EXCOMMUNIER v. tr., qui apparaît dans la première moitié du XIIe s. alors écrit escumunier (v. 1120), est emprunté au latin ecclésiastique excommunicare « mettre hors de la communauté religieuse », de ex- et communicare « mettre ou avoir en commun » (→ communiquer), de communis (→ commun). Le verbe latin excommunicare avait abouti en ancien français à escomengier (v. 1170), dont dérivait escomengement.
❏
La forme excommunier, adaptée du latin d'après communier, est d'abord attestée au sens isolé de « profaner, violer » (v. 1120), puis avec le sens moderne de « rejeter de l'Église » (1160-1174).
◆
Le verbe s'emploie par analogie dès le XIIIe s. (1225-1230) pour « exclure, rejeter » (qqn, qqch.).
❏
Le
participe passé EXCOMMUNIÉ, ÉE adj. (
XIIIe s.) s'est employé aussi pour « sacrilège » au
XVIe siècle.
■
EXCOMMUNICATION n. f., sous les formes escomination (1160), escomenacïon (1175) plus proche du radical du verbe, et escomunication (v. 1195), est un emprunt au latin ecclésiastique excommunicatio « exclusion de la communauté chrétienne », de excommunicare ; le nom a suivi la même évolution sémantique que le verbe.
■
Du radical commun au verbe et au nom dérivent les termes didactiques EXCOMMUNICATOIRE adj. (1456) et EXCOMMUNICATEUR, TRICE adj. et n. (1910, Brunetière).
❏ voir
SCOUMOUNE.
EXCORIER v. tr., relevé en 1532 chez Rabelais mais probablement antérieur (Cf. son dérivé), est un emprunt au bas latin excoriare « enlever le cuir », « écorcher la peau », de ex- et du classique corium (→ cuir).
❏
Le verbe, d'emploi didactique, a repris le sens étymologique d'« écorcher (la peau) légèrement ».
❏
EXCORIATION n. f. (1377, excoriacion) est emprunté au dérivé latin médiéval excoriatio, terme de médecine (v. 1200).
EXCRÉMENT n. m., relevé en 1534 chez Rabelais, est un emprunt savant au latin impérial excrementum « déchet », et « excrétion, déjection », dérivé de excretus. Cet adjectif est le participe passé du latin impérial excernere « passer au tamis » et, dans la langue médicale, « évacuer », de ex- et cernere « passer au crible » et « distinguer ». Ce dernier se rattache à une racine indoeuropéenne °krē-, variante de °krei- qui exprime l'idée de « cribler » ; on la retrouve dans le latin cribrum (→ crible), crimen (→ crime), certus (→ certes), le grec krisis (→ crise), etc.
❏
Le mot a d'abord désigné l'ensemble des matières évacuées du corps (matières fécales, urine, mucus nasal, sueur), puis son emploi s'est restreint au sens de « matières fécales ».
◆
L'idée de « déchet » explique l'emploi figuré classique pour désigner qqn ou qqch. de vil et méprisable (av. 1628, excrément de la terre).
❏
Le dérivé
EXCRÉMENTEUX, EUSE adj. (1555) est archaïque.
■
EXCRÉMENTIEL, ELLE adj. (1561, excremenciel) est didactique.
❏ voir
EXCRÉTION.
EXCRÉTION n. f. est un emprunt (1534, Rabelais) au bas latin excretio « criblure », dérivé de excretus participe passé du latin impérial excernere (→ excrément).
❏
Ce terme de physiologie désigne d'abord l'action par laquelle les déchets de l'organisme sont rejetés au-dehors puis, par métonymie (1792), les déchets rejetés, reprenant le sens large d'excréments, spécialisé pour « matières fécales ».
❏
Le radical de
excrétion a fourni les termes didactiques
EXCRÉTOIRE adj. (1536),
EXCRÉTEUR, TRICE adj. (1560) et
EXCRÉTER v. tr. (1836), usuels en physiologie.
◈
EXCRETA n. m. pl. reprend un mot latin, participe passé neutre de
excernere, employé en physiologie (1814, Nysten) pour désigner les substances rejetées directement ou indirectement de l'organisme.
EXCROISSANCE n. f. représente une adaptation (1314), sous l'influence de croissance, du bas latin excrescentia, dérivé de excrescere « croître en s'élevant », formé de ex- intensif et de crescere (→ croître). Des variantes ont été calquées sur le latin : escressence, excressence (1314), excrescence (XVIIe -XVIIIe s.).
❏
D'abord relevé comme terme de médecine au sens de « petite tumeur superficielle (de la peau) », le mot se dit ensuite par analogie (1770) d'une proéminence qui apparaît à la surface de qqch. Il s'emploie aussi au figuré (XIXe s.) pour « développement extérieur », la paronymie avec croissance jouant alors un rôle.
EXCURSION n. f., qui apparaît vers 1500, est un emprunt au latin excursio « voyage », « incursion (dans un pays ennemi) », « irruption », dérivé de excursum, supin de excurrere « sortir en courant » et « s'avancer », « parcourir », de ex- et currere (→ courir).
❏
Excursion signifie d'abord, dans un contexte militaire, « irruption dans un pays ennemi » ; encore employé en ce sens au
XIXe s., le mot a été supplanté par
incursion.
■
Rare jusqu'au XVIIIe s., il est alors repris en mécanique (1741), en astronomie (1771), puis entre dans l'usage courant et désigne (1775) l'action de parcourir une région pour l'explorer, sens qui s'affaiblit au cours du XIXe s. pour correspondre à « longue promenade », « petit voyage ».
◆
Le mot est employé au figuré à la même époque avec le sens de « digression » (1798, Académie) qui a vieilli. Avec la valeur de « mouvement d'un élément hors de sa position de repos », excursion s'emploie ensuite en physiologie (1840 ; excursion diaphragmatique) et en physique (1851, Cournot).
❏
Les dérivés
EXCURSIONNISTE n. (1852, T. Gautier) et
EXCURSIONNER v. intr. (1871, Hugo), ce dernier vieilli, viennent du sens de « longue promenade ».
◈
EXCURSUS n. m., latinisme dérivé de
excurrere, désigne un développement verbal qui consiste en un commentaire d'un passage célèbre.
EXCUSER v. tr. a été emprunté dans la première moitié du XIIe s. (v. 1120, escuser) au latin excusare, proprement « mettre hors de cause », d'où « justifier », « alléguer comme excuse », formé de ex- et de causa (→ cause, chose).
❏
Le verbe apparaît en français avec le sens de « justifier (qqn, une action) en alléguant une explication, une défense » d'où « décharger (qqn) d'une accusation, en admettant des motifs qui justifient la faute » (v. 1190). Excuser qqch. à qqn « l'excuser auprès de lui » s'est dit à l'époque classique (1670).
◆
Le verbe s'est aussi employé (v. 1274) pour « se mettre à l'abri d'une sanction », puis « servir d'excuse » en parlant de choses (1283).
◆
S'excuser a signifié « se dispenser, refuser » (XVIe s.), d'où le sens du transitif (1668, Racine) « accepter de qqn les raisons qu'il invoque pour se dispenser de faire qqch. ». Excusez-moi, vous m'excuserez sont des formules de politesse usitées quand on veut contredire qqn ou manifester son regret de causer quelque gêne, etc. ; s'excuser « présenter ses excuses », attesté en 1690, ne se répand qu'à partir du XIXe siècle. Les puristes en matière de politesse recommandent d'employer je vous prie de m'excuser et d'éviter le pronominal je m'excuse, usuel et employé par dérision pour « c'est pourtant vrai », avant une attaque ou une critique. La formule de Coluche, je m'excuse, mais merde !, met cet usage en dérision.
◆
On emploie en français du Québec excusez !, là où on dirait pardon !, en français d'Europe.
◆
En France, l'expression familière excusez du peu (1761) exprime ironiquement l'idée de « beaucoup ».
❏
EXCUSABLE adj. est emprunté (
XIIIe s.) au latin impérial
excusabilis « qu'on peut excuser », dérivé de
excusare.
◆
Il a pour dérivé le terme de droit
EXCUSABILITÉ n. f. (1873).
■
Le contraire INEXCUSABLE adj. est emprunté (1402) au dérivé latin inexcusabilis ; il est relativement plus courant que le simple, notamment dans l'emploi étendu pour « moralement sans excuse », comme intolérable ou inacceptable.
◆
INEXCUSABLEMENT adv. (1545) est rare.
◈
EXCUSE n. f. a suivi une évolution sémantique parallèle à celle du verbe dont il provient. Attesté au
XIVe s., le mot désigne une raison alléguée pour se défendre d'une accusation, pour expliquer ou atténuer une faute. Il est très usuel au pluriel (1690) dans les locutions
faire, présenter ses (des) excuses (à qqn), recevoir des excuses (de qqn), etc. Si
faire excuse à qqn est sorti d'usage,
faites excuse est vivant dans l'usage populaire, comme
demander excuse (1740) « s'excuser » (sous l'influence de
demander pardon).
◆
Le mot se dit aussi depuis le milieu du
XVIe s. (av. 1549) du motif que l'on invoque pour ne pas faire qqch., spécialement en droit et dans
mot d'excuse (par métonymie,
une excuse). De ce sens viennent les locutions
être sans excuse, donner, prendre pour excuse.
■
Au tarot, l'excuse désigne la carte imprenable qui permet de ne pas jouer la couleur ou l'atout demandé.
EXEAT n. m. inv. est un emprunt (1622) au latin exeat « qu'il sorte », 3e personne du subjonctif présent de exire « sortir », de ex- et ire, itum (qui a fourni le futur de aller*), rattaché à une racine indoeuropéenne °ei-, °i- « aller ».
❏
Exeat s'est d'abord employé comme formule de droit ecclésiastique pour « autorisation donnée par l'évêque à l'un de ses prêtres d'exercer son ministère dans un autre diocèse ».
◆
Le mot s'est employé dans le vocabulaire général (mil. XVIIe s.) pour « permission de sortir », à propos d'un élève, d'un malade dans un hôpital, d'où donner son exeat à qqn « le congédier » (1865), sorti d'usage.
EXÉCRER v. tr. est emprunté (1495) au latin exsecrari « maudire, charger d'imprécations », de ex- « hors de » et sacer qui qualifie la personne ou la chose qui ne peut être touchée sans être souillée ou sans souiller, d'où le double sens de « sacré » et « maudit ». Sacer (→ sacré) s'oppose à profanus « qui est devant, c'est-à-dire en dehors du temple », domaine de la vie courante des hommes.
❏
Le verbe est introduit à la fin du XVe s. avec le sens étymologique d'« avoir en horreur, abominer », aujourd'hui littéraire.
◆
Il se dit ensuite, par affaiblissement, pour « ne pas aimer (qqn), avoir de l'antipathie pour (qqn) » (1822, Hugo), également en parlant d'une chose.
❏
Le dérivé
EXÉCRATEUR n. m. « celui qui exècre (qqn ou qqch.) » (1886, Bloy) est rare.
■
EXÉCRATION n. f. (XIIIe s.) est emprunté au dérivé latin exsecratio « serment (accompagné d'imprécations en cas de parjure) » et « malédictions », antonyme de consecratio (→ consécration). D'abord attesté avec un sens général : « sentiment d'horreur extrême » (pour ce qui est digne de malédiction), le mot s'emploie au XVIe s. avec le sens étymologique de « malédiction (en cas de faux serment), imprécation » (1559, Amyot), emploi sorti d'usage.
◆
Au XVIIIe s., exécration est employé en théologie avec le sens de « retour d'un objet consacré à l'état profane » (1752, Trévoux).
◈
EXÉCRABLE adj., emprunt au dérivé latin impérial
exsecrabilis « abominable, que l'on doit exécrer », signifie couramment (av. 1380, mais rare avant le
XVIIe s.) « extrêmement mauvais ».
◆
Dans un emploi aujourd'hui littéraire, il se dit à partir du
XVIe s. (1530) de ce que l'on doit avoir en horreur, en aversion.
■
De l'adjectif dérivent EXÉCRABLEMENT adv. (XVe s.) et EXÉCRABILITÉ n. f. (XVIe s.), mots littéraires et rares.
EXÉCUTION n. f. est un emprunt du XIIIe s. (1263-1265, execucion ; 1283, avec la graphie moderne) au latin classique exsecutio, -onis « achèvement, accomplissement », « poursuite judiciaire », dérivé de exsecutum, supin de exsequi « suivre jusqu'au bout », d'où « accomplir », « achever », « poursuivre en justice ». Ce verbe est formé de ex- et de sequi « suivre » (sequere en bas latin ; → suivre).
❏
En français, le nom reste longtemps un terme de droit désignant d'abord la fonction, le mandat d'exécuteur testamentaire, d'où le sens juridique de « mise à fin de jugement, d'un acte » (1283, metre le testament a execution).
◆
Il s'emploie ensuite par extension (XIVe s.) pour désigner la saisie et mise en vente des biens d'un débiteur, par décision de justice (exécution d'un débiteur) et aussi, en relation avec exécuter, dans metre a secussion (à exécution) « faire mourir, anéantir » (v. 1330). De là vient l'emploi de exécution criminelle (1540) ou exécution « mise à mort (d'un condamné) » d'où « mise à mort en dehors de toute procédure légale ».
◆
Le sens d'« action d'effectuer (qqch.) », lié au verbe exécuter (ci-dessous), passe dans le vocabulaire général au XIVe s., d'où mettre à exécution et le sens d'« action effective », par opposition à projet ; homme d'exécution « d'action » (XVIe s.) encore employé au XIXe s., est sorti d'usage. Exécution, senti comme dérivé de exécuter, désigne aussi (1680) le fait d'exécuter d'après une règle, un plan et la manière de faire un ouvrage, spécialement en musique (l'exécution d'une sonate).
◆
Par figure du sens de « mise à mort », exécution se dit (XIXe s.) d'une atteinte malveillante à la considération (de qqn) ; par jeu sur les sens du mot, il désigne enfin l'interprétation exécrable d'une pièce musicale.
❏
Deux mots sont formés à partir du radical de
exécution.
■
EXÉCUTIF, IVE adj. est attesté au XIVe s. (Oresme) au sens de « relatif à l'exécution des lois, qui exerce le pouvoir de mise en œuvre des lois », mais le mot est rare avant le XVIIIe s. (1764, Rousseau), l'expression pouvoir exécutif et la substantivation l'exécutif, n. m., datant de la Révolution (1792). Par extension, l'adjectif qualifie un organisme qui exerce le pouvoir exécutif. Dans ces emplois, exécutif est opposé à législatif et à judiciaire depuis la théorie des trois pouvoirs de Montesquieu.
◈
EXÉCUTER v. tr. signifie (1351) « mener à accomplissement » et en droit (v. 1355) « rendre effectives (les dispositions d'un jugement, etc.) ». Parallèlement, le verbe s'emploie (1374) au sens de « faire mourir (qqn) conformément à une décision de justice ».
◆
Les emplois extensifs pour « réaliser », spécialement « faire (un ouvrage) d'après un plan, un devis » (1690) et figurés sont parallèles à ceux d'
exécution, ce substantif à partir de la fin du
XVIIe s. étant senti comme dérivé du verbe.
Exécuter une œuvre musicale est attesté au
XVIIIe siècle (1761).
■
De exécuter dérivent deux mots. EXÉCUTABLE adj., d'abord terme de droit (v. 1435), signifie d'après exécuter « qui peut être accompli » (1835). Il a pour contraire INEXÉCUTABLE adj. (une fois en 1579, repris à partir de 1695) « impossible à exécuter, à accomplir ».
■
EXÉCUTANT, ANTE n. (XIVe s., E. Deschamps) désigne une personne qui exécute (un ordre, une œuvre, etc.) et, spécialement (1767, Rousseau), « qui exécute sa partie dans un ensemble musical ».
◈
À partir de
exécution ont été formés
INEXÉCUTION n. f. (av. 1606, puis 1620, d'Aubigné), terme de droit qui est passé quelquefois dans le vocabulaire général, et
NON-EXÉCUTION n. f. (déb.
XIXe s.), resté dans le vocabulaire juridique.
◈
EXÉCUTEUR, TRICE n. et adj. est emprunté (v. 1200) au dérivé latin impérial
exsecutor « celui qui accomplit », « magistrat chargé de faire exécuter une sentence » et, en latin médiéval (
XIIe s.), « exécuteur testamentaire ».
■
Le nom est sorti d'usage au sens initial de « personne qui exécute (un ordre, etc.) » ; il est alors remplacé par exécutant.
◆
Il désigne ensuite en droit la personne qui accomplit les dernières volontés d'un testateur (1275-1280) ; exécuteur d'un testament, sorti d'usage, a été remplacé par exécuteur testamentaire. Le nom, au masculin, d'abord sous la forme excecuteur de la justice (1376) puis exécuteur (XVIe s.), se dit pour « bourreau ».
■
EXÉCUTOIRE adj. et n. m., emprunté au dérivé bas latin exsecutorius, dérivé du latin classique exsecutum, supin du verbe, est attesté en 1337 comme nom masculin et en 1355 comme adjectif.
EXÉGÈSE n. f. est un emprunt savant (1705) au grec exêgêsis « explication », dérivé de exêgeisthai « conduire » et « expliquer », de ex- et hêgeisthai « marcher devant », « conduire en qualité de chef » (→ hégémonie), verbe qui se rattache à une racine indoeuropéenne °sāg- « avoir du flair », comme le latin sagax (→ sagace), praesagium (→ présage).
❏
Exégèse désigne d'abord l'interprétation de la Bible d'où, absolument en ce sens, l'Exégèse.
◆
Le mot s'est dit ensuite de l'interprétation d'un texte non religieux puis par extension (XXe s.) a pris le sens de « commentaire, développement détaillé ».
❏
Le grec
exêgeisthai a fourni
exêgêtês « qui explique (dirige ou interprète les oracles) », auquel est emprunté
EXÉGÈTE n. m. (1732, Trévoux).
■
EXÉGÉTIQUE adj. (1694) est emprunté à exêgêtikos « qui expose en détail », dérivé de exêgêtês, peut-être par le bas latin exegetice, -es, « art d'expliquer ».
EXÉMA, EXÉMATEUX → ECZÉMA
EXEMPLE n. m. a été emprunté au milieu du XIe s., sous la forme esample relatinisée au XIIe s., au latin exemplum « objet mis à part, pour servir de modèle », d'où « échantillon », « reproduction, copie » et « modèle, chose exemplaire ». Exemplum dérive de eximere, au supin exemptum (→ exempt), « supprimer », « retirer », de la famille de emere, emptum, et signifiant à l'origine « prendre », puis en latin classique « prendre contre de l'argent, acheter ». Emere entre dans de nombreux préfixés, comme perimere (→ périmer), praesumere (→ présumer) ; il a des correspondants dans plusieurs langues indoeuropéennes : le vieux slave ima « je prends », le gotique niman « prendre » (allemand nehmen), etc.
❏
Exemple est d'abord attesté au sens de « nouvelle, bruit », puis s'emploie (1080) pour désigner un récit qui tire des faits un enseignement moral ; ces sens ne se sont pas maintenus.
Exemple est parfois au féminin en ancien français (1080), peut-être d'après
exampla, pluriel neutre ; le féminin subsiste jusqu'au
XIXe s. dans
une exemple d'écriture.
◆
Dès le début du
XIIe s., le nom se dit (v. 1119) d'un fait servant à appuyer une assertion et désigne (v. 1160) une leçon que l'on peut tirer d'une situation, d'où l'emploi pour « récit didactique » (1180, Marie de France). Par extension,
exemple se dit en parlant d'une personne digne d'être imitée (fin
XIIe s.) puis à partir de la fin du
XIVe s. s'emploie pour désigner un châtiment considéré comme pouvant servir de leçon (1381) et, par métonymie, la leçon qu'on en tire, puis à propos d'une personne dont le sort malheureux peut donner à réfléchir (1643). Il est maintenant surtout utilisé avec cette acception dans des expressions comme
faire un exemple, pour l'exemple.
◆
Un autre sens de
pour exemple « pour illustrer par un exemple » est relevé chez Montaigne, la locution adverbiale de même sens
par exemple est devenue très courante en français moderne, au
XVIIe s. (elle est dans Furetière, 1690).
Par exemple !, issu (1627) par ironie de
par exemple, marque familièrement l'étonnement, la surprise ; la locution adverbiale est ensuite employée, dans l'usage familier, pour marquer l'opposition.
■
Exemple désigne spécialement (1653) le passage d'un texte, une phrase, etc. que l'on cite à l'appui d'une explication grammaticale, pour illustrer l'emploi d'un mot (exemple de grammaire).
❏
EXEMPLIFIER v. tr., didactique, est dérivé en 1365 (Oresme) d'après les verbes latins en
-ificare. Sorti d'usage, le verbe a été repris (mil.
XXe s.) dans l'usage didactique, alors par emprunt à l'anglais
to exemplify.
■
Le nom d'action EXEMPLIFICATION n. f., dérivé du verbe, est attesté au XIVe s. au sens d'« action de donner l'exemple », aujourd'hui pour « action d'illustrer d'exemples » (attesté en 1949).
■
Plusieurs mots sont empruntés à des dérivés de exemplum.
■
1 EXEMPLAIRE adj., emprunt au latin classique exemplaris « qui sert de modèle », s'applique (1240-1280) à ce qui peut servir de modèle, spécialement en philosophie (cause exemplaire « modèle parfait », du latin médiéval forma exemplaris, v. 1200). L'adjectif signifie ensuite (v. 1570) « dont l'exemple doit servir d'avertissement » (punition exemplaire), puis « qui peut ou doit servir d'exemple », d'où « remarquable en son genre ».
◆
En dérivent EXEMPLAIREMENT adv. (fin XVe s.) et EXEMPLARITÉ n. f. (1573 ; v. 1361 in G. L. L. F. ; Cf. le latin médiéval exemplaritas, v. 1270).
◈
2 EXEMPLAIRE n. m. est emprunté au bas latin
exemplarium « copie exemplaire » et « original, type » (latin classique
exemplar).
■
Le nom est attesté (1119, essemplaire) au sens de « récit, narration », disparu, puis de « modèle à suivre » (1170), déjà archaïque au milieu du XVIIIe siècle ; il est aussi sorti d'usage en philosophie. En général, le mot a été remplacé par exemple.
■
Exemplaire désigne ensuite (1216) un écrit, un livre ; ce sens disparaît, mais le mot se dit depuis le XVIe s. (1580, Montaigne) de chacun des objets reproduisant un type commun, en parlant de livres, puis de médailles, de photographies, etc.
◆
Exemplaire entre ensuite dans le vocabulaire scientifique (1808, Cabanis), se disant de chacun des individus d'une même espèce ; par extension, il s'emploie (1870) en parlant de choses ou d'êtres semblables.
◈
EXEMPLATIF, IVE adj., fourni (av. 1925) à partir de
exemplum, terme administratif en Belgique (employé aussi dans l'ex-Congo belge), signifie « relatif à l'exemple »
(à titre exemplatif), « qui constitue un exemple ».
Peine exemplative, pour l'exemple.
■
EXEMPLIER n. m., « collection d'exemples », se dit dans un contexte didactique (1990).
EXEMPT, EMPTE adj. et n. m. est un emprunt (1260, exant, adj. ; XVe s., exent) au latin classique exemptus, participe passé passif de eximere « supprimer », « retirer », composé de ex- (→ 1 ex-) et de emere, emptum, à l'origine « prendre » puis « prendre contre de l'argent, acheter » en latin classique (→ exemple). On relève au XIIe s. le latin médiéval exemptus adjectif « affranchi de l'autorité épiscopale » (1171-1172).
❏
D'abord adjectif,
exempt (toujours suivi de la préposition
de) se dit en droit d'une personne qui est affranchie, dispensée d'une charge ou d'un service commun. Au
XVIe s., le mot qualifie figurément quelqu'un qui n'est pas sujet à certains défauts ou tendances (v. 1530, Marot), puis s'emploie pour « à l'abri de » (1580, Montaigne) et équivaut à « sans ».
Exempt de, au sens de « qui est affranchi d'un soin inutile » (
XVIIe s.), est sorti d'usage.
■
Exempt se substantive au début du XVIIe s., désignant (1617, d'Aubigné, un ezent de gardes) un sous-officier de cavalerie exempt du service ordinaire et qui commandait en l'absence du capitaine ou de ses lieutenants, puis un officier de police commandant une escouade de gardes (1665, Molière), sens disparus au XIXe siècle.
◆
Le nom prend au XVIIe s. le sens général de « personne qui est délivrée de certaines charges » (1690, Furetière) et, spécialement, se dit d'un ecclésiastique non soumis à la juridiction ordinaire.
❏
Le dérivé
EXEMPTER v. tr. (1320,
essenter), dont l'évolution sémantique est parallèle à celle d'
exempt, s'emploie spécialement dans le domaine militaire pour « dispenser (d'un service) » (1848) ; par extension, il se dit (
XVIIe s.) dans le style soutenu pour « dispenser, mettre à l'abri ».
◈
EXEMPTION n. f., emprunt au latin
exemptio « action d'ôter », dérivé du supin de
eximere, est attesté en 1330 avec le sens général et courant de « dispense (d'une charge, d'une obligation) ».
❏ voir
EXEMPLE, PRÉEMPTION, RÉDEMPTION.
EXEQUATUR n. m. inv. est un mot latin, introduit au XVIIIe s. en droit (1752, Trévoux) et signifiant proprement « qu'il exécute, qu'on exécute », ex(s)equatur est la troisième personne du singulier du subjonctif présent du verbe exsequi, « poursuivre en justice » (→ exécution).
❏
Le mot désigne une décision par laquelle un tribunal rend exécutoire en France un jugement ou un acte étranger.
◆
Exequatur désigne ensuite (1781) en droit international un décret par lequel le gouvernement d'un pays autorise un consul étranger à remplir ses fonctions dans ce pays.
L +
EXERCER v. tr., d'abord sous la forme essercier (1121-1134), refaite d'après le latin aux XIIIe -XIVe s., est issu du latin exercere « poursuivre, chasser » et « agiter, ne pas laisser en repos » puis, par extension, « mettre à l'épreuve, à la torture » et encore « travailler », et avec un complément de chose « pratiquer, exercer ». Exercere est formé de ex- et de arcere, verbe rare au sens de « contenir, maintenir », plus courant pour « écarter » ; en grec l'équivalent de arcere est arkein « écarter » (→ autarcie).
❏
Exercer est d'abord attesté au sens de « pratiquer (une discipline) », sans idée de formation méthodique, emploi courant à l'époque classique, littéraire aujourd'hui.
◆
Au pronominal, le verbe signifie ensuite (XIIIe -XIVe s., soi exercer) « se former, s'éduquer par des exercices appropriés » ; l'emploi transitif correspondant apparaît plus tard (XVIe s.). Au XIVe s., il correspond comme transitif à « se consacrer à (une activité professionnelle, une charge) » (1340) d'où l'emploi absolu, en parlant des professions libérales (cet avocat exerce encore). Le verbe a aussi, par extension du premier emploi, le sens de « faire agir (ce qui est en sa possession, à sa disposition) » (fin XIVe s.) [exercer un pouvoir, un droit], d'où « mettre en usage (un moyen d'action) » (1548).
◆
Exercer s'est employé au sens latin (1551) de « mettre à l'épreuve », aujourd'hui archaïque, et par extension pour « tourmenter », sorti d'usage.
❏
EXERCÉ, ÉE adj. « devenu habile à force d'exercices » (1679) a pour contraire
INEXERCÉ, ÉE adj. (1794, Pougens), mot rare, sinon virtuel.
◈
EXERCICE n. m. est emprunté (déb.
XIIIe s.) au dérivé latin
exercitium « exercice, pratique » ; on trouve aussi en ancien français la forme latinisée
exercite.
■
Exercice s'emploie d'abord dans espiriteil exercice, « exercice spirituel », pour désigner une activité réglée s'exerçant dans le domaine religieux, puis intellectuel (1580) et artistique.
◆
Le mot signifie aussi (fin XIIIe s.) « action ou moyen d'exercer (de s'exercer) pour entretenir ou développer des qualités morales ou physiques ». Au XVe s., le nom se dit pour « pratique (de qqch.) » (1424, au féminin ; exercice d'un pouvoir, d'un droit, etc.).
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Il désigne spécialement (1531) le fait d'exercer une activité d'ordre professionnel, d'où en exercice « en activité », dans entrer, être en exercice. De ces acceptions viennent des emplois plus spécialisés comme exercice physique ou absolument l'exercice (1637, Descartes) ; l'exercice se dit aussi de l'entraînement des soldats.
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Dans le domaine religieux (1669, Molière), généralement qualifié (exercices spirituels), le mot désignait un acte de piété, une prière, etc., destiné à élever l'âme.
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Dans le domaine scolaire, on appelle exercices scolaires (1865) ou exercices les devoirs aux difficultés graduées qui conduisent les élèves à des travaux plus amples d'où, par métonymie, exercices de calcul (de grammaire, etc.) « livre qui contient ces exercices ». Le mot s'emploie aussi en musique (1865) pour désigner des compositions destinées à l'apprentissage d'un instrument.
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De la notion d'épreuve, attachée à exercer et à exercice, vient le sens classique de « peine, tourment » (1685), sorti d'usage.
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C'est d'une spécialisation en droit fiscal (1707, Vauban), où exercice correspond à « contrôle par des visites régulières » (qui permet à l'agent d'exercer son action), que vient le sens de « période entre deux inventaires, deux budgets », en droit commercial (1865).
❏ voir
COERCIBLE.
EXERGUE n. m., attesté en 1636, est un emprunt au latin scientifique moderne exergum, composé des mots grecs ex- « hors de » et ergon « action », « travail » (→ énergie).
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D'abord employé comme terme de numismatique, exergue désigne le petit espace réservé dans une médaille pour recevoir une inscription, une date et, par métonymie, l'inscription elle-même.
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Le mot se dit au figuré, surtout dans en exergue, pour « ce qui présente, explique » (XXe s.) ; cet emploi est critiqué, certains préférant conserver en ce sens épigraphe*.
EXFOLIER v. tr. est un emprunt savant (1560, Paré) au bas latin exfoliare « effeuiller », de ex- et du classique folium (→ feuille, folié, folio).
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D'abord terme de médecine, exfolier se dit d'un os, d'un cartilage dont les parties mortes se détachent par parcelles.
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Rare au sens de « dépouiller (de ses feuilles, de ses pétales) », le verbe s'emploie plus couramment au pronominal s'exfolier (1690).
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Le dérivé
EXFOLIATIF, IVE adj. (1545) est un terme de médecine.
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EXFOLIATION n. f., formé à partir de exfoliatum, supin de exfoliare, est attesté en 1478 en médecine.
EXHALER v. tr. est un emprunt savant (v. 1350, au participe passé exalé) au latin exhalare, formé de ex- et de halare « exhaler un souffle, une odeur », moins fréquent que le dérivé et d'étymologie douteuse.
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Le verbe s'emploie, en parlant d'une personne, au sens de « laisser échapper de sa bouche (un souffle, un son, etc.) », le participe passé qualifiant d'abord le dernier soupir. Exhaler son âme « mourir » semble être le premier emploi du verbe transitif (av. 1613), qui signifie ensuite « dégager de soi, répandre au-dehors (une chose volatile) ». La forme pronominale s'exhaler est attestée dans ce sens dès le début du XVIe siècle.
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Le mot est relevé, à partir du XVIIe s., dans des emplois figurés et littéraires ; il se dit ainsi (1643, Corneille) en parlant d'une personne pour « manifester (un sentiment) de façon audible (par des paroles, des pleurs, etc.) », puis en parlant de choses ou de notions abstraites (av. 1848, Chateaubriand ; exhaler une force).
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Il s'emploie par analogie comme terme de physiologie, alors opposé à inhaler.
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Du radical du verbe est dérivé
EXHALAISON n. f. (1561), variante francisée de
exhalation « ce qui s'exhale d'un corps, d'un lieu »
(Cf. émanation, effluve).
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EXHALATION n. f. est emprunté (1361 Oresme, exalacion) au latin exhalatio « action d'exhaler » (du supin de exhalare) dont il reprend le sens.
❏ voir
INHALER.
EXHAURE n. f. est un dérivé savant du latin exhaurire « épuiser ». Ce latinisme est une création technique du milieu du XIXe siècle, désignant l'épuisement des eaux d'infiltration par les techniques appropriées.