EMMÉNAGOGUE adj. est un composé savant (1738) du grec emmêna « menstrues », pluriel neutre substantivé de l'adjectif emmênos « qui revient tous les mois », de mên « mois » (→ menstrues) et de agôgos « qui conduit, qui amène ». Agôgos vient de agein, correspondant au latin agere qui a donné agir*.
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Le mot s'applique en médecine à ce qui provoque ou facilite le flux menstruel.
EMMENTHAL n. m. est un emprunt (1880) à l'allemand Emmenthaler, nom propre de la vallée (-thal) de l'Emme, rivière de Suisse.
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Le mot désigne un fromage à pâte cuite analogue au gruyère, ce dernier mot servant erronément à le désigner, en français de France.
ÉMOI n. m. représente le déverbal (v. 1175, esmai ; fin XIIIe s., esmoi) de l'ancien français esmaier « inquiéter, effrayer », issu du bas latin °exmagare « priver qqn de ses forces », de ex- privatif et de °magare, verbe hypothétique d'origine germanique auquel se rattache l'anglais may (Cf. gotique et ancien haut allemand magen « avoir le pouvoir, la force ») ; on relève dans les langues romanes l'italien smagare « décourager », le portugais esmagar « écraser », l'ancien provençal esmagar, esmaiar « (se) troubler ». P. Guiraud reprend l'hypothèse de Meyer-Lübke qui rattache exmagare à magus « sorcier » (→ mage), le verbe signifiant proprement « faire sortir de soi en jetant un sort » ; cette formation permet d'expliquer les variantes amaier, emmayer, l'espagnol amagar « menacer ».
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Émoi désigne un trouble provoqué par la crainte ou l'inquiétude. Le mot, très employé au XVIe s., tombe en désuétude à l'époque classique et est qualifié de « vieux mot » au début du XVIIIe siècle. Il est repris au XIXe s. par les romantiques et les symbolistes (1835), avec les sens de « trouble agréable, d'ordre sentimental ou esthétique », « trouble provoqué par une émotion vive », mais reste littéraire. Les expressions en émoi, avec émoi concernent cet emploi.
ÉMOLLIENT, ENTE adj. est un emprunt savant (1549) au latin emolliens, participe présent de emollire « amollir », employé notamment dans la langue médicale, et dérivé de mollis « mou, tendre » puis « souple, sans rudesse » (→ mou).
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Émollient se dit en médecine de ce qui amollit, relâche les tissus enflammés (aussi
n. m., « remède calmant, adoucissant », 1755) et s'emploie au figuré (1835) pour « doux, doucereux ».
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Une forme ÉMOLLIÉ, ÉE adj., « ramolli », est attestée chez Proust.
ÉMOLUMENT n. m. est un emprunt savant (fin XIIIe s., Jean de Meun) au latin classique emolumentum « somme payée au meunier pour moudre le grain » d'où « gain », dérivé de emolere (plus rare et attesté tardivement). Le verbe est formé de ex- intensif et de molere « moudre (le grain) » (→ moudre ; émoulu).
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Le sens étymologique de « bénéfice, profit » est aujourd'hui sorti d'usage, mais c'est cette valeur qui subsiste dans les emplois postérieurs. En droit moderne, le mot désigne l'actif que recueille un héritier, un légataire universel ou un époux commun en biens (1804).
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Émolument s'emploie au pluriel avec le sens de « revenu casuel d'une charge » (en particulier d'officier ministériel) [1690] et, par extension, avec celui de « salaire, rémunération » (1843, Balzac), spécialement en parlant des fonctionnaires.
ÉMONDER v. tr. est emprunté (fin XIIe s., esmonder) au latin impérial emundare « nettoyer, purifier », mot de la langue rustique, de ex- et mundare « nettoyer », dérivé de l'adjectif mundus « propre » d'où « soigné, coquet », dont l'origine est obscure (→ monde, monder).
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Émonder est d'abord attesté avec le sens étymologique de « purifier, nettoyer » (en ancien provençal esmondar) qu'il conserve jusqu'au début du XVIIe siècle. Cependant, dès le début du XIIIe s., apparaît le sens moderne, « enlever les petites branches (d'un arbre) » (v. 1230) et par extension « soigner (une plante) en ôtant certains éléments ». Par analogie, émonder s'emploie dans des domaines spéciaux : « nettoyer et trier (des grains) », « tailler (une pierre) » et spécialement, en cuisine, « retirer l'enveloppe (d'un aliment) ».
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Depuis le début du XIXe s. (1832), il s'emploie au figuré avec le sens de « débarrasser du superflu » (Cf. élaguer).
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À partir d'
émonder ont été formés des termes d'arboriculture.
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ÉMONDE n. f., déverbal d'émonder, est attesté en 1214 en latin médiéval (esmunda), puis sous la forme esmonde (1557) ; le mot désigne les branches coupées (1557 ; n. f. pl.), plus tard l'enlèvement des branches mortes ou inutiles (1870), et par métonymie un arbre dont on ne conserve qu'un bouquet à la cime (1890).
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ÉMONDEMENT n. m. (1538) « action d'émonder » est rare.
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ÉMONDEUR, EUSE n. (1542, esmondeur), « personne qui émonde », signifie au figuré « personne qui épure un texte » (1857, Sainte-Beuve).
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ÉMONDAGE n. m., attesté une première fois en 1572 et repris en 1829, synonyme d'émonde et d'émondement, s'emploie aussi au figuré (XIXe s.).
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ÉMONDOIR n. m. (1873, suffixe -oir) désigne un outil servant à émonder.
❏ voir
IMMONDE.
ÉMOTIF, ÉMOTION → ÉMOUVOIR
ÉMOULU, UE adj. vient (v. 1120, esmulu) du participe passé du verbe ÉMOUDRE (tr.) qui est attesté sous les formes esmoldre (1160-1174), esmoudre (XIIIe s.) puis sous la forme actuelle en 1636. Émoudre représente l'aboutissement du latin populaire °exmolere « aiguiser sur une meule », réfection du latin impérial emolere « moudre entièrement », de ex- et molere (→ émolument, moudre) ; il a conservé son sens étymologique d'« aiguiser sur une meule » mais est d'un emploi rare.
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Émoulu s'est employé, jusqu'au XVIIe s., avec le sens technique de « qui est aiguisé à la meule » (en parlant d'une lame), sorti d'usage, mais conservé dans la locution se battre à fer émoulu, d'emploi littéraire.
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Le mot s'emploie couramment au figuré, dans la locution être frais, fraîche émoulu(e) de « être récemment sorti de » (1548).
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Du verbe émoudre dérivent des termes techniques et peu usités : ÉMOULEUR, EUSE n. (1313), formé par suffixation (-eur) sur le participe passé du verbe, « artisan qui aiguise les instruments tranchants », et le nom d'action ÉMOULAGE n. m. (1611, esmoulage).
❏ voir
RÉMOULEUR.
1 ÉMOUSSER v. tr. est un dérivé (1575) de l'adjectif mousse « qui n'est pas aigu, tranchant », peut-être issu du latin populaire °muttius, de même radical que mutilus « tronqué » (→ mutiler).
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Émousser est d'abord relevé au figuré pour « rendre moins vif, moins incisif », puis (av. 1593) « rendre moins coupant, moins aigu ».
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Le dérivé
ÉMOUSSEMENT n. m. (1641) s'emploie aussi au figuré (1851), comme le participe passé adjectivé
émoussé (une sensibilité émoussée).
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Quant à
1 MOUSSE adj., réfection (v. 1534) de
mosse (
XVe s.), il est toujours vivant, mais technique, au sens de « qui n'est pas pointu ou tranchant », et ne s'emploie guère qu'avec quelques substantifs, comme
ciseau, pointe, lame, en concurrence avec
émoussé.
ÉMOUSTILLER v. tr. est l'altération (1743) de amoustiller, d'abord attesté au participe passé amoustillé (1534, Rabelais ; 1611, amoustiller), dérivé de moustille « moût, vin nouveau » (attesté en 1573), lui-même dérivé de moust (→ moût).
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Le verbe est d'abord passif, dans être émoustillé (1534, être amoustillé) « avoir subi l'influence des propriétés du vin nouveau », « être excité ».
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Au XVIIIe s., émoustiller prend le sens (1743) de « mettre de bonne humeur, exciter à la gaieté » et par extension « mettre en excitation » (1839, Stendhal, émoustiller la jalousie).
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Le dérivé ÉMOUSTILLANT, ANTE adj. (1842, Sainte-Beuve), tiré du participe présent de émoustiller, s'emploie au propre (en parlant d'un vin) et au figuré.
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ÉMOUVOIR v. tr. apparaît sous les formes esmoveir (1080), esmouvoir (XIIIe s.), puis sous la forme actuelle au XVIe siècle. Le mot représente l'aboutissement du latin populaire °exmovere, réfection du latin classique emovere « remuer, ébranler », composé de ex- et movere « mettre en mouvement » (→ mouvoir).
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Le verbe est d'abord attesté (1080) avec le sens étymologique de « mettre en mouvement », qui ne subsiste que dans un emploi très littéraire.
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Le sens figuré et aujourd'hui courant de « troubler, porter à certains sentiments » apparaît dès le XIIe s. (v. 1170). De la valeur initiale d'émouvoir sont issus des sens tombés en désuétude : « faire naître, susciter (une querelle, un débat) » (1196), « faire sortir du calme, pousser au soulèvement » (XIIIe s.) et, en français classique, « agiter, troubler » (en parlant des fonctions organiques) [1673]. Au figuré, émouvoir se dit spécialement (émouvoir les sens) pour « éveiller l'érotisme » et, en parlant d'une émotion vécue sur le plan affectif, « toucher, plaire » (émouvoir qqn), d'où la locution émouvoir les pierres « toucher ce qui est réputé insensible ».
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Le participe passé
ÉMU, UE adj. (
XIIe s.) s'emploie surtout au sens psychologique du verbe, et entre dans la locution
cuisse de nymphe émue « d'une couleur rose tendre ».
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ÉMOUVANT, ANTE adj. (fin XVIe s.) signifie d'abord « qui meut, déclenche une action » et ne prend son sens moderne, « qui fait naître l'émotion », qu'au XIXe s. (1834) ; il est formé sur le participe présent du verbe.
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ÉMOTION n. f. a été dérivé (av. 1475) d'
émouvoir, d'après l'ancien et moyen français
motion « mouvement » (v. 1223), emprunté au latin
motio « mouvement » et « trouble, frisson (de fièvre) », lui-même dérivé de
movere (→ motion). D'abord usité avec le sens de « trouble moral »,
émotion s'emploie ensuite au sens de « mouvement », d'où spécialement (1512) celui de « trouble, sédition », valeur courante à l'époque classique, en particulier pour désigner un commencement de sédition (1690, Furetière) ; à l'époque classique, le mot s'est dit d'un état de malaise physique (1580) et du trouble suscité par l'amour (1645).
Émotion ne s'emploie plus aujourd'hui que pour désigner une sensation, agréable ou désagréable, considérée du point de vue affectif (1641).
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Le dérivé ÉMOTIONNER v. tr. (1823) se dit familièrement pour « toucher par une émotion », surtout au pronominal. Le verbe peut être antérieur, car l'adjectif ÉMOTIONNÉ, ÉE est attesté en Normandie dès le XIVe s. (1350, Du Pineau).
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En dérivent ÉMOTIONNABLE adj. (1870), d'emploi rare, et ÉMOTIONNANT, ANTE adj. (1890), d'emploi familier.
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Le verbe, comme ses dérivés, a été condamné dès la fin du XIXe s. par les puristes qui y voient un doublet inutile d'émouvoir.
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ÉMOTIONNEL, ELLE adj. (1870, Taine ; suffixe -el), « relatif à l'émotion », est un terme de psychologie.
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ÉMOTIF, IVE adj. est formé récemment (1877, Littré) par suffixation en
-if sur le radical du latin
emotum, supin de
emovere (→ émouvoir) ; emotive est attesté en anglais dès 1735 et a pu servir de modèle pour le français. L'adjectif est didactique pour qualifier ce qui est relatif à l'émotion, aux émotions
(choc, trouble émotif) ; puis il s'emploie couramment (1898) en parlant de personnes qui réagissent vivement aux émotions, d'où l'emploi substantivé :
un émotif, une émotive, notamment dans le vocabulaire de la psychologie.
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Le composé HYPERÉMOTIF, IVE adj. et n. (de hyper-), attesté en 1933 mais antérieur, est synonyme d'hypersensible.
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De l'adjectif dérive par suffixation ÉMOTIVITÉ n. f. (1877), probablement d'après l'anglais emotivity (1854) ; il désigne couramment la capacité à ressentir des émotions et spécialement, en psychologie, un des éléments essentiels du caractère (opposé à l'activité), d'où HYPERÉMOTIVITÉ n. f. (1926), plus courant que INÉMOTIVITÉ n. f. (1910) pour « indifférence affective ».