L
ÉCONDUIRE v. tr. représente une altération (v. 1485) sous l'influence de conduire, de l'ancien français escondire « s'excuser » (v. 1050, au pronominal), « refuser, repousser » (v. 1170, v. tr.) issu du bas latin (se) excondicere (873) « réfuter une accusation » et « s'excuser » (av. 882). Ce verbe est composé de ex- et du latin classique condicere « conclure un arrangement », de dicere (→ dire).
❏
Éconduire signifie « se débarrasser de (une personne) » et, par extension, « congédier ». Au sens technique de « conduire au-dehors », en parlant de l'eau (1876), le verbe est sorti d'usage.
+
ÉCONOME n. et adj., réfection (1546) de aconome (1337), représente un emprunt au bas latin oeconomus « administrateur (des biens d'une église, d'un monastère) », emprunt au grec oikonomos « qui administre une maison, un patrimoine », composé de oikos « maison » (→ éco-) et -nomos de nomos « règle, usage, loi », qui se rattache à une importante racine indoeuropéenne °nem-, °nom- composé de oikos « maison » et nomos « administration ». Oikos, mot indoeuropéen, apparenté au sanskrit vis-, au persan, a pour valeur initiale « clan » (→ œcuménique).
❏
Le nom est introduit en français pour désigner l'administrateur des dépenses d'un couvent. Par extension il a pris le sens général d'« administrateur des dépenses d'une maison, de biens » (1611, à propos des revenus d'un bénéfice d'une charge ecclésiastique) et « intendant (d'une grande maison) ». Ces valeurs ont disparu et le mot ne s'emploie plus aujourd'hui qu'en parlant d'une communauté religieuse, d'un hôpital ou d'un établissement d'enseignement.
■
L'adjectif, d'emploi courant (1690), signifie « qui dépense avec modération » et s'emploie au figuré (1810, Mme de Staël, économe du temps).
■
Le composé SOUS-ÉCONOME n. signifie « adjoint d'un économe » (1793).
❏
ÉCONOMAT n. m. désigne (1553) la fonction d'économe d'où, par métonymie, le service chargé de cette fonction et (1835) le lieu où elle s'exerce
(Cf. intendance) ; en droit ancien, le mot se disait de la régie d'un bien ecclésiastique vacant, exercée au nom du roi.
Économat désigne aussi (
XIXe s.) un magasin de vente, créé par un employeur à l'usage de ses salariés, où les marchandises sont remises en échange de bons délivrés à l'employé en paiement de son salaire. Le mot a été employé pour désigner les magasins d'une chaîne commerciale, par allusion à la notion d'économie. (Voir le tableau « Économie ».)
◈
ÉCONOMIE n. f. est emprunté, d'abord sous la forme
yconomie (1370-1372) puis
économie (1546), au grec
oikonomos, puis au latin
oeconomia « organisation, disposition » (dans une œuvre littéraire), lui-même du grec.
■
Économie a désigné dans son premier emploi l'art de bien administrer une maison puis la bonne gestion des biens d'autrui.
◆
Ces valeurs ont été peu à peu éliminées avec le développement du sens pris au XVIe s. de « gestion où l'on évite toute dépense inutile » et, par métonymie, « ce que l'on épargne ». Cette acception, illustrée par la locution proverbiale il n'y a pas de petites économies, la locution faire l'économie de « éviter, se dispenser de », reste très vivante aujourd'hui (faire des économies, économies d'énergie, etc.). Du sens d'« épargne », on est passé au XIXe s. (1829), par métonymie, à celui de « somme d'argent économisée », au pluriel, d'où l'argot ÉCONOCROQUES n. f. pl. (1913) de économie, et croque « sou ».
◈
◆
Au début du
XVIIe s. apparaît
économie politique (1615, Montchrestien), puis au
XIXe s.
économie publique (1838) « art d'administrer les richesses de l'État », le premier prenant au
XVIIIe s. la valeur de « science des phénomènes concernant la production, la distribution et la consommation des biens » ;
économie politique a été abrégé en
écopo (1950) en argot scolaire mais a vieilli, le sens de
politique ayant évolué : on dit en français contemporain
économie, ou
sciences économiques.
■
Au XVIIe s., le sens latin « organisation de divers éléments (d'un ensemble) » est repris ; il est didactique, comme celui de « relation entre des parties ».
◈
Les principaux dérivés de
économie sont formés au
XVIIIe siècle.
■
ÉCONOMISER v. tr. (1718, oeconomiser, forme moderne, 1740) a signifié d'abord « gérer sagement ». Lié à l'évolution sémantique du nom, le verbe signifie ensuite « dépenser avec mesure » (1759), attesté auparavant au figuré (1747), d'où « épargner » (1835) ; de ce sens dérive le terme technique ÉCONOMISEUR adj. m. et n. m. (1890 ; dispositif économiseur).
■
ÉCONOMISTE n. a désigné, surtout au pluriel (1767, aussi économiste politique) les écrivains français du XVIIIe s., auteurs de théories économiques (Cf. physiocrates). Le sens moderne de « spécialiste d'économie politique » est attesté en 1802.
◆
Le mot désigne aussi (XXe s.) un partisan de l'ÉCONOMISME n. m. ; ce mot, qui fut synonyme (1775) d'économie politique, se dit de nos jours (XXe s.) de la doctrine qui tend à donner à l'économique la priorité sur le politique.
◈
ÉCONOMÉTRIE n. f. (1948 dans les dictionnaires généraux ; de
-métrie) désigne le traitement mathématique de données quantitatives concernant les phénomènes économiques ; c'est l'un des développements de la statistique.
■
En dérivent des termes didactiques : ÉCONOMÈTRE n. (1952), synonyme d'ÉCONOMÉTRICIEN, IENNE n. (1955), lui-même dérivé de l'adjectif ÉCONOMÉTRIQUE (1952).
◈
ÉCONOMIQUE adj. et n. s'est substitué (
XVIe s.) aux formes anciennes
iconomike (v. 1265,
n. f.),
yconomique (1370-1372) et s'est aussi écrit
oeconomique jusqu'au
XVIIIe s. ; c'est un emprunt au latin
oeconomicus « qui est relatif à l'administration d'une maison » (grec
oikonomikos).
■
Le nom désigne d'abord ce qui concerne la gestion familiale, opposé à éthique et à politique, puis plus largement l'économie politique, la science économique ; en ce sens, l'adjectif est archaïque (1370-1372).
◆
Lié à économie « épargne », l'adjectif a pris le sens courant « qui réduit les frais, épargne la dépense » (1690, Furetière) ; en relation avec économie politique, il s'applique à ce qui concerne la production et la distribution des richesses (1767), aussi comme substantif (1927, n. m.).
■
Le dérivé ÉCONOMIQUEMENT adv. a ces deux valeurs : « avec épargne » (1690) et « relativement à la vie économique » (av. 1770).
■
Les composés MACRO- et MICROÉCONOMIQUE adj. (1948) s'appliquent à deux dimensions de l'analyse économique.
■
ÉCONOMICITÉ n. f. (1949) est un terme didactique.
■
L'importance prise par les phénomènes économiques dans les sociétés modernes a suscité la formation d'adjectifs composés avec économique comme premier élément, sous la forme ÉCONOMICO- : économico-juridique (1908), économico-financier (1932), économico-social (1936), économico-politique (1960), économico-culturel (1972), etc.
G
ÉCOPE n. f. est issu (XIIIe s., escope) du francique °skopa « pelle de bois pour vider l'eau (dans une embarcation) », restitué par le moyen néerlandais schoepe, le moyen bas allemand schôpe, de même sens. On relève les variantes dialectales escoupe, écoupe et escope, cette dernière encore attestée.
❏
Écope conserve le sens de l'étymon. Par analogie de forme, le mot a désigné une coupe de bois servant à écrémer le lait (attesté 1864) ; le mot s'emploie au XXe s. pour désigner la pièce d'alimentation d'un broyeur.
❏
Le dérivé
ÉCOPER v. tr. est attesté en 1837 au sens de « vider (une embarcation) avec une écope ». Par analogie, le verbe s'est employé familièrement pour « boire » (1867) mais ce sens n'a pas vécu
(Cf. écluser).
■
Selon la même métaphore que pour trinquer (le coup doit être « absorbé »), écoper a pris le sens toujours vivant d'« être atteint, puni » et de « recevoir des coups » (1867, en emploi absolu ; 1879, tr., « recevoir un coup », Huysmans), d'où écoper de (1880) « être condamné » (à une peine de prison).
■
Du verbe dérive ÉCOPAGE n. m., terme de marine (XXe s.).
L
ÉCORCE n. f. représente l'aboutissement (1176) du latin impérial scortea « manteau de peau », féminin substantivé de l'adjectif classique scorteus « de cuir, de peau ». Ce mot dérive de scortum « peau, cuir », qui se rattache à une racine indoeuropéenne °sker ou °ker comme le latin corium (→ cuir).
❏
Le mot apparaît avec le sens d'« enveloppe des troncs, des branches d'arbres » qui correspond au latin cortex (→ écorcher) ; la locution figurée il ne faut pas juger de l'arbre par l'écorce s'est longtemps employée. Tissu d'écorce se dit en français d'Afrique d'un tissu végétal fait d'écorces battues de certains arbres. Par extension, le mot désigne (XIIIe s.) l'enveloppe coriace de certains fruits (sens aberrant en botanique).
◆
Par analogie, écorce terrestre se dit (XIIIe s.) de la partie superficielle du globe (Cf. croûte) ; écorce cérébrale a été remplacé par cortex.
◆
Au sens figuré d'« apparence » (1265), écorce est archaïque ou d'emploi littéraire.
❏
Le dérivé
ÉCORCER v. tr. « dépouiller de son écorce » et « décortiquer » est attesté au
XIIe s. (
escorcier ; 1568
escorcer).
■
Du verbe dérivent des termes techniques : ÉCORCEMENT n. m. (1538, escorcement) ou ÉCORÇAGE n. m. (1799), ÉCORCEUR n. m. (1893) et ÉCORCEUSE n. f. (mil. XXe s. ; attesté en 1940 au Canada).
L
ÉCORCHER v. tr. est issu (1155) du bas latin excorticare « écorcer », composé de ex- et du latin classique cortex, corticis « écorce », qui se rattache à une racine indoeuropéenne °(s)ker- « couper », « séparer, partager ».
❏
Écorcher apparaît avec le sens de « dépouiller de sa peau » une personne (1155), puis un animal (1160-1174). Les locutions il crie comme si on l'écorchait « très fort », il crie avant qu'on l'écorche « sans raison » ont vieilli, mais sont encore comprises. Par affaiblissement de sens, le verbe signifie (1205-1250, pron., puis v. 1230) « blesser en entamant superficiellement la peau », sens assez usuel au pronominal.
◆
Au figuré, le verbe s'emploie aux sens de « faire mal moralement » (1193-1197) et de « causer une sensation désagréable » (1280).
◆
Écorcher prend au XVIe s. le sens de « déformer, prononcer de travers » (1532, Rabelais), toujours vivant (écorcher un mot), et de « détériorer (une chose) en entamant la surface » (1598). Écorcher les oreilles (1665) signifie « offenser l'ouïe » ; par métaphore, le verbe prend le sens (1673, Molière) de « demander un prix excessif » (écorcher les clients).
❏
ÉCORCHÉ, ÉE adj. et n. a suivi l'évolution sémantique du verbe ; en outre, le nom masculin désigne spécialement (1796) une statue d'homme ou d'animal représenté dépouillé de sa peau et d'après laquelle on dessine des études ; par analogie, le mot se dit (
XXe s.) du dessin d'une machine dépourvue de son enveloppe extérieure et de schémas analogues.
◈
ÉCORCHEUR, EUSE n. et adj. désigne d'abord (1
re moitié du
XIIIe s.) celui qui écorche les bêtes pour la boucherie (le mot est inusité au féminin).
◆
Au figuré, le mot signifie (
XIVe s.) « celui qui pressure, vole » et désigne spécialement (1441) les brigands qui rançonnèrent les paysans pendant la guerre de Cent Ans. Comme adjectif, au sens figuré de « qui choque l'oreille, le goût esthétique », le mot est rare.
■
ÉCORCHURE n. f. (XIIIe s., escorcheüre) se dit couramment d'une déchirure légère de la peau.
■
ÉCORCHERIE n. f., mot technique ancien de boucherie, est attesté avant 1320.
■
ÉCORCHEMENT n. m., à la fin du XIIIe siècle. La loc. adv. composée À (L') ÉCORCHE-CUL (1552, Rabelais), signifiant « en glissant sur le derrière », est familière et vieillie.
ÉCORNER, ÉCORNIFLER → CORNE
ÉCOSSAIS, AISE n. et adj. est dérivé (1re moitié XIVe s., escochois) du nom propre Écosse ; en ancien français, on emploie escot (1160-1174), du bas latin Scoti « habitants de la Calédonie » (scotus, adj., Ve s.).
❏
Le mot désigne et qualifie une personne originaire de l'Écosse et l'écossais, n. m. se dit du dialecte anglais parlé en Écosse (1864, n. m.), la langue celtique de l'Écosse recevant en général une autre désignation.
◆
Spécialement l'École écossaise se dit (XVIIIe s.) d'une école philosophique fondée en Écosse à cette époque.
◆
Tissu écossais (1814), ou écossais, n. m. (1855), désigne un tissu de fils de laine disposés par bandes de couleurs différentes et se croisant à angle droit (dep. 1800), ce tissu était autrefois distinctif des clans en Écosse.
◆
Douche écossaise (1864) se dit d'une douche alternée d'eau chaude et froide et, au figuré, d'un traitement très contrasté (agréable, désagréable, etc.).
◆
Le rite écossais (1875) est une des subdivisions de la franc-maçonnerie française (dénommée aussi écossisme).
❏ voir
aussi SCOTCH.
G
1 ÉCOT n. m. est relevé chez Chrétien de Troyes (1176, escoz), mais son dérivé escouter pour escoter « payer sa part » le précède ; le mot est issu du francique °skot « impôt », restitué par l'ancien bas allemand scot, le moyen néerlandais schot, l'ancien haut allemand scaz.
❏
Écot apparaît avec le sens de « contribution » (1176, escoz) et « montant d'une note à régler » (XIIe s.) ; remplacé par addition, le mot ne s'emploie plus que dans payer son écot (XIIIe s.). Il est relevé ensuite (1er quart XIIIe s., escot) au sens de « quote-part pour un repas ».
◆
Écot s'est dit par métonymie en ancien français (1216) pour « repas, festin » et « assemblée de convives » (1281) ; ces valeurs ont disparu depuis l'époque classique où l'on relève encore être de l'écot « faire partie d'une société » (1630) ainsi que écot « assemblée » (1690, Furetière).
G
2 ÉCOT n. m. est issu (v. 1200) du francique °skot « pousse, rejet », restitué par le moyen néerlandais schot et l'ancien haut allemand scoz de même sens.
❏
Écot désigne d'abord un tronc d'arbre ou un rameau imparfaitement élagué, puis entre dans le vocabulaire de l'héraldique : « arbre ou branche sans rameaux » (1479).
❏
Le verbe dérivé
ÉCOTER « fixer un bâton » (1288), « ébrancher », a disparu mais son participe passé adjectivé
ÉCOTÉ, ÉE, « privé de rameaux », demeure comme terme de blason (1671).
■
Le composé ÉCOPERCHE n. f., de perche, a désigné une perche (1470 ; 1315, formes isolées, escouberge, escoberge). Ce mot technique s'est spécialisé comme nom d'une grande pièce de bois verticale qui, munie d'une poulie, sert à élever des matériaux de construction (1676), ou qui maintient les boulins dans un échafaudage (1755).
L
ÉCOUTER v. tr. est issu (fin IXe s.), d'abord sous la forme eskolter, puis escolter (Xe s.), escouter (XIIe s.), avec substitution de es-, puis é- à as-, du bas latin ascultare (IIe s.), altération du latin classique auscultare (→ ausculter) « écouter avec attention » et « ajouter foi, obéir », de la même famille que auris (→ oreille).
❏
Écouter est d'abord attesté aux sens d'« accueillir favorablement (ce que dit qqn) », « prêter l'oreille à qqch. » et « prêter son attention à (des paroles, des bruits) » ; dans ce sens, le verbe est employé aussi absolument
(savoir écouter), rejoignant certains emplois du verbe
entendre. Il prend par extension la valeur de « prêter une attention plus ou moins bienveillante à (qqn, des propos) », d'où l'emploi du pronominal
s'écouter « écouter sa propre voix » (1558) par exemple dans
s'écouter parler, et la locution
n'écouter que soi-même. Écouter entre dans plusieurs locutions :
écouter de toutes ses oreilles (de ses deux oreilles), n'écouter que d'une oreille, écouter aux portes au figuré « être indiscret »,
écouter d'où vient le vent « se conformer aux idées en vogue ».
◆
Du premier sens du verbe viennent par extension : « obéir spontanément à (qqn) » et « se laisser aller à un sentiment, une passion, etc. » (fin
XIIe s.), par exemple dans
écouter sa colère (littéraire) et dans la locution courante
n'écouter que son devoir (
son courage, etc.).
■
L'emploi pronominal s'écouter correspond à « suivre son inspiration » (1628) et « prêter une trop grande attention à sa personne » (XVIIe s.).
■
Le participe passé adjectif ÉCOUTÉ, ÉE a souvent la valeur de « qui est influent par sa parole » (un conseiller écouté).
❏
Les dérivés du verbe sont assez nombreux.
◈
1 ÉCOUTE n. f., déverbal, a d'abord désigné une personne qui écoute, spécialement un guetteur ou un espion (déb.
XIIe s.), d'où au
XVIIe s.
sœur écoute (1680) pour désigner une religieuse qui accompagne au parloir une autre personne.
◆
Le mot prend en moyen français (1401) le sens de « lieu où l'on peut écouter, poste de guet », emploi sorti d'usage ; avec cette valeur
les écoutes (1690) a désigné les tribunes secrètes, dans un collège, un couvent. De ce sens archaïque vient la locution
aux écoutes (de) « dans une situation où l'on peut entendre » (
être aux écoutes « attentif, vigilant »).
◆
Au sens d'« action d'écouter » (1411), le nom reste rare en emploi général ; il survit surtout dans des emplois spéciaux.
Écoute, terme militaire, désigne (1826) un poste enterré pour espionner l'ennemi, et l'emploi moderne, « détection par le son de l'activité ennemie », est attesté en 1864 (par exemple dans
poste d'écoute, puis
XXe s.
écoute sous-marine, écoutes électroniques) ;
écoute se dit aussi pour l'action d'écouter une émission radiophonique (1914-1915), d'où
être à l'écoute, prendre l'écoute et l'expression
ne quittez pas l'écoute, abandonnée avec l'évolution des techniques radiophoniques. Le mot s'emploie (
XXe s.) pour l'action d'écouter à l'insu des personnes qui communiquent
(table d'écoute, écoutes téléphoniques).
◆
Il désigne le fait d'être écouté par qqn (d'où la locution figurée
avoir l'écoute de qqn « avoir son appui »).
◆
Au
XXe s. le sens général a été repris pour « le fait de prêter attention aux sons et de leur attribuer une valeur, un sens ».
■
ÉCOUTES n. f. pl. a désigné en argot les oreilles (1632, escoules ; puis 1725, escoutes) ; c'est aujourd'hui seulement un terme de vénerie (1864, « oreilles du sanglier »).
◈
ÉCOUTEUR, EUSE n. est vieilli au premier sens de « personne qui écoute » (v. 1175,
escoteor). Le mot désigne aujourd'hui (1919), au masculin, un appareil récepteur d'un signal acoustique, qu'on applique à l'oreille (spécialement en parlant du téléphone, et opposé à
microphone).
◈
ÉCOUTANT, ANTE adj. et n. est sorti d'usage au sens de « personne qui écoute » (1389,
n., abscoultant ; Cf. auditeur). Il est aujourd'hui rare comme adjectif. Un emploi classique (1690) et plaisant était
avocat écoutant « qui n'a pas de client et écoute les autres plaider ».
◈
ÉCOUTEUX, EUSE adj., variante de
écouteur, est un terme de manège (1690,
cheval écouteux « qui se laisse distraire par ce qu'il entend »).
■
ÉCOUTOIR n. m. (1812) « cornet acoustique » est sorti d'usage.
■
ÉCOUTABLE adj. est assez rare (1866 ; 1845 au figuré) sauf dans des contextes négatifs, où il concurrence le préfixé INÉCOUTABLE (1842 au figuré), pour « mauvais au point d'être insupportable à écouter ». INÉCOUTÉ, ÉE adj. (1797) s'emploie pour « qui n'est pas écouté, perçu, dont on ne tient pas compte ».
◈
Le composé
ÉCOUTE-S'IL-PLEUT n. m. inv. (de
écouter à l'impératif,
si et
il pleut) a désigné (
XVIe s.) un moulin qui manque d'eau, puis au figuré une promesse illusoire (1718) et un homme faible, peureux (1835) parce qu'il semble à l'écoute du moindre bruit ; ce nom est tombé en désuétude dans tous ses emplois, sauf en toponymie.
ÉCOUTILLE n. f. est un emprunt (1538,
escoutille) à l'espagnol
escotilla « ouverture pratiquée dans le pont d'un navire et permettant l'accès aux étages inférieurs » (1431-1450) ; le mot espagnol est un dérivé du verbe
escotar « faire une encolure » (attesté en 1607, mais le dérivé
escotadura « trappe de théâtre » est relevé au
XVe s.), peut-être emprunté à l'ancien nordique
skaut « bord d'un vêtement », « angle inférieur de la voile » d'où « cordage fixé à cet angle ».
■
2 ÉCOUTE n. f. (1165) terme de marine qui en est issu a ce sens de « cordage ».
❏
Écoutille désigne d'abord le panneau qui recouvre la trappe ouverte dans le pont, puis l'ouverture elle-même (1552, Rabelais).
❏
En dérive ÉCOUTILLON n. m. (1552) « petite écoutille ».
ÉCOUVILLON n. m., réfection (1456, Villon, escouvillon) de la forme escoveillon (fin XIIe s.), est dérivé de l'ancien français escouve « balai », en judéo-français escove (XIe s.), issu du latin scopa « balai » (surtout usité au pluriel), de la même famille de scabellum « escabeau* ».
❏
Écouvillon a d'abord été un terme de boulangerie désignant un balai composé d'un long bâton auquel était fixé un chiffon, utilisé pour nettoyer le four ; il se disait aussi du chiffon lui-même et s'est employé par métonymie au sens de « brandon » (1368).
◆
C'est l'idée de « nettoyage » qui est conservée dans les emplois ultérieurs du mot : au début du XVIIe s. (1611), il désigne un chiffon pour nettoyer les plats, ensuite une brosse montée sur un manche et utilisée pour nettoyer l'âme des armes à feu (1659). Par analogie, le mot s'emploie (1826) en médecine pour désigner une brosse servant à nettoyer une cavité profonde ; il s'utilise ensuite dans d'autres domaines.
❏
Le dérivé
ÉCOUVILLONNER v. tr. est un terme technique :
écouvillonner une arme à feu (1611),
un four (1680), et s'emploie en médecine (1922) ; en dérivent
ÉCOUVILLONNEMENT n. m. (1835) et
ÉCOUVILLONNAGE n. m. (1870).
◈
ÉCOUVETTE n. f. (
XIVe s.,
escouvette, escovette) « petit balai », autre dérivé de
escouve, escove, est un terme technique ancien.
ÉCRABOUILLER v. tr., d'abord sous la forme escarbouiller (1535, Rabelais) puis escrabouiller (1578, Ronsard), représente probablement un croisement de écraser* et de l'ancien français esboillier « éventrer, étriper » (XIIe s. ; → ébouler) dérivé de boiel (→ boyau).
❏
Ce verbe familier signifie « réduire en bouillie » et, au figuré (déb. XXe s.), « détruire ».
❏
En dérivent
ÉCRABOUILLEMENT n. m. (1871, Goncourt),
ÉCRABOUILLAGE n. m. (1885, Vallès),
ÉCRABOUILLEUR, EUSE n. (1939) et
ÉCRABOUILLABLE adj. (attesté en 1951, Céline).
◈
Une variante québécoise de même sens est
ÉCRAPOUTIR v. tr.
ÉCRAN n. m. est un emprunt adapté (dernier quart XIIIe s., escren) au moyen néerlandais scherm « paravent, écran », avec métathèse du e et du r. Scherm provient d'un mot francique mal déterminé ; l'anglais screen « écran » et l'allemand Schranke « barrière » lui sont apparentés.
❏
Écran désigne d'abord un panneau servant à protéger qqn de la chaleur d'un foyer. Par extension, le mot se dit ensuite (1538) d'un objet qui dissimule ou qui protège
(Cf. paravent, et pare-) d'où spécialement
écran de fumée, destiné à masquer les opérations de troupes, l'expression figurée
servir d'écran à qqn (1808) et les locutions
en écran, faire écran (1866, Amiel).
◆
Du premier sens viennent des emplois techniques, où
écran désigne tout panneau arrêtant un rayonnement : « châssis tendu de toile pour voiler un excès de lumière », utilisé par les peintres (1857), « filtre » en photographie et « blindage protégeant des radiations » (2
e moitié
XXe s.),
écran thermique, en parlant d'un réacteur nucléaire
(Cf. bouclier).
■
Écran, par analogie d'aspect, prend le sens de « surface faisant arrêt », en optique (1859) pour désigner la surface sur laquelle se reproduit l'image d'un objet (écran de chambre noire) ; ce sens s'est largement diffusé lorsqu'il s'est appliqué à la surface blanche sur laquelle sont projetées les images (1895 pour le cinéma). Par métonymie l'écran se dit pour « l'art cinématographique » (1917), d'où porter (un roman) à l'écran « en faire un film » (1921), crever l'écran (en parlant d'un acteur) « faire un effet remarquable ».
◆
Écran (fluorescent) désigne à tort la surface fluorescente sur laquelle se forme l'image dans les tubes cathodiques (écran d'un récepteur de télévision, d'une console d'ordinateur, etc.). Par métonymie, le petit écran (v. 1958) désigne la télévision, par opposition au grand écran du cinéma.
❏
Le dérivé ÉCRANIQUE adj., signifiant « de l'écran », « du cinéma », est un terme didactique peu diffusé (1947, Souriau) ; ÉCRANESQUE (1923) a été utilisé avec le même sens.