ECCLÉSIASTIQUE adj. et n. m. est un emprunt (1284, n. m.) au latin chrétien ecclesiasticus, n. et adj., pris au grec ekklêsiastikos « relatif à l'assemblée du peuple ». Cet adjectif est dérivé de ekklêsia « assemblée du peuple », puis « assemblée des fidèles » et « lieu où se tient cette assemblée ». Ekklêsia, dérivé de kalein « appeler », est à rattacher à une racine indoeuropéenne que l'on retrouve par exemple dans le latin calare et clamare « appeler » (→ clamer), clarus (→ clair), et dans les langues germaniques (anglais to call).
❏
Ecclésiastique (1284, n. m., avec une majuscule) désigne d'abord un des livres sapientiaux de l'Ancien Testament. Le mot est ensuite attesté comme adjectif (1324) pour qualifier ce qui concerne le clergé chrétien et spécialement catholique, puis est employé comme substantif (1507-1508) pour « membre du clergé ».
❏
L'adverbe dérivé
ECCLÉSIASTIQUEMENT (1422) est rare.
◈
ECCLÉSIASTE n. m., terme didactique emprunté (
XIIe s.) au grec
ekklêsiastês « prédicateur », est la dénomination de l'auteur d'un des livres sapientiaux et, par métonymie, du livre lui-même.
■
ECCLÉSIAL, ALE, AUX adj. est emprunté au latin médiéval ecclesialis « relatif à une église », dérivé du latin classique ecclesia. Attesté une première fois en 1174-1176, puis au début du XVIe s., il est repris en 1838 appliqué à ce qui concerne l'Église en tant que communauté.
◈
ECCLÉSIA n. f. (1954), repris du grec après
ecclésie n. f. (1831), est un terme d'histoire pour désigner l'assemblée du peuple dans les cités grecques et notamment à Athènes.
❏ voir
ÉGLISE.
L
ÉCHAFAUD n. m. apparaît (v. 1170) sous les formes eschaafauz, eschalfaut ; on relève d'autres graphies jusqu'au XIVe s. (1357, eschafaud). Le mot est une altération, d'après échelle ou échasse, de l'ancien français chafaud, n. m., « échafaudage » (v. 1160) encore attesté dans quelques dialectes. Chafaud est issu par évolution phonétique d'un latin populaire °catafalicum (Cf. italien catafalco ; → catafalque) composé du préfixe d'origine grecque kata- indiquant un mouvement de haut en bas, et du latin fala « tour de défense en bois » (mot étrusque), sur le modèle de catasta « estrade où l'on expose les esclaves à vendre » (emprunt au grec katastasis).
❏
Le mot a d'abord désigné une construction provisoire, plate-forme ou échafaudage (v. 1170) permettant l'édification de bâtiments (→ échafaudage, ci-dessous), ainsi qu'une estrade à l'usage d'un prédicateur (v. 1170, eschalfaut), des gradins pour les spectateurs (fin XIIIe s., escaffaus). L'emploi de échafaud pour « échafaudage » est resté vivant en français du Canada. Le mot, dès le XIVe s., a désigné spécialement l'estrade où jouent des comédiens (1319, eschaiffaut) ; ces emplois sont sortis d'usage en français d'Europe.
◆
Au XIVe s., le mot désigne notamment une plate-forme en charpente destinée à l'exposition et à l'exécution des condamnés (1357), sens le plus courant aujourd'hui. Par métonymie, le mot se dit pour « peine de mort par décapitation », après l'invention de cet appareil de supplice, « par la guillotine » (sens attesté seulement vers le milieu du XIXe s., av. 1870).
❏
ÉCHAFAUDER v. intr. et tr. (v. 1260,
eschaufauder) conserve son sens initial de « dresser un échafaudage »
(intr.). L'emploi transitif (
XVe s.) est devenu courant au sens étendu de « superposer (des objets) de manière instable ou en élevant une construction complexe », d'où le sens figuré, « réunir et superposer (de nombreux éléments) » et, plus couramment, « former des combinaisons hâtives et fragiles » (1464,
eschaffaulder « projeter »,
Maistre Pathelin).
■
Le verbe a fourni plusieurs dérivés ; ÉCHAFAUDEUR, EUSE n. (1292, eschaufaudeeurs), d'abord attesté pour désigner un constructeur d'échafaudage, puis celui qui établit un échafaud pour faire sécher les morues (1859), sens disparus ; le mot est repris au XXe s. dans l'emploi figuré, peu usité, de « personne qui échafaude (une théorie, etc.) ».
■
ÉCHAFAUDEMENT n. m., attesté une première fois en 1384 comme synonyme d'échafaudage, semble repris au début du XXe s. (1914, Gide) dans un emploi figuré et littéraire.
■
ÉCHAFAUDAGE n. m. (1517, eschafaudaige), autre dérivé du verbe qui est devenu rare au sens d'« action de dresser des échafauds », se dit couramment de la construction elle-même.
◆
Le sens figuré « assemblage de faits, d'arguments » semble apparaître au milieu du XVIIIe s. longtemps après le sens correspondant du verbe, et le sens analogique d'« amas » avant 1791.
L
ÉCHALAS n. m. inv., attesté en 1215 sous la forme eschalaz, représente une altération, très probablement d'après échelle, de l'ancien français escharat (1158, hescaraz) issu d'une forme °charas attestée par le dérivé charasson « échalas » dans les dialectes du Centre. °Charas est lui-même issu du latin populaire °caracium, altération du bas latin carratium « échalas », transposition du grec kharax « pieu, échalas », de kharassein « entailler », « aiguiser », mot d'origine incertaine (v. 300, charax). Échalas a supplanté le terme plus ancien et répandu dans les parlers gallo-romans qui était paisseau, du latin populaire °paxellus, altération du latin classique paxillus.
❏
Le mot désigne d'abord un pieu en bois qui, enfoncé dans le sol, sert à soutenir une plante, un arbuste ou un cep de vigne. Par comparaison, il est ensuite employé au figuré pour désigner une personne grande et maigre (1690) et aussi (1808) une jambe maigre.
❏
Le dérivé ÉCHALASSER v. tr. (1396, eschalacier) signifie en agriculture « garnir d'échalas », d'où les termes de viticulture ÉCHALASSEMENT n. m. (1552) ou ÉCHALASSAGE n. m. (1845), qui tend à le remplacer.
L
ÉCHALIER n. m. est issu (v. 1180, eschalier) du bas latin scalarium, dérivé de l'adjectif scalaris « d'escalier » et est un doublet de escalier*.
❏
Échalier, qui a eu le sens d'« échelle » (v. 1180), désigne (1530, eschallier) une échelle rudimentaire pour franchir une haie ; par analogie de forme, le mot se dit ensuite (v. 1534) d'une clôture faite de branches entrelacées ou d'une clôture mobile fermant un champ. Le mot est surtout utilisé dans les régions, comme le Centre, où les limites des propriétés sont marquées par des haies.
ÉCHALOTE n. f. est issu (eschalote, v. 1500) par substitution de suffixe de l'ancien français échalogne (fin XIe s.) qui a plusieurs variantes : eschaloines (v. 1140), escaluigne (XIIIe s.), escalone ou eschalogne. L'ancien français représente une altération du latin classique ascalonia (caepa) « (oignon) d'Ascalon » (nom d'une ville de Palestine), absolument, ascalonia, d'où le latin médiéval scalongia (fin XIIIe s.). La graphie du nom de cette plante potagère a varié ; au XIXe s., on a écrit le mot avec un ou deux t ; l'usage moderne est plutôt de ne retenir qu'un seul t.
❏
Outre le sens concret, « plante voisine de l'oignon (Liliacées), dont le bulbe est utilisé en cuisine ; ce bulbe », le mot, avec la valeur figurée qu'a aussi oignon, entre dans l'expression course à l'échalote, où on fait courir les victimes en les poussant par le fond de culotte et par le col.
◆
Au Québec, le mot désigne un jeune bulbe d'oignon vert. Par comparaison et au figuré, évoque la maigreur.
❏
Le dérivé ÉCHALOTÉ, ÉE adj. est attesté une première fois chez Rabelais (1552) puis chez Huysmans (1903).
ÉCHANCRER, ÉCHANCRURE → CHANCRE
ÉCHANGER v. tr. est dérivé (1160-1174, eschangier) de changer (→ changer) par préfixation.
❏
Le verbe a dès l'origine le sens général de « céder (qqch.) moyennant contrepartie », d'où (avec un sujet au pluriel) « se faire des communications réciproques » (1787 ; échanger des lettres) et des expressions comme échanger des coups ; le verbe s'utilise spécialement dans plusieurs domaines : échanger des pièces (aux échecs), échanger des devises. Au figuré, il s'emploie (1830, Balzac) avec un complément désignant des signes, des abstractions (échanger des sourires, des injures, etc.).
◆
En français d'Afrique, on emploie échanger sans complément, pour « parler, discuter avec qqn, à plusieurs ».
❏
Le déverbal
ÉCHANGE n. m. est attesté (1080,
escange) au sens d'« opération par laquelle on échange (des biens, des personnes considérées comme des biens) », spécialement en droit (v. 1283) à propos de biens ; de là viennent les locutions
en échange (loc. adv.), en échange de (
loc. prép. ; déb.
XIIIe s.) et des emplois spéciaux, aux échecs
(faire un échange), en économie (1748),
monnaie d'échange s'employant aussi au figuré pour « moyen de remplacement ».
◆
Par analogie, le mot désigne (1704) une communication réciproque (de renseignements, de documents, etc.), d'où au figuré
échange de politesses, échange de vues, échange de coups.
◆
Au
XIXe s.
échange se spécialise en physiologie (1865) au sens de « passage dans les deux sens et circulation de substances entre la cellule et le milieu extérieur »
(échanges respiratoires).
◆
Au
XXe s., par extension du premier sens,
les échanges désigne les relations entre États se traduisant par des prestations réciproques dans un domaine déterminé
(échanges culturels, artistiques). En sport, le mot signifie (1937) « fait d'échanger des coups, des balles ».
■
Le dérivé ÉCHANGISTE n. et adj. (1776) désigne en droit et en économie la personne qui est partie dans un échange, nommée aussi COÉCHANGISTE n. (de co-) ou copermutant, n. m. (1552 ; de permutant).
◆
Le mot (apr. 1960) se dit aussi de couples qui échangent chacun un partenaire amoureux, d'où ÉCHANGISME n. m. (apr. 1960).
◆
La loc. adv. EN CONTRE-ÉCHANGE (1461, en contre eschange ; 1557, en contr'échange) est d'emploi littéraire.
■
LIBRE-ÉCHANGE n. m. a été composé (v. 1840) avec libre, d'après l'anglais free-trade (1606), de free « libre » et trade « commerce », qui a pris vers 1823 sa valeur économique précise ; l'anglais employait auparavant freedom of trade (1776, Adam Smith) « liberté du commerce », et les économistes français du XVIIIe s. le libre cours des échanges (1784, Necker) ; free-trade fut parfois utilisé en français (1845) ; libre-échange, terme d'économie, désigne le système dans lequel les échanges commerciaux sont libres.
◆
De là les dérivés LIBRE-ÉCHANGISME n. m. (mil. XIXe s.) et LIBRE-ÉCHANGISTE n. m. et adj. (1845). C'est le sémantisme de libre-échange qui a donné la valeur érotique d'échangiste (ci-dessus). La métaphore est déjà présente dans la pièce de Feydeau, L'Hôtel du libre-échange (1894).
◈
Un autre dérivé du verbe,
ÉCHANGEABLE adj. est attesté à la fin du
XVIe s., son contraire
INÉCHANGEABLE adj. au
XIXe s. (1845).
◈
ÉCHANGEUR, EUSE n. apparaît d'abord (1292,
eschangeor) comme terme de droit au sens de « celui qui a fait un échange », disparu au bénéfice d'
échangiste. Au masculin le mot s'emploie (1862) pour désigner un appareil destiné à réchauffer (ou à refroidir) un fluide, au moyen d'un autre fluide circulant à une température différente
(échangeur de chaleur, de température).
◆
Échangeur a pris vers 1960 le sens particulier de « raccordement sans croisement à niveau de plusieurs voies routières » et, par extension (1970), « de plusieurs voies ferrées ».
G
ÉCHANSON n. m. est issu (fin XIIe s., eschanson) du francique °skankjo, attesté sous la forme scancio dans la loi salique et, au VIIIe s., écrit scantio dans les Gloses de Reichenau (Cf. aussi l'ancien haut allemand scencho ; l'allemand Schenk).
❏
Échanson, aujourd'hui terme d'histoire, désignait au moyen âge un officier chargé de verser à boire à un roi, à un seigneur. Par extension (1797), le mot se dit familièrement d'une personne qui sert à boire (aussi féminin dans cette acception).
❏
En dérive ÉCHANSONNERIE n. f. (av. 1278, eschançonerie), d'abord « lieu du palais où l'on distribuait le vin », puis (1718) « corps des échansons ».
L
ÉCHANTILLON n. m. est issu (1260) d'un type eschandillon (2e moitié du XIIIe s., escandelon), dérivé d'une forme °eschandil correspondant à escandil « mesure de capacité » en ancien provençal, attestée par le verbe eschandiller « vérifier les mesures des marchands », dans la région de Lyon. Cette famille de mots vient d'un latin populaire °scandiculum, variante d'une forme °scandaculum « échelle », d'où « jauge, mesure », dérivée de scandere « monter, gravir » (→ scander) de la même famille que scala (→ échelle). Le latin médiéval connaît scandilia « échelons » et scandilium « mesure de capacité » (Cf. aussi les formes apparentées, ancien provençal escandalh, italien scandaglio, scandiglio).
❏
Échantillon a d'abord eu le sens (1260) d'« étalon » (de mesures, de poids, de monnaies), aujourd'hui disparu comme les emplois extensifs pour « matrice avec laquelle on étalonne » (XVe s.), et « essai, épreuve » (XVe s.).
◆
Par extension, le mot prend (1407) le sens moderne de « petite quantité d'une marchandise, que l'on montre pour faire connaître la qualité de l'ensemble ». C'est cette idée de « partie d'un ensemble » que l'on retrouve ensuite dans les diverses acceptions. Par analogie, échantillon désigne (1579) une partie (d'un travail, de qqch.) qui donne une idée de l'ensemble ; il équivaut à « spécimen remarquable » et spécialement (1611) « individu représentatif » (d'un groupe, etc.), puis, au figuré (av. 1622), se dit pour « aperçu » (un échantillon de son style). Au XXe s. le mot s'emploie en statistique au sens de « fraction d'une population destinée à être étudiée par sondage ».
❏
Le composé
SOUS-ÉCHANTILLON n. m. (v. 1970 ; de
sous-), terme didactique, s'emploie aussi en statistique.
◈
Le dérivé ancien
ÉCHANTILLONNER v. tr. a d'abord (1452) le sens de « comparer (une mesure, etc.) avec l'étalon »
(Cf. étalonner) puis, par une évolution sémantique parallèle à celle du nom, signifie (1524) « enlever un morceau de qqch. » et spécialement comme terme de commerce « prélever des échantillons » (1723), employé au
XXe s. en statistique.
■
En dérivent ÉCHANTILLONNAGE n. m. (1452, « droit perçu pour l'étalonnage des mesures » ; 1864, « action d'échantillonner » ; sens statistique, attesté en 1946, puis terme de commerce), et ÉCHANTILLONNEUR, EUSE n. (1904).
❏ voir
ÉCHELLE.
L +
ÉCHAPPER v. est issu (1080, escaper, intr.) du latin populaire °excappare, proprement « sortir de la chape », d'où « laisser seulement son manteau aux mains des poursuivants ». Ce verbe est dérivé du bas latin cappa « sorte de coiffure », « manteau, chape » par préfixation en ex- (→ chape). Dès le XIIe s. le verbe s'écrit eschaper (v. 1130) et la graphie moderne est relevée à partir du XVIe s. (1559).
❏
Échapper s'emploie comme en latin au sens de « s'enfuir (d'un lieu) » (XVe s., pron.) ; aujourd'hui « se soustraire à (qqn, qqch.) » (1080), en emploi transitif (XIIe s.) encore à l'époque classique ; le verbe signifie en particulier (fin XIIe s.) « se maintenir hors d'atteinte de ce qui est considéré comme menaçant », d'où au figuré échapper à qqn « cesser de subir son influence ». Échapper de « sortir d'(un état dangereux) » a été remplacé par échapper à ; s'échapper de qqn « le quitter » (v. 1130) est archaïque.
◆
Le verbe s'utilise en parlant d'une chose (v. 1140, intr.) au sens de « cesser d'être tenu » (un objet qui échappe des mains, laisser échapper un cri), par figure à propos de ce qui n'est plus soumis au contrôle de qqn (XVIe s.), et s'échapper pour « sortir brusquement » (1667). Au sens de « laisser partir, laisser tomber (involontairement) » (1273), échapper n'est plus aujourd'hui que d'usage régional, en particulier dans le centre-sud de la France, en Lorraine et en Charente ; cet usage régional est passé au Québec (j'ai échappé une assiette).
◆
Depuis le XVIe s. (1559), on passe au sens de « faire défaut, après avoir été su » en parlant d'un mot, d'un nom (ce nom m'échappe), d'où s'échapper « disparaître, s'évanouir » en parlant d'une idée, d'un sentiment (1835).
◆
Le verbe s'emploie aussi en parlant de choses, pour « être en dehors de » et pour « n'être pas compris, contrôlé, remarqué » (1580 ; ce détail m'a échappé), parfois avec l'auxiliaire être jusqu'au XIIIe siècle. La locution l'échapper belle (1640) signifiait « manquer une balle qui était belle, c'est-à-dire rattrapable » ; aujourd'hui elle équivaut à « échapper de justesse à un danger ».
◆
S'échapper s'employait à l'époque classique (1641) au sens figuré de « s'emporter ». Le pronominal s'emploie absolument (1880) en sport pour « faire une échappée ».
❏
La famille du verbe est abondante.
■
Le dérivé ÉCHAPPEMENT n. m. est sorti d'usage au sens de « moyen d'échapper, issue » (v. 1175). Le mot est rare avant le XVIIIe s., où il est repris (1752) comme terme technique d'horlogerie ; il est utilisé ensuite (1845) comme terme de mécanique (par exemple dans soupape d'échappement et pot d'échappement, 1894).
◈
ÉCHAPPATOIRE n. f. est rare avant le
XVIIIe s. (1465,
eschapatoire) ; il se dit d'un moyen détourné par lequel on cherche à échapper d'une situation difficile
(Cf. faux-fuyant, fuite) et par extension d'un moyen de s'échapper.
◈
Le participe passé du verbe a produit
ÉCHAPPÉ, ÉE n. (
XIIe s.,
adj.), disparu dans l'emploi moral pour « libertin » (1677) et vieilli au sens de « personne fugitive » (1709,
échappé des galères ; [Cf. évadé]) ;
échappé, n. m. désigne un pas de danse.
◈
ÉCHAPPÉE n. f. (1490,
eschappee ; 1475 dans un texte de Suisse romande) a disparu de l'usage au sens d'« action de s'échapper » et au figuré pour « écart de conduite » (fin
XVe s.). Le mot a pris le sens figuré (1666-1667) de « bref moment, intervalle », d'emploi littéraire. Concrètement, il désigne un espace qui laisse voir qqch., (1629,
échappée de vue), d'où
échappée de lumière, en peinture, et un espace ménagé pour une vue (1699), un passage (1704), en architecture, dans
échappée d'un escalier. En sport et couramment (1865), c'est le nom d'une action menée par un ou plusieurs coureurs qui lâchent le peloton.
◈
ÉCHAPPADE n. f., terme de gravure (1755), a été repris en emploi littéraire (1856, Goncourt) pour « action de s'échapper, évasion ».
◈
Le verbe préfixé
RÉCHAPPER, attesté sous les formes du Nord
rescaper (fin
XIIe s.),
reschapper (v. 1200), a pris sa graphie moderne au
XVIIe siècle. Le verbe
(intr.) signifie « échapper à un péril pressant ». Au sens transitif (depuis le
XIIIe s.) de « tirer (qqn) d'un danger », il est sorti d'usage, et a été remplacé par
rescaper (ci-dessous).
■
RESCAPÉ, ÉE adj. et n. vient de la forme picarde rescaper (reschappez attesté en 1588, ayant vieilli) ; le mot s'est répandu à partir de 1906 : les journalistes l'avaient entendu sur les lieux de la catastrophe minière de Courrières (Hainaut) et employé dans leurs comptes rendus pour la presse parisienne, d'où il est passé en français général. Son origine dialectale n'est plus ressentie. L'adjectif, qui signifie « qui a échappé à un accident, à un sinistre », a été substantivé (1913).
■
RESCAPER v. tr. (1933) « sauver d'un danger » est moins usité.
G
ÉCHARDE n. f. apparaît sous la forme escherde (v. 1165) qui, propre à l'ouest de la France, s'est maintenue jusqu'au XIVe s. ; dès le XIIIe s., on a aussi des formes en a- (v. 1223, escharde ; 1388, eschardre). Le mot est issu du francique °skarda « éclat » (de bois), attesté par l'allemand Scharte « brèche », « entaille », peut-être avec un croisement (P. Guiraud) avec un gallo-roman °excarpitare (Cf. ancien français escart « brèche », escarder « ébrécher »).
❏
D'abord attesté avec le sens d'« écaille (de poisson, de serpent) », aussi sous la forme isolée esjarde (av. 1105), le mot apparaît au XIIe s. dans son sens moderne de « petit fragment (bois, épine, etc.) qui entre accidentellement dans la peau », mais n'est pas réattesté dans cette acception avant 1530.
?
ÉCHARPE n. f., attesté au XIIe s. (v. 1135, escharpe), surtout au XIIIe -XIVe s. sous la forme escherpe (1283), est rattaché au francique °skirpa, °skirpja « panier de jonc », lui-même issu du latin scirpus « jonc », le latin médiéval ayant scrippa « sacoche de pèlerin » (754-755) ; dès le latin classique, on a scirpea « panier », dérivé de scirpus, mot sans origine connue. P. Guiraud rapproche écharpe « bourse » du mot escarcelle et propose pour écharpe « bande de tissu » (obtenue en déchirant un morceau d'étoffe) l'étymon latin °excarpere « mettre en morceaux », les deux emplois ayant pu se croiser : « bande d'étoffe pour porter une bourse », « bourse portée en écharpe » (→ 2 écharper).
❏
Écharpe a désigné comme en latin médiéval une sacoche de pèlerin (v. 1135) ; on relève ensuite en écharpe (1283, en escherpe, puis v. 1330 en escharpe) « en bandoulière », parce que la sacoche était ainsi portée ; l'expression s'est employée au figuré avec la valeur de « de travers » dans avoir l'esprit en écharpe « être un peu fou » (XVIIe s.).
◆
De là, écharpe s'est dit (1306, escherpe) d'une large bande d'étoffe que les chevaliers portaient obliquement d'une épaule à la hanche opposée ; elle servait, par la couleur, à marquer l'appartenance à une armée, à un parti, etc., d'où la locution ancienne changer d'écharpe « changer de parti ». La coutume d'accorder une valeur symbolique à cet ornement survit dans l'emploi de l'écharpe comme insigne, par exemple, des députés, des maires.
◆
Elle était aussi, sans valeur symbolique, utilisée pour étancher le sang d'une blessure : au XVIe s., écharpe est employé comme terme de médecine (1549), au sens de « bandage servant à soutenir l'avant-bras », d'où la locution en écharpe ; mais la locution tenir ses bras en écharpe « être paresseux » (XVIIe s.) ne s'emploie plus. La métaphore romantique du cœur en écharpe (Chateaubriand) est un emploi littéraire.
◆
Par analogie de forme, le mot désigne (1567) un cordage pour monter des matériaux.
◆
Le sens aujourd'hui courant de « bande de tissu portée autour du cou » (1666) engendre celui de « pièce de tissu de forme quelconque portée de la même manière » (Cf. foulard). La locution adverbiale en écharpe, ancienne au sens de « en bandoulière », s'emploie (1690) au sens d'« obliquement, de côté » ; de là l'usage du mot en menuiserie (1755) pour « pièce de bois placée diagonalement (pour consolider) », en ameublement (1864) et l'expression prendre en écharpe.
❏
Le dérivé 1 ÉCHARPER v. tr. (XVe s., escharper, attestation isolée) est rare au sens de « ceindre une écharpe » ; escharpé (1516) a aussi signifié « ceint d'une écharpe », sens inusité, repris au XIXe siècle. Terme technique, le verbe signifie « entourer (un fardeau) d'une pièce en diagonale, dite écharpe » (1676, Félibien).
2 ÉCHARPER v. tr. représente (1669) une variante du verbe escharpir (XVIe s.), dérivé par préfixation en é-, es- à valeur intensive de l'ancien français charpir « déchirer » (v. 1265, Rutebeuf) ; → charpie. On trouve aussi décharpir « déchiqueter (des personnes) », (v. 1290) puis (XVIe s.) « déchirer (un tissu) ».
❏
Écharper s'emploie d'abord au sens de « blesser avec un instrument tranchant ». Par extension, le verbe signifie (av. 1755) « mettre en pièces, massacrer » (Cf. mettre en charpie) et, plus tard (1864), pour « tailler maladroitement ». Il s'emploie comme terme technique pour « diviser les brins d'(un textile) » (1765).
❏
Le dérivé
ÉCHARPAGE n. m. (attesté en 1870) est un terme technique.
■
ÉCHARPILLER v. tr., familier et vieilli au sens de « mettre en pièces (qqn) » (av. 1468, escarpiller, attestation isolée ; repris en 1845), est employé comme terme technique, au sens d'écharper.
G
ÉCHASSE n. f. est issu, sous la forme eschace (1181-1190), du francique °skakkja, d'un verbe germanique °skakan « courir vite », d'où vient aussi l'anglais to shake « secouer ».
❏
Échasse signifie d'abord « béquille, jambe de bois », encore au
XVe s. ; il prend par extension au
XIIIe s.
(eschesse) le sens de « long bâton muni d'un étrier sur lequel on pose le pied, utilisé pour se déplacer dans les terrains difficiles ». Écrit
échasse (
XVIe s.), le mot s'emploie au figuré dans les locutions archaïques
monter, être monté, perché, etc. sur des échasses « se vouloir plus grand que l'on est », « être guindé » (1665), puis
être monté sur des échasses « avoir de longues jambes » (1718 ; 1861, employé seul).
■
Par analogie, le mot est employé en zoologie pour désigner (1768) un oiseau des marais à hautes pattes fines.
❏
Le dérivé ÉCHASSIER, IÈRE est attesté (v. 1150) pour « qui a une jambe de bois ». Substantivé, le mot suit l'évolution sémantique d'échasse : il désigne qqn qui marche sur des échasses (1606), puis est employé en zoologie (1799, n. ; 1845, adj., oiseau échassier) et au sens de « personne qui a de longues jambes » (1866).
L
1 ÉCHAUDER v. tr. est issu (fin XIe s., eschalder, puis fin XIIe s., eschauder) du bas latin excaldare « baigner dans l'eau chaude », « échauder », composé de ex- intensif et de caldare « faire chauffer », dérivé du classique calidus, caldus « chaud » (→ chaud).
❏
Le verbe français conserve le sens du bas latin et s'emploie en particulier en cuisine. Échauder est d'usage régional au sens de « brûler (qqn, la peau, etc.) avec un liquide chaud », mais d'emploi général au figuré : se faire échauder, être échaudé « éprouver un dommage, une déception ». Dans le domaine agricole, échauder signifie « dessécher », « griller » (1723), en parlant de la chaleur, du soleil.
❏
L'
adj. ÉCHAUDÉ, ÉE s'emploie avec des acceptions spéciales parallèles à celles du verbe :
blé échaudé « grillé par la chaleur » (fin
XVIIIe s.),
avoir les mains échaudées. Le mot est substantivé d'abord pour désigner un petit gâteau (1260,
n. m.) ; la locution
crier comme un échaudé est vieillie, mais le proverbe
chat échaudé craint l'eau froide est toujours bien vivant (
XIIIe s., sous une autre forme).
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ÉCHAUDURE n. f. (XIIe s.) se dit d'une brûlure occasionnée par un liquide très chaud.
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ÉCHAUDOIR n. m. (1380, « vase à chauffer ») est un terme technique qui désigne le lieu ou la cuve où l'on échaude des bêtes de boucherie (1523), de la laine (1690).
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1 ÉCHAUDAGE n. m., « action de passer à l'eau chaude » (1864), est un terme d'agriculture, désignant l'accident qui frappe les céréales, les vignes échaudées ; il est plus courant que ÉCHAUDEMENT n. m. (1845) déjà formé au XVIe s. (1564) au sens de « brûlure ».
L
ÉCHAUFFER v. tr. est issu, d'abord (fin XIe s.) sous la forme eschalfer puis eschaufer (v. 1175), du latin populaire °excalefare, altération du latin impérial excalfacere « chauffer, échauffer », composé de ex-, intensif, de calere « être chaud » dérivé de calidus, caldus (→ chaud) et de facere « faire* ». La forme moderne est influencée par chauffer.
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Échauffer s'emploie d'abord au sens d'« enflammer, irriter » (fin XIe s., en parlant de l'œil), puis de « rendre chaud » (1121-1134, pron.). Par métaphore du sens médical il signifie (v. 1175) « donner de l'animation, de la force (à l'esprit, etc.) », acception d'emploi soutenu aujourd'hui, plus courant en emploi pronominal (XIIIe s. ; s'échauffer en parlant) ou dans la locution échauffer la bile, le sang.
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S'échauffer, au sens de « faire quelques exercices pour échauffer ses muscles », est attesté dès 1423.
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Les deux participes sont adjectivés.
ÉCHAUFFANT, ANTE adj. (v. 1128) s'emploie pour « qui augmente la chaleur » et en médecine « qui provoque l'irritation, l'inflammation », aussi substantivé ; cet emploi est archaïque.
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ÉCHAUFFÉ, ÉE adj. s'est employé dans tous les sens du verbe. Il a vieilli, même au figuré pour « passionné, animé ».
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Le dérivé
ÉCHAUFFEMENT n. m. est d'abord relevé (v. 1200) au sens figuré d'« animation, excitation », aujourd'hui d'emploi littéraire. Le nom se dit (1423) de l'action d'échauffer le corps par des mouvements appropriés ; il est sorti d'usage comme terme médical (1690) pour « provoquer l'irritation, l'inflammation » et est seulement d'emploi technique au sens général d'« action d'échauffer, de s'échauffer » (
échauffement d'un essieu, des pneus, etc.).
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ÉCHAUFFURE n. f., vieilli en médecine (v. 1256, eschauffeure « inflammation cutanée »), s'emploie encore comme terme technique (1870).
ÉCHAUFFOURÉE n. f. apparaît au milieu du XIVe s. (eschauffourée) ; on considère traditionnellement le mot comme issu du croisement de fourrer avec chaufour (→ four), par référence à l'activité du chaufournier qui pousse la bourrée, le bois dans l'âtre, l'éparpille et en remet, sans interruption. Selon P. Guiraud, qui estime ce sémantisme trop artificiel, le mot serait composé de eschauffe (déverbal de l'ancien français eschauffer ; Cf. l'ancien français une eschaufée « accès de fièvre ») et de fourrée (Cf. coup fourré), avec l'idée de « coup entrepris dans la fièvre et qui tourne mal, faute d'en avoir prévu les dangers cachés ».
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Échauffourée, d'abord attesté au sens de « mauvaise rencontre », désigne par la suite une entreprise téméraire (1677) et un emportement de colère (1694) ; tous ces emplois sont sortis d'usage.
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Le sens moderne de « bagarre » (1797) a été accompagné par celui de « petit combat isolé » (1752), aujourd'hui vieilli.