, produisant des syntagmes comme dos de la cuiller (1393), DOS-À-DOS n. m. (1859) ou DOS D'ÂNE n. m. (v. 1360) « bombement d'une route » (→ âne).
❏
Les noms dérivés désignent des objets concrets se rapportant au dos (de l'homme, d'un objet). Le plus ancien,
DOSSIÈRE n. f. (1260), est un terme de bourrellerie qui s'est également dit du dos d'une cuirasse (sens attesté au
XIXe s.).
■
DOSSIER n. m. apparaît d'abord dans le syntagme dossier de lit (1352) avant d'être employé absolument pour désigner la partie de certains sièges où l'on appuie le dos (1611). En dehors de quelques sens techniques spécialisés, dossier désigne aussi, en référence au dos d'un livre, un ensemble de pièces relatives à une affaire et placées dans une chemise (1586), avec les emplois métonymiques afférents.
■
DOSSERET n. m. (1377), diminutif de dossier, a désigné le dossier d'un dais puis, en architecture, le pilastre saillant servant de support à un arc ou de jambage à une ouverture (1690). Depuis le XVIIIe s. (1762), il a aussi le sens technique de « pièce de fer renforçant le dos d'une scie ».
■
Dernier dérivé de dos en moyen français, le féminin DOSSE (1400) est réservé à des sens techniques et se dit de la face bombée des osselets au jeu (1864, Littré).
■
Quant à DOSSARD n. m., il est beaucoup plus récent (1904) et s'est spécialisé en sports.
◈
Dos a aussi donné un certain nombre de composés, que ce soit des noms désignant des objets concrets, comme
GRATTE-DOS n. m. (1872),
LAVE-DOS n. m. (1902) ou, en architecture,
INTRADOS n. m. (1676) et son antonyme
EXTRADOS, ou des verbes au développement sémantique plus complexe (ci-dessous).
◈
Ainsi,
ADOSSER v. tr. (v. 1050) était employé en ancien français au sens figuré de « tourner le dos », d'où « renier, rejeter », sens sortis d'usage avant le
XVIe siècle. Depuis la fin du
XIe s., il signifie concrètement « appuyer son dos », pronominalement « s'appuyer » (v. 1160) en parlant d'une personne et, par analogie, d'un bâtiment (fin
XIIe s.).
■
Son participe passé ADOSSÉ, ÉE est adjectivé avec le sens de « mis dos à dos » en héraldique (1611) ; il se dit en dessin de deux têtes mises sur une même ligne en sens opposé (1762).
■
Le déverbal ADOS n. m., apparu (déb. XIIe s.) avec une valeur figurée « appui moral », sortie d'usage en moyen français, a été repris comme terme d'horticulture (1697) en parlant de la terre élevée en « dos » (en talus) le long d'un mur, afin d'y semer pendant l'hiver et le printemps des semis ou plantations précoces. Par extension, il désigne la terre élevée entre les lignes d'un champ labouré.
■
Le nom d'action correspondant à adosser, ADOSSEMENT n. m., constate l'état d'une construction adossée (1432) et désigne le fait de l'adosser ; il est employé techniquement en agriculture (1694) et en médecine (1872).
◈
L'autre composé verbal de
dos, ENDOSSER v. tr. (av. 1150) « mettre sur son dos » et spécialement, « mettre (un vêtement maintenu par des manches) », a développé rapidement un sens figuré, d'abord à la forme pronominale (1246), pour « s'engager », puis transitive, pour « prendre la responsabilité de » (déb.
XIVe s.). Il a suivi un développement particulier, correspondant à « écrire au dos d'un document » (1570) dans le domaine du commerce (1600).
■
Certains de ces sens sont repris par ses dérivés : le plus ancien, ENDOSSEMENT n. m. (XIVe s.), désigne l'action d'écrire au dos d'un document, spécialement dans un contexte commercial (1611). Il est également employé comme terme de reliure (1810), en concurrence avec ENDOSSURE n. f. (1845) qui a perdu ses multiples sens antérieurs (1260).
■
ENDOSSEUR n. m. (1664) désigne celui qui endosse un effet, et accessoirement qui accepte une responsabilité (1864), et, symétriquement, ENDOSSATAIRE n. m. (1935) celui qui bénéficie de l'effet endossé.
■
Le déverbal ENDOS n. m. (1583) appartient au même domaine sémantique, désignant la mention portée au dos d'un effet.
■
En revanche, le déverbal féminin ENDOSSE n. f., après avoir désigné un vêtement (1450 ; jusqu'au XVIe s.), correspond au sens vestimentaire du verbe ; il a pris le sens figuré de « responsabilité (d'une chose) » (1482) et, en argot, celui de « dos » (v. 1470) qui aboutit beaucoup plus tard, au pluriel, à « reins, épaules » (XIXe s.) ; avoir qqch. sur les endosses s'emploie aussi au figuré, comme sur le dos. Le mot a vieilli.
■
Le nom d'action, ENDOSSAGE n. m. (1870), concerne l'action d'endosser un vêtement et tient lieu de synonyme à endossement et à endossure, en reliure.
DOSE n. f. est emprunté par les médecins (v. 1370) au latin médiéval dosis (1252) qui a donné une forme française doise (XIIIe s.). Le mot latin est lui-même emprunté au grec dosis, proprement « action de donner », par métonymie « ce que l'on donne », spécialisé tardivement en droit et en médecine au sens de « portion, mesure administrée en une fois ». Le mot est le nom d'action correspondant à didonai « donner », qui contient une racine °dō-, °də- représentée dans presque toutes les langues indoeuropéennes, notamment dans le latin dare (→ don, donner).
❏
Dose, introduit en thérapeutique, est entré dans le langage courant pour exprimer l'idée d'une « petite quantité », abstraitement (1671, La Fontaine, quelque petite dose d'amour) et concrètement (XVIIIe s.). Forcer la dose se dit au figuré pour « exagérer, aller trop loin ».
❏
DOSER v. tr., dérivé de
dose au
XVIe s. (1558), est d'abord employé dans un contexte médical au sens de « mesurer la quantité d'un médicament à administrer ». Depuis le
XIXe s. (1825), il signifie plus largement « mesurer la proportion des différents ingrédients d'un mélange » (d'abord en cuisine) ; il répond au sens figuré du nom, à propos d'une réalité concrète (1884) ou abstraite (1903).
■
Le verbe a produit DOSEUR, EUSE n. (1909), spécialisé pour le nom de l'ouvrier qui introduit dans les bouteilles de vins de Champagne la quantité de sucre nécessaire, aujourd'hui nom d'instrument (1949), mais qui peut s'employer dans les différents contextes du verbe, de même que DOSABLE adj. (1819-1884), son antonyme INDOSABLE adj. (XXe s.) et DOSAGE n. m. (1812), qui a lui-même donné SURDOSAGE n. m. (1956).
◆
Le diminutitf de dose, DOSETTE n. f. (1991) correspond à l'emploi courant, notamment culinaire, de doser, à propos d'une quantité déterminée d'un produit, présentée sous une forme pratique (épices, condiments, café...).
■
On note, au XXe s., les composés DOSIMÈTRE n. m. (1925 ; antérieurement en médecine, 1890), nom d'un appareil utilisé en physique, de dosi- (du grec dosis) et -mètre*, ainsi que le mot abstrait DOSIMÉTRIE n. f. « mesure au dosimètre ».
■
SURDOSE n. f., composé récent (1984) de dose, adapte l'anglicisme overdose*. En pharmacologie, d'autres composés préfixés ont cours : UNIDOSE n. f. (1974) « conditionnement (d'un médicament) pour un seul usage » ; MINIDOSE n. f. (1971) « très petite dose (d'un médicament) ».
❏ voir
OVERDOSE.
DOT n. f. est emprunté (XIIIe s.) au latin juridique dos, dotis « bien apporté par une femme en se mariant », également employé au figuré et, dans la basse latinité, en parlant des qualités, des mérites de qqch. ou de qqn, mot dérivé de la racine de dare (→ donner).
❏
Le mot apparaît avec le sens juridique de « bien qu'apporte une femme en se mariant ». Rare jusqu'au XVIe s., il semble s'être implanté dans certains parlers régionaux ; Bonaventure des Périers écrivait : « ce mot de dot, lequel disent en certains endroit du royaume et principalement en lyonnois, pour douaire ». Il semble que le -t- final n'était pas prononcé et qu'il a dû l'être d'après l'orthographe, d'après doter* et pour éviter les homonymies (dos, etc.). Dot a été masculin jusqu'au XVIIe s. (comme en provençal), probablement d'après douaire, le latin dos étant féminin.
◆
L'ensemble de ses emplois est marqué, et fait référence à des usages en voie de disparition ou appartenant au passé (le sans dot ! de Molière).
◆
Seuls son emploi à propos d'autres cultures que celles d'Europe (notamment l'Afrique) et au sens juridique large de « biens donnés par un tiers dans le contrat de mariage » correspondent à des réalités contemporaines et courantes. En particulier, dot s'emploie en français d'Afrique à propos de biens donnés par l'homme à la famille de sa future épouse (les ethnologues parlent de compensation matrimoniale) et en terres d'islam, pour « biens donnés par l'époux à l'épouse » pour sceller le contrat du mariage.
❏
DOTER v. tr. est emprunté (1180-1190) au latin impérial
dotare qui a donné
douer* par évolution phonétique et qui est dérivé de
dotatus, lui-même de
dos « dot ». Le mot est rare avant le
XVIe s. ; on employait surtout
douer.
■
Il signifie « pourvoir de certains avantages », concrètement et au figuré (1245). Aux XVe et XVIe s., il a développé les sens juridiques de « pourvoir de biens » (XVe s.), « assigner un revenu à une collectivité, un service » (1479), reprenant aussi à douer le sens de « pourvoir d'une dot » (1522).
◈
DOTATION n. f. est emprunté (1325), pour servir de nom d'action au verbe, au latin médiéval
dotatio (1203), fait sur le supin de
dotare. Le mot désigne d'abord un fonds assigné à un établissement, à un service, puis les biens, les revenus attribués aux membres d'une famille souveraine, à un chef d'État (1824).
■
DOTAL, ALE, AUX adj., emprunté (1459, selon Bloch et Wartburg ; 1551, selon T. L. F.) au latin dotalis, de dos (→ dot), s'est d'emblée spécialisé au sens de « relatif à la dot ». En ce sens, il est entré dans la locution juridique régime dotal (régime supprimé par la loi du 13 juillet 1965).
■
Son dérivé DOTALITÉ n. f. (1895), d'usage juridique, n'est plus guère employé.
❏ voir
DOUAIRE, DOUER.
DOUAIRE n. m., d'abord doaire (v. 1160), est adapté du latin médiéval dotarium (av. 1040) « droit d'usufruit de l'épouse survivante sur les biens de son mari », dérivé de dos (→ dot). La forme moderne est due à l'influence de douer*, mot apparenté pris au sens de « gratifier d'un douaire ».
❏
Le mot, d'usage juridique, a développé dans le style littéraire la valeur de « pension ».
❏
En est dérivé DOUAIRIÈRE n. et adj. f. (1368) qui qualifie et désigne juridiquement une veuve jouissant d'un douaire et, par extension, dans l'usage courant, une femme âgée et riche de l'aristocratie ou de la haute bourgeoisie. Dans cet emploi, il est démotivé.
DOUANE n. f. est emprunté, d'abord sous la forme dohanne (1281) puis doana et doane (1441), à l'ancien italien doana, dovana (italien moderne dogana), attesté dès la fin du XIIe s. en latin médiéval de Sicile pour désigner l'édifice où sont perçus les droits d'entrée et de sortie des marchandises, puis (1264) au sens d'« administration de ces biens ». Lui-même est emprunté à l'arabe dīwān « registre, salle de réunion », puis « bureau de douane », qui vient du persan dīwān (→ divan).
❏
Le mot désigne à la fois l'édifice où sont perçus les droits d'entrée et de sortie des marchandises, le service administratif surveillant ces opérations (1372) et ces droits eux-mêmes (1421).
❏
Le mot a plusieurs dérivés, dont
1 DOUANIER n., d'abord écrit
dohanier (1281) puis
douannier (1545), parfois employé (abusivement) pour désigner des fonctionnaires de l'octroi, faute d'un terme spécifique : c'est le cas, à la fin du
XIXe s., du
douanier Rousseau, le peintre Henri Rousseau étant en fait employé d'octroi à Paris.
■
DOUANER v. tr. (1675) « marquer (les marchandises présentées à la douane) du plomb de l'administration », est sorti d'usage.
■
2 DOUANIER, IÈRE adj. (1850) qualifie ce qui est relatif aux douanes ; il est d'usage fréquent (tarif douanier, etc.).
■
DÉDOUANER v. tr. (d'abord intr., 1835) est le seul mot du groupe qui, tout en étant usité au sens propre de « dégager de la douane en payant les droits », a développé un sens figuré (1946), celui de « relever (qqn) du discrédit dans lequel il était tombé », également à la forme pronominale se dédouaner (1941) et surtout au passif et au participe passé.
◆
Il a produit DÉDOUANEMENT n. m. ou DÉDOUANAGE n. m. (1900), de sens propre et figuré.
L
DOUBLE adj., adv. et n., d'abord dobpla (fin Xe s., au féminin), puis duble (XIe s.) et doble, est issu du latin duplus « deux fois aussi grand, aussi considérable », substantivé au neutre duplum « deux fois autant », l'ablatif duplo remplissant une fonction adverbiale. Duplus, dont la plupart des sens se retrouve dans duplex (→ duplex), est dérivé de duo (→ deux).
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L'adjectif, attesté le premier, compte, outre son sens propre, un sens figuré qualifiant une personne qui fait preuve de duplicité (1210). Il s'applique également à une chose ayant deux aspects dont un seul est révélé, ceci sans valeur péjorative (1657-1662, Pascal). Il réalise une valeur stylistique d'intensité, d'augmentatif (fin
XVIe s.), notamment dans quelques syntagmes lexicalisés, tels
double-bière (1551), devenu
bière double, ou
café double. On notera la vitalité de
double en tant qu'élément formateur, non dans le langage scientifique où il est supplanté par des préfixés savants
(→ ambi-, amphi-, bi-, di-, diplo-), mais dans l'usage courant et dans celui des techniques à grande diffusion
(→ croche, décimètre, fond, rideau, etc.).
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Dans certaines techniques récentes, des locutions ou mots composés sont des calques de l'anglais. C'est le cas de
double-aveugle (v. 1965), calque de l'anglais
double-blind test, double-blind procedure en médecine, et de
double précision (anglais
double precision) en informatique.
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Double est substantivé (v. 1150) pour désigner une quantité qui en vaut deux fois une autre, notamment dans les locutions adverbiales au double (1170) et, plus couramment de nos jours, en double (1461). Lui-même tend à assumer une fonction adverbiale (v. 1960).
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Substantivé, l'adjectif a plusieurs valeurs spéciales. Concrètement, un double désigne une ancienne monnaie (1340) [→ doublon], l'épaisseur formée par les deux parties repliées d'une chose (v. 1375), et au XXe s., une partie de tennis entre deux équipes de deux joueurs (1929). L'accent est mis, avec le, un double de..., sur l'idée de « chose semblable à une autre » (1406) et surtout de « personne semblable à une autre » d'abord au théâtre (1771), là où l'usage moderne emploie doublure*, et spécialement en occultisme (1832, Balzac). En français du Québec, un double est une épaisseur, une couche (supplémentaire) (deux doubles de planches).
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DOUBLE n. f. (XVe s.) n'a que des sens spéciaux : « panse des ruminants » (→ gras-double) et « deuxième ration de vin » en marine (1883), sens d'ailleurs quasiment sorti d'usage.
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Outre
DOUBLEMENT adv. (v. 1185),
double a produit un assez grand nombre de noms qui assument généralement des sens concrets, souvent techniques.
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1 DOUBLON n. m., d'abord écrit dublun (fin XIe s.), a eu le sens de « gras-double » ; il est passé dans le vocabulaire des typographes (1690) et de la métallurgie (1757) et a pour homonyme un emprunt à l'espagnol (→ 2 doublon).
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Au XIIe s. apparaissent DOUBLIER n. m. (v. 1180) « nappe pliée en deux », aujourd'hui employé avec un sens technique en agriculture (1864), et DOUBLET n. m. (1180-1190) dont les nombreux sens techniques et scientifiques sont pour la plupart modernes. En linguistique, un mot dérivé par évolution phonétique et un mot emprunté du même étymon (par exemple douer et doter) sont appelés doublets.
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DOUBLEAU n. m. (1260, doubliou) apparaît aussi en ancien français ; il s'est spécialisé en architecture (arc doubleau).
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DOUBLETTE n. f. possède des sens techniques, en musique (1610), en menuiserie (1868) et désigne une équipe de deux joueurs de boules.
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L'adjectif DOUBLETÉ, ÉE (1765) qualifie une étoffe ornée de fleurs à deux couleurs.
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Le terme d'argot ancien DOUBLARD n. m. (1881) a désigné différents gradés en raison de leurs galons doubles. Le même mot désigne la seconde femme d'un souteneur (1828) dans l'argot du milieu.
❏ voir
DOUBLER.
L
DOUBLER v. est issu (1080) du bas latin duplare « rendre double », de duplus (→ double).
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Le premier sens du verbe est « garnir d'une doublure », en parlant d'un vêtement et, ultérieurement, en orfèvrerie (1517), valeur qui sera reprise par
doublé n. m. (ci-dessous).
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Depuis le XIIe s., le mot signifie aussi « mettre en double, plier » (1135) et surtout « multiplier par deux » (1165-1170), sens auquel correspond l'intransitif « devenir double » (1165-1176) et auquel se rattachent plusieurs emplois spéciaux au billard (1690), en typographie, en musique.
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Un ancien sens transitif indéterminé, correspondant à « augmenter » (apr. 1150), est sorti d'usage, partiellement remplacé par le composé redoubler (ci-dessous).
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À partir de 1529, doubler est employé en navigation, à propos d'un bateau qui franchit un cap (une île), mais c'est seulement au XIXe s. que cette acception se répand en parlant d'un véhicule qui en dépasse un autre sur la même voie, d'abord en navigation (1845) puis en conduite automobile (1900) ; dans ce dernier contexte, par extension de complément, on dit aussi doubler qqn (1860).
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Au XVIIIe s., le verbe a pris, dans le domaine du spectacle, le sens de « remplacer (l'acteur en titre) », dans doubler un rôle (1718) et doubler qqn (1743), en relation avec le dérivé doublure (ci-dessous). Au XXe s., il est passé dans le langage du cinéma (1929) pour « remplacer (la bande sonore originale) par une bande dans une autre langue », en concurrence avec post-synchroniser, d'usage plus technique.
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Le français de Belgique et de Suisse, celui du Québec, ceux d'Afrique et de Madagascar emploient le verbe là où on dit redoubler en français de France.
En argot français, doubler signifie depuis le XVIIe siècle, « tromper » ; c'est l'un des sens du dérivé doublage. Avec la même idée que redoubler, les mots de la famille ont fait allusion à la résidence forcée d'un temps égal à la peine.
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Le participe passé adjectivé
DOUBLÉ, ÉE, entre autres sens, assume notamment cette dernière acception de
doubler (1938 en termes de cinéma :
film doublé).
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Depuis le XIXe s., il avait le sens figuré « accompagné (de) » (1843, Balzac) ; on trouve aussi chez Balzac (1847) l'emploi du type un menteur doublé d'un filou « qui est aussi ».
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En français du Canada, doublé correspond à « garni de fourrure, fourré » (des gants doublés).
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DOUBLÉ a été substantivé au masculin, spécialement en orfèvrerie, pour un bijou en métal ordinaire recouvert d'une mince plaque de métal précieux (1755). Cf. doré, argenté, etc.
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Désignant un fait répété deux fois, l'adjectif est employé spécialement en sports (1900, en manège) et en chasse (1900).
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Doubler a produit deux noms d'action aux champs sémantiques bien distincts. DOUBLEMENT n. m. (1268) exprime l'action de multiplier par deux et d'ajouter une chose à une autre. Pour « action de dépasser un véhicule » (1900), il est rare ; on dit plutôt dépassement.
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DOUBLAGE n. m. (1405) désigne l'action de garnir un vêtement d'une doublure, puis également, dans d'autres domaines techniques, l'action d'associer une chose à une autre pour l'embellir, la renforcer (en marine, 1678). Depuis 1919, c'est le mot couramment employé au cinéma à côté de post-synchronisation.
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De doubler sont aussi dérivés deux mots. Le nom d'agent 1 DOUBLEUR, EUSE (XIIIe s.) est d'usage technique, le nom masculin étant spécialisé en photographie (doubleur de focale, vers 1990).
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Le nom s'applique aussi au spécialiste du doublage des films.
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Dans tous les lieux francophones où on emploie doubler pour « recommencer une année scolaire », doubleur, euse correspond au redoublant du français de France.
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DOUBLURE n. f. (1376) correspond au sens le plus ancien de doubler. Le mot désigne un objet servant à en doubler un autre ; dans le domaine du théâtre, puis du cinéma, d'après un sens ultérieur de doubler, il s'applique à un acteur qui en remplace un autre (1808).
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On relève en français de Belgique, d'après doubler au sens de « suivre une classe une seconde fois » (en France, ce sens, [1765], a vieilli au bénéfice de redoubler), DOUBLANT, ANTE n. et 2 DOUBLEUR, EUSE n. « élève redoublant ».
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Doubler est entré dans deux séries de préfixés verbaux.
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REDOUBLER v. (déb. XIIIe s.) exprime à la fois l'idée de « rendre double à nouveau » et une idée intensive de « renouveler en augmentant », d'abord en construction intransitive (v. 1220) puis transitive directe (v. 1462) et indirecte (redoubler de...) [1728].
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Un emploi spécial usuel est redoubler une classe (1856 dans Sainte-Beuve), d'où REDOUBLANT, ANTE, adj. et n. (1875), qui correspondent à doubler et doubleur dans d'autres usages du français (voir ci-dessus).
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Le dérivé REDOUBLEMENT n. m. (XIVe s. ; repris 1539) exprime l'action de rendre double (spécialement en linguistique, 1869) avec des emplois spéciaux en escrime (1859, mais redoubler a le sens correspondant dep. 1670), et en rugby (1905).
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Le participe passé REDOUBLÉ est adjectivé dès l'ancien français (XIIe s.), entrant avec un sens intensif dans la locution à coups redoublés (1691).
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L'antonyme
DÉDOUBLER v. tr., d'abord
desdoubler (1429), a entraîné
DÉDOUBLEMENT n. m. (av. 1755) « action de dédoubler, son résultat », spécialement en sciences occultes et en psychologie (1870), et
DÉDOUBLAGE n. m. (1845), réservé à l'usage technique.
2 DOUBLON n. m. est emprunté (1534) à l'espagnol doblón (1497), nom de monnaie dérivé de doble, correspondant de même sens et de même origine que le français double*.
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Le mot, homonyme d'un dérivé de double*, désigne une ancienne monnaie d'or espagnole frappée depuis 1497.
DOUCHE n. f. est emprunté (v. 1580) à l'italien doccia, prononcé dotcha, « jet d'eau dirigé sur le corps à des fins hygiéniques ou thérapeutiques » (1499), déverbal de docciare « couler en jet » (av. 1350). Ce verbe est lui-même dérivé de doccia « conduit, tuyau » (XIIIe s.), peut-être dérivé de doccione « conduit » (XIVe s.), lui-même emprunté au latin impérial ductio, -onis « conduite » (ductio aquae « conduite d'eau »), de ducere (→ conduire), la finale -one ayant été en italien confondue avec le suffixe augmentatif.
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Le mot est d'abord cité par Montaigne dans son Journal de voyage (1580) sous la forme italienne doccia ; puis il est adapté en doulche (1584). Montaigne l'emploie à propos des conduits acheminant l'eau chaude dans l'établissement thermal de La Villa et le glose par « certein esgout » et (au pluriel doccie, dans les Essais) « certaines gouttières ».
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Cependant, il l'applique déjà au jet d'eau dirigé sur le corps par traitement thérapeutique, le distinguant de bain. Le mot, souvent douge au XVIIe s., se rapporte d'abord à un contexte thermal, la douche simplement hygiénique n'étant dénommée qu'au XIXe siècle.
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Alors, le mot prend aussi la valeur figurée de « traitement violent » (1870), tout en s'appliquant par analogie à une averse de liquide, par métaphore (1829), puis familièrement au figuré (1870).
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Enfin le mot s'emploie pour « salle de douche » (chambre avec douche), en concurrence avec cabinet de toilette et salle de bain, et pour « appareil à douche ». Pour douche écossaise, voir écossais.
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En français d'Afrique, le mot s'applique en général au local où on peut faire ses ablutions, et aussi aux « toilettes ».
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Le dénominatif
DOUCHER v. tr. (1640) s'emploie pour « faire prendre une douche », surtout au pronominal
se doucher.
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En français d'Afrique,
se doucher s'emploie aussi pour « se laver en entier », là où l'on dit
se baigner en français d'Europe
(se doucher dans le fleuve).
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Au figuré,
doucher qqn s'est dit (1900) pour « réprimander »
(Cf. passer un savon), surtout au passif ou au factitif :
se faire doucher, être douché sont plus courants pour « recevoir, avoir reçu une pluie abondante » et au figuré « être déçu, dépité, désabusé, subir une contrariété ».
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On a tiré du verbe DOUCHEUR, EUSE n., attesté une première fois en 1687 et repris à partir de 1838. Le diminutif DOUCHETTE n. f. est devenu courant à propos d'un appareil muni d'un tuyau flexible et d'une pomme percée de petits trous, pour distribuer l'eau courante en pluie fine. Le mot sert aussi à désigner un dispositif de forme analogue pour la lecture des codes à barres.
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DOUCHIÈRE n. f. n'est en usage qu'en français d'Afrique subsaharienne, pour la pièce ou l'enclos en plein air où l'on peut faire ses ablutions et aller aux toilettes, ainsi que pour « système de douche ».
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Le composé BAINS-DOUCHES n. m. pl. désigne en français de France un établissement public.