ÉGÉRIE n. f. est un emprunt (1842) au latin Egeria, mot sans doute étrusque : c'est le nom d'une nymphe que Numa Pompilius, roi légendaire de Rome, prétendait consulter avant d'établir des lois pour les Romains.
❏  Égérie se dit, en termes littéraires, d'une femme qui passe pour la conseillère, l'inspiratrice d'un homme politique, d'un écrivain, d'un artiste. Au figuré (1862, Vigny), le mot s'emploie par plaisanterie en parlant d'une chose personnifiée en tant que source d'inspiration.
ÉGIDE n. f. est un emprunt (1512) au latin Aegis, Aegidis « bouclier de Jupiter, de Pallas Athéna », d'où « défense, protection », lui-même du grec aigis proprement « peau de chèvre » et « bouclier fait avec la peau de la chèvre Amalthée », de aix, aigos « chèvre ».
❏  Égide, terme de mythologie, désigne le bouclier de Zeus, qui était recouvert de la peau de la chèvre Amalthée, sur lequel était posée la tête de Méduse ; ce bouclier avait été confié par le dieu à Pallas Athéna (Minerve) ; en français, comme en latin, le mot a spécialement désigné le bouclier de Pallas. Le sens figuré de « protection, sauvegarde » (1569) est d'usage littéraire ou didactique. Seule l'expression sous l'égide de (1801) est d'emploi plus courant, pour « sous la protection notoire de », mais égide n'y est en général plus compris.
ÉGLANTIER n. m., attesté sous la forme eglenter n. m. en 1080, est un dérivé avec le suffixe -ier (sur le modèle d'autres noms d'arbres dérivés de noms de fruits) de l'ancien français aiglent. Ce dernier est issu du latin populaire °aquilentum, altération de °aculentum « muni d'épines » (Cf. piscilentus « poissonneux », spinulentus « épineux ») ; cette forme provient du latin classique aculeatus « qui a des aiguillons, des piquants », de aculeus « aiguillon », dérivé de acus « aiguille ». Ce nom est rattaché à une racine indoeuropéenne °ak- exprimant l'idée de « pointe », comme acer (→ âcre), acerbus (→ acerbe).
❏  Églantier est le nom donné à un rosier sauvage. Dans l'iconographie chrétienne, l'églantier mystique est représenté aux pieds de la Vierge.
❏  ÉGLANTINE n. f. (1560, englantine ; 1600, esglantine) représente le féminin substantivé de l'adjectif aiglentin, dérivé de aiglent. Le mot, qui désigne la fleur de l'églantier, est attesté spécialement en 1560 à propos de l'églantine d'or décernée au Jeux Floraux de Toulouse. Par métonymie, églantine, adjectif invariable qualifie une couleur (rose pâle). En termes d'histoire politique, les églantines rouges ont désigné les socialistes et communistes qui portaient (v. 1900-1910) cette fleur à la boutonnière ; d'où le dérivé ÉGLANTINARDS employé par Barrès (1917-1918) et sorti d'usage.
ÉGLEFIN ou AIGLEFIN n. m. apparaît sous diverses formes : egreffin (v. 1300), esclefin (1er tiers du XIVe s.), eglefin en 1554. Le mot est emprunté au moyen néerlandais schelvisch « poisson proche de la morue » (qui donne v. 1340 le français esclevis et l'allemand Schellfisch) avec altération de la finale sous l'influence de fin, la graphie aiglefin (1555) étant influencée par aigle ; la variante aigrefin (XIVe s.) est une altération d'après aigre (→ aigrefin).
ÉGLISE n. f. est issu (v. 1050) du latin populaire eclesia, altération du latin chrétien ecclesia, emprunt au grec ekklesia, désignant l'assemblée des citoyens, et, dans le Nouveau Testament, celle des fidèles. Le grec ekklesia remonte à une racine indoeuropéenne signifiant « appeler » (→ ecclésiastique). En latin médiéval, eclesia, ecclesia désigne aussi, par métonymie, le lieu où les fidèles s'assemblent, le temple ; cette valeur concrète s'est imposée.
❏  Le mot apparaît au sens concret, désignant l'édifice consacré au culte catholique. L'ancien français connaît plusieurs variantes, glise (XIe -XIIe s.), egleise (Franche-Comté), etc. ◆  Dès le XIIe s., sainte eglise (1135), la sainte mère eglise (v. 1175) se dit de l'ensemble des chrétiens et de l'autorité qui les dirige. Un emploi spécial concerne l'Assemblée des premiers chrétiens, dite église primitive ou primitive église. À partir du XVIe s., le mot s'applique à une catégorie plus précise de chrétiens, dans des syntagmes comme eclise romaine (1546, Rabelais), église gallicane (XVIIe s.) ; cette acception a pris de l'importance avec la Réforme (églises réformées, anglicane, baptiste...). Gens d'église (1549), puis homme d'église se dit des membres du clergé, Église désignant le clergé en tant qu'État, au XVIIIe siècle.
Un emploi figuré pour « groupe de personnes ayant même croyance, même doctrine » apparaît au XIXe s. (1862, Goncourt).
❏  La dérivation est faible, le latin chrétien ecclesia ayant fourni par emprunt plusieurs dérivés (ecclésiastique, etc.). Le diminutif églisete, églisette n. f. est attesté en ancien français. ◆  ÉGLISIER n. m. s'est dit d'un dévot (fin XVIIIe s., Beaumarchais), mais cet emploi stylistique et péjoratif n'a pas vécu.
ÉGLOGUE n. f. est une altération (1375) de eclogue (XIIe s.), emprunt au latin classique ecloga « choix, recueil », d'où « pièce de vers » en bas latin, « petit poème pastoral ». Le mot est emprunté au grec eklogê « choix » puis « pièce choisie, extrait d'un auteur », du verbe eklegein « choisir », de legein « rassembler » et « dire » apparenté au latin legere (→ lire). Les familles de legere et de legein ont donné de nombreux mots en français (→ cueillir, élire, légende, lexique, etc.). ◆  La forme étymologique éclogue est encore en usage au XVIIIe siècle.
❏  Églogue désigne comme en bas latin un poème pastoral qui met en scène des bergers (Cf. bucolique, idylle, pastorale), puis le genre littéraire qui comprend de tels poèmes. Par analogie (XIXe s.), le mot se dit du genre de vie qui rappelle l'atmosphère des églogues et d'une œuvre (musicale, picturale) dont les thèmes sont ceux de l'églogue. ◆  Au sens du latin classique, « recueil de poèmes choisis » (1842), le mot est tombé en désuétude.
EGO n. m. est un mot latin, nominatif du pronom personnel de la 1re personne en emploi atone, et qui a un correspondant exact dans le grec ego. Il a été introduit en philosophie (1886) comme calque de l'allemand das Ich (denke) « le je (pense) », employé par Kant ; ego est attesté en anglais et en allemand à la fin du XVIIIe siècle.
❏  En français comme dans ces langues, ego désigne, d'abord dans la philosophie kantienne, l'unité transcendantale du moi (Cf. je, moi). Au XXe s., le mot est entré dans le vocabulaire de la psychanalyse (Cf. moi). En ethnologie, il désigne l'individu retenu comme point de référence pour la description d'un système de parenté.
❏ voir ÉGOCENTRIQUE, ÉGOÏSTE, ÉGOTISME.
ÉGOCENTRIQUE adj. est composé (1880-1884) du latin ego (→ ego) et de centre (→ centre), d'après anthropocentrique.
❏  L'adjectif s'applique à une personne « centrée » sur elle-même et spécialement, en psychologie, au langage de l'enfant qui ne se réfère pas explicitement à autrui. En ethnologie, on parle de groupe égocentrique « formé autour d'un individu vivant ».
❏  L'adjectif a été substantivé (déb. XXe s.) et a fourni ÉGOCENTRISME n. m. (1918), d'où ÉGOCENTRISTE adj. et n. (1923, Du Bos) et ÉGOCENTRIQUEMENT adv. (av. 1940).
ÉGOÏNE n. f. représente (sous la forme egoÿne à Québec, 1671 ; 1676, egohine ; 1831, égoïne) une altération d'après ego, l'instrument désigné se manipulant sans l'aide d'autrui, de escohine n. f. (1344), issu du latin populaire °scofina, forme dialectale, osco-ombrienne, du classique scobina « lime, râpe », dérivé de scabere « gratter, raboter ». Ce verbe se rattache à la même racine indoeuropéenne que le gotique skaban « gratter » ou le grec skaptein « creuser ». Escohine a désigné une lime et une râpe comme l'italien scuffina et l'espagnol escofina.
❏  Égoïne a pris le sens de « petite scie à main maniée par une seule personne ». Par ailleurs, escohine s'est altéré en escuene (1676), escouene (1690), qui ont disparu.
❏  ÉCOUANE n. f. (1755), autre altération du mot, s'est spécialisé pour désigner une « grande lime plate », puis un « rabot d'armurier ».
ÉGOÏSTE adj. et n. est un dérivé savant (1721) du latin ego « moi » (→ ego).
❏  Le mot, d'abord substantif, se dit d'une personne qui fait preuve d'un intérêt exclusif ou excessif pour elle-même ; il est adjectivé en 1793 et est entré au XIXe s. dans l'usage courant, s'opposant à altruiste.
❏  ÉGOÏSME n. m. autre dérivé du latin ego, désigne (1743) la disposition à trop parler de soi, à rapporter tout à soi, emploi devenu d'usage littéraire, puis (1789) l'attachement excessif à soi-même, qui fait que l'on subordonne l'intérêt d'autrui au sien propre, valeur courante du mot aujourd'hui. ◆  L'emploi du mot en philosophie (égoïsme métaphysique) est tombé en désuétude (Cf. solipsisme) ; mais égoïsme est utilisé en psychanalyse (déb. XXe s.), au sens d'« intérêt porté par le moi à lui-même ».
■  ÉGOÏSTEMENT adv. est attesté en 1785 ; il est devenu usuel, à la différence du verbe intransitif égoïser « parler trop de soi » (1835).
ÉGO-ALTRUISME n. m. est formé (1922, égo-altruiste) de égo(ïsme) et altruisme, d'après l'anglais ego-altruistic (1855), et désigne, en philosophie, l'égoïsme qui se réalise dans l'altruisme.
ÉGOTISME n. m. est un emprunt (1726, attestation isolée, repris au début du XIXe s., 1823, Stendhal) à l'anglais egotism, mot créé par Addison en 1714 pour traduire le français égoïsme (→ égoïsme), au sens de « disposition à parler trop de soi ».
❏  C'est avec ce sens qu'il entre en français ; il devient ensuite un équivalent littéraire d'égocentrisme. Le mot s'est diffusé grâce à Stendhal (Souvenirs d'égotisme). ◆  En philosophie, égotisme désigne (1832, G. Sand), sans valeur péjorative, un mode de connaissance où le moi constitue la référence essentielle.
❏  ÉGOTISTE adj. et n. est également un emprunt (1714, hapax, puis 1825) à l'anglais : egotist traduisait (1714, Addison) le français égoïste. L'adjectif rare ÉGOTIQUE a été formé à la fin du XIXe s. à partir du radical d'égotisme.
❏ voir EGO.
ÉGOUT, ÉGOUTTER, ÉGOUTTOIR → 1 GOUTTE
ÉGRATIGNER v. tr. représente (XIIIe s., esgratigner) une altération de esgratiner (1155) « écorcher en déchirant superficiellement la peau », dérivé de gratiner (1175-1180), diminutif de gratter (→ gratter) ; gratigner est encore attesté en 1530.
❏  Égratigner garde le sens de esgratiner ; il s'emploie par analogie comme terme technique, en couture (1552), en gravure (1762) et en agriculture (1832), et au sens de « dégrader légèrement (qqch.) ». ◆  Au figuré, égratigner signifie « blesser légèrement par un mot piquant » (1588).
❏  Du verbe dérivent : ÉGRATIGNURE n. f., employé au propre (XIIIe s., esgratineure) et au figuré (1844), et les formes plus rares ÉGRATIGNEMENT n. m. (1532, esgratinement), ÉGRATIGNEUR, EUSE adj. et n. (1558, esgratigneur) et ÉGRATIGNOIR n. m. (1755), mot technique ancien.
ÉGRENER → GRAIN
? ÉGRILLARD, ARDE n. et adj., d'abord sous la forme esgrillard (1573), est probablement dérivé du verbe dialectal égriller « glisser » (Normandie), altération de l'ancien français escriller de même sens ; on le rapproche de l'ancien scandinave °skridla « glisser sur la neige avec des raquettes », restitué d'après le suédois dialectal skrilla.
❏  Le mot est d'abord attesté avec le sens de « malfaiteur qui guette les passants » que l'on explique par les mouvements vifs du voleur apparaissant et disparaissant de façon inattendue. À partir du XVIIe s., égrillard comme nom désigne une personne alerte, vive ou d'une conduite libre (1640), d'où plus tard un homme adroit, éveillé (1808). Comme adjectif, le mot a signifié « rusé » (1704). Seul l'emploi adjectif (1656, air égrillard) au sens d'« un peu libre avec une tendance à la gauloiserie », qualifiant aussi une personne (1668), est encore en usage aujourd'hui.
❏  Le dérivé ÉGRILLARDISE n. f. (1867), ou ÉGRILLARDERIE n. f., n'est pas d'usage courant.
ÉGROTANT, ANTE adj. est un emprunt (av. 1300, egrotans, puis XVIe s., emplois isolés) au latin classique aegrotans « malade », participe présent de aegrotare « être malade », de aegrotus « malade ». C'est un dérivé de aeger, aegra, adjectif d'origine inconnue, apparenté seulement au tokharien, dans le domaine indoeuropéen.
❏  Égrotant est introduit avec le sens du latin ; cet emploi a disparu. Il est repris au XIXe s. (1834) et s'applique, dans l'usage littéraire, à une personne qui est dans un état maladif permanent.
ÉGYPTIEN, IENNE adj. et n. est dérivé en français (XIIIe s., n. m. pl.) de Égypte, nom de pays, emprunté au latin Aegyptus repris au grec Aiguptos.
❏  Égyptien « de l'Égypte » s'appliquait aussi à une personne membre de tribus nomades, en général des tziganes, qu'on croyait originaires d'Égypte (XVIe s. ; Cf. gipsy). ◆  ÉGYPTIENNE n. f. a désigné (attesté XIXe s.) une étoffe de soie à rayures, à la mode dans la seconde moitié du XVIIIe s. et se dit (depuis 1835) d'un caractère d'imprimerie dont les empattements acérés évoquent l'écriture égyptienne. ◆  L'égyptien n. m. est aussi le nom de la langue des anciens Égyptiens (1854) et de l'arabe parlé aujourd'hui en Égypte, surtout nommé arabe égyptien.
❏  ÉGYPTO- est le premier élément de termes didactiques comme égypto-araméen (1890), égypto-israélien, égypto-lybien, etc.
■  ÉGYPTOLOGUE n. est formé en 1827 (de -logue) et ÉGYPTOLOGIE n. f. au milieu du XIXe s. (de -logie) ; ces deux mots, comme le dérivé du premier, ÉGYPTOLOGIQUE adj. (1851), concernent l'archéologie de l'Égypte antique.
EH interj. (1050, e XIVe s., eh) sert à interpeller, à attirer l'attention ou à renforcer le mot qu'il précède (eh oui !). Redoublé (apr. 1650, eh ! eh !), il indique un sous-entendu. Eh bien (XVIIe s.) marque l'émotion du locuteur, ou introduit une digression, une information, etc., par rapport à un contexte donné.
ÉHONTÉ → HONTE
EIDER n. m. est d'abord un emprunt (v. 1200, edre, isolément) à l'ancien nordique aedr « duvet ». Terme de zoologie en français à partir de 1755, eider est un emprunt, par l'intermédiaire du latin scientifique (1655), à l'islandais aedur « oiseau » et, spécialement, « genre de grand canard » ; la forme initiale du mot est aedhr.
❏  Le mot désigne un canard des pays du Nord, recherché pour son duvet (Cf. édredon).
❏ voir ÉDREDON.