DRACONIEN, IENNE adj., relevé en 1796 dans Le Néologiste français, est dérivé avec le suffixe -ien, du nom propre Dracon, grec Drakôn, législateur d'Athènes (fin VIIe s. av. J.-C.), célèbre pour la sévérité du code pénal qu'il institua dans cette cité (→ dragon), mais qui fut la première tentative pour remplacer la vengeance privée par une justice d'État.
❏  Le mot, qui a remplacé draconique (XVIe s.), s'emploie au sens de « relatif à Dracon » dans la langue didactique, et, couramment, pour « excessivement sévère ». Il est homonyme d'un adjectif didactique correspondant à dragon (→ dragon).
1 DRAG n. m. est un emprunt du XIXe siècle à l'anglais, où le mot, qui vient du verbe to drag « traîner », a désigné un simulacre de chasse à courre au renard, suivi par un cortège de calèches pour les dames.
❏  Le français en a retenu le sens de « calèche à l'anglaise », notamment dans l'expression la journée des drags « journée de courses hippiques, à Auteuil », où les gens du monde se rendaient en drags.
2 DRAG → DRAG QUEEN
? 1 DRAGÉE n. f., d'abord dragiee (v. 1200), est d'origine incertaine : l'hypothèse généralement admise le fait remonter au latin impérial tragemata « dessert », lui-même emprunté au grec tragêma, -atos (généralement au pluriel) « friandise que l'on croque », du verbe trôgein « croquer, ronger (animaux, hommes) ». Ce mot, conservé en grec moderne pour « manger », appartient à une racine indoeuropéenne que l'on retrouve dans l'arménien aracem « paître ». Bloch et Wartburg mentionnent l'italien treggea, l'espagnol gragea, l'ancien provençal tragea, dragea, mais les relations de ces mots avec le français dragée sont obscures. P. Guiraud considère le nom de la confiserie comme un emploi figuré de 2 dragée* « mélange de grains pour les bestiaux » qui, pense-t-il, aurait désigné un mélange de petits fruits couverts de sucre (avelines, amandes, pistaches).
❏  Le mot, nom d'une confiserie faite d'une amande enrobée de sucre, est entré dans quelques locutions dont tenir la dragée haute à qqn (1773, Diderot) « lui faire payer cher ce qu'il demande », rattachée par les uns au sens de « friandise », mais par d'autres à 2 dragée « fourrage ». Il semblerait toutefois que l'image de la friandise tenue hors de portée convienne mieux. Par extension, le mot désigne, en pharmacie, une pilule recouverte de sucre, de gomme (1776) et, par analogie de forme, dans le vocabulaire de la chasse, le petit plomb (1552). ◆  L'argot en fait un synonyme de balle « projectile d'arme à feu » (1792). ◆  L'appellation dragées de Tivoli (1775) désigne une calcite aux concrétions en forme de grains.
❏  Dragée a produit un nom d'objet concret, DRAGEOIR n. m., d'abord drajouer (XIIe s.), aujourd'hui vieilli avec l'objet qu'il désigne : une coupe où l'on mettait des dragées, des friandises, des épices (Cf. le titre de Huysmans, Le Drageoir aux épices), et une petite boîte pour porter des dragées sur soi. ◆  Il a aussi produit le terme de confiserie DRAGÉIFIER v. tr. (1850) auquel correspond le nom d'action DRAGÉIFICATION n. f. (1870).
L 2 DRAGÉE n. f., terme d'agriculture, est issu sous la forme dravie (v. 1200) puis dragie (fin XIIIe s.) d'un latin populaire °dravocata, de dravoca « ivraie », mot probablement d'origine gauloise qui a donné DRAVIÈRE n. f. (1318), son synonyme régional.
❏  Le mot désigne un mélange de graines que l'on fait pousser en fourrage. Selon P. Guiraud, une spécialisation analogique serait à l'origine de 1 dragée. Pour d'autres, tenir la dragée haute à qqn concerne ce mot et non 1 dragée.
G DRAGEON n. m., terme d'arboriculture, est probablement issu (1548) du francique °draijbo « pousse, rejeton », postulé par l'ancien haut allemand trîban, le gotique draijban et l'allemand treiben « pousser, mener ». La même racine se retrouve en anglais to drive « conduire », en néerlandais drijuen.
❏  Le mot, d'abord employé en parlant d'un œillet d'artichaut et d'un bourgeon, d'une tige poussant sur un arbre, a pris le sens de « rejeton qui naît de la racine d'un arbre » (1694).
❏  Il a produit DRAGEONNER v. (1636) « pousser des drageons », auquel correspond le nom d'action DRAGEONNEMENT n. m. (1872, Littré) ; on rencontre aussi drageonnage, plus ancien (XVIe s.).
DRAGON n. m., attesté dans la Chanson de Roland (1080) sous la graphie dragun, est emprunté au latin draco, qui désigne un animal fabuleux (souvent gardien de trésor) et, par analogie, un poisson de mer inconnu, un récipient tortueux servant à faire chauffer l'eau et un vieux cep de vigne, toujours avec l'idée d'une forme tortueuse. À basse époque, s'y ajoutent le sens d'« enseigne de cohorte » (à l'image d'un dragon) et, en latin chrétien, celui de « diable, démon ». Draco est emprunté, tant avec son sens propre qu'avec divers sens analogiques, au grec drakôn, proprement « dragon », également employé à Athènes comme nom propre (→ draconien ; Cf. le roumain dracul dans Dracula), et apparenté au verbe derkesthai (aoriste edrakon) « regarder », avec une idée de regard fixe ou perçant. Ce verbe repose sur une racine indoeuropéenne °derk- « briller », que l'on retrouve dans le sanskrit darśatá « visible », le vieil irlandais, le vieil haut allemand zoraht « clair », et même l'albanais dritë « lumière ».
❏  Le mot est passé en français avec le sens initial et dominant d'« animal fabuleux » avec un emploi spécial en héraldique (1176-1181) et le sens de « symbole du démon » dans l'iconographie chrétienne (1130-1140). Les emplois figurés datent du XVIIe s. et couvrent les nuances de « gardien vigilant et farouche » (1662), « personne vive et acariâtre » (1672) aussi au féminin DRAGONNE.
■  Les sens analogiques sont nombreux dès l'ancien français où le syntagme dragon volant désignait un phénomène se produisant dans l'atmosphère (1275-1280) puis un grain soudain et violent soufflant sur la mer (1686). De cette expression vient probablement le sens classique de « chagrin, souci qui tourmente » (1672, encore chez Chateaubriand) analogue aux blue devils anglais.
■  Au XVIIe s. dragon, d'après le latin Draco, désigne une constellation (attesté 1690). Le mot se dit aussi d'une maladie des yeux des chevaux. Il est passé dans le vocabulaire de la zoologie, s'appliquant à un serpent (1800, Boiste) puis (1803) à un lézard volant.
■  Parallèlement, et dès ses premières attestations, dragon a désigné comme en latin draco un étendard (1080) jusqu'au XVIe s., avant de s'appliquer à un soldat de cavalerie (1590) et, de nos jours, au soldat d'une unité motorisée, puis blindée. C'est de ce sens militaire que vient l'expression à la dragonne, équivalent de à la hussarde.
❏  En dehors de DRAGONNÉ, ÉE adj. (1647) « en forme de dragon » (spécialement en héraldique), les dérivés prolongent les sens analogiques du mot.
■  DRAGONNEAU n. m. (déb. XIIIe s.) est un ancien diminutif spécialisé en médecine et en médecine vétérinaire, ainsi que la variante moderne DRAGONNET n. m. (1808), terme d'ichtyologie.
■  Les autres dérivés se rapportent à dragon « soldat de cavalerie » : le terme historique DRAGONNADE n. f. (1708), par lequel on désigne les violences exercées par les dragons que l'on envoyait persécuter les protestants, vient probablement de dragon par l'intermédiaire de l'expression à la dragonne. ◆  Ce type d'action avait entraîné la formation d'un verbe DRAGONNER v. tr. (1668), sorti d'usage en dehors de son contexte historique.
■  Enfin, dragon a donné DRAGONNE n. f. passé de son sens premier de « batterie de tambour » (1771) au sens actuel de « cordon garnissant la poignée d'un sabre » (1800) ; ce dérivé avait été antidaté par confusion avec dragonne « femme acariâtre », attesté au XVIIe s., par exemple chez Molière.
■  Dragon entre dans la formation d'un nom d'arbre, SANG-DRAGON n. m. (XIIIe-XIVe s.) également dit DRAGONNIER n. m. (XVe s., antérieurement « porte-drapeau », XIIe s.).
❏ voir DRAKKAR, ESTRAGON.
DRAG QUEEN n. f. est un emprunt à un composé anglais, de queen « reine » et to drag « traîner », par allusion à la traîne d'une robe longue.
❏  Le mot, répandu en français dans les années 1990 avec la gay pride, désigne un travesti vêtu de manière recherchée et ostentatoire. On l'abrège parfois en drag ou en queen.
1 DRAGUE n. f. est emprunté (1300-1301) au moyen anglais dragge (XIVe s.), devenu drag en anglais, terme désignant un filet de pêche et un gros cordage (fin XVe s.). Ce mot se rattache à l'ancien nordique draga « tirer » (à l'origine du verbe anglais to draw) et à son substantif verbal drag, désignant un madrier sous la quille d'un bateau et l'isthme où l'on doit tirer un bateau (l'islandais a drag : « action de tirer, de traîner »).
❏  En France, l'emprunt est d'abord relevé en latin médiéval sous la forme dragge, à propos du filet servant à la pêche à la traîne, ainsi que dans des textes anglo-normands (1381-1382). Il se répand en français sous une forme francisée (drègue, 1388), comme terme de pêche et avec le sens qui s'est maintenu : « machine pour enlever le sable, la vase du lit d'un cours d'eau » (1556). ◆  Le mot désigne aussi le câble ou le grappin que l'on promène au fond de l'eau pour en tirer les objets immergés (1701, « gros cordage utilisé pour chercher une ancre »).
❏  DRAGUER v. tr., dénominatif de drague, est d'abord relevé sous la forme dragger dans un texte anglo-normand (1425) avec le sens de « pêcher (des huîtres) à l'aide d'une drague ». Il semble rare avant le XVIIe s. (1634, « curer à l'aide d'une drague, repêcher à la drague »).
■  Fin XIXe s., il a commencé à s'employer au figuré, d'abord pour « parcourir un lieu à la recherche d'un butin » (1885, Laforgue). Le sens courant de « chercher à séduire (une fille, un garçon) » et, absolument, « déambuler à la recherche d'une aventure facile », apparaît dans un contexte argotique dans les années 1950 et s'est diffusé dans l'usage familier courant.
■  Tous les dérivés du verbe ont suivi son évolution : DRAGUEUR, EUSE adj. et n. qualifie (1529) et désigne par ellipse du nom (1664) un navire de pêche muni d'une drague, un navire qui drague un fond (1829) et aussi l'ouvrier qui accomplit le même travail (1800). Après un emploi métaphorique lié à draguer « errer à la recherche d'un butin » (Journal de Jules Renard, 1892), il est employé aujourd'hui au sens figuré familier d'« homme ou femme qui cherche l'aventure » vers 1960 (dragueur professionnel).
■  Le féminin DRAGUEUSE désigne spécialement une machine complexe servant à draguer un fond (av. 1948).
■  Le nom d'action DRAGAGE n. f. correspond d'abord au sens technique du verbe (1765) puis également à son sens figuré d'usage familier (1968).
■  Il faut y ajouter le déverbal 2 DRAGUE n. f., qui n'est attesté qu'au sens métaphorique récent de « recherche d'aventures érotiques » (1961, comme dragueur).
? 1 DRAILLE n. f. est peut-être la variante de traille, issu du latin tragula « javelot, herse », ou plutôt de l'occitan languedocien tralho, variante de dralho « câble pour tirer un bac ». C'est un terme de marine, dénommant un cordage tendu, sur lequel peut glisser une voile (draille de foc).
2 DRAILLE n. f. est la francisation (1835) de dialectes francoprovençaux, où draya (1316 dans le Dauphiné) désigne un sentier. Le mot semble dérivé du verbe trailla « laisser une trace en marchant », issu d'un verbe latin populaire °tragulare « suivre à la trace », croisement de trahere (→ tirer) et tragula (→ 1 draille). En français des Hautes-Alpes, de Provence, du Languedoc, le mot désigne une piste ménagée pour la transhumance des troupeaux de moutons et, par extension, un sentier.
DRAIN n. m. est emprunté (1849) à l'anglais drain (1552), tiré de to drain « assécher », verbe issu, de même que dry « sec », d'un ancien germanique °draug- « sec ». Le mot anglais désigne un conduit souterrain destiné à faire écouler l'eau des sols humides et, dans un tout autre domaine, un tube percé de trous utilisé en chirurgie pour favoriser un écoulement (1834).
❏  Le mot est passé en français avec le premier sens de « conduit » (1849) et avec le second en chirurgie (1859 ?, sans référence). Sa prononciation a été aussitôt francisée.
❏  La dénasalisation de l'anglais réapparaît dans le dérivé DRAINER v. tr. (1848) employé en agriculture et en chirurgie (1855) et, par suite, au sens figuré de « faire affluer en attirant à soi » (1865).
■  Le verbe, plus courant que drain, surtout au figuré (drainer des capitaux, etc.) a produit les dérivés DRAINAGE n. m. (1848), qui correspond aux trois sens du verbe, DRAINEUR, EUSE adj. et n. m. (1850) et DRAINEUSE n. f. (1861) qui désigne exclusivement l'appareil de drainage du sol.
DRAKKAR n. m. est emprunté (1840) au suédois drakar, pluriel de drake « dragon » et, par métonymie, « navire (dont la proue était ornée d'un dragon) ». Le mot remonte à l'ancien nordique dreki, probablement d'origine latino-grecque (→ dragon). Le français a fait du pluriel suédois le singulier français (pluriel drakkars), la forme drake, attestée en 1870, ne s'étant pas imposée.
❏  Le mot désigne, en histoire, un navire utilisé par les Vikings au moyen âge.
DRAME n. m. est la francisation (1657, d'Aubignac) du bas latin drama « action théâtrale », emprunté au grec drama, -atos « action » (souvent chargée de conséquences), spécialisé au théâtre où il désigne l'action scénique, la pièce, et plus particulièrement la tragédie. Par extension, drama se disait d'un coup de théâtre, d'un événement tragique. C'est le nom d'action correspondant à dran « faire, agir » (→ drastique), souvent avec la spécification de la responsabilité prise plutôt que celle de la réalisation d'un acte ; il est également employé pour parler de l'accomplissement de rites. On le rapproche hypothétiquement de formes baltiques (lituanien darau, darytî « faire », lette darît), sans parvenir à établir une famille indoeuropéenne.
❏  Le mot, relevé dans un traité de l'abbé d'Aubignac, Pratique du théâtre, comme francisation du mot grec, est absent des dictionnaires du XVIIe s. ; il est appliqué, de manière isolée, à une pièce de théâtre représentée dans les collèges de jésuites et portant cette mention (1696). L'expansion du mot au XVIIIe s. coïncide avec la naissance d'un nouveau genre théâtral. Il sert momentanément de terme générique pour tous les ouvrages composés pour le théâtre (1750, abbé Prévost). Sa définition s'élabore dans la seconde moitié du XVIIIe s., dans les œuvres de Diderot, Beaumarchais, Sedaine, Mercier. Il désigne alors (vers 1760, après Sylvie, pièce qualifiée de drame en 1742) la tragédie bourgeoise, genre hybride né du souci de renouveler les traditions classiques par plus de réalisme, sous la double influence du théâtre étranger et de la bourgeoisie montante. Au XIXe s., il reçoit sa définition romantique, en 1830 avec la bataille d'Hernani, dès 1827 dans la Préface de Cromwell, pièce de Hugo. Il se définit alors comme un théâtre d'action complexe, lyrique, substituant les sujets modernes aux sujets antiques, épris de couleur locale, mêlant les genres. Depuis 1787, drame est employé au sens figuré de « suite d'événements tragiques, terribles ». C'est le titre d'un ouvrage de Restif de la Bretonne : Le Drame de la vie (1793). Le style journalistique l'a répandu au sens de « catastrophe causée par un crime, un accident ».
❏  En sont dérivés les termes de théâtre DRAMATISTE n. m. (1771), disparu, et DRAMATISME n. m. (1776), repris dans un sens plus général ainsi que DRAMATISER v. tr. (1801) donné comme néologisme par Mercier, à propos de Shakespeare, mais probablement antérieur si l'on en juge par l'attestation du syntagme les dramatisants modernes, en 1773.
■  Du verbe sont dérivés à leur tour DRAMATISATION n. f. (1889) et les antonymes préfixés DÉDRAMATISER v. tr. (1965), DÉDRAMATISATION n. f. (v. 1965), devenus usuels dans un contexte psychologique.
Deux autres mots du groupe sont des emprunts.
■  DRAMATIQUE adj. est emprunté (1370-1371) au bas latin dramaticus « qui concerne le théâtre », lui-même pris au grec dramatikos, dérivé de drama. Le mot qualifie ce qui se rapporte au théâtre, mais il semble rare jusqu'au milieu du XVIIe siècle. Furetière, qui ignore le mot drame, le qualifie de « terme poétique » et reprend les sens substantivés de « genre poétique » (la dramatique, 1636), éliminé par le masculin à valeur de neutre (1688). Le nom s'applique aussi aux auteurs qui s'occupent de théâtre (1680). Au XIXe s., d'après la définition moderne du drame (ci-dessus), l'adjectif prend le sens de « susceptible d'intéresser vivement le spectateur au théâtre » (v. 1835) et de « grave, dangereux, pénible », s'agissant d'événements réels (1839, Boiste).
■  Le féminin substantivé DRAMATIQUE n. f., appliqué à un récit adapté aux moyens de la télévision, tend à être évincé par la création de téléfilm, qui témoigne d'un passage de la référence théâtrale à la référence cinématographique.
■  Dramatique a donné DRAMATIQUEMENT adv. (1767, Grimm) chez lequel le sens strictement théâtral est aujourd'hui supplanté par le sens courant, l'adverbe signifiant « d'une manière pénible, triste », ce qui le rapproche de tragiquement.
DRAMATURGE n. m. est un emprunt de la seconde moitié du XVIIIe s. (1773) au grec tardif dramatourgos « auteur dramatique », de drama, -atos et -ergos (de ergon « action, œuvre »). Le sens d'« auteur de pièces de théâtre », d'abord seulement « auteur de drames » tend, depuis une trentaine d'années, à se doubler d'une nouvelle valeur, celle de « conseiller littéraire et historique du metteur en scène, chargé de préparer l'analyse historique du texte et les moyens concrets de la réalisation technique » (dans le sillage de Brecht).
■  Le nom correspondant, DRAMATURGIE n. f., est soit dérivé du précédent, soit emprunté au grec dramatourgia « composition ou représentation d'une pièce de théâtre », dérivé de dramatourgos ; il est attesté pour la première fois en 1668 chez Chapelain, traduisant l'italien dramaturgia de L. Allacius, « catalogue d'ouvrages dramatiques », emploi qui reste isolé. Le mot est repris à partir de 1775.
■  En est issu DRAMATURGIQUE adj. (1777).
❏ voir MÉLODRAME, PSYCHODRAME et aussi DRASTIQUE.
L + DRAP n. m. est issu (1050) du bas latin drappus « chiffon, morceau d'étoffe », peut-être d'origine gauloise (le gaulois a les noms propres Drappus, Drappo, Draponus).
❏  Le mot est passé en français avec le sens général d'« étoffe » et c'est par spécialisation de fonction qu'il a pris son sens usuel, « pièce de toile garnissant le lit » (v. 1175), évinçant de cet emploi linceul. Le sens métonymique d'« habit (en drap) » (XIIe s.) est sorti d'usage ; il avait fourni l'expression être des draps de qqn « être au service de qqn de puissant ». Dans son acception courante, drap entre dans la locution ironique être dans de beaux draps (et ses variantes) [XIXe s.] qui pourrait être un avatar de être couché en blancs draps (fin XVIe s.), puis mettre qqn en beaux draps blancs (XVIIe s.) « le prendre comme cible de sa médisance ». ◆  Ses emplois déterminés, où le mot a son sens ancien et général, sont souvent régionaux ou vieillis (drap de poche « mouchoir »), à l'exception de drap de bain « serviette de bain ». Drap de vaisselle se dit en Belgique, à côté de essuie-vaisselle, là où on emploie torchon en France.
❏  En dehors du nom de métier DRAPIER, IÈRE (1244) également adj. (l'industrie drapière) et de ses dérivés DRAPERIE n. f. (1254) « fabrication du drap », et DRAPIÈRE n. f. (1811), substantivation du féminin de l'adjectif, les dérivés de drap ont connu une évolution sémantique qui les a éloignés du sens usuel de « pièce de toile ».
Le diminutif DRAPEAU n. m., réfection de drapel (1119) sur le pluriel drapiaus (XIIIe s.), a désigné un morceau de tissu, un chiffon (et au pluriel des langes), sens resté en usage en français central jusqu'au XVIIIe s. (le dictionnaire de Trévoux le dit « vieilli » en 1752). Ce sens s'est conservé dans des usages régionaux, du nord au sud de la France, en passant par le Centre et le Centre-Est francoprovençal. Il désigne le tissu des langes et les langes d'un bébé.
■  Le sens moderne (1578) est une spécialisation due à l'italien drapello, de même formation que drapeau, mais attesté au sens de « bannière » dès le XIVe s. (av. 1388). H. Estienne, qui enregistre ce sens (1578), signale qu'il commence à remplacer enseigne. Son usage s'est ensuite généralisé et le mot a pris des valeurs symboliques et figurées, comme « signe de ralliement » (1784) et « personne symbolisant une cause » (1870). Dans la phraséologie, il symbolise aussi l'armée, le service armé (sous les drapeaux, 1792). Il est quelquefois employé en apposition (v. 1966) pour signaler le caractère prestigieux d'un objet. ◆  Le sens de « signal » s'est réalisé des années 1920 jusque vers 1950-1960 pour « appareil à levier indiquant la prise en charge, sur un taxi ». Un autre exemple de ce sémantisme, dont on ignore la nature exacte, est l'expression laisser, planter un drapeau (1894) « laisser un impayé, en s'en allant ».
■  Il a donné en ancien français le diminutif DRAPELET n. m. (v. 1120). Celui-ci s'est aligné sur le sens moderne de drapeau, désignant un petit drapeau (1611, repris 1832) ; il a disparu sauf archaïsme (Montherlant) au sens technique (v. 1960) de « partie d'un revêtement de sol repliée et fixée au soubassement ».
■  Céline emploie (1932) un adjectif ironique DRAPEAUTIQUE.
PORTE-DRAPEAU n. m. (1578) désigne celui qui est chargé de porter le drapeau d'un régiment (Cf. porte-enseigne, à enseigne et porte-étendard à étendard). Il s'applique au figuré (att. XIXe s. ; 1866 dans Zola) à la personne qui est reconnue comme chef d'un mouvement.
DRAPERIE n. f., après avoir désigné un tissu ou un vêtement de drap (jusqu'au XVIe s.), se réfère à un vêtement ample formant de grands plis dans le domaine de la peinture (1622) et de la sculpture, et enfin dans l'usage courant (1677).
■  Le dénominatif DRAPER v. tr. (1225) a perdu la valeur de « fabriquer le drap » au début du XVIIe s., et a alors signifié « habiller de vêtements amples formant des plis harmonieux » (1622) en art, puis dans l'usage courant. Au XIXe s., se draper s'emploie pour « se mettre en valeur d'une façon théâtrale » (1838, Hugo).
■  Le participe passé DRAPÉ, ÉE est adjectivé (1464) avec un sens technique : « préparé comme un drap » ; il signifie plus couramment « garni d'un drap » (au propre et au figuré). Substantivé (1901), un drapé désigne l'ensemble des plis formés par l'étoffe d'un vêtement.
■  Le nom d'action correspondant au verbe est, soit DRAPEMENT n. m. (1876), soit DRAPAGE n. m. (1890).
❏ voir SPARADRAP.
DRASTIQUE adj. est un emprunt médical assez tardif (1741) au grec drastikos « actif, énergique », spécialisé en médecine, dérivé du participe passé drastós de dran « faire », « agir » (→ drame).
❏  Introduit en médecine au sens de « qui purge énergiquement », drastique a pris, sous l'influence de l'anglais drastic (1808), lui-même emprunté au grec, le sens figuré familier de « draconien, énergique » (1875), bien que la première attestation française en ce sens soit donnée comme un germanisme.
❏  Le dérivé DRASTIQUEMENT adv. (v. 1950) est calqué sur l'anglais.
DRAVE n. f., mot du français canadien, est un emprunt à l'anglais drive, sens spécialisé de l'anglais to drive « conduire ». Il est attesté au Canada v. 1870.
❏  Le mot désigne le flottage du bois traditionnel, l'action de diriger les trains de bois flotté.
❏  Il a pour dérivé DRAVER v. tr. « conduire le bois flotté » d'où DRAVEUR n. m. « flotteur de bois », par exemple dans le titre du roman de Savard, Menaud, maître draveur (1937).
DRAVIDIEN, IENNE adj. (1865) est emprunté à l'anglais dravidian (1856), lui-même tiré du nom sanskrit Dravidah désignant les provinces du sud de l'Inde. La forme dravidique (1856) peut avoir été formée indépendamment.
❏  Le mot a remplacé malabare pour qualifier ce qui est relatif aux populations du sud de l'Inde, et notamment leurs langues non indoeuropéennes (tamoul, télugu, malayalam, etc.).
? DRÈCHE n. f., attesté en 1250 mais au moins aussi ancien que le dérivé draschier (1160-1174), est d'origine obscure. On le suppose issu d'un type °drasca, probablement d'origine celtique comme plusieurs mots du vocabulaire de la brasserie (Cf. cervoise, brai), en s'appuyant sur les formes latines médiévales drasca, drachia (1276), drascum (1194). P. Guiraud l'apparente à rache, raiche, mot issu du latin populaire °rasicare qui désigne toutes sortes de détritus que l'on « racle » : boue, lie, rebut, etc. La forme primitive du mot, drashe (mais on a aussi draque, 1410, drache, 1600), serait alors un doublet de rasche et représenterait une forme °derasicare, du latin classique deradere « enlever en raclant » (→ raser). La forme actuelle drèche (avec accent grave) serait attestée en 1478 selon Bloch et Wartburg (1688, in T. L. F.). On trouve aussi drêche.
❏  Ce terme technique de brasserie désigne le résidu d'orge cuite après la cuisson de la bière. On l'a étendu aux résidus des distillations des pommes, des grains.
DRELIN interj. et n. m., attesté depuis 1673 (Molière), antérieurement sous la forme dre lin din din (1630, en parlant d'un luth) est d'origine onomatopéique, imitant un bruit métallique répété, comme celui d'une sonnette (Cf. drlo drlo, 1605).
❏  Depuis le XXe s., drelin est fortement concurrencé par dring (redoublé en dring, dring) ou par ses variantes drain drain, 1542, drin, drinn.
❏  Le mot a inspiré plusieurs dérivés rares, tel le verbe DRELINER v. intr. (1879, Huysmans, altéré en derliner).