ÉPISCOPAL, ALE, AUX adj. est un emprunt (1er quart XIIIe s.) au latin chrétien episcopalis « concernant l'évêque », de episcopus, pris au grec episkopos qui a donné évêque*. Le mot, signifiant « qui surveille », puis « évêque », est composé de epi (→ épi-) et d'un dérivé de skopein « surveiller », qui se rattache à la racine indoeuropéenne °skep-, °skop- « regarder » (→ écueil, évêque, sceptique).
❏
Épiscopal est rare avant le XVIIIe siècle. Le syntagme Église épiscopale (1661) désigne l'Église anglicane, qui a conservé la hiérarchie (par opposition à Église presbytérienne*).
❏
Il a pour dérivé
ÉPISCOPALIEN, IENNE adj. (1822). On trouve dans le même sens, au début du
XVIIe s.,
épiscopaux nom masculin pluriel (1611).
◈
ÉPISCOPAT n. m. est un emprunt (1610) au dérivé latin chrétien
episcopatus « dignité d'évêque », « corps des évêques ». Le mot conserve le sens de « dignité d'évêque » (1610) et désigne à la même date le temps pendant lequel un évêque occupe un siège. Le second sens du latin, « ensemble des évêques », a été repris au
XVIIe s. (1662, Bossuet).
ÉPISODE n. m., d'abord episodie (XVe s.), forme utilisée jusqu'au début du XVIIe s., puis épisode (1637), est un emprunt au grec epeisodion « accessoire », qui a, comme terme de rhétorique, le sens de « partie du drame entre deux entrées du chœur » et, plus tard, celui d'« incident, digression, épisode ». Le mot grec est dérivé de epeisodos « action de s'introduire », composé de epi (→ épi-) et de eisodos « entrée », lui-même composé de eis « vers » et de hodos « chemin » et « voie, moyen », mot d'origine indoeuropéenne.
❏
Épisode désigne d'abord, au théâtre, une action accessoire rattachée à l'action principale, d'où l'emploi plus tardif dans d'autres domaines, roman, poésie, peinture, cinéma.
◆
Par extension, le mot se dit (av. 1696) d'un fait accessoire qui se rattache plus ou moins à un ensemble.
◆
Il s'emploie aussi avec le sens rhétorique (1660) en parlant du théâtre grec.
❏
Le dérivé ÉPISODIQUE adj. (1633) est d'usage littéraire appliqué à ce qui a les caractères de l'épisode ; il s'emploie couramment par extension pour « qui se produit de temps en temps ».
◆
Le dérivé ÉPISODIQUEMENT adv., attesté en 1826, est relativement courant.
ÉPISSER v. tr. est un emprunt (1516, espisser) au moyen néerlandais splissen, terme de marine signifiant « entrelacer les torons (de deux cordages) pour les assembler » ; la chute du l (on devrait avoir esplisser) s'expliquerait par un emprunt à une variante °spissen (Cf. bas allemand spiessen, de même sens).
❏
Le verbe a conservé le sens de l'étymon.
❏
De épisser dérivent ÉPISSURE n. f. (1677), courant en navigation, et ÉPISSOIR n. m. (1678 ; variante épissoire n. f., 1888).
ÉPISTÉMOLOGIE n. f. a été introduit assez récemment (1901) dans la traduction de l'Essai sur les fondements de la géométrie de Russell ; c'est un emprunt à l'anglais epistemology, formé pour traduire l'allemand Wissenschaftslehre « théorie de la connaissance », avec le grec epistêmê « science, connaissance », dérivé de epistanai « savoir », proprement « se tenir au-dessus de » et -logy (→ -logie).
❏
Le mot est introduit en français pour désigner l'étude critique des sciences, visant à déterminer leur valeur, leur origine logique et leur portée. Il est donné comme équivalent de philosophie des sciences par Meyerson (1907). L'épistémologie se constitue à un moment où ce n'est plus la philosophie qui donne son statut à la science, mais la science qui peut être l'objet de la philosophie. Ce moment correspond à une crise des fondements des mathématiques et de la physique, avec la théorie relativiste. Les contenus de l'épistémologie ont varié au cours du XXe s. ; tentant de répondre à la question « qu'est-ce que la science ? », l'épistémologie se heurte au problème de l'unité scientifique et à celui de l'unité des formes de la connaissance (y a-t-il rupture ou continuité entre la connaissance commune et la science ?). Au sens large, également repris de l'anglais pour désigner (1941) la théorie de la connaissance et de sa validité, l'emploi du mot a été critiqué. Le mot désigne en outre l'étude des processus psychiques de connaissance, notamment dans épistémologie génétique (Piaget, 1970).
❏
Les dérivés
ÉPISTÉMOLOGIQUE adj., attesté avant 1908,
ÉPISTÉMOLOGISTE n. (1918), concurrencé par
ÉPISTÉMOLOGUE (1941), sont usuels dans l'usage didactique.
■
ÉPISTÉMÉ n. f., adaptation graphique du mot grec (v. 1965 ; Cf. la variante épistémie), d'usage plus didactique encore, désigne l'ensemble des connaissances réglées à une époque ; il a été promu avec d'autres hellénismes (mathêsis, etc.) par Michel Foucault.
ÉPISTOLAIRE adj. et n. est d'abord un emprunt (1487, n. m.) au latin médiéval ecclésiastique epistolarium (v. 1100) « livre d'épîtres », dont il reprend le sens, disparu aujourd'hui (Cf. lectionnaire). Le mot représente ensuite un emprunt (1542) au bas latin epistolaris « relatif à la correspondance » et comme nom « secrétaire impérial », de epistolarius, dérivé de epistola « lettre missive » (→ épître).
❏
Épistolaire signifie « qui a rapport à la correspondance par lettres », d'où, dans le domaine littéraire, genre épistolaire (1839) et roman épistolaire.
◆
Au sens d'« auteur de lettres » (1622), le mot semble avoir disparu au XVIIIe siècle.
❏
Le dérivé
ÉPISTOLAIREMENT adv. (1845, Balzac) est rare.
◈
ÉPISTOLIER, IÈRE n., de même origine que
épistolaire nom masculin, a aussi désigné (v. 1250) un livre d'épîtres et (1505) celui qui lit l'épître ; c'est alors un emprunt au latin médiéval de même sens
epistolarius. C'est ensuite un dérivé savant (milieu
XVIe s.) du latin classique
epistola ou du français
épistole, nom féminin, « lettre » (emprunt au
XIIIe s. du latin), devenu archaïque.
Épistolier, mot vieilli au sens d'« écrivain qui pratique le genre épistolaire », s'emploie encore littérairement pour désigner une personne qui écrit beaucoup de lettres, mais il est stylistique et ironique.
ÉPITAPHE n. f. est emprunté (v. 1130, epitafe, n. m.) au bas latin epitaphium « inscription gravée sur un tombeau » et « support de cette inscription », qui reprend le grec epitaphios « relatif au tombeau », « funèbre », employé à propos d'éloges, de jeux, etc. ; ce mot est formé de epi « sur » (→ épi-) et de taphos « tombeau », que l'on rapproche de l'arménien dab-an « fosse, sépulture ».
❏
En français, épitaphe a d'abord repris le premier sens du latin, puis (v. 1530) le second.
ÉPITHALAME n. m. est un emprunt savant (1536) au latin impérial epithalamion, mot du grec tardif signifiant « chant nuptial », neutre substantivé de epithalamios « nuptial », dérivé de thalamos « chambre », mot sans étymologie connue.
❏
Le mot désigne un poème composé à l'occasion d'un mariage ; il est devenu didactique et rare avec l'abandon du genre.
ÉPITHÈTE n. f. est un emprunt savant (1517) au latin impérial epitheton, mot grec signifiant « chose ajoutée », d'où en grammaire « adjectif », et substantivation de l'adjectif epithetos. Ce mot est formé de epi « sur » (→ épi-) et de thetos « placé », adjectif verbal de tithenai « poser, placer », construit sur la base grecque the-, de la racine indoeuropéenne °dhe- « placer » que l'on retrouve dans de nombreuses langues indoeuropéennes, notamment dans le latin facere (→ faire). Épithète est masculin jusqu'au XVIIe siècle.
❏
Le mot désigne (1517) ce qu'on adjoint au nom ou au pronom pour le qualifier. Par extension, épithète se dit (XVIe s.) d'une qualification louangeuse ou injurieuse donnée à qqn.
❏
Le dérivé ÉPITHÉTIQUE adj. (1864) est d'emploi didactique et rare ; il est concurrencé par l'adjectivation (1901) de épithète.
L
ÉPÎTRE n. f. est issu (1174-1176, epistle) du latin epistola, epistula « lettre missive » et « épître en vers », emprunt au grec epistolê « ordre oral ou écrit, message, lettre », composé de epi (→ épi-) et d'un dérivé de stellein « envoyer ». Epistola avait aussi donné par emprunt épistole (→ épistolaire).
❏
Épître a d'abord le sens latin de « lettre missive », en parlant des Anciens (Épîtres de Cicéron). Puis, comme en latin chrétien (fin XIIe s., aspitle), il entre dans le vocabulaire religieux pour parler des lettres écrites par les Apôtres et réunies dans le Nouveau Testament (Épîtres de saint Paul, des Apôtres) ; par extension, dans la liturgie catholique, épître désigne une leçon lue à la messe, tirée des épîtres des Apôtres.
◆
Le mot reprend ensuite (1518-1519, Marot) le sens de « lettre en vers », genre littéraire.
ÉPIZOOTIE n. f. est un mot savant (1775, probablement antérieur) composé de épi-* et à partir du grec zôotês « nature animale », de zôon « être vivant, animal » (→ zoo-) d'après épidémie.
❏
C'est un terme didactique, désignant une épidémie qui frappe les animaux.
❏
Le dérivé ÉPIZOOTIQUE adj. est attesté avant le nom (1771) ; l'anglais epizootic est encore antérieur (1748).
L
ÉPLUCHER v. tr. est la contraction (1508, esplucher), d'abord écrite esplukier (fin XIIIe s.), de l'ancien verbe espeluchier (1194-1197), dérivé par préfixation en es- de peluchier « nettoyer (la vermine) » en parlant d'animaux (v. 1180, soi peluchier). Ce dernier est issu d'un latin populaire °piluccare (Cf. italien piluccare et catalan pellucar sous l'influence de pell « peau »), réduction d'une forme °pilucicare, venant elle-même de °pilucare (Cf. ancien provençal pelugar et peluche*). Ce mot populaire est dérivé du bas latin pilare « épiler » (qui a abouti à peler*), du latin classique pilus (→ poil).
❏
Le verbe signifie d'abord « nettoyer, en enlevant les parties inutiles » (1194-1197, espeluchier) ; dans ce sens, la forme esplucher est attestée en 1549 ; de là vient l'emploi technique (1508) « enlever les bourres, les pailles (d'une étoffe) ».
◆
Il s'emploie ensuite figurément (fin XIIIe s., esplukier) au sens d'« examiner attentivement avec une intention critique », repris avec la forme moderne avant 1613.
❏
Le dérivé
ÉPLUCHEUR, EUSE n. s'emploie d'abord au figuré (1555 ; av. 1553,
éplucheur de sacs « homme de loi zélé »), puis au propre (1611) une
ÉPLUCHEUSE n. f. désigne une machine à éplucher (1870).
■
Du verbe dérivent aussi ÉPLUCHEMENT n. m. (v. 1460), ÉPLUCHURE n. f. (1680 ; 1611, espluchure) le plus courant, concurrencé par pluches, familier, ÉPLUCHAGE n. m. (1755 ; 1864 au figuré), ÉPLUCHOIR n. m. (1680). Le composé ÉPLUCHE-LÉGUME n. m. (de légume) est attesté au XXe siècle.
■
ÉPLUCHETTE n. f. (1856), épluchette de blé d'Inde, désigne au Canada la fête au cours de laquelle on épluche les épis de maïs. C'est l'équivalent français de l'anglo-américain husking.
ÉPODE n. f. est un emprunt savant (1550, Ronsard) au latin impérial epodos, repris au grec epôıdos, terme de prosodie désignant la troisième partie d'une ode, et composé de epi (→ épi-) et de ôıdê « chant » (→ ode).
❏
Épode conserve le sens de l'étymon, puis désigne (1552, Rabelais) un couplet lyrique composé de deux vers inégaux et, par extension, un poème composé de distiques de ce genre.
❏ voir
AÈDE.
L
ÉPONGE n. f., qui adapte au XIIIe s. (esponge) les formes anciennes espoigne (v. 1220, en anglo-normand), espoinge (1249-1272) et s'écrit éponge en 1636, est issu du latin populaire °sponga, du latin classique spongia, d'où vient espoigne (v. 1220). C'est un emprunt au grec spongia, dérivé de spongos, représentant un mot d'une langue méditerranéenne, °sp(h)ongo- que l'on retrouve aussi dans des termes désignant le champignon, comme le latin fungus ou l'arménien sunk. La forme °sponga est peut-être due à un contact tardif avec spongos, par le commerce à Marseille des éponges venues des îles grecques.
❏
Le mot désigne d'abord la substance poreuse provenant d'un animal marin et qui a la propriété d'absorber les liquides (XIIIe s., esponge de mer), d'où au XIIIe s. le sens de « compresse ».
◆
Le second sens, métonymique (1502), concerne l'animal marin dont le squelette fournit la matière déjà appelée éponge.
◆
Les propriétés de l'éponge et ses usages expliquent les locutions figurées : passer l'éponge sur qqch. (1607 ; 1611, variante porter l'éponge), boire comme une éponge (1651), d'où une éponge « un grand buveur » (v. 1840), presser l'éponge « exploiter (qqn) » (1690). D'autres locutions de la langue classique ont vieilli, comme vouloir sécher la mer avec une éponge (1690) ou éponge à sottises (1691) « naïf qui croit tout ce qu'on lui dit », encore relevée au milieu du XIXe siècle.
◆
Au XVIIIe s., la métaphore de l'éponge est couramment utilisée en physique comme principe d'explication pseudo-scientifique ; Bachelard en a fait patiemment l'analyse.
◆
Par analogie de forme ou de fonction, éponge est employé en botanique (1702, éponge d'églantier).
◆
Tissu éponge se dit par analogie d'un tissu absorbant (1877). De là, le syntagme usuel serviette éponge.
◆
Le mot désigne en outre un objet analogue à l'éponge, en quelque matière que ce soit ; la rareté des éponges d'origine animale conduit à préciser aujourd'hui éponge animale, naturelle. En boxe (1901), par traduction de l'anglais to throw up the sponge (employé métaphoriquement dès 1877), jeter l'éponge signifie « abandonner le combat », d'où « abandonner la lutte ».
❏
Le dérivé
ÉPONGER v. tr., attesté en ancien français au figuré « purifier sa conscience » (v. 1223,
soi espungier) puis isolément en 1558
(spongier), signifie aujourd'hui et depuis le
XVIIIe s. « passer une éponge sur (qqch.) » (1755) et par extension « étancher (un liquide), essuyer » (1762). Le pronominal
s'éponger n'est attesté qu'en 1859.
◆
Le verbe a signifié par figure (mil.
XIXe s.) « absorber, réduire » : aujourd'hui il s'emploie spécialement (v. 1950) dans le domaine économique au sens de « supprimer, absorber (un excédent financier, une dette) ».
◆
En argot,
éponger a pris au
XXe s. le sens de « soustraire (de l'argent) » ; par une autre métaphore (
XXe s. : 1954 chez Le Breton), il signifie, en parlant d'une prostituée, « faire une passe avec (un client) ».
■
Le nom d'action ÉPONGEAGE n. m. (1877) est rare.
❏ voir
SPONGIEUX.
ÉPONYME adj. est un emprunt (1751) au grec epônumos « attribué comme surnom » ou « qui donne son nom à », composé de epi « sur » et de onoma « nom » (→ onomatopée, synonyme), qui correspond au latin nomen (→ nom).
❏
Terme didactique, éponyme signifie comme en grec « qui donne son nom à » (héros éponyme, magistrat éponyme).
❏
Le dérivé ÉPONYMIE n. f., attesté en 1870, est très rare.
ÉPOPÉE n. f. est un emprunt, attesté en 1675 par le Traité du poème épique de R. Le Bossu, au grec epopoiia « composition d'un récit en vers » et « épopée », composé de epos « parole » (qui désigne, au pluriel, la poésie épique) et de poiein « faire » (→ poème) ; epos, comme le latin vox (→ voix), se rattache à une racine indoeuropéenne °wekw - « parler ».
❏
Épopée désigne, comme l'étymon grec, un long poème en vers (ensuite aussi en prose) qui célèbre un héros ou un grand fait, mêlant l'histoire et la légende.
◆
Par extension (1835), le mot se dit d'une suite d'éléments historiques qui s'apparentent aux récits des épopées.
❏
ÉPOS n. m., mot grec emprunté, désigne de manière très didactique (milieu XXe s.) un discours poétique de nature narrative et historique, mis ensuite en forme dans l'épopée.
❏ voir
ÉPIQUE.
ÉPOQUE n. f. est un emprunt savant d'époque préclassique (1637, epoche) au grec epokhê « point d'arrêt », « période de temps, ère » et, en astronomie, « arrêt apparent d'un astre à son apogée ». C'est un composé de epi « sur » (→ épi-) et okhê « soutien, appui », de ekhein « tenir, avoir », mot d'origine indoeuropéenne.
❏
Époque reprend d'abord le sens d'« espace de temps » et désigne spécialement (1678-1680) une période historique marquée par des événements importants.
◆
Le mot se dit également (1678-1680), comme en grec, d'un point fixe et déterminé dans le temps, qui sert de départ à une chronologie, sens qui ne subsiste que dans la locution faire époque (1762). Cette valeur de « point d'arrêt » a été employée en logique, où époque signifiait (XVIIIe s.) « suspension d'un jugement » ; elle se conserve par l'emploi du mot en astronomie (1808) au sens de « lieu moyen (d'une planète) fixé pour un instant déterminé ».
◆
Par extension du premier sens, époque désigne couramment (fin XVIIIe s.) un moment déterminé de la vie d'une personne ou d'une société. Cette valeur se réalise dans plusieurs emplois : le mot se dit (1829) d'une période caractérisée par un style artistique (l'époque classique). Il est devenu un terme de géologie (XIXe s.) pour « division d'une période géologique » d'abord dans Les Époques de la nature chez Buffon (1778), puis en biologie. De la valeur biologique vient un euphémisme familier, devenu archaïque, les époques (d'une femme) « les règles » (1835), par exemple dans avoir ses époques.
◆
Spécialement, le mot s'emploie dans la belle époque « les premières années du XXe s. », célèbres pour l'état d'euphorie qui, selon les traditions, les caractérise.
L
ÉPOUSER v. tr. est issu (v. 1050, espouser) du bas latin sponsare « promettre en mariage, fiancer », itératif du classique spondere « promettre solennellement », vieux mot juridique et religieux qui se rattache à une racine indoeuropéenne °spend- « faire une libation, promettre » (→ répondre), que l'on retrouve dans le grec spendein et le hittite sǐpand- de mêmes sens.
❏
Épouser signifie d'abord « prendre pour époux, pour épouse », d'où plus tard s'épouser (1440-1475) et l'emploi absolu (v. 1640) « se marier ». Épouser (qqn) « unir par le mariage » (v. 1138) ne s'est pas maintenu ; épouser qqn « avoir des rapports avec lui » (v. 1155) est devenu un archaïsme.
◆
Par figure, ont été construites les locutions argotiques sorties d'usage : épouser la veuve « être pendu » (1610), puis « guillotiné » ; épouser une prison « être emprisonné » (XVIe s.) ; épouser la camarde « mourir » (1867), faux archaïsme du XIXe siècle.
◆
Par métonymie le verbe prend le sens de « recevoir (qqch.) en épousant qqn » ; on a dit épouser une dette au XVIe siècle.
◆
Épouser s'emploie par figure (1548) au sens de « s'attacher de propos délibéré à (qqch.) », comme embrasser, d'où aujourd'hui par extension (1965) « adopter (une technique, une invention) ». Depuis le XIXe s., le verbe est utilisé (1886) pour « s'adapter exactement à (une forme, un mouvement) ».
❏
Le participe passé substantivé
ÉPOUSÉ, ÉE, rare au masculin, s'est d'abord employé au féminin (1130-1140,
espousee) au sens de « fiancée du Christ » et, laïquement, de « personne qu'on va ou vient d'épouser » ; il est devenu archaïque. Il était entré dans des locutions,
être parée comme une épousée de village « avec mauvais goût » (1690),
marcher comme une épousée (1864 ; aux
XVIe et
XVIIe s.,
marcher en épousée) « lentement et avec gravité » ; ces expressions sont elles aussi archaïques.
■
Du verbe dérivent ÉPOUSEUR n. m. (XIVe s., espouseor, attestation isolée, puis 1665) souvent ironique (Don Juan est pour Sganarelle l'épouseur du genre humain) et ÉPOUSABLE adj. (espousable v. 1520).
◈
ÉPOUSAILLES n. f. pl. est issu (1160-1174,
espusailles) du latin classique
sponsalia « fiançailles », dérivé de
sponsus, participe passé de
spondere.
■
Le mot, désignant la célébration d'un mariage, n'est plus employé que par archaïsme ou par plaisanterie.
◈
Enfin,
ÉPOUX, ÉPOUSE n. est issu d'abord au féminin
espouse (
XIIe s.), après les formes
espus et
spuse (v. 1050), du latin classique
sponsus, sponsa et
sposus, sposa, participe passé de
spondere (voir ci-dessus).
■
Le mot s'emploie d'abord dans le vocabulaire religieux, époux (espoux, 1487) et épouse évoquant l'alliance entre Dieu et le peuple juif, d'où au XVIIe s. des locutions comme l'Époux céleste (1694), l'Époux de l'Église (1680) pour désigner Jésus-Christ et l'Épouse de Jésus-Christ (1680 ; 1553, l'Épouse) pour l'Église.
◆
Il désigne en même temps dans l'usage général, mais moins couramment que femme et mari, une personne unie à une autre par les liens du mariage (les époux « le mari et la femme », après 1650). C'est aujourd'hui un terme de droit ou littéraire, mais épouse est d'emploi courant lorsque femme est ambigu.
◈
COÉPOUSE n. f. désigne, en Afrique subsaharienne, une épouse d'un homme polygame, par rapport à ses autres épouses.
?
ÉPOUSTOUFLER v. tr., attesté en 1867, est un mot d'origine incertaine, relevé d'abord dans les dialectes de l'Ouest sous les formes du type époustifler ; c'est peut-être un dérivé de l'ancien français soi espo(u)sser « perdre haleine » (XIIe s.), issu du latin pulsare « pousser violemment » (qui a donné pousser, pulsation) avec une finale -tifler, -toufler peut-être sous l'influence de emmitoufler.
❏
Époustoufler, rarement utilisé à l'actif, signifie familièrement « jeter (qqn) dans l'étonnement » ; la finale moderne trahit peut-être l'influence de souffler.
❏
L'adjectif ÉPOUSTOUFLANT, ANTE, du participe présent, est attesté en 1915.
ÉPOUVANTER v. tr. est la réfection étymologique (v. 1120, espouventer) de s'espoer (1080), forme issue du latin populaire °expaventare (Cf. italien spaventare, l'espagnol aspaventar) formé à partir de expavens, participe présent du latin classique expavere « craindre, redouter ». Ce verbe vient de ex- intensif et de pavere « avoir peur, être troublé » (→ peur ; épave).
❏
Épouvanter signifie d'abord « frapper d'horreur, de terreur ». C'est à partir du XVIIe s. que le verbe, par extension, s'emploie au sens de « causer de vives appréhensions », puis de « surprendre fortement » (av. 1613 ; 1666, au pronominal) [Cf. choquer]. Le verbe a conservé une valeur très forte, malgré son ancienneté, mais il est assez littéraire.
❏
Il n'en va pas de même pour certains de ses dérivés.
ÉPOUVANTABLE adj., d'abord « qui cause de l'épouvante » (v. 1120,
espowentable), signifie par hyperbole (1663) « très mauvais, inquiétant ». Puis l'idée superlative subsiste surtout, avec le sens d'« excessif, extrême ».
■
En dérive ÉPOUVANTABLEMENT adv. « d'une manière effrayante » (v. 1120) et (1690) « d'une manière excessive ».
◈
ÉPOUVANTEMENT n. m. (1611), réfection de
espoentement (1
re moitié
XIIe s.) « action d'épouvanter », signifie par métonymie « ce qui provoque l'épouvante » ; sorti d'usage, il a eu une valeur intensive par rapport à
épouvante.
◈
ÉPOUVANTAIL n. m. désigne (1180-1190,
espoëntaus) un objet placé dans les champs ou les jardins pour effrayer les oiseaux, d'où la locution sortie d'usage,
c'est un épouvantail à chènevière « une personne moins redoutable qu'elle ne le paraît ».
◆
Par figure (1556, Ronsard), le mot signifie « ce qui inspire de vaines ou excessives terreurs ». Par analogie,
épouvantail se dit (
XIXe s.) d'une personne habillée ridiculement.
◈
ÉPOUVANTE n. f. (av. 1571,
espavente ; forme moderne, 1592) a suivi la même évolution sémantique que le verbe et est demeuré très fort. On disait à l'époque classique
prendre l'épouvante (1639) « perdre son sang-froid sous l'effet d'une grande frayeur ».
ÉPRENDRE v. tr. est dérivé (1080, esprendre) de prendre* par préfixation.
❏
Éprendre a signifié « commencer à brûler (qqch.) » en parlant du feu. À partir de la première moitié du XIIe s., le participe passé adjectivé ÉPRIS, ÉPRISE (v. 1120) puis s'éprendre v. pron. ont le sens d'« (être) saisi par (un sentiment, une passion) », aujourd'hui littéraire. Le pronominal reste courant dans la construction (1643) s'éprendre de (qqn) « devenir amoureux de », et l'adjectif épris s'emploie encore, comme synonyme élégant de amoureux.