EMBARGO n. m. est un emprunt (1626) à l'espagnol embargo (depuis 1020 au sens d'« empêchement, obstacle »), déverbal de embargar « embarrasser, empêcher » ; ce dernier est issu du latin populaire °imbarricare, propre aux domaines hispanique et occitan, dérivé de °barra (→ barre).
❏  Embargo, surtout employé avec les verbes mettre, lever, est d'abord attesté dans lever l'embargo (1626) avec le sens de « mesure destinée à empêcher la libre circulation de marchandises ». Au début du XVIIIe s., c'est un terme de droit maritime (mettre un embargo), désignant l'interdiction faite par un gouvernement à des navires étrangers de quitter le port où ils ont mouillé (1723). ◆  Le mot désigne ensuite (av. 1825) une mesure qui tend à empêcher la circulation de qqch. et s'emploie également au figuré pour « ce qui empêche l'exercice de qqch. » (1865, Flaubert) ; ces emplois sont littéraires et rares.
EMBARQUER → BARQUE
EMBARRASSER v. tr. est un mot emprunté (1570-1571, embarasser ; probablement antérieur, Cf. ci-dessous embarras) à l'espagnol castillan embarazar (v. 1460) « causer de la gêne (à qqn) », lui-même pris au léonais et au galicien-portugais embaraçar dérivé de baraço « courroie, corde », d'origine incertaine. L'italien imbarazzare a la même origine. Le verbe français est probablement apparu en Wallonie, occupée au XVIe s. par les Espagnols.
❏  Embarrasser, qui a d'abord le sens de l'étymon, s'emploie ensuite (1580) comme pronominal, au sens de « se troubler, perdre le pouvoir de se mouvoir », qui a vieilli. ◆  Par extension, embarrasser signifie « gêner (qqn) en troublant ses idées » et concrètement « gêner (un passage) par un obstacle » (fin XVIe s.), puis (1665) au figuré « encombrer (qqn) de sa présence » en parlant d'une personne et s'embarrasser (1663) « prendre souci, se préoccuper ». ◆  Le verbe est vieilli au sens classique (1690) de « gêner par un obstacle », d'où vient l'emploi moderne de « priver (qqn) de sa liberté de mouvement » (1690).
❏  EMBARRAS n. m., déverbal d'embarrasser, s'est d'abord employé (1552, au pluriel) en français de la Flandre espagnole au sens d'« obstacles qui entravent la circulation », puis au figuré (1561, embaras) pour « situation difficile ». ◆  Par extension, embarras désigne un obstacle qui s'oppose à l'action (1668), d'où la cause d'un désagrément (1685) et spécialement la gêne résultant d'une situation difficile (1690, embarras d'argent). Par analogie, il se dit d'un encombrement des voies digestives. ◆  Au figuré, embarras n'est plus que d'usage littéraire au sens de « confusion résultant d'affaires difficiles à débrouiller » (1677) ; cependant, cette idée de « complication » se retrouve dans la locution courante faire de l'embarras, des embarras « chercher à se faire remarquer, faire des manières ». ◆  Le nom a pris (1660, Corneille) la valeur d'« incertitude de l'esprit devant une décision à prendre », dans quelques expressions comme avoir de l'embarras, n'avoir que l'embarras du choix, et désigne l'état d'une personne gauche (1680).
■  L'adjectif EMBARRASSÉ, ÉE « dans l'embarras » (1580) a suivi l'évolution du verbe.
■  EMBARRASSANT, ANTE adj. (1606, embarassant) s'emploie au propre et au figuré (« qui trouble »).
❏ voir DÉBARRASSER.
EMBASTILLER → BASTIDE
EMBATTRE → BATTRE
EMBAUCHER v., attesté au XVIe s. (1564), a été formé, par substitution de préfixe, comme antonyme de débaucher* au sens de « détourner de son travail ».
❏  Le mot est employé dès le XVIe s. (tr.) avec le sens d'« engager (un ouvrier) en vue d'un travail » (l'emploi absolu on embauche est plus tardif). Par extension, embaucher a été employé (1797) pour « enrôler (des hommes) dans l'armée de métier », d'où « attirer dans son armée (les soldats de l'ennemi) » (XIXe s.). ◆  C'est au XIXe s. que le verbe a pris le sens courant d'« entraîner (qqn) dans une activité » (1895, L. Bloy), « attirer (qqn) dans un parti, un groupement ». ◆  En emploi intransitif, embaucher, dans l'usage régional de l'ouest de la France (1887 en français de Saintonges), correspond à « commencer sa journée de travail » (débaucher a un emploi comparable).
❏  EMBAUCHE n. f., déverbal d'embaucher, est attesté en 1660 mais demeure rare avant le XXe s., avec le sens d'« action d'embaucher » ; il se dit de la possibilité de travail (offre d'embauche, bureau d'embauche) et appartient au champ sémantique du travail salarié, comme chômage, emploi, etc. ◆  Le sens « début du travail quotidien » correspond à l'emploi régional du verbe.
■  EMBAUCHEUR, EUSE n. (1680) « celui qui embauche » n'a pas conservé les emplois dérivés des sens étendus d'embaucher.
■  EMBAUCHAGE n. m. (1752) « action d'embaucher » (aussi terme de droit), se dit par extension de l'action d'entraîner (qqn) dans une activité, d'enrôler dans un parti. ◆  On rencontre dans cet emploi EMBAUCHEMENT n. m. (1792), aujourd'hui sorti d'usage.
■  Le préfixé RÉEMBAUCHER v. tr. (1904), d'abord rembaucher (1832), a donné RÉEMBAUCHAGE n. m. (1928) ou RÉEMBAUCHE n. f. (attesté 1964).
❏ voir DÉBAUCHER.
EMBAUMER v. tr., réfection (v. 1270) de enbasmer (1160-1170), est un mot dérivé, par préfixation en-, de basme, baume (→ baume).
❏  Embaumer se dit d'abord (fin XIIe s.) de l'action de conserver un cadavre au moyen de substances balsamiques ; il est ensuite employé par extension (v. 1270) pour « imprégner (qqch.) d'une odeur suave, parfumer », notamment au participe passé (air, brise embaumé[e]). ◆  De la première acception, vient le sens figuré (av. 1778) « préserver de l'oubli, rendre immuable », aujourd'hui d'emploi littéraire. Par extension du second emploi, embaumer se dit, absolument, pour « exhaler, répandre une odeur agréable » (1841), d'où, familièrement, avec une valeur négative, ça n'embaume pas (la rose, etc.) « ça sent mauvais ». ◆  Par métaphore, le mot s'est employé familièrement (1842) avec le sens de « prodiguer (à qqn) des flatteries exagérées » (Cf. encenser) ; cet emploi a disparu.
❏  EMBAUMEUR, EUSE n. (1556) « personne chargée d'embaumer les morts », a désigné aussi au figuré (1865) une personne qui prodigue les flatteries.
■  EMBAUMEMENT n. m. (1575), réfection de l'ancien français enbassement (fin XIIIe s.), enbalsement (XIVe s.), « action d'embaumer un cadavre » et par métaphore « fait de rendre immuable » (1862, Hugo), se dit aussi (1834) du fait d'être odorant.
■  EMBAUMANT, ANTE adj. (1800 ; du participe présent d'embaumer) est d'un emploi didactique en parlant de ce qui a des propriétés balsamiques, et littéraire pour qualifier ce qui répand une odeur suave.
EMBERLIFICOTER v. tr. est attesté à la fin du XVIIIe s. (1790) après toute une série de formes : embarelicotter (1711) « rendre amoureux », embarelificorelicoter (1744), embarlificoté (1783). C'est une altération d'emberlucoquer qui a lui-même de nombreuses variantes (XIVe s. embirelicoquier, embrelicoquer, emberloquer, etc.), avec infixation de -(if)ique, sous l'influence probable de mots comme mirifique, horrifique, et suffixe -oter. Emberlucoquer est issu d'un radical expressif bir- ou pir- qui contient l'idée d'un mouvement circulaire (Cf. pirouette) ; cette base pir- / bir- se rattache peut-être au grec peirein « transpercer » (grec moderne peiros « cheville », « pivot »). Le substantif coque est pris au sens de « chose dans valeur » attesté par exemple dans byrelicoquille (XIIIe s.) « chose de peu de valeur ». Selon P. Guiraud, emberlificoter serait formé d'un radical berl- (Cf. berloque, breloque, l'ancien français berele « menu objet ») et d'une combinaison des suffixes -ique et -oque.
❏  Peu courant au sens familier de « gêner (qqn) dans ses mouvements », le verbe s'emploie usuellement au figuré pour « entortiller, embrouiller (qqn) pour le tromper » (déb. XXe s.). Il se dit au propre (1824) comme au figuré en emploi pronominal.
❏  En dérivent EMBERLIFICOTÉ, ÉE adj. « embarrassé, confus » et ENBERLIFICOTEUR, EUSE n. (1867) « personne qui gêne, empêtre » et « personne qui trompe habilement ».
EMBÊTER → BÊTE
EMBLAVER v. tr., attesté en 1242 au participe passé (1573 à l'infinitif), est un dérivé ancien de blef c'est-à-dire blé*, formé avec le préfixe em- (en-) et le développement d'une consonne de transition v (Cf. v. 1202, la forme étymologique emblaer, embleer).
❏  C'est un terme d'agriculture qui signifie « ensemencer (une terre) en blé » et se dit absolument pour « semer les céréales ».
❏  Du verbe dérivent des termes d'agriculture : EMBLAVURE n. f., d'abord « récolte », écrit emblaüre (XIIIe s.), emblaveure (1509), désigne une terre ensemencée en blé (1762), auparavant sous la forme embleüre (fin XIVe s.).
■  EMBLAVEMENT n. m., autrefois « récolte de blé » (1613), signifie « action d'emblaver » (1878) et par métonymie « terre emblavée » (1932).
■  Dans ce sens, le mot remplace l'ancien EMBLAVE n. f. (1755, pl. ; 1838, sing.).
■  Enfin EMBLAVAGE n. m., attesté une première fois au XVIIIe s. et repris en 1845, se dit de l'action d'emblaver.
EMBLÉE (D') loc. adv. succède (av. 1453) aux locutions anciennes an emblét (v. 1121), en emblee (v. 1165) « clandestinement, en cachette ». Emblée est le participe passé substantivé de l'ancien français embler, verbe transitif (v. 980), issu du latin classique involare, proprement « voler dans » d'où « se précipiter sur, se saisir de », de in et volare (→ voler). Le verbe, qui a conservé le sens de « voler, dérober » (v. 980), est considéré comme vieux au XVIIe s. (Richelet, 1680).
❏  La locution adverviale d'emblée signifie d'abord « par surprise (en parlant de la prise d'une ville) », puis par extension « immédiatement » (XVe s.) et enfin « du premier coup, tout de suite ».
EMBLÈME n. m. est un emprunt savant (1560) au latin emblema « ornement en placage sur des vases », lui-même du grec emblêma « ornement appliqué », dérivé de emballein « jeter dans », de ballein « jeter ». La famille de ballein est à l'origine de nombreux mots français (→ bolide, diable, hyperbole, parabole, symbole) et se trouve probablement en rapport avec le latin ballare (→ bal).
❏  Le mot désigne d'abord la représentation d'une figure à valeur symbolique, généralement accompagnée d'une devise, puis un être ou objet concret qui symbolise une chose abstraite (1760, Voltaire) et enfin un attribut, une figure, destinés à les représenter (1801-1818).
❏  EMBLÉMATIQUE adj., didactique, emprunté (1564) au dérivé bas latin emblematicus « plaqué », suit l'évolution sémantique d'emblème. Mot didactique à la mode, il se dit pour « qui a valeur de symbole ». ◆  Il a pour dérivé EMBLÉMATIQUEMENT adv. (1699).
❏ voir PROBLÈME.
EMBOBELINER v. tr., d'origine dialectale (Ouest, Centre), est attesté au XVIe s. (1587, emboubelinez), dérivé (avec le préfixe en-) de l'ancien français bobelin « chaussure grossière » (1375-1380), lui-même de l'onomatopée bob- que l'on retrouve dans bobine*.
❏  Le mot apparaît d'abord, au XVIe s., au sens d'« emmitouflé, harnaché » ; le sens d'« envelopper de vêtements », attesté dans de nombreux dialectes, est sorti d'usage. Conjointement, apparaît l'emploi figuré et familier de « duper, enjôler, séduire (qqn par des paroles) » (1594) qui reste seul en usage (Cf. emballer).
❏  Du verbe dérivent deux mots peu usités, EMBOBELINAGE n. m. (fin XIXe s., Daudet) et EMBOBELINEUR, EUSE adj. et n. (déb. XXe s.).
Du même embobeliner est issue, au début du XIXe s., la forme altérée, d'après bobine, EMBOBINER v. tr., d'abord (1813) au sens d'« enjôler, tromper par des paroles captieuses » puis au sens concret d'« envelopper de vêtements ou de linge » (1881, Maupassant). Quand il signifie « enrouler autour d'une bobine, former en bobine » (1876), le mot est dérivé de bobine*.
■  Du verbe embobiner dérive EMBOBINAGE n. m., employé au figuré (1945, Cendrars) et au propre (l'embobinage d'un film).
■  Le composé REMBOBINER v. tr. (XXe s.) se dit en parlant d'un fil ou d'un film ; il a pour dérivé REMBOBINAGE n. m. (XXe s.), employé comme terme de cinéma (v. 1923).
EMBOIRE v. tr. est issu (v. 1165) du latin classique imbibere « se pénétrer de, s'imprégner de », de in- intensif, et bibere « boire » (→ boire, imbiber).
❏  Le verbe a conservé le sens d'« imprégner » (v. 1165 au figuré, « enivrer »), aujourd'hui spécialement en peinture (1676, Félibien), à la forme pronominale en parlant d'un tableau dont les couleurs deviennent ternes parce que la toile a bu l'huile.
❏  EMBU, UE adj., d'abord attesté au sens d'« enivré » (v. 1170), signifie « imbibé (d'un liquide) » (v. 1280, enbu) dans quelques contextes (yeux embus de larmes ; en marine, voile embue, « alourdie par l'eau »).
■  C'est aussi un terme de peinture (1676), substantivé dans un EMBU n. m. (1838).
❏ voir FOURBU, IMBU.
G EMBOISER v. tr. est un composé (1680) de l'ancien français boisier « tromper par de petites flatteries, des promesses » (XIIe s.), issu du francique °bausjan « dire des sottises, dénaturer » (Cf. ancien haut allemand bôsôn, de même sens).
❏  Emboiser, « tromper », s'est utilisé jusqu'à la fin du XIXe siècle.
EMBOLIE n. f. est un dérivé savant (1845-1856) à partir du grec embolê « action de jeter dans, sur », d'où « attaque, choc », dérivé de emballein « jeter dans », de em- (pour en « dans ») et ballein « jeter » (→ emblème).
❏  Le mot désigne l'oblitération brusque d'un vaisseau par un corps étranger ou un caillot entraîné par le sang.
❏  Le dérivé EMBOLIQUE adj. (1864) est un terme de médecine comme EMBOLUS n. m. (1857) ou EMBOLE n. m. (1870), emprunt savant au latin impérial embolus « piston d'une pompe » (du grec embolos « éperon »), qui désigne tout corps étranger pouvant provoquer une embolie.
❏ voir EMBOLISME.
EMBOLISME n. m. est un emprunt (1119) au bas latin embolismus « intercalation », du grec embolimos « (jour) intercalaire », dérivé de embolê « action de jeter dans » (→ embolie).
❏  Le mot désigne, en parlant de l'Antiquité, l'intercalation d'un mois lunaire, certaines années, destinée à faire concorder les années solaires et lunaires.
❏  EMBOLISMIQUE adj. est attesté au XVe siècle.
EMBONPOINT n. m. est issu (1528) du syntagme en bon point « en bonne condition, situation » (1164), et spécialement « en bonne santé » (fin XIIIe s.).
❏  Le mot a désigné l'état d'une personne en bonne santé jusqu'au XVIIIe s. ; dès le XVIe s., il se dit aussi (v. 1540) de l'état d'un corps bien en chair, un peu gras, sens courant aujourd'hui, l'étymologie du mot n'étant plus sentie ; → point.
1 EMBOUCHER, EMBOUCHURE → BOUCHE
2 EMBOUCHER v. tr. est une altération (attesté 1890, mais antérieur), sous l'influence de bouche*, de embaucher « mettre à l'engrais », verbe dialectal formé par préfixation en- de l'ancien français bauc, bauch « poutre », devenu bau, probablement parce que le bétail destiné à l'abattoir était installé d'une façon particulière.
❏  Emboucher signifie « mettre (un animal) dans un pré pour l'engraisser ».
❏  Il a fourni des dérivés techniques, EMBOUCHE n. f. « prairie » (1837) et « engraissement du bétail dans les prés », dont la variante embauche (1875) est régionale, et EMBOUCHEUR n. m. (1920, embaucheur).