F

FA n. m. représente (v. 1223) la première syllabe du latin famuli, au second vers de l'hymne de saint Jean-Baptiste de Paul Diacre, syllabe retenue arbitrairement par Gui d'Arezzo (995-1050).
❏  Le mot désigne le sixième degré de l'échelle musicale (dans notre système, la quatrième des sept notes).
❏ voir GAMME.
L + FABLE n. f. vient (v. 1155 par semi-emprunt) du latin fabula « récit, propos », d'où « récit mythologique, allégorique, conte, apologue », du verbe fari « parler », issu d'une racine indoeuropéenne °bhā- « énoncer » (→ faconde, fatal ; enfant).
❏  Fable apparaît au milieu du XIIe s. au sens de « récit imaginaire, histoire » et d'« allégation mensongère » (1160). Le sens de « petit récit moralisant qui met en scène des animaux » est lui aussi ancien (1180). Ce n'est qu'au début du XVIIe s. que le mot désigne la mythologie de l'antiquité païenne et en géneral (la fable) le mythe ; ce sens a disparu.
❏  Le diminutif FABLIAU n. m. est d'origine picarde (fin XIIe s.) et correspond à l'ancien français (d'Île-de-France) fablel, fableau ; il désigne un genre, celui du récit en octosyllabes, moral ou satirique, important aux XIIIe et XIVe siècles.
■  Le dérivé FABLIER n. m. (1729) — mot utilisé par d'Olivet, puis Voltaire à propos de La Fontaine — a d'abord désigné un producteur de fables, avant de s'appliquer à un recueil de fables (1811).
FABULISTE n. m. traduit d'abord (1588) l'espagnol fabulista avec le sens de « conteur de mensonges » ; chez La Fontaine, où il signifie « auteur de fables » (1668), c'est un dérivé savant de fabula.
■  FABULER v. intr. est emprunté (XVe s.) au latin fabulari « parler, causer » et « inventer des fables, des histoires », dérivé de fabula ; le verbe latin a abouti à l'espagnol hablar (→ hâbler). ◆  Il est introduit avec ce second sens (XVe s., intr. ; XVIe s., tr.). L'emploi didactique (1892) pour « raconter des choses incroyables » sous l'influence de fabulation, en psychologie, se répand au milieu du XXe siècle.
■  FABULATION n. f. est emprunté au latin classique fabulatio (du supin de fabulari) « discours, conversation », qui signifiait en latin chrétien « bavardages, mensonges ». Apparu avec le sens de « représentation imaginaire des faits » (1830), devenu archaïque, il désigne l'organisation des faits qui constitue la trame d'un rêve (1856) et une production imaginaire (fin XIXe s.).
■  FABULATEUR, TRICE adj. et n. entre dans la langue avec le sens du latin fabulator « auteur de récits, conteur » (1519 à propos d'Ésope) et est aujourd'hui associé à fabulation (fin XIXe s.).
AFFABULATION n. f., emprunt au bas latin affabulatio (v. 500) « moralité d'une fable », composé de fabulatio ou de fabula, est attesté au sens du latin à la fin du XVIIIe s. (1798, Académie), sens archaïque. Le mot est repris au XIXe s. en littérature (1853) pour « trame d'un récit, narration », emploi didactique et critiqué par les puristes, puis (XXe s.) en psychologie, d'après la valeur prise par fabulation (ci-dessus).
■  Le dérivé verbal de ce nom, AFFABULER v. tr., s'emploie d'abord pour « organiser (un récit, une narration) », en littérature (1925, Gide). Il est repris en psychologie comme variante de fabuler (mil. XXe s.).
FABULEUX, EUSE adj. est un emprunt (XIVe s.) au latin fabulosus « qui relève de la fable, du merveilleux », dérivé de fabula. ◆  L'adjectif conserve la valeur du latin ; il s'applique (av. 1715, Fénelon) à ce qui paraît incroyable, sens devenu courant au XIXe siècle. Fabuleux est devenu aussi (XXe s.) un intensif, équivalent d'« exceptionnel, énorme » et correspondant à peu près à formidable*.
■  En dérive FABULEUSEMENT adv. (1488).
FABRIQUER v. tr. est emprunté (XIIe s.) au latin classique fabricare « faire (un objet) », en bas latin « construire, bâtir » et « truquer » (→ forger), de fabrica « métier d'artisan », « action de travailler », « œuvre d'art », « atelier » et spécialement en latin médiéval « construction et entretien d'une église ». Fabrica dérive de faber « ouvrier qui travaille les corps durs », sens général précisé par une épithète. Faber avait abouti à fèvre « forgeron » (→ orfèvre) et ne subsiste que dans le patronyme Fèvre ou Lefèvre, en occitan Fabre, Faure.
❏  Rare avant le XVIe s., fabriquer apparaît au sens propre de « faire (un objet) » et au sens figuré d'« élaborer de façon à tromper » (fabriquer de faux papiers). Il prend le sens plus technique de « transformer des matières premières en objets manufacturés » probablement au milieu du XVIIe s. (attesté 1690) et, à partir du XIXe s., veut dire « faire par des procédés (une œuvre qui devrait être créée) » (1828). Le sens général de « faire » explique l'acception familière « avoir une occupation » (1879).
■  En argot ancien, fabriquer s'est employé pour « arrêter » (1876), « tromper (quelqu'un) » (1878), « voler (quelque chose) » (1887) ; on disait aussi passer à la fabrication pour « être arrêté par la police » et « être trompé ». L'idée de tromperie associée à fabriquer remonte au latin.
❏  Les dérivés FABRICATION n. f. (1488) et FABRICANT, ANTE n. (1604) ont le sens technique du verbe et s'emploient au figuré ; l'un comme l'autre s'appliquent à l'artisanat, avant de suivre l'évolution de fabrique. Fabricant s'emploie surtout avec un complément pour « manufacturier », puis « industriel qui fabrique (un produit) » (1740).
■  FABRICABLE adj. est d'usage technique (v. 1950) comme son dérivé FABRICABILITÉ n. f. (v. 1970).
■  FABRICOTER v. tr. (XXe s.), suffixé d'après fricoter, est littéraire et plaisant.
■  Le préfixé PRÉFABRIQUÉ, ÉE adj. se dit couramment d'une maison montée avec des éléments fabriqués au préalable (1932, adj. ; 1963, n. m.) et s'emploie aussi au figuré (1959) ; PRÉFABRIQUER v. tr. (1949) est plus rare. PRÉFABRICATION n. f. est attesté en 1943.
FABRICATEUR, TRICE n., emprunt (1279, puis fin XVe s.) au dérivé latin fabricator « constructeur, artisan », est sorti d'usage pour désigner une personne qui fabrique qqch. et a pris une valeur péjorative (1648).
FABRIQUE n. f., emprunt au latin fabrica (→ forge), a désigné (1364) le travail du forgeron et, dans le vocabulaire religieux, la construction d'une église, le conseil chargé de gérer les revenus destinés à sa construction et à son entretien (1386-1387) et les revenus eux-mêmes (XIVe s.). Fabrique prend le sens plus large de « fabrication » (déb. XVIe s.), resté aujourd'hui dans marque de fabrique. ◆  C'est dans la seconde moitié du XVIIe s. (1666) que la fabrique devient un « établissement où l'on fabrique » ; fabrique implique que l'activité de l'établissement ne requiert pas un outillage important (Cf. manufacture, opposé à usine). ◆  Le mot a eu le sens de « plantation (d'un jardin) » (1600) et s'était spécialisé pour désigner des édifices dont on ornait le fond d'un tableau (1690, n. f. pl.), une construction qui agrémentait un parc (1835).
FABRICIEN n. m., dérivé du latin médiéval fabrica, désignait (1569) un membre du conseil de fabrique d'une église ; on disait aussi fabricier (1611).
FAÇADE n. f. est une réfection (1611) de fassade (1565), emprunté à l'italien facciata « un des côtés d'un bâtiment » (XIIIe s.), dérivé de faccia, mot issu d'un latin populaire °facia comme le français face*.
❏  Façade conserve le sens de l'étymon, puis désigne par figure (mil. XIXe s.) une apparence qui abuse sur la réalité de qqch. ou de qqn. L'emploi familier au sens de « visage » (1872) provient d'un jeu de mots sur face ; il ne se trouve que dans des locutions, comme se refaire la façade, démolir la façade à qqn (1881). Le mot a pris une acception technique en matière d'assurance (mil. XXe s.).
❏  FAÇADIER, IÈRE n. (années 1970) désigne, en architecture, la personne qui réalise les façades. ◆  FAÇADING n. m., faux anglicisme, s'applique à la réfection d'un édifice dont on respecte ou on restitue la façade, modifiant ou reconstruisant tout l'intérieur (s'emploie notamment en français de Belgique).
L + FACE n. f. est issu (v. 1120) d'un latin populaire °facia « portrait », du latin classique facies « forme, aspect général » jusqu'à l'époque impériale, puis spécialement « visage » ; facies se rattache à facere (→ faire).
❏  Le mot apparaît avec le sens de « visage » ; il n'est conservé en ce sens que dans l'éloquence de la chaire, pour parler de Dieu ou de Jésus-Christ (XVIIe s., la Sainte Face). Dans les emplois courants, face est devenu un terme de raillerie, par exemple dans des locutions familières comme face de rat, face de crabe, face d'œuf. Mais face au sens premier de « visage » a en français de France des connotations assez nobles. Le mot est plus naturel en français du Canada, où on dira par exemple une face à claques là où tête à claques s'emploie en français d'Europe. ◆  La locution adverbiale face à face (1172-1174) a fourni FACE À FACE n. m. inv., « situation de deux personnes l'une en face de l'autre » (1842), spécialement avec le développement de la civilisation de l'image « rencontre entre deux personnages importants » (v. 1965).
■  Par figure, face désigne (1265) l'aspect sous lequel une chose se présente ; le mot s'emploie couramment pour parler de chacun des côtés d'une chose (1370-1372), mais est abandonné au sens de « partie antérieure (d'un bâtiment) » (1552) au profit de façade*. Il s'est spécialisé en géométrie (1752) et désigne (1819) le côté d'une médaille, d'une monnaie qui porte une figure. Dans certains emplois (religieux ou littéraire), il se dit encore pour « surface » (1611 ; → surface).
■  De nombreuses locutions ont été formées à partir de face, comme en face loc. adv. (1534), faire face à, spécialement faire face à l'ennemi (1657), à une dépense (1798) « pouvoir payer ».
❏  Le diminutif FACETTE n. f. a signifié « petit visage » (XIIIe s., facete) ; il désigne une des faces d'un corps qui en a beaucoup (1582, fasette), s'est spécialisé en joaillerie (1671) et en sciences naturelles (1845, yeux à facettes des insectes), et s'emploie au figuré (1680).
■  Son dérivé FACETTER v. tr. (1454) est un terme de diamanterie.
FACIAL, ALE, ALS ou AUX adj., dérivé savant du radical du latin facies, a signifié « de face » (1545) et s'applique à ce qui appartient à la face (1800). Plusieurs termes de médecine sont composés avec facial, tel MAXILLO-FACIAL, AUX adj. (1917) « des maxillaires et de la face » (chirurgie maxillo-faciale). ◆  L'adjectif facial a pris aussi le sens extensif de face dans valeur faciale (d'une pièce de monnaie, d'un billet).
Le mot facies lui-même passe en français (mil. XVIIIe s.) en sciences : FACIÈS n. m. reste un terme savant, sauf lorsqu'on parle du visage humain, récemment dans un contexte raciste, un faciès (basané) désignant parfois un immigré maghrébin. De là l'expression critique délit de faciès, stigmatisant l'injustice à l'égard des « minorités visibles ».
Le composé FACE-À-MAIN n. m. (1872) désigne une sorte de binocle à manche.
Du provençal faci et (par influence de l'italien faccia) fatcho, l'expression FATCHE DE... marque la surprise et souvent l'exaspération, surtout renforcée par un terme péjoratif (fatche de con). Elle s'emploie en français régional de Provence, notamment à Marseille.
❏ voir EFFACER, FAÇADE, SURFACE, VOLTE-FACE (art. VOLTE).
FACÉTIE n. f. est une réfection (1580) de facecie (fin XVe s.), emprunté au latin facetia « plaisanterie », surtout employé au pluriel facetiae « élégances », « traits d'esprit ». Ce mot dérive de facetus « élégant, bien fait » et « spirituel », d'origine obscure, qui a été emprunté en moyen français sous la forme facet « gracieux » (XIVe s.).
❏  Le mot désigne une plaisanterie burlesque et spécialement (XVIIIe s.) un petit écrit plaisant. Comme ses dérivés, il appartient à l'usage soutenu.
❏  Le dérivé FACÉTIEUX, EUSE adj. qualifie ce qui est plaisant (fin XVe s., facecieux), puis une personne qui aime à dire ou faire des facéties (fin XVIe s.).
■  Il a servi à former FACÉTIEUSEMENT adv. (fin XVe s.).
L FÂCHER v. tr. (1442, fachier, fascher) représente probablement l'aboutissement d'un latin populaire °fasticare, forme issue par changement de suffixe de fastidiare « repousser dédaigneusement, faire le dédaigneux » ; ce verbe, qui a donné par emprunt (XIVe s.) le verbe disparu fastidier « dégoûter, rebuter », est une transformation du latin classique fastidire « causer ou éprouver du dégoût », dérivé de fastus « dédain » (→ 1 faste).
❏  En français, le sens de « dégoûter » (1442, fachier à) et la valeur atténuée d'« affliger » (1539) étaient vivants à l'époque classique. ◆  Le verbe signifie aujourd'hui (mil. XVe s. ; 1480, pron.) « causer du déplaisir à (qqn), mettre en colère » et se fâcher (avec qqn) signifie couramment « interrompre une relation » (1865). ◆  En emploi absolu, l'expression un, des sujet(s) qui fâche(nt) semble venir d'un emploi régional de fâcher pour « être très désagréable à » (1931 à Marseille) ; elle s'applique (années 1990) à différents contextes, politique, médical, etc. où certains sujets déclenchent des effets à éviter. ◆  En français régional du centre de la France (surtout en Auvergne), « réprimander ». Son papa l'a fâché ; se faire fâcher.
❏  Le dérivé FÂCHERIE n. f. a suivi l'évolution sémantique du verbe ; désignant d'abord (1470) le dégoût pour qqch. et une peine profonde, il a signifié aussi « tracas, ennui » (1484) et « colère » (1504). Le sens moderne atténué de « désaccord, brouille » est plus tardif (1737).
■  FÂCHE n. f., autrefois « contrariété » (v. 1510), s'emploie encore régionalement avec ce sens.
FÂCHEUX, EUSE adj. s'est appliqué aux choses pénibles à accomplir ou à supporter (1480), puis aux personnes difficiles à contenter (1528). Son emploi substantif (1544) était courant au XVIIe s. (les Fâcheux de Molière). C'est aujourd'hui un quasi-synonyme assez littéraire d'ennuyeux.
■  Il a fourni FÂCHEUSEMENT adv. (1558).
FACHO → FASCISTE
FACILE adj. est emprunté (1441) au latin facilis « faisable », d'où « facile à faire » et « indulgent », qui se rattache à facere (→ faire).
❏  Facile qualifie une tâche dont l'exécution ne présente pas de difficultés (1441), avant de s'appliquer aux personnes (1559) au sens de « conciliant, d'humeur agréable et douce ». De l'idée de complaisance, on passe au sens de « sans caractère, faible », encore employé à l'époque classique ; c'est de là que vient l'emploi à propos d'une femme qui accepte aisément des relations sexuelles (1761). ◆  Vieilli en parlant d'une personne qui exécute sans peine qqch. (1613), l'adjectif s'applique ensuite (1680) à ce qui semble avoir été fait aisément. Facile ne s'oppose normalement à difficile qu'en parlant des choses.
❏  Il a pour dérivé FACILEMENT adv. (v. 1450), très courant, mais concurrencé (mil. XXe s.) par FACILE adv., dans l'usage oral spontané.
■  FASTOCHE adj., tiré oralement de facile avec une finale en -oche et un -t- ajouté, est devenu un équivalent très courant de facile, dans l'usage familier.
FACILITÉ n. f. a été emprunté au dérivé latin facilitas et, comme lui, désigne la qualité de ce qui se fait aisément (1455) et la disposition à accomplir qqch. sans peine (1559). Le sens de « manque de fermeté » (1580) est vieux ou littéraire, celui d'« élégance aisée » (XVIIe s.) est péjoratif. ◆  Au pluriel, à l'époque classique, facilités signifie « concessions », en français moderne « commodités » et, en particulier, « délais accordés à un acheteur pour payer qqch. » (1901, facilités de paiement). ◆  En français de Belgique, les facilités désignent les dispositions légales accordées à ceux qui ne parlent pas la langue majoritaire dans la Région considérée (wallone ou flamande). Les communes concernées sont appelées communes à facilités. Ces facilités linguistiques ont trait à l'enseignement, l'administration (formulaires traduits dans la langue minoritaire) ; elles concernent notamment des communes néerlandophones de la périphérie de Bruxelles, à forte minorité francophone.
FACILITER v. tr. est emprunté (XVe s.) à l'italien facilitare, dérivé de facilità « facilité » (du latin facilitas).
■  Il a fourni FACILITATION n. f. (1832), FACILITATEUR, TRICE adj. (XXe s.), FACILITANT, ANTE adj., mots didactiques assez courants.
L FAÇON n. f. est issu (v. 1121) du latin factionem, accusatif de factio, -onis « action et manière de faire » (→ faction), du supin de facere (→ faire). Ce sens général est conservé dans différents emplois.
❏  Le nom désigne la manière d'être extérieure d'un animal (v. 1121), d'une personne ; ce sens est conservé à l'époque classique, entre autres avec une valeur méliorative puisque façon se dit pour élégance ; il est maintenu aujourd'hui, mais uniquement dans l'emploi du mot au pluriel à comparer à manières, sauf dans SANS-FAÇON n. m. inv. « sans cérémonie » (1660) et « sans gêne » (1865). ◆  Du sens de « manière » (1276), on est passé à celui de « manière d'agir » (1578) ; à partir de cet emploi sont formées des locutions comme en façon que (1580), sortie d'usage, de façon que (1580), à la façon de (1580), de façon à ce que (1839) et c'est une façon de parler (1798).
■  Façon a signifié par ailleurs « acte, action » (1260), d'où l'emploi pour « action de mettre en œuvre » (1377), en agriculture (1606), dans de la (ma...) façon (1668) ou pour parler du travail de l'artiste qui met en œuvre une matière. ◆  Façon, suivi d'un nom, s'emploie aussi pour « imitation de » (1810).
❏  Le dérivé FAÇONNER v. tr. (1175) a le sens général de « travailler une matière pour lui donner une forme particulière ». Le verbe s'emploie spécialement pour indiquer une action positive sur une personne : façonner qqn, c'est le former par l'habitude ou l'éducation (1462) ou, dans un usage littéraire (1580), l'accoutumer à qqch. (construction avec à).
■  Le verbe a eu à l'époque classique (1671, intr.) le sens défavorable de « faire des façons » et, par extension, « dissimuler des sentiments ». Il s'emploie comme le nom en agriculture (1751) et, par figure (XIXe s.), signifie « créer par un travail de l'esprit ».
FAÇONNAGE n. m. « forme, apparence » (fin XIIe s., isolément) dérive de façon, comme FAÇONNEMENT n. m. de même sens (fin XIIe s.). En tant que dérivé de façonner (1552), il s'emploie surtout au figuré. ◆  Façonnage (et façonner) s'emploient spécialement dans la fabrication des livres pour les opérations succédant au pliage (massicotage, etc.) et précédant la reliure proprement dite. Dans ce sens, on emploie un autre dérivé, 2 FAÇONNIER n. m.
■  Le verbe a aussi produit FAÇONNABLE adj. (1898), technique, et FAÇONNEUR, EUSE n. (mil. XXe s.), rare.
Le composé MALFAÇON n. f. (v. 1260) est surtout employé à propos des métiers du bâtiment.
1 FAÇONNIER, IÈRE n. et adj., dérivé peu usité de façon, s'est employé à l'époque classique (1549) pour « tisserand ». Il désigne (1564, n.) un ouvrier qui travaille à façon et se dit (1639, adj.) d'une personne qui fait trop de cérémonies.
❏ voir CONTREFAÇON (art. FAIRE).
FACONDE n. f. est emprunté (v. 1150, facunde) au latin facundia « facilité d'élocution », « talent de la parole, éloquence », dérivé de facundus « disert », adjectif dérivé de fari « parler, dire », qui se rattache à une racine indoeuropéenne °bhā- « énoncer » (→ fable, fatal).
❏  Le mot, rare jusqu'au XVIIe s., désigne une élocution facile, abondante et, péjorativement (1829), une trop grande abondance de paroles.
FAC-SIMILÉ n. m. est emprunté (1808 ; écrit fac simile en 1796) à la locution du latin fac simile « fais une chose semblable », composée de fac, impératif du verbe facere « faire* » et de simile « chose semblable », substantivation de similis « semblable, ressemblant », qui se rattache à la racine indoeuropéenne °sem- « un » (→ ensemble).
❏  Le mot désigne la reproduction exacte d'un écrit, d'un dessin et, par analogie en informatique (v. 1970), un procédé de transmission des images par le réseau téléphonique.
❏  Il a fourni les dérivés d'emploi rare FAC-SIMILER v. tr. (1831) et FAC-SIMILAIRE adj. (1865). ◆  De là FAX n. m., emprunt à l'abréviation anglo-américaine pour fac-simile, qui a pour équivalent français télécopie, et le dérivé FAXER v. tr. télécopier.
FACTEUR, TRICE n. est un emprunt (1326) au latin classique factor « fabricant », employé en latin chrétien au sens de « créateur, auteur » pour traduire le grec poiêtês ; factor dérive de factum, supin de facere (→ faire). L'évolution phonétique régulière a donné en ancien français faitres, faitor (XIIe s.).
❏  Facteur est d'abord un terme de négoce (1326), désignant une personne qui fait du commerce pour le compte d'une autre, sens encore courant au XVIe siècle. ◆  À partir du XVIIe s., le mot désigne qqn qui porte des lettres à leurs destinataires (1651, facteur de lettres), sens devenu usuel avec l'établissement de la « Petite Poste » en 1759. Le mot, toujours courant aujourd'hui et qui a reçu le féminin factrice, a été remplacé (mil. XXe s.) dans l'administration par préposé.
Parallèlement, facteur s'est employé pour désigner celui qui crée qqch. (1339, n. m.) et spécialement, au XVIe s., l'écrivain, l'artiste, comme synonyme de créateur, spécialement en parlant de Dieu. À partir du XVe s., il s'applique spécialement à une personne qui fabrique certains instruments de musique (1421, facteur d'orgues). ◆  Par extension, le mot désigne en mathématiques (1699) chaque élément constitutif d'un produit et (1805) chacun des éléments qui concourt à un résultat.
❏  Quelques termes de commerce ont été dérivés savamment du latin factor : FACTORERIE n. f. (1568), vieilli, a été en concurrence jusqu'au XVIIIe s. avec factorie (1414), et FACTAGE n. m. (1842) est un terme technique, qui s'est appliqué à tout transport de marchandises jusqu'au domicile du destinataire, puis (1872) à la distribution du courrier par le facteur*.
■  FACTORIEL, IELLE adj. et n. f. (1845) est un terme didactique comme FACTORISER v. tr. (mil. XXe s.). Ces deux mots correspondent au sens mathématique de facteur. L'analyse factorielle est une méthode statistique pour dégager les facteurs déterminants des variations d'une grandeur. Le nom FACTORIELLE n. f. désigne le produit des nombres entiers inférieurs ou égaux à un nombre donné. ◆  Le préfixé MULTIFACTORIEL, ELLE adj. est l'adaptation de l'anglais multifactorial pour qualifier ce qui dépend de plusieurs facteurs ou ce qui comporte de nombreux facteurs.
1 FACTURE n. f., formé à partir du radical de facteur « agent commercial », est une ellipse (1611) pour lettre de facture (1540) désignant une pièce comptable et, par métonymie, la note d'une somme à payer. Il est devenu très courant avec cette valeur. L'expression commerciale garanti sur facture a pris (1905, garantir sur facture 1872) la valeur figurée de « certain, sûr ». ◆  En français québécois, l'emploi du mot s'étend souvent à ce qui est appelé addition ou note (restaurants, hôtels) en français d'Europe. Cet usage est critiqué.
Le mot a produit FACTURER v. tr. (1829) dont dérivent FACTURATION n. f. (1934) et FACTURIER, IÈRE n. (1849).
FACTICE adj. est un emprunt (1534, Rabelais) au latin impérial facticius « artificiel », « imitatif », dérivé du latin classique facere (→ faire). Facticius avait abouti à l'ancien français faitis, faitice « façonné », « bien fait » (fin XIe s.) [→ fétiche].
❏  Factice s'applique couramment (1534) à ce qui est fait artificiellement, à l'imitation de la nature, et s'emploie spécialement dans la philosophie cartésienne, où idées factices « élaborées par l'esprit » s'oppose à idées innées (1647). ◆  Par figure et péjorativement, l'adjectif équivaut à « faux, affecté » (XVIIIe s.). Il est aussi substantivé depuis le XVIIIe s. (1776, le factice).
❏  En dérivent FACTICEMENT adv. (1842, Hugo), rare, et FACTICITÉ n. f. (1873), spécialisé en philosophie (1943, Sartre) au sens de « caractère d'un fait contingent » ; c'est alors l'adaptation de l'allemand Faktizität « caractère existentiel », chez Husserl.
FACTION n. f. est emprunté (v. 1355, faccion) au latin factio, -onis « groupe de gens qui agissent ensemble », de factum « action de faire », supin de facere (→ faire) ; c'est le doublet savant de façon.
❏  Faction désigne un groupe se livrant à une activité séditieuse (v. 1355) ; le mot s'est employé pour « action de guerre » (v. 1540) et plus généralement pour « action de faire » (déb. XVIIe s.). Il signifie également « service de surveillance d'un soldat armé » (1616), peut-être par emprunt à l'italien fazione ; par analogie de ce sens militaire, il désigne (XXe s.) chacune des tranches d'heures entre lesquelles sont réparties des équipes assurant un travail continu dans une entreprise.
❏  Le dérivé FACTIONNAIRE n. m. s'est employé d'abord comme adjectif (v. 1560) puis comme nom (1574) au sens de factieux et désigne (1671) un soldat en faction.
■  FACTIONNER v. intr. (XXe s.) est rare.
FACTIEUX, EUSE adj. et n. est emprunté (av. 1468, n. ; 1488, adj.) au latin factiosus « affilié à une coterie politique », dérivé de factio. Il est lié à faction et signifie « séditieux, subversif ». Le mot s'est employé spécialement vers 1958 dans le contexte du conflit algérien à propos des militaires français partisans de l'Algérie française et révoltés contre le gouvernement.
■  Le dérivé FACTIEUSEMENT adv. (1660) a vieilli.
FACTITIF, IVE adj. est un dérivé savant (1890) du latin factitare « faire souvent, habituellement », fréquentatif de facere (→ faire).
❏  Ce terme signifie en grammaire « qui exprime que le sujet est à la cause de l'action, sans agir lui-même ».
❏  De là FACTITIF n. m. (1907) « verbe factitif ».
FACTOTUM n. m. (1552), d'abord écrit factoton (1545), reprend une locution latine de la Renaissance, fac totum « fais tout », composée de l'impératif de facere (→ faire) et de l'accusatif de totus (→ tout) ; la forme factoton, encore normale à la fin du XVIIIe s. (1798, Académie), transcrit la prononciation du latin au XVIe siècle.
❏  Le mot, d'usage littéraire, désigne un employé qui s'occupe de tout dans une maison et, par figure (fin XIXe s.), une personne qui se mêle de tout.
FACTUEL, ELLE adj. représente (v. 1950) la francisation de l'anglais factual adj. « relatif aux faits » (1834), dérivé de fact « fait », emprunté au latin factum (→ fait).
❏  Cet adjectif didactique est appliqué à ce qui est de l'ordre du fait.
❏  Il a fourni FACTUELLEMENT adv. (1951) et FACTUALITÉ n. f. (1957).
FACTUM n. m. est emprunté (1532, Rabelais) au latin factum signifiant « fait », participe passé neutre substantivé de facere (→ faire).
❏  Terme de droit sorti d'usage (« exposé des faits d'un procès »), il désigne aujourd'hui dans l'usage littéraire (1601) un mémoire d'un ton polémique (les Factums de Furetière contre l'Académie).
1 FACTURE n. f. → FACTEUR