2 ÉCU ou E. C. U. n. m. est le sigle de l'expression anglaise European Currency Unit « unité monétaire européenne » (1978).
❏  Le sigle est utilisé en français grâce à l'homonymie avec 1 écu. Il tend à s'écrire écu et à prendre la marque du pluriel. Le remplacement de écu par euro en 1996 fait du premier une monnaie de compte.
ÉCUBIER n. m. est l'altération (1601-1603, escubbier) de escumier (1553), attesté plus tôt en ancien normand (1382-1384) sous les formes esquenbieu, esquembieu. Le mot est d'origine inconnue ; la forme escumier représente peut-être une adaptation du portugais escouvem (1552 ; portugais moderne escovém) dont l'origine, comme celle du catalan escobenc et de l'espagnol escobén, est ignorée.
❏  Terme de marine, écubier désigne chacune des ouvertures ménagées à l'avant d'un navire pour le passage des câbles ou des chaînes.
ÉCUEIL n. m., d'abord escueil (1538), la graphie moderne étant attestée en 1604, est un emprunt à l'ancien provençal escueyll (déb. XIVe s. au propre et au figuré), issu comme l'italien scoglio et le catalan escull, d'un latin populaire °scoclu, altération du latin classique scopulus « écueil », lui-même emprunté au grec skopelos « hauteur, lieu pour guetter » et « écueil », qui se rattache à une racine indoeuropéenne °skep-, °skop- « regarder » (→ évêque, périscope, sceptique). L'écueil est ainsi nommé en grec, soit parce qu'un promontoire rocheux est un endroit d'où on guette, soit parce qu'il « guette » le navigateur. On relève la forme scoigle (v. 1550), adaptation isolée de l'italien, dans une traduction.
❏  Écueil désigne (1538) un rocher et, par extension, un banc de sable à fleur d'eau ou caché, contre lequel un navire risque de se briser ; le mot signifie ensuite (1604) figurément « obstacle dangereux ».
L ÉCUELLE n. f. représente l'aboutissement (v. 1119, escüele) du latin populaire °scutella (u long), forme altérée, sous l'influence de scutum « bouclier » (→ écu) en raison de l'analogie de forme entre les deux objets, du latin classique scutella (u bref) « petite coupe » (Cf. italien scodella).
❏  Écuelle désigne d'abord une assiette creuse, évasée et sans rebord, destinée à contenir des aliments liquides, d'usage courant au moyen âge, y compris à la table des grands, et l'on a longtemps dit les écuelles pour « la vaisselle » (1694). Aujourd'hui, avec la diffusion de mots comme assiette, le mot a une connotation rurale ou péjorative et s'emploie souvent en parlant d'un récipient pour nourrir un animal. Écuelle se dit par métonymie du contenu du récipient (1671) par préférence à écuellée (ci-dessous). ◆  Le mot est entré dans quelques locutions sorties d'usage : mettre (jeter) tout par écuelles, du XVIe au XIXe s. ; il a bien plu dans son écuelle « il a fait un gros héritage » (XVIIIe s.) ; manger à la même écuelle « avoir des projets communs » (1821).
■  Par analogie de forme, écuelle est aussi un terme technique d'architecture et du vocabulaire maritime (1691, écuelle de cabestan). En botanique, écuelle d'eau est le nom donné à une plante amphibie (1671).
❏  D'écuelle dérivent : ÉCUELLÉE n. f. (XIIIe s., escuëlee) « contenu d'une écuelle », d'emploi rare, et ÉCUELLIER n. m. autrefois « marchand d'écuelles » (1260, escuellier), qui ne s'emploie plus qu'en histoire du mobilier, pour désigner un meuble où l'on rangeait la vaisselle ordinaire.
ÉCULER v. tr., d'abord esculer (1564), est l'un des composés verbaux formés sur cul* qui ont été fortement démotivés par l'usage (→ acculer, basculer, bousculer, culbuter, reculer).
❏  Le verbe, qui exploite la valeur figurée de cul « partie postérieure d'une chose », signifie « déformer (une chaussure) en affaissant le talon ». Il a rapidement supplanté acculer, attesté au même sens et à la même époque (1532).
❏  Le participe passé éculé, ée, adjectivé avec le sens correspondant en parlant d'une chaussure (1690), a acquis la valeur figurée de « usé, dévalué par l'usage » (1859) sans équivalent chez le verbe (une plaisanterie éculée.)
G + ÉCUME n. f. est issu (fin XIe s., Raschi ; v. 1130, escume), par l'intermédiaire d'un latin populaire °scuma, d'une forme hypothétique du germanique occidental °skum « savon liquide », sans doute par croisement avec le latin classique spuma « écume, mousse, bave », attesté en latin impérial au sens de « savon ». Ce produit circulait probablement par les mercenaires germains des armées de Rome.
❏  Le mot est attesté, dès les gloses bibliques du rabbi Raschi (mort en 1105), au sens de « mousse blanchâtre qui se forme sur un liquide agité ou en fermentation » (dans la Bible, livre d'Osée, « l'écume à la surface des eaux »). C'est sans doute par analogie d'aspect que le mot s'applique (v. 1288) aux impuretés à la surface d'un liquide en fusion. Il se dit aussi (déb. XIIe s.) de la bave mousseuse d'animaux ou d'humains, connotant alors la colère ou la maladie et donnant lieu à l'expression avoir l'écume aux lèvres, à la bouche. ◆  Par ressemblance de couleur et de légèreté, écume désigne (1546) la magnésite. Par analogie, écume (de mer) se dit des plantes laissées sur le sable par la marée (1690). ◆  Au figuré, écume (d'une société, d'un peuple) s'est dit péjorativement (1770) des gens qui en constituent la partie la plus vile (Cf. lie, rebut opposé à crème, gratin) ; cet emploi a vieilli.
■  Du sens d'écume « magnésite » (ci-dessus), on passe (1802) à celui de « magnésite (naturelle ou artificielle) utilisée pour fabriquer des pipes » (elliptiquement pipe en écume, d'écume, ou en écume de mer).
❏  Le dérivé ÉCUMER v. apparaît en emploi intransitif (v. 1135, escumer) au sens de « baver (en parlant d'animaux, de personnes) », puis (v. 1165) de « se couvrir d'écume », d'où (v. 1230) « être au dernier degré de l'exaspération » (écumer de rage ; Cf. enrager). Le verbe s'emploie transitivement (v. 1200) au sens de « débarrasser de l'écume, des impuretés », d'où écumer une marmite, le pot ; au figuré écumer le pot, la marmite de qqn signifiait « vivre à ses dépens » (on a préféré la métaphore moins culinaire du pique-assiette).
■  Par figure, écumer (1460, escumer, Villon) signifie aussi « piller », en raflant tout ce qui est intéressant, d'où la locution écumer les mers (attesté 1606, mais antérieur → écumeur) « y exercer la piraterie » et, en emploi littéraire, écumer les grands chemins (fin XIXe s.).
ÉCUMEUR, EUSE n. s'emploie dès l'origine au figuré : escumeur (de mer) se dit (1351) pour « pirate », d'où par extension pour « pillard ». Écumeur littéraire « plagiaire » (1834) ne s'emploie plus. ◆  Au sens de « personne qui enlève l'écume » (1864), le mot n'est plus utilisé.
ÉCUMOIRE n. f. est attesté d'abord au masculin (1333, escumoir ; puis 1372, escumoire n. f.) ; le mot est inusité avant 1611 ; il désigne un ustensile de cuisine qui sert à écumer, d'où la locution (XIXe s.) comme une écumoire, en écumoire « criblé de trous » et, familier, avoir une mémoire comme une écumoire (Cf. passoire).
■  ÉCUMEUX, EUSE adj. « qui écume », « qui évoque l'écume », attesté au début du XIVe s., est vivant mais assez littéraire. ◆  ÉCUMETTE n. f., dans quelques régions de France, s'emploie pour écumoire.
L ÉCUREUIL n. m. apparaît sous différentes formes avant de se fixer dans sa graphie actuelle ; on a notamment, au XIIe s., escuriuel, escuriax (escuriaux, 1176-1181), puis escural (av. 1250), escurel (v. 1355), escuiroil (v. 1358) et aussi escureul, escuireul, escuriel, et deux formes régionales encore attestées : écureux (Canada), esquirol (Sud-Ouest). Le mot est issu du latin populaire °scuriolus, diminutif et altération par dissimilation, du latin impérial sciurus « écureuil » ; le mot latin est emprunté au grec skiouros, de skia « ombre » mot d'origine indoeuropéenne et oura « queue », littéralement « qui fait de l'ombre avec sa queue ».
❏  Le nom de ce petit mammifère rongeur a été donné beaucoup plus tard à plusieurs poissons (1791) et à un papillon de nuit (1838). ◆  L'écureuil volant (dit aussi polatouche) désigne (escureux volant, 1632 au Canada) un animal de la même famille, muni d'une membrane parachute qui lui permet de franchir certaines distances en vol plané. ◆  Par comparaison avec l'animal, le mot entre dans des expressions, en parlant de personnes : agile, vif comme un écureuil (1835). Il s'est dit, par référence à l'écureuil en cage, d'un ouvrier puis d'un forçat qui faisait tourner une roue actionnant une machine (1878) ; pour la même raison, il désigne en sports (1897) un cycliste qui tourne en rond sur une piste de vélodrome. ◆  Par allusion aux provisions de graines que l'animal fait pour l'hiver, l'écureuil symbolise l'épargne ; en France, il représente la Caisse d'épargne.
ÉCURIE → ÉCUYER
ÉCUSSON → ÉCU
L + ÉCUYER, ÈRE n. est issu (1080, escuier) du bas latin scutarius « soldat de la garde impériale qui portait un bouclier » puis, en latin médiéval, « écuyer » (1080), dérivé de scutum (→ écu). Le mot s'écrit escuyer à partir du XVIe s. (1549) ; écuyer est relevé en 1701.
❏  En français, le mot équivaut en ancien français à « valet » (1080), puis spécialement (XIIe s.) signifie « gentilhomme qui porte l'écu d'un chevalier et le sert ». Au début du XIIIe s., écuyer désigne un jeune noble qui n'a pas encore été nommé chevalier, d'où son usage comme titre porté par les gentilshommes des derniers rangs. Par extension, c'est le nom donné à un officier (du roi, d'un prince) qui a une fonction particulière : écuyer de cuisine « maître cuisinier » (v. 1393), écuyer tranchant « qui découpe la viande » (1429), écuyer de bouche « qui sert à la table du roi » (1680), etc. (l'échanson, par exemple, est souvent un écuyer). Écuyer s'est également dit (1265) de l'intendant des écuries d'un prince ; spécialement le Grand Écuyer ou Grand Écuyer de France appelé aussi Monsieur le Grand, commandait la grande écurie du roi (1549), ce qui constituait la première charge de la couronne. ◆  Au XVIIe s., le mot prend le sens de « personne qui sait monter à cheval » et, spécialement (1636), de « professeur d'équitation ».
■  Écuyère, qui s'employait au XVIe s. (escuyere) au sens de « femme qui s'occupe du service d'une maison », est attesté pour « cavalière » en 1690 ; écuyère désigne ensuite (1832, Balzac) une femme qui fait des exercices d'équitation dans un cirque.
Par analogie de fonction (idée d'« aide », de « suite »), écuyer n. m. s'emploie dans divers domaines : en vénerie « jeune cerf qui en suit un plus vieux » (fin XIIe s.) ; « faux bourgeon qui croît au pied d'un cep de vigne » (1564) ; « main courante soutenue par des supports le long du mur d'un escalier » (1752).
❏  ÉCURIE n. f. est la forme réduite du dérivé esqüierrie (v. 1200) et désigne d'abord l'ensemble des écuyers et des pages puis (1532) la fonction d'écuyer. Par extension, parce que les chevaux des grandes maisons étaient à la charge des écuyers, le mot (1285, escurierie) signifie « service des chevaux, dans une maison princière ». Tous ces emplois ont aujourd'hui disparu, sauf en histoire.
■  Par métonymie, écurie prend le sens d'« ensemble de chevaux » (1512, escuyrie), l'emploi moderne pour « bâtiment où sont logés les chevaux » étant attesté à la fin du XVIe s. (1583). De ce sens viennent plusieurs locutions : faire une écurie de ses chausses (1640) signifiait par allusion à la saleté, aux souillures des écuries, « avoir une maladie vénérienne » en parlant d'un homme ; la locution est sortie d'usage, comme fermer l'écurie quand les chevaux sont dehors (1718) « prendre des précautions quand il est trop tard ». Sentir l'écurie se dit encore au figuré pour « avoir un regain d'énergie quand on approche de la fin d'un trajet, d'un travail, etc. » ; les écuries d'Augias désigne un lieu très sale, par allusion à la fable grecque du cycle d'Héraklès ; dans la fable, Héraklès nettoie des étables, non des écuries ; le mot écurie a sans doute été préféré à cause du rapprochement avec curer « nettoyer ». On relève encore (1864) se croire dans une écurie, entrer quelque part comme dans une écurie « comme dans un lieu public » (Cf. comme dans un moulin). ◆  Par extension, écurie entre dans le vocabulaire hippique (1834, écurie de course ou écurie) pour désigner des chevaux appartenant à un même propriétaire, puis par analogie (1898) des cyclistes courant dans la même équipe (sens vieilli), un ensemble de voitures, etc. courant pour une même marque ; enfin par plaisanterie, des candidats d'un éditeur dans la course aux prix littéraires. ◆  Par extension, le mot s'emploie régionalement, dans l'est de la France, sauf l'Alsace, et en français de Suisse, en Bretagne occidentale, en Vendée..., pour « étable » (Cf. étable) et même « abri pour animaux d'élevage » (écurie des poules, à, de lapins).
ECZÉMA n. m. est un emprunt savant (1747) au latin médiéval eczema, lui-même emprunté au grec médical ekzema « éruption cutanée » dérivé de ekzein, de ek « hors de » et zein « bouillir », « bouillonner », mot reposant sur une racine indoeuropéenne °yes- que l'on retrouve dans le sanskrit yasatí et l'ancien haut allemand jesan « bouillonner ».
❏  C'est un mot du vocabulaire médical qui désigne aussi une affection cutanée caractérisée par des rougeurs, un érythème suintant, des démangeaisons. Eczéma entre dans l'usage général et s'emploie par métaphore, en parlant de ce qui fait souffrir ou enlaidit comme une maladie de peau (un eczéma moral, Saint-Exupéry). ◆  La variante graphique EXÉMA se rencontre aussi dans les dérivés.
❏  En dérivent les termes de médecine ECZÉMATEUX, EUSE adj. (1838), suffixe -eux, et ECZÉMATISER (S') v. pron. (XXe s.) d'où ECZÉMATISATION n. f. (1901).
■  Le composé ECZÉMATOGÈNE adj. (XXe s. ; de -gène) désigne en médecine une substance qui peut provoquer l'eczéma. Tous ces dérivés possèdent un t de liaison (Cf. comateux).
EDELWEISS n. m. inv. est un emprunt (1861) à l'allemand Edelweiss (depuis 1785 en Autriche), composé de edel « noble » et de weiss « blanc » ; le mot allemand a été importé de Suisse alémanique.
❏  Cette plante en forme d'étoile, recouverte d'un duvet blanc, et qui pousse sur les hauts sommets, est aussi appelée « immortelle des neiges » ou « pied-de-lion ».
ÉDEN n. m. est un emprunt (v. 1235 comme toponyme biblique) à l'hébreu biblique ῾ēden, nom du lieu du paradis terrestre. Par confusion avec le nom commun hébreu ῾adānîm « délices » (forme plurielle de ῾ēden), le mot fut traduit par « volupté » ou « délices » en grec ou en latin (Genèse, 2, 15), d'où les expressions paradis de délices ou jardin de délices dans les traductions de ces passages en ancien et moyen français.
❏  La traduction stricte de JARDIN DDEN pour désigner le paradis terrestre n'est apparue qu'au XVIe s. avec les traducteurs de la Réforme qui recouraient au texte hébreu (1547, Eden « paradis terrestre » ; 1553, jardin d'Eden). ◆  Aujourd'hui, généralement employé avec l'article défini, Éden est un terme didactique, un éden, des édens s'employant littérairement pour « lieu de délices » (1794, Chénier).
❏  De Éden dérivent des termes littéraires.
■  ÉDÉNISME n. m. (1843, Proudhon) se dit de l'état de bonheur qui aurait constitué la première période de l'humanité, précédant l'état sauvage.
■  ÉDÉNIEN, IENNE adj. (XIXe s., 1838, selon Bloch et Wartburg) a été supplanté par son synonyme ÉDÉNIQUE adj. (1865, Proudhon) « qui évoque l'Éden », plus courant pour qualifier ce qui est très agréable et dont dérive ÉDÉNIQUEMENT adv. (1887).
■  ÉDÉNISER v. tr. « transformer en Éden » (1866) et son dérivé ÉDÉNISATION n. f. (1862) semblent avoir été créés par Victor Hugo.
ÉDICTER → ÉDIT
ÉDICULE n. m. est un emprunt savant et récent (milieu XIXe s.) au latin aedicula « petite maison », « édifice », diminutif de aedes à l'origine « foyer », « lieu où l'on fait le feu », en latin classique « temple, maison », de la même famille que aestas (→ été). Le mot se rattache à une racine indoeuropéenne °aidh- « brûler ». Le genre masculin d'édicule s'explique par l'influence d'édifice et des mots masculins en -cule.
❏  Édicule, d'abord attesté (1863, Flaubert) au sens du latin aedicula, est peu employé aujourd'hui pour désigner un petit édifice à caractère religieux (chapelle, petit temple). Il se dit surtout (attesté 1876) d'un petit édifice servant d'abri sur la voie publique, et en particulier (déb. XXe s.) d'un urinoir ou vespasienne.
❏ voir ÉDIFIER.
ÉDIFICE n. m. est emprunté (v. 1120) au latin aedificium « bâtiment », de aedificare (→ édifier).
❏  Le mot désigne un bâtiment important puis, au figuré (1669), un ensemble vaste et organisé (édifice social, etc.) et, par analogie (1692), un assemblage résultant d'un arrangement (édifice de cheveux).
ÉDIFIER v. tr. est emprunté (v. 1120) au latin classique aedificare « construire », qui a pris en latin chrétien le sens moral de « faire grandir dans la foi » ; le verbe latin est composé de aedes « maison » (à l'origine « foyer », « hutte avec le feu au milieu » → édicule) et facere « faire* » ; aedes appartient à la famille d'une racine indoeuropéenne °aidh- « brûler » (→ estival, été, éther).
❏  Édifier reprend le sens latin de « construire » (v. 1120) au propre et au figuré. ◆  Depuis la fin du XIIe s., le verbe se dit comme en latin chrétien pour « porter à la vertu ». Il signifie ensuite (apr. 1550) « mettre (qqn) à même d'apprécier » (Cf. instruire) ; il est souvent péjoratif ou ironique à partir du XIXe siècle.
❏  Le dérivé ÉDIFIANT, ANTE adj., « qui porte à la vertu » (fin XIIe s.), du participe présent, s'emploie aussi ironiquement (1713 ; un témoignage édifiant).
■  ÉDIFICATION n. f. est emprunté au latin classique aedificatio « action de bâtir, construction » (du supin de aedificare), qui prend un sens moral en latin chrétien. ◆  Comme édifier, le mot a conservé les valeurs du latin ; il est introduit (v. 1200) avec le sens moral et désigne (v. 1380) l'action d'édifier (ensuite au figuré : l'édification d'une science).
■  ÉDIFICATEUR, TRICE n. et adj. est emprunté (av. 1517) au dérivé latin classique aedificator « qui bâtit ».
■  Le préfixé RÉÉDIFIER v. tr. est d'usage littéraire au propre (v. 1225, redefier) et au figuré (1796), comme son dérivé RÉÉDIFICATION n. f. (v. 1295).
❏ voir ÉDIFICE, ÉDILE.
ÉDILE n. m. est un emprunt (1213) au latin classique aedilis qui désignait à l'origine la personne qui s'occupait des édifices sacrés et privés, puis à Rome un magistrat municipal ; c'est un dérivé de aedes « maison », « temple » (→ édifier).
❏  Édile, d'abord terme d'histoire romaine (1213), est appliqué au XVIIIe s. aux institutions modernes pour désigner, par analogie de fonction (1754), le magistrat municipal d'une grande ville (Cf. maire).
❏  Du dérivé latin classique aedilitas « charge d'édile », on a emprunté (XVe s.) ÉDILITÉ n. f., d'abord appliqué à l'histoire romaine, puis employé (1838) pour désigner la magistrature municipale. Peu usité dans son sens moderne, c'est un terme didactique ou administratif, comme son dérivé ÉDILITAIRE adj. (1875).
ÉDIT n. m. est emprunté (XIVe s., esdit) au latin edictum, supin de edicere « proclamer », « ordonner », de ex- et dicere (→ dire).
❏  Le mot désigne, en parlant de l'Antiquité romaine, un règlement, une ordonnance émanant d'un empereur ou d'un magistrat (édile, prêteur, consul, etc.) puis un acte législatif émanant d'un souverain et statuant sur une matière spéciale (Édit de Moulins, 1566 ; Édit de Nantes, 1598). Par extension, le mot a désigné toute ordonnance rendue par un souverain.
❏  Au XVIIIe s. a été formé le composé CONTRE-ÉDIT n. m. « édit qui s'oppose à un autre ».
ÉDICTER v. tr. (1619) est un dérivé savant du supin edictum, pour servir de verbe à édit ; il a remplacé le dérivé éditer (1399), éliminé par la diffusion de édition, au XVIe s., puis de l'homonyme éditer.
+ ÉDITER v. tr. a été formé à la fin du XVIIIe s. sur l'adjectif édité (1784, Restif), tiré du participe passé latin editus, de edere « produire, mettre au jour » ; l'adjectif edit « publié », de même origine, étant attesté vers 1310. Edere se rattache probablement au verbe dare « donner* », de la famille d'une racine indoeuropéenne °do- « donner », « transmettre la possession de ».
❏  Le verbe, d'après le sens d'édité, inédit, édition et éditeur, tous antérieurs (voir ci-dessous) signifie « publier et faire circuler (un texte reproduit) ». Puis éditer signifie didactiquement « préparer, établir et présenter (un texte) pour la publication » (fin XIXe s.) ; dans cet emploi, qui correspond à la première valeur d'édition, le sens d'éditer est proche de celui du verbe anglais to edit « préparer matériellement un texte pour la publication », de même origine, le sens français d'éditer correspondant en anglais à to publish. ◆  Éditer est entré (apr. 1960) dans le vocabulaire de l'informatique avec le sens emprunté à l'anglais to edit, de « préparer (des informations) pour le traitement ».
❏  À partir d'éditer a été dérivé ÉDITABLE adj. (XIXe s.) et son contraire préfixé INÉDITABLE adj. (1875).
■  Éditer a servi à former par préfixation RÉÉDITER v. tr. (1845), employé au propre et au figuré, et COÉDITER v. tr. (XXe s.), auxquels correspondent des préfixés d'édition (ci-dessous).
ÉDITION n. f., attesté dès le deuxième tiers du XVIe s., est emprunté au latin impérial editio « production » et spécialement « établissement de texte », de editum participe passé neutre de edere (Cf. ci-dessus).
■  Le mot désigne d'abord l'action d'établir un texte afin de le faire paraître et de le reproduire. Ce sens, devenu didactique, correspond à un emploi tardif d'éditer, parallèle à l'anglais to edit. ◆  C'est par extension que édition désigne au XVIIe s. (1679) le fait de reproduire un texte, préalablement établi, par un procédé technique ; cette valeur correspond à la diffusion généralisée de l'imprimerie.
■  Par métonymie, le mot désigne (1690) l'ensemble des exemplaires d'un texte reproduits sur un même modèle (Cf. tirage), puis un exemplaire d'une telle série (une édition originale désigne un exemplaire de l'édition originale) ; cette acception est courante dans la presse (cinquième, dernière édition d'un journal). Plusieurs syntagmes se rattachent à ce sens : première, nouvelle édition, etc. ◆  Au figuré, la nouvelle édition de qqch. se dit pour « la reprise, la répétition ». ◆  Employé absolument, le mot désigne l'ensemble des activités techniques et économiques concernant la reproduction et la diffusion des textes imprimés, notamment celle des livres (Cf. le livre), puis par extension, celle des journaux et d'autres produits analogues.
■  Enfin édition, en informatique (apr. 1960) est un calque de l'anglais edition, de to edit au sens latin ; le mot désigne la matérialisation des informations traitées par l'ordinateur, sur écran ou sur imprimante.
Sur édition ont été formés par préfixation RÉÉDITION n. f. d'abord « édition nouvelle » (1725), puis « ouvrage réédité » (1788) et employé familièrement au figuré (XXe s.) pour « répétition », et COÉDITION n. f. (mil. XXe s.).
■  ÉDITIONNER v. tr. (1773, repris v. 1950), signifie « marquer d'une mention de tirage les exemplaires d'une édition ».
ÉDITEUR, TRICE n., attesté en 1732, est formellement un emprunt au latin impérial editor « celui qui produit » et « auteur, fondateur », de editum. Mais le sens est celui de édition, attesté depuis le XVIe s. et éditeur pourrait en être le dérivé. Le mot s'emploie d'abord au sens aujourd'hui didactique de « personne qui fait paraître un texte après l'avoir établi ». ◆  Depuis la fin du XVIIIe s. (attesté 1775, Voltaire), en accord avec le second sens d'édition et celui du verbe nouveau éditer, éditeur désigne la personne qui assure la publication et la mise en vente d'ouvrages imprimés, d'où plus tard, par analogie, éditeur de musique, de photographies, etc. ◆  Au XIXe s. le mot a pris spécialement le sens de « directeur politique (d'une publication périodique) » (Cf. éditorialiste). Au sens de « personne qui prépare un texte pour l'impression », le mot est aujourd'hui un anglicisme (XXe s., de editor, de même origine) ; on emploie en français préparateur de copie ou réviseur ; cependant cet emploi correspond au sens originel d'édition (voir ci-dessus). ◆  Éditeur a également pris en informatique (apr. 1960) le sens anglais dérivé de « programme qui permet la composition de textes sur ordinateur ».
■  Au sens le plus courant, éditeur a pour composé COÉDITEUR, TRICE n. (mil. XXe s.).
INÉDIT, ITE adj. et n. m. est un emprunt savant (1729, Montesquieu) au latin ineditus « qui n'a pas été publié », de in- et editus. L'adjectif est introduit avec le sens du latin ; un INÉDIT n. m. « une œuvre inédite » apparaît au début du XIXe siècle. Par extension, inédit signifie « qui n'est pas connu » (déb. XIXe s. ; n. m., 1862, Hugo) et par métonymie (milieu XIXe s.) « dont les œuvres n'ont pas été éditées » (un auteur inédit). ◆  Un sens extensif « nouveau », s'est diffusé, notamment en publicité, ainsi qu'un emploi substantivé dans ce sens, l'inédit (1807).
❏ voir ÉDITORIAL.