L + FAIM n. f. est issu (v. 1050) du latin fames, famis qui n'a pas de correspondant hors du latin ; les noms de la faim et de la soif varient d'une langue indoeuropéenne à l'autre.
❏  Faim conserve les sens de l'étymon, désignant le besoin de manger et signifiant (v. 1200) « désir, envie de » ; ce sens figuré a été concurrencé en ancien français par talent, usité encore dans les parlers languedociens (→ talent).
❏  L'adjectif FAMÉLIQUE (1457) emprunte le dérivé latin famelicus « qui ne mange pas à sa faim ».
FAMINE n. f. (1155 ; v. 1130, famire), tiré du radical de fames, a eu aussi le sens propre de faim (du XVIe au XVIIIe s.), que l'on retrouve encore, par exemple, dans crier famine, un salaire de famine. ◆  En français de la zone sahélienne subsaharienne, le mot s'applique à la période entre deux récoltes (appelée soudure en français de France), le mot soulignant les terribles situations alimentaires de cette région.
AFFAMER v. tr. (XIIe s.) est issu d'un latin populaire °affamare, dérivé de fames (Cf. italien affamare, ancien provençal afamar) ; du premier sens de « réduire (qqn) à la faim », on est passé par figure à celui de « priver », « enlever qqch. », notamment dans le vocabulaire technique (1694 ; 1787, affamer un arbre).
■  Le verbe a fourni AFFAMÉ, ÉE adj. (XIIe s.) et AFFAMEUR, EUSE n. et adj. (1791), qui s'est surtout employé dans un contexte politique.
Plusieurs composés sont construits à partir d'une forme verbale : MATEFAIM n. m. inv. (1540) est moins courant que COUPE-FAIM n. m. inv. (XXe s.) ; ABAT-FAIM n. m. inv. (1732) est sorti d'usage ; MEURT-DE-FAIM n. m. inv. (1690 ; 1604, mort-de-faim) et CRÈVE-LA-FAIM n. m. inv. (1870).
FAIM-CALLE ou FAIM-VALLE n. f., « faim impérieuse, pathologique », est formé (v. 1150, fainvale) d'un élément d'origine obscure, peut-être du breton gwall « mauvais » ; on relève la variante faim-gale, n. f. (1316-1326).
❏ voir FRINGALE.
L FAÎNE ou FAINE n. f. est issu, d'abord sous la forme favine (1165) puis faïne (1258), finalement réduite en faine (1600 ; 1762, faîne), du latin fagina « fruit du hêtre », féminin substantivé de l'adjectif faginus, dérivé de fagus « hêtre ». Fagus avait abouti à l'ancien français fou (→ fouet) et à l'ancien provençal fag, fau, encore dans des noms de lieux (Cf. La Fage). À fagus, nom d'arbre indoeuropéen, correspond le dorique phagos « sorte de chêne », le hêtre n'existant pas en Grèce.
❏  Le mot désigne le fruit du hêtre, qui correspond au gland du chêne et sert de nourriture à certains animaux.
FAINÉANT, ANTE adj. et n. est une altération (1306), d'après fait (forme verbale de faire) et néant*, de faignant, feignant (fin XIIe s.) ; ces formes représentent le participe présent du verbe feindre (1080) au sens de « se dérober, rester inactif » et sont aujourd'hui considérées populaires.
❏  Fainéant a une valeur plus forte que paresseux.
❏  Il a produit FAINÉANTISE n. f. (1539 ; 1739, fainiantise) et FAINÉANTER v. intr. (1690, faitnéanter).
■  La prononciation relâchée de fainéant a été notée FEIGNANT, ANTE adj., qui fait renaître l'ancien dérivé de feindre (voir ci-dessus) avec le sens de fainéant « paresseux ». Le mot est écrit dans Henri Monnier, observateur de l'usage populaire parisien (1829), sous la forme feigniant ; feignant est dans les Mystères de Paris, d'Eugène Sue (1842). L'équivalent familier FEIGNASSE adj. et n. a été formé (1890) avec le suffixe péjoratif -asse ; c'est un mot argotique, puis familier (Cf. feignantasse, 1927, Mauriac, mot régional).
L + FAIRE v. tr., attesté pour la première fois à la 3e personne du singulier du subjonctif fazet (842), est l'aboutissement du latin facere. À l'origine, facere signifiait « placer, poser » puis a été employé de façon technique, par exemple en religion dans sacrum facere « placer un sacrifice (sur l'autel) », d'où « faire (un sacrifice) ». Le sens de « placer » est pris par ponere (→ pondre) et facere signifie alors « causer », « exciter », « travailler », « faire artificiellement » ; il s'emploie aussi en litote et comme substitut d'un autre verbe et entre, à l'époque impériale, dans des emplois impersonnels. Facere, représenté dans les langues romanes par l'italien fare, l'espagnol hacer (d'où hacienda), le portugais facer (d'où fazenda) et le roumain face, se rattache à une racine indoeuropéenne °dhē- « placer », comme le grec tithenai « poser » (→ thème, thèse).
❏  Faire est attesté dans ses premiers emplois comme suppléant d'un verbe d'action et, suivi d'un infinitif, signifiait « être cause que, attribuer à » (880). Il s'emploie au sens général de « réaliser (une manière d'être), être le sujet de (une activité) » (Xe s.). À partir du sens d'« accomplir » (faire une bonne action), un grand nombre de locutions a été formé ; parmi celles qui sont encore vivantes, certaines sont anciennes : faire tant, si bien que (mil. XIe s.), ne faire que de, suivi de l'infinitif (v. 1190), n'en faire qu'à sa tête, etc.
■  Faire a aussi le sens de « déterminer (qqn, qqch.) dans sa manière d'être » (fin Xe s. pour les personnes ; 1080 pour les choses) et de « donner un caractère à qqn » (fin Xe s., faire un ministre), d'où par extension (v. 1172) « représenter, remplir le rôle de » (faire un personnage, faire le chien). De là faire premier, second, dernier (1934).
■  Avec la valeur générale de « réaliser (qqch.) », on le trouve dans la Chanson de Roland (1080), en particulier au sens de « constituer ». Il s'est spécialisé avec la valeur de « produire, donner la vie à, enfanter » (1372). Par extension, faire équivaut à « produire (qqch.) par l'industrie, la culture, etc. » (1606) ; et aussi à « obtenir » (1837, faire de l'argent), familièrement à « extorquer, voler » (1808).
■  C'est avec la valeur générale de « fonctionner, marcher, aller » que le verbe, en impersonnel, a fourni des expressions devenues rapidement très courantes, comme ça le fait, ça le fait pas, ça le fait bien, ça va pas le faire. ◆  Comme transitif, faire quelque chose à quelqu'un, souvent en mauvaise part, a suscité l'apostrophe : qu'est-ce que tu me (nous) fais, tu me fais quoi ?, pour reprocher à qqn son comportement. ◆  Faire garde la valeur très large d'« obtenir un résultat », quel qu'il soit, ce qui a induit de nombreux emplois argotiques et familiers. Parmi les plus usuels, l'elliptique la faire à qqn signifie « tromper », dans on (ne) me la fait pas, faut pas me la faire (les deux en 1865). (Il) faut le faire n'a pas la même valeur et correspond à « c'était très difficile, il y fallait de l'habileté », d'où « c'est exceptionnel » (années 1970). ◆  Y faire, familier, s'emploie dans savoir y faire (1824) « être compétent, habile, malin ».
Le verbe est également utilisé avec un sujet impersonnel (1119) pour exprimer les conditions atmosphériques (il fait soleil, beau, mauvais...).
■  Faire, employé absolument, a pris au XVIIe siècle le sens de « distribuer les cartes » (c'est à vous à faire, 1627).
Se faire, dans l'usage familier, s'emploie avec un nom de personne pour complément, notamment (dans Zola, 1880) avec le sens de « posséder sexuellement » (Cf. se farcir) et « maltraiter », ou encore « battre, surclasser » (je vais me le faire, celui-là). (Il) faut se le (se la) faire (mil. XXe s.) vaut pour « il faut le (la) supporter ». Avec un complément numéral, se faire (une somme), vaut depuis les années 1880 au moins, pour « gagner ».
Le passif être fait, adjectivé (FAIT, FAITE) a pris la valeur en argot, puis dans l'usage populaire, d'« arrêté », « pris » (fait comme un rat, 1915).
Un certain nombre d'emplois sont propres à un espace francophone spécifique. Aussi, en français de Belgique, le sens de « passer (un certain temps) à une activité professionnelle » (il a fait deux ans à Mons) est plus courant qu'en français de France ; l'impersonnel il faut (et adjectif) s'emploie pour qualifier une situation générale, une atmosphère (il fait propre, il fait triste) alors qu'en France, cette construction s'applique surtout au temps (il fait beau, mauvais...). En français d'Afrique (Maghreb et Afrique subsaharienne), la valeur « avoir pour profession » (faire professeur) est plus fréquente qu'en français d'Europe où elle est marquée comme populaire (il va faire pompier). En français de Madagascar, l'expression faire un bon vaut pour « acheter à crédit ». En Afrique aussi, faire est courant pour « passer un certain temps (dans un lieu) », et « séjourner (quelque part) ». À propos du temps, on dit il fait cinq heures ou encore il fait tard là où on emploie être en français d'Europe. Pittoresque, avec l'impératif, le composé un fais dodo n. m. s'est employé en Louisiane à propos d'une soirée où l'on danse.
FAIRE n. m. (mil. XIe s., fare) désigne l'action de faire, le fait d'agir (1713) et la manière de faire une œuvre (1752).
❏  De nombreux dérivés et composés ont été formés à partir de faire ou des dérivés latins de facere.
FAISEUR, EUSE n., réfection (XIVe s.) de fesere « artisan » (1260), désigne qqn qui agit, dans des expressions ; faiseur de... remplace dans l'usage courant le terme technique fabricant. Sorti d'usage pour « créateur » (fin XIIIe s., fesiere), il s'emploie péjorativement pour désigner qqn qui se livre habituellement à une activité ; en emploi absolu (1789), il désigne celui qui cherche à se faire valoir. L'emploi au sens d'« homme d'affaires véreux » (1786, faiseur d'affaires) est devenu littéraire (Cf. Balzac, Mercadet ou le Faiseur) ; ces emplois ont motivé les valeurs argotiques de faisan*, confondu avec faisant ; la locution faiseuse d'anges (1878) s'est employée pour « avorteuse ».
FAISABLE adj., « réalisable » (1350 ; XIVe s., var. faisible), a pour contraire INFAISABLE adj. (1613).
■  FAISABILITÉ n. f., terme technique, est une francisation (av. 1974) de l'anglais feasibility (1624, de feasible, 1460, lui-même de l'ancien français).
FAIT n. m. est issu (v. 1160) du latin factum, participe neutre substantivé de facere ; son premier sens est « action humaine » et notamment « action remarquable » (1170), d'où fait d'armes, hauts faits ; (être) le fait de qqn signifiait « (constituer) sa manière d'agir » (XIIIe s.) ; l'emploi en droit au sens de « part, bien » (1283) est sorti d'usage. Fait a une autre valeur générale, désignant ce qui est arrivé, ce qui existe réellement (v. 1160), d'où le sens d'« événement » (1268), qui donne lieu à plusieurs locutions adverbiales : tout à fait (1200), en fait (1268), de fait (1283), etc. ; enfin, par extension, le fait, c'est « le sujet dont il est question » (1268). En fait avait conservé depuis l'ancien français une valeur précise : « en réalité, véritablement », souvent pour rectifier une opinion estimée fausse. Alors que de fait, par le fait, qui a vieilli, et le fait est que... ont conservé ce sens, en fait est devenu dans les années 1980-1990 une sorte de ponctuation du discours, extraordinairement fréquente à l'oral, et a perdu tout contenu précis.
■  FAIT DIVERS n. m., a été formé au XIXe s. (1838) pour désigner une nouvelle ponctuelle concernant des faits non caractérisés par leur appartenance à un genre ; son dérivé FAIT-DIVERSIER n. m. (1892), terme technique critiqué, désigne un journaliste chargé des faits divers ; on relève la variante fait-diversiste n. m. (1916).
Quelques noms ont été composés à partir de faire : FAIT-TOUT n. m. inv. ou FAITOUT n. m. « ustensile de cuisine » (1790 en Picardie) ; FAIRE-PART n. m. inv. (1830 ; 1819, billet, lettre de faire-part) ; FAIRE-VALOIR n. m. inv. « exploitation d'un domaine agricole » (1877) et « personne qui en met en valeur une autre » (1902).
Le nom AFFAIRE n. f., formé de à et faire (« ce qui est à faire »), est d'abord masculin (v. 1150), puis des deux genres aux XVIe et XVIIe s. avant de devenir féminin. ◆  Son emploi, dès l'origine, pour les questions sentimentales et galantes, est aujourd'hui archaïque ; il est très vivant pour les questions d'intérêt, d'où la valeur de « convention », « transaction ». Les questions pouvant être compliquées, affaire désigne (XVIIe s.) un ensemble de faits créant une situation embrouillée ou constituant des embarras ; par extension, le mot signifie (1690) « procès », « litige ». ◆  Au pluriel, les affaires désigne (1508) l'ensemble des questions d'intérêt public (1680, Mme de Sévigné, les affaires étrangères, ministre pour les affaires étrangères, 1690 Spanheim) ou l'ensemble des activités économiques (1788). Au niveau individuel, les affaires sont les objets personnels (1215, repris au XIXe s.) et, par euphémisme populaire, les règles d'une femme (v. 1793). ◆  Affaire s'utilise également dans les locutions avec les verbes avoir (1172, avoir affaire de « avoir besoin de ») et faire.
L'usage de ce mot usuel présente des aspects assez différents au Canada, par rapport au français d'Europe. Une affaire s'emploie pour « une chose quelconque » (Cf. truc, machin) et on entend c'est quoi, l'affaire ? là où on dirait en France, c'est quoi, le problème ? En français acadien une petite affaire vaut pour « un petit peu ». Des expressions ont pris une valeur spécifique : avoir affaire à (quelque lieu) se dit pour « avoir besoin d'aller à » ; être d'affaires signifie « savoir s'y prendre » ; avoir d'affaire à (et infinitif) « avoir de bonnes raisons pour... » ; cette affaire, familier (c't'affaire), correspond à « évidemment ».
À partir d'affaire ont été construits les dérivés (1926) AFFAIRISME n. m. et AFFAIRISTE n. et adj. ; ◆  AFFAIRÉ, ÉE est plus ancien (1584 au sens moderne ; avant 1573 « qui a besoin d'argent ») ; de cet adjectif viennent AFFAIREMENT n. m. (1865 ; attestation isolée au XIIe s.) et S'AFFAIRER v. pron. (1876).
CONTREFAIRE v. tr. (av. 1155) vient, avec influence de faire, du bas latin contrafacere « imiter » (de contra « contre », et facere). Le sens de « simuler » (XIVe s.) est vieilli, celui de « déformer » est sorti d'usage mais est resté vivant dans CONTREFAIT, AITE adj. (XIe s., contrefet) « rendu difforme ». Le verbe a aujourd'hui le sens de « reproduire par imitation », souvent pour se moquer (1549) ou, quand il s'agit de choses, dans une intention frauduleuse (déb. XIIIe s.).
■  CONTREFAÇON n. f. (1268, d'après façon) a le sens général d'« imitation pour tromper ».
DÉFAIRE v. tr. (1080, desfaire) a le sens général de « changer, supprimer (un ordre) », d'où « vaincre (qqn) ».
■  Le participe substantivé DÉFAITE n. f., sorti d'usage pour « action de se défaire de qqch. » (XIIIe s.), signifie « mise en déroute » (1475) ; DÉFAITISME n. m. et DÉFAITISTE adj. et n. (1915) ont été formés par l'écrivain russe Alexinsky pour traduire le mot qu'il avait forgé, porajentchestvo. ◆  Défaire a produit dès le XIIe s. REDÉFAIRE v. tr. (1174).
REFAIRE v. tr., « faire de nouveau » (v. 1155), « remettre en état » (v. 1160), a pris au XVIIe s. la valeur seconde de « faire autrement » (1611) ce qui est jugé mal fait. Familièrement, le verbe signifie « attraper (qqn) » (1846 ; 1700, « duper ») ou « voler (qqch.) » (1800 ; → réfection).
FORFAIRE v., de fors (du latin foris « dehors* »), signifie « commettre (un délit) » (fin Xe s.), emploi littéraire et intransitif (v. 1120) ; il est archaïque pour « agir en dehors du devoir » (1080). En droit féodal, il voulait dire « perdre un bien en punition d'un forfait » (1283, tr.).
■  Le dérivé 1 FORFAIT n. m. désigne un crime détestable (fin Xe s., forsfait) ; l'idée d'une violation d'un devoir, attachée au moyen âge à FORFAITURE n. f. (1283, forfeture), demeure dans l'usage juridique du terme (1690).
MALFAIRE v. intr. (XIIe s.), « nuire », s'est maintenu jusqu'au XVIIIe s. ; reste vivant MALFAISANT, ANTE adj. au sens de « méchant » (XIIe s.) et appliqué à une chose dont les effets sont nuisibles (1686) — d'où MALFAISANCE n. f. (1738), littéraire.
■  L'évolution est parallèle pour les emplois avec MÉFAIRE v. intr. (v. 1130, mesfaire) « faire une mauvaise action », sorti d'usage, et son participe passé substantivé MÉFAIT n. m., toujours utilisé aux sens d'« action mauvaise » (1273 ; v. 1120, mesfait) et de « résultat pernicieux de qqch. » (1902). Les verbes malfaire et méfaire ont disparu alors que le nom d'agent est resté vivant.
■  MALFAITEUR, TRICE n. et adj. est la réfection savante (v. 1155) de l'ancien français maufaiteur d'après le latin malefactor « homme nuisible, qui commet des actes criminels », dérivé de malefactum, supin de malefacere « mal agir » d'où vient malfaire, encore vivant dans malfaisant. ◆  L'histoire du mot a distendu son rapport de contraire avec bienfaiteur : le sens de « personne qui commet des actes criminels, des délits » — avec lequel il a supplanté le type malfaisour, et malfaisant, méfaisant ainsi que maléfique — domine nettement le sens moral de « personne nuisible » (v. 1200). En français moderne, le nom est synonyme de délinquant, notamment de voleur.
SURFAIRE v. tr. (XIIe s. : sorfeire v. 1174), « estimer à un prix exagéré », s'emploie surtout au présent de l'indicatif et à l'infinitif ; il s'utilise aussi au figuré (1749), seul emploi moderne (1690) de SURFAIT, AITE adj. qui signifiait d'abord (1170) « excessif, immodéré ».
ENTREFAITE n. f., participe passé substantivé de l'ancien français entrefaire « faire dans l'intervalle », n'est plus en usage au sens d'« intervalle de temps » (déb. XIIIe s.) ; il ne s'emploie que dans la locution sur ces entrefaites (XVIe s.).
BIENFAIT n. m. représente (1120) le participe passé substantivé (d'après le latin benefactum « bonne action ») de l'ancien bienfaire, verbe intransitif, « être vaillant au combat » (XIIIe s.) et « faire du bien aux autres » dont reste, peu utilisé, le nom invariable bien-faire (1265), courant jusqu'au XVIIe siècle. Au sens de « donation d'argent », le mot est aujourd'hui rare ; il est plutôt employé dans le domaine moral et, au pluriel, pour « action heureuse » (1752).
■  BIENFAISANT, ANTE adj. (1170), « qui fait du bien », appartient aujourd'hui à un style soutenu. ◆  BIENFAISANCE n. f. (XIVe s.), peu employé jusqu'au XVIIe s., a été repris (1725) par l'abbé de Saint-Pierre.
■  BIENFAITEUR, TRICE n. (1181) a été concurrencé jusqu'à l'époque classique par bienfacteur, bienfaicteur, construits à partir du latin benefactor.
❏ voir FACTOTUM, 2 FORFAIT, PARFAIRE.
FAIR-PLAY n. m. inv. est emprunté (1849, fair play) à l'anglais fair play, qui s'emploie à propos des jeux et de toute situation où des règles doivent être respectées, et est composé (XVIe s.) de fair « juste, loyal » et play « jeu ».
❏  Fair-play, « franc-jeu » (équivalent officiel, 1973), s'est répandu comme adjectif (1938) — l'anglais ne le connaît que comme nom — sans doute à cause de l'incertitude sur la possibilité d'employer franc-jeu comme adjectif : il, elle est très fair-play.
L FAISAN, ANE n. est l'aboutissement (v. 1170, faisant) du latin phasianus, emprunt au grec phasianos ornis, proprement « (oiseau) du Phase », rivière de la Colchide où les Argonautes sont censés l'avoir découvert.
❏  Le mot, qui a pris son orthographe moderne au XVIe s. (1552), garde le sens de l'étymon. Faisane (1732 ; 1552, faisanne) s'est substitué à faisande (1493) pour désigner la femelle de cet oiseau.
Les emplois figurés et argotiques du mot en France (« escroc, tricheur », « organisateur de jeux truqués »), vivants de 1850 à 1930 environ, proviennent d'un jeu sur faisant « qui fait », aux sens argotiques. Cf. faiseur.
❏  On emploie les dérivés FAISANDEAU n. m. (1393 ; 1373, faisanteau) et FAISANNEAU n. m. (XVe s.) pour désigner le jeune faisan. Le mot a fourni les dérivés techniques FAISANDERIE n. f. (1694 ; 1669, fézanderie) et FAISANDIER n. m. (1700 ; 1552, faisannier).
FAISANDER v. tr. (1393) présente un -d- qui vient d'une analogie avec les dérivés des mots en -and ; son participe passé a pris au XIXe s. un sens figuré, « malsain, corrompu », par allusion au début de corruption du gibier, qui n'est pas consommé frais. ◆  Il en va de même pour son dérivé FAISANDAGE n. m. (1852 au fig., Flaubert). ◆  Les deux mots ont eu en argot la valeur de « escroquer, voler » (1901) et « escroquerie, vol ».
L FAISCEAU n. m. représente (1549) une réfection de faissel, fassel (XIIe s.), issu d'un latin populaire °fascellus, dérivé du latin classique fascis « paquet lié par une corde », le plus souvent « fagot, botte » et « fardeau » (→ faix).
❏  Faisceau désigne un assemblage de choses liées ensemble ; le mot s'est spécialisé avec cette valeur à partir du XVIIe siècle. C'est un terme didactique (antiquités romaines) employé au pluriel (1662) pour désigner l'assemblage de verges autour d'une hache, symbole de l'autorité d'un grand magistrat, le licteur* — d'où sa reprise pour l'emblème du fascisme italien, analogue au faisceau romain (→ fascisme). ◆  Il s'emploie pour un assemblage de fusils disposés en pyramide (1851), en physique (1865, puis XXe s. pour faisceau hertzien, faisceau d'électrons) et en mathématiques (1904). Il a le sens figuré d'« assemblage d'éléments abstraits » (Cf. 1835, faisceau de preuves).
L FAÏSSE n. f., attesté au XIIIe s. en Champagne, correspond à faïsse en occitan, attesté antérieurement (XIIe s.) et est issu comme lui du latin fascia « lien, bande » et « objet allongé », de fascis (→ faisceau). En français régional des pays occitans (des Alpes de Provence au Gard), il désigne un petit mur de pierres sèches et, par métonymie, un champ en terrasse retenu par ce muret.
L FAISSELLE n. f. est la réfection (fin XIVe s.) de fissele (fin XIIe s.), feiscelle, foisselle (XIIIe s.), issu du latin fiscella « petite corbeille » et, en particulier, « forme d'osier pour égoutter les fromages », diminutif de fiscus « corbeille » (→ fisc).
❏  Conservé dans les dialectes avec le sens latin, le mot a été récemment remis à la mode.
G FAÎTE n. m. est d'abord apparu (1135) sous les formes fest, n. m. et feste, n. f., issues du francique °first (Cf. bas allemand verst « comble d'un édifice » ; allemand First) ; il a été refait (1547) d'après le latin fastigium, proprement « toit à deux pentes ».
❏  En dehors de son acception technique de « poutre formant l'arête supérieure d'un comble », faîte s'emploie pour désigner la partie la plus élevée de qqch. de haut (1636), spécialement d'un édifice (1680). Le sens figuré (au faîte de la gloire) est contemporain (1640).
❏  FAÎTAGE n. m., ancien terme de droit féodal (1233, festage), formé avec le suffixe collectif -age, s'emploie au sens technique de faîte (1676) et, littéraire, pour la toiture entière d'un bâtiment (1680).
■  Un autre dérivé, FAÎTIÈRE n. f. (1287, festière) et adj. (1575), s'applique à ce qui appartient au faîte, d'où lucarne faîtière (1676) ou faîtière n. f. (1845).
■  FAÎTIER, IÈRE adj. « relatif au faîte » signifie « central » en français de Suisse, peut-être d'après l'alémanique Dachorganisation « organisation de contrôle » — qui coiffe, comme le toit (de Dach « toit » et organisation). On parle d'organisations faîtières, regroupant des organismes locaux, régionaux, etc.
■  FAÎTEAU n. m. a d'abord eu le sens de « tuile faîtière » (1521 ; 1329, festel « faîte », hapax), sorti d'usage. C'est le nom d'un ornement qui recouvre le faîtage (1824).
L FAIX n. m. est la réfection (v. 1360) de fais (1080), issu du latin fascis au sens de « fardeau », dont la racine est dans toutes les langues romanes et est passée aux langues germaniques (→ faisceau).
❏  Il est vieilli ou littéraire au sens propre, conservé dans quelques expressions, comme plier sous le faix, et au sens figuré (XIIe s.) de « charge peu supportable ».
❏  Faix a été introduit dans quelques composés. PORTEFAIX n. m. inv. désignait (1270, portefays) celui qui portait les fardeaux ; c'est devenu un mot d'historien ou de description pittoresque.
■  SURFAIX n. m., terme technique (1542), est le nom d'une pièce de harnais.
■  ARRIÈRE-FAIX n. m. inv. (1539) est un terme d'obstétrique.
❏ voir AFFAISSER.
FAKIR n. m. est emprunté (1653 ; Furetière 1690, faquir) à l'arabe faqîr « pauvre » ; l'ancien français connaissait foqui (XIIIe s.) « homme versé dans la connaissance de la loi divine », qui vient d'un autre mot arabe faqīh, mais dont le souvenir a pu interférer avec le nouvel emprunt.
❏  Du sens religieux, « ascète se livrant à des mortifications en public », on passe par extension et influence des pratiques de certains ascètes indiens à l'acception courante (XXe s.) de « personne qui exécute en public des exercices difficiles et des tours relevant de l'illusionnisme ».
❏  Le dérivé FAKIRISME n. m. (1890) est rare.
FALACHA ou FALASHA adj. et n. est un emprunt à l'amharique (langue majoritaire de l'Éthopie) où le mot signifie « séparé », « différent ». Le mot qualifie et désigne un membre d'une population du nord de l'Éthiopie, pratiquant une forme ancienne de judaïsme. Les Falachas ont été reconnus comme juifs par les autorités religieuses d'Israël en 1973, et beaucoup ont émigré en Israël dans les années 1980, époque où l'usage du mot s'est répandu internationalement.
FALAFEL n. m., est emprunté à un mot arabe, pluriel de filfil « poivre ».
❏  Le mot, répandu par les Libanais francophones, désigne tant au Liban qu'en Afrique une boulette de farine de pois chiches et de fèves, épicée. Il est connu en France grâce aux restaurants de cuisine libanaise.
? FALAISE n. f. apparu au XIIe s. (1182), s'est aussi écrit faleise (v. 1130), faloise et falise. D'abord mot dialectal des côtes normandes et picardes, il pourrait venir d'un francique °falisa, correspondant à l'ancien haut allemand felisa (Cf. l'allemand Fels « roche »). P. Guiraud rapproche faloise de l'ancien français faloise « tromperie », d'après faillir dont la variante normanno-picarde falir est issue du latin fallere, la falaise étant un rocher qui « fait défaut, se dérobe » (→ 2 faille, à faillir).
❏  Le mot est usuel pour désigner un escarpement rocheux bordant la mer.
? FALBALA n. m. est peut-être emprunté (1692) au provençal farbella « frange, dentelle » (Cf. l'italien fardella « pli de vêtement ») qui remonterait, comme l'ancien français felpe « guenilles », variante de frepe (→ 1 fripe), à un groupe de mots contenant la suite f-l-p, désignant des choses de peu de valeur (Cf. latin tardif faluppa « brin de paille », « pacotille », Xe s.). Pour P. Guiraud, falbala étant courant en Normandie, Picardie et Wallonie, pourrait être un composé de baller, au sens de « pendre », « être suspendu » en wallon et en normand, et de far-, qui indique l'idée de mouvement (→ farandole), le falbala désignant une bande de tissu qui se balance quand on marche.
❏  Quoi qu'il en soit, le mot ne s'emploie plus pour « bande d'étoffe ornant le bas d'une robe » (1692) ; il a pris un sens extensif au pluriel (1844), « ornement de toilette », puis le sens péjoratif d'« ornement prétentieux de mauvais goût » (1872).
FALDISTOIRE n. m. → FAUTEUIL
FALLACIEUX, EUSE adj. est un emprunt savant (v. 1450) au latin impérial fallaciosus « trompeur », dérivé de fallacia « ruse, tromperie », de fallax, -acis, adj., « trompeur, perfide », dérivé de fallere (→ faillir). Fallacia a été emprunté sous la forme fallace n. f. (1223) « tromperie », encore en usage à l'époque classique.
❏  Fallacieux, rare au XVIIe s. et repris au XVIIIe s., a gardé le sens du latin ; par extension, il signifie aussi « illusoire » en parlant d'une chose. Il a eu à l'époque classique (1647) le sens de « fourbe ».
❏  Il a fourni FALLACIEUSEMENT adv. (1544).
L FALLOIR v. impers. apparaît (v. 1160) à l'indicatif présent sous la forme falt. Le latin populaire °fallire « manquer à », altération du latin classique fallere « tromper, manquer à, échapper à », a abouti à fallir (→ faillir) et falloir ; les formes du verbe ont été construites au XVe s. et au XVIe s., d'après la 3e personne du singulier il faut (du latin °fallit), sur le modèle de valoir.
❏  On relève au XIIe s. le sens de « manquer » dans la construction peu s'en faut (v. 1160, petit en faut que), encore en usage à côté de il s'en faut de peu, de beaucoup ou de tant s'en faut. ◆  Parallèlement (1165), falloir est employé pour exprimer la nécessité, sens dominant ensuite. Il faut (que) au sens de « il est inévitable (que) » (mil. XVe s.) a éliminé deux autres verbes impersonnels de même sens, estovoir (XIe s.) et estre metier (XIIe s.). ◆  La locution adverbiale comme il faut « comme il convient », est d'abord à l'imparfait (1548) ; l'emploi de la locution adjective est plus tardif (1790, des gens comme il faut) ; elle est à peu près lexicalisée. À partir du XVIIe s. (v. 1657), il faut, suivi de l'infinitif, exprime une supposition propre à expliquer un fait, une situation. Avec l'omission de il, on relève les locutions familières faut voir, faut le faire !, usuelles dans la langue parlée.
1 FALOT n. m. est emprunté (1371) à l'italien toscan falò « feu allumé pour fêter qqch. », issu de °farò (Cf. l'ancien catalan faro, l'espagnol faron, le portugais farol) — le r passant à l sans doute en pisan, dialecte où ce phénomène est régulier ; °farò représente une altération du grec phanos « torche, lanterne » (→ fanal), la transformation du n en r étant due au croisement avec pharos (→ phare).
❏  Le français falot signifie d'abord « torche, grosse lanterne », spécialement comme terme de marine (1616), et se dit en argot militaire (1890) pour « conseil de guerre » (passer au falot).