L FANFRELUCHE n. f., employé chez Rabelais (1534), s'est substitué à l'ancien français fanfelue (1174-1178), fanfeluce chez Christine de Pisan (1405). Le mot est issu d'un latin de basse époque famfaluca (IXe s.), forme conservée par l'italien, altération du grec pompholux « bulle d'air » (→ farfelu), que l'on rattache à un groupe de mots baltes exprimant l'idée de gonflement, ce qui implique une racine expressive indoeuropéenne.
❏  Du premier sens de « bagatelle », on passe (1541) à celui de « petite chose qu'emporte le vent », puis au sens moderne (1611) de « petit ornement qu'on utilise dans la toilette » ; le mot aujourd'hui est le plus souvent employé au pluriel et à propos de la toilette féminine (1680), avec une valeur proche de celle de falbala.
G FANGE n. f. est une réfection (v. 1170) de fanc n. m. « boue liquide » (fin XIe s.), par la forme masculine le fange (v. 1120). Le mot serait à rattacher à un type germanique °fanga, variante de °fanja, que l'on retrouve dans l'ancien gascon fanha, et qui représente le pluriel du gotique fani « boue » ; une autre forme °fannja, qui a donné l'allemand Fenn « terrain marécageux », a abouti en wallon à fagne (voir fagne). P. Guiraud remarque que fange existe avec le sens de « pourriture, pus » en franco-provençal et en franc-comtois, ce qui suggérerait un rapprochement avec le latin tardif famix « abcès, meurtrissure ».
❏  Fange, « boue épaisse », est sorti d'usage au figuré pour « état de déchéance » (1500) ; le mot est d'emploi littéraire au sens de « souillure morale » : couvrir qqn de fange (1770).
❏  Le dérivé FANGEUX, EUSE adj. a le sens propre (XIIe s. ; v. 1160, fanjos) et le sens figuré (v. 1770) de fange.
FANION → FANON
G FANON n. m., réfection (1418) de fanun (v. 1170), est issu du francique °fano « morceau d'étoffe » (qui a abouti à l'allemand Fahne « drapeau »), par l'intermédiaire du bas latin fano « pièce d'étoffe » (v. 720) et « manipule d'un prêtre » (IXe s.).
❏  Il est d'abord employé comme terme de liturgie pour désigner le manipule du prêtre (v. 1170) et plus tard (1418) les deux pendants de la mitre de l'évêque. Le sens de « morceau d'étoffe » est conservé quand fanon désigne (1549) la pièce que l'on suspend au bout d'une lance ; mais on emploie plutôt en ce sens GONFALON n. m. (XIIIe s.) ou gonfanon, d'un ancien haut allemand gundfano « étendard de combat » (de gund « bataille » et de °fano). ◆  C'est par une image que fanon a pris le sens de « repli de la peau qui pend sous le cou de certains animaux » (1538 ; 1310-1340 en parlant du coq) — une bannière étant faite d'une bandelette à pendants — puis de « lames cornées garnissant la bouche de certains cétacés » (1685).
■  Il s'est opéré une répartition des sens entre fanon et FANION n. m. (1673 ; feinion, 1180), autre forme du mot (par changement de suffixe) ; aujourd'hui seul fanion désigne un petit drapeau servant ou non d'emblème ; gonfalon s'emploie encore quand on parle du moyen âge.
FANTAISIE n. f., réfection graphique (v. 1450) de fantasie (v. 1200), forme courante jusqu'au XVIe s., est emprunté au latin classique fantasia ou phantasia « image, concept », et « vision » en bas latin, mot employé notamment dans les traductions latines des textes de Platon et d'Aristote. Le latin l'a repris du grec phantasia « apparition », d'où « imagination », « image qui s'offre à l'esprit », qui appartient à la famille de phainein « apparaître » (→ fantasme, fantastique ; phatique, phéno-).
❏  Fantaisie s'est employé (v. 1200) au sens de « vision », puis d'« imagination » (XIVe s.), jusqu'à l'époque classique. En moyen français (1370), le mot prend par métonymie le sens d'« objet que forme l'imagination », d'où de fantaisie « par l'imagination » (1718), emploi sorti d'usage. L'idée d'imagination s'opposant à celle de contrainte, fantaisie s'emploie pour nommer un goût passager, un caprice (fin XVe s.), valeur commune aux divers emplois du mot. ◆  Il désigne une pièce musicale de forme libre (1585), dite aussi caprice, une œuvre créée sans suivre de règles formelles (1636), un amour passager (XVIIe s.) et une chose peu utile mais originale, qui plaît (1690) ; de là vient de fantaisie au sens moderne (1798, objets de fantaisie). Le mot, d'abord mélioratif, en vient à désigner (XXe s.) la tendance à agir par caprice, qu'il soit ou non employé de façon favorable.
❏  Le dérivé FANTAISISTE n. a désigné (1845) un artiste, un écrivain n'obéissant qu'à sa fantaisie et s'applique à qqn qui agit sans suivre les usages, qui n'est pas sérieux (1850, adj. ; 1855, n.). ◆  C'est le nom (mil. XXe s.) d'un artiste de music-hall qui se produit surtout dans des numéros comiques.
■  Par calembour sur 1 fantoche, un adjectif populaire 2 FANTOCHE « de fantaisie », est en usage dans l'armée (1915).
FANTASIA n. f. apparaît (1843) dans le titre d'un tableau de Delacroix, Une fantasia au Maroc, exposé en 1842 ; c'est une adaptation de l'arabe d'Afrique du Nord fantaziya « panache, ostentation », auquel Delacroix attribua le sens de « divertissement équestre de cavaliers arabes » ; le mot arabe est probablement emprunté à l'espagnol fantasia « imagination » et « vanité, arrogance », de même origine que fantaisie.
Le mot français étant emprunté par la langue anglaise, fantasy a pris en littérature anglo-saxonne le sens, attesté en 1949 de « genre d'imagination où l'auteur évoque un univers légendaire original, mais de forme traditionnelle ». Ce sens n'a pas trouvé d'autre expression en français que l'anglicisme FANTASY n. f. (1982).
FANTASMAGORIE n. f. est, selon Bloch et Wartburg, un mot formé savamment (1797) du grec phantasma « apparition, fantôme » (→ fantasme) et de (allé)gorie, qui pouvait désigner des représentations plastiques. P. Guiraud penche pour une composition populaire à partir de fantasme « fantôme, hallucination visuelle » et gourer, agourer « tromper (en falsifiant la marchandise) » ; une fantasmagorie serait une fausse et trompeuse apparition ; mais la première hypothèse est sociologiquement plus vraisemblable.
❏  Les premières fantasmagories (1797) étaient des images lumineuses et mobiles créées à l'aide d'une lanterne magique, le fantascope. Le mot prend le sens de « spectacle surnaturel et fantastique » (1810) et (1835), désigne dans les arts l'abus des effets fantastiques.
❏  Le dérivé FANTASMAGORIQUE adj. est contemporain du nom (1798).
FANTASME n. m. est emprunté (fin XIIe s.) au latin impérial phantasma « fantôme, spectre », en bas latin « image, représentation par l'imagination », transcription du grec phantasma « apparition, vision, fantôme », de la famille de phainein « apparaître » (→ fantaisie). La graphie phantasme a été aussi usuelle ; la tentative de distinguer deux sens selon la graphie, en psychanalyse, a échoué.
❏  Introduit avec le sens d'« illusion », fantasme a signifié aussi « fantôme » (XIVe s.) [→ fantôme]. Il devient un terme médical, avec le sens d'« image hallucinatoire » (1832) ; son emploi s'est restreint au sens de « production de l'imaginaire qui permet au moi d'échapper à la réalité » (1866, Amiel) ; le développement de la psychanalyse, où le mot marque l'opposition entre imagination et perception réelle, a rendu cette valeur courante au XXe s. (il traduit chez Freud l'allemand Phantasie).
❏  Le dérivé FANTASMATIQUE adj., attesté isolément au sens de « fantomatique » (1604), s'applique (1837) à ce qui est fantastique, irréel ; c'est le sens didactique, « qui relève du fantasme » (mil. XXe s.), qui domine aujourd'hui.
■  FANTASMER v. intr., « avoir des fantasmes » (v. 1960), s'emploie aussi transitivement.
❏ voir FANTASMAGORIE, FANTÔME.
FANTASQUE → FANTASTIQUE
FANTASSIN n. m. est emprunté (1548, Noël du Fail, Contes d'Eutrapel) à l'italien fantaccino « soldat d'infanterie » (1541), dérivé de fante, qui signifie aussi « valet » et est une forme abrégée de infante « jeune guerrier » et « petit garçon », du latin infans, -antis (→ enfant ; fantoche). La forme fantachin a été aussi utilisée (1578). Des resuffixations populaires ont produit fantaboche (1916) puis fantabosse (1918), sortis d'usage.
FANTASTIQUE adj. et n. m. est emprunté (mil. XIVe s.) au bas latin fantasticus, emprunt au grec phantastikos « capable de former des images, des représentations » ou « qui imagine des choses illusoires », dérivé de phantazesthai « s'imaginer » (de phainein « apparaître », → fantaisie).
❏  Fantastique s'applique (mil. XIVe s., adj. ; 1738, n. m.) à ce qui n'existe pas dans la réalité et a signifié « fou, insensé » (1536, n. m.). Ces valeurs viennent de ce que le produit de l'imagination est considéré comme un écart opposé à la raison. Par extension, le mot qualifie ce qui paraît imaginaire (1580), ce qui présente une apparence étrange. On en vient au XIXe s. au sens courant d'« étonnant, incroyable » (1833) et à l'emploi du mot comme intensif. ◆  C'est le développement d'un type particulier de nouvelles et de romans, jouant sur l'extraordinaire, la rupture avec l'ordre reconnu du monde, qui explique son emploi nominal (1821, Charles Nodier) pour caractériser un genre littéraire puis cinématographique, le fantastique.
❏  FANTASTIQUEMENT adv. (XVe s.) a suivi l'évolution de l'adjectif.
FANTASQUE adj. représente une réfection (XVe s., puis 1575) d'après fantastique de fantaste, forme abrégée de fantastique. L'adjectif s'applique à une chose qui surprend par son apparence bizarre et est employé chez Montaigne pour « fantastique » (1580) ; il qualifie couramment une personne sujette à des sautes d'humeur (1606).
■  Son dérivé FANTASQUEMENT adv. (1602) est littéraire et rare.
1 FANTOCHE n. m. est un emprunt (1842) à l'italien fantoccio « poupée, marionnette » (1552) et « personnage inconsistant » (av. 1584), diminutif de fante « valet » (→ fantassin), de infante issu du latin infans, -antis (→ enfant).
❏  Fantoche désigne une marionnette articulée (couramment, on dit marionnette). Au XVIIIe s., on a employé dans ce sens technique fantochin (1769) et fantochini (1792) — de l'italien fantoccino, -ini, diminutif de fantoccio. Le sens figuré moderne de « personnage inconsistant » apparaît à la fin du XIXe siècle.
2 FANTOCHE adj. → FANTAISIE
FANTÔME n. m. vient (v. 1130, fantosme) d'une forme méridionale °fantauma, issue du grec de Marseille (Phocée) par où le mot a pénétré, à partir du grec ionien °phantagma, correspondant à l'attique phantasma « apparition, vision » (→ fantasme) et « fantôme », repris par le latin impérial.
❏  Fantôme est introduit en français avec le sens d'« illusion trompeuse », qui existe déjà en latin, et désigne (1165) l'apparition surnaturelle d'une personne morte ; par extension, le mot s'emploie pour « idée, être imaginaire » (1586) et à propos d'une personne ou d'un animal squelettique (1690). ◆  Il a pris des acceptions techniques, par exemple celle de « fiche pour matérialiser l'absence d'un livre sorti d'un rayon » (1906).
❏  FANTOMATIQUE adj., dérivé (1807) d'après le radical grec du génitif, a pris un sens extensif, rejoignant presque fantastique.
■  FANTOMAL, ALE, AUX adj. (1883, Daudet) est un quasi-synonyme plus littéraire.
❏ voir FANTASMAGORIE, FANTASME.
FANZINE n. m. est un emprunt (1963) à un mot-valise américain (1949), formé de fan(atic) « amateur » et de (maga)zine « revue ».
❏  Fanzine, « petite revue (de bandes dessinées, de science-fiction) éditée par des amateurs », s'oppose à PROZINE n. m. « revue éditée par des professionnels » (v. 1970), d'emploi très spécialisé en français, comme zine, qui recouvre les deux catégories.
L FAON n. m. représente la réfection (1549) de feün (v. 1120), foün (v. 1170), aboutissement du latin populaire °fetonem, accusatif de °feto, dérivé du classique fetus « enfantement » et « portée (des animaux) » (→ fœtus). On trouve aussi la graphie fan au XVIe siècle.
❏  Le mot a désigné jusqu'à l'époque classique le petit de toute bête (faon pour lionceau est chez La Fontaine) ; il est spécialisé au sens de « petit d'un cervidé », ceci dès les premiers emplois (v. 1170).
❏  Le dérivé FAONNER v. intr. (1121-1134, feüner) signifie « faire ses petits » en parlant de la biche.
FAQUIN n. m. serait un dérivé (1534, Rabelais), selon Wartburg, de l'argot facque « poche, sac » que l'on trouve au XVe s. (les compaignons de la facque) et que Rabelais utilise encore ; les deux formes viendraient du moyen néerlandais fak « poche » (Cf. allemand Fach « compartiment, case »). Pour P. Guiraud, l'existence du provençal fasco « tas de gerbes », celle du moyen français fasqué « chargé » et de l'ancien français sosfachier « fléchir sous un fardeau », dirigent vers la racine fasc-, du latin fascis « faix » (→ faix), par le biais d'un verbe °fascare ou °fascicare, qui expliquerait le sens de faquin.
❏  Faquin a désigné un portefaix (1534), sens vivant en italien (1442, facchino). ◆  Le sens moderne, d'emploi littéraire, « homme méprisable » (1561), serait à rapprocher d'une autre acception du mot, « mannequin (de paille ?) utilisé dans les joutes » (1606), qui supposerait aussi le latin fascis.
1 FAR → 1 FARCE
2 FAR → FARINE
FARADIQUE adj. a été formé (1851) sur le nom du physicien et chimiste anglais Michael Faraday (1791-1867), qui énonça les lois quantitatives de l'électrolyse et montra la généralité des propriétés magnétiques de la matière.
❏  L'adjectif s'applique à un courant alternatif obtenu par induction et se dit de ce qui se rapporte aux théories de Faraday.
❏  Sur le nom du physicien ont été formés d'autres termes didactiques, FARADISATION n. f. (1858) en médecine, FARAD n. m. (1874 ; 1859, autre sens) « unité de capacité électrique », et FARADAY n. m. (1873), nom d'unité employé dans le domaine de l'électrolyse.
FARAMINEUX, EUSE adj. est dérivé (av. 1521) de faramine « bête nuisible » (XIVe s.), surtout employé dans la locution bête faramine, dans l'Ouest et en Bourgogne, nom d'un animal fantastique et redoutable, analogue à la Tarasque provençale. Faramine est emprunté au bas latin feramina, pluriel neutre (pris pour un féminin singulier) de feramen (VIe s.), dérivé du latin classique fera « bête sauvage » (→ fier). Feramen avait abouti en ancien français à ferain (XIIe s.) et à l'ancien provençal feram dont dérive le méridional faramio « bête sauvage ».
❏  Cet adjectif, attesté isolément avec un sens obscur au XVIe s., est repris et répandu au XIXe s. (1834, pharamineux). Il qualifie ce qui étonne par son étrangeté (1892, faramineux) et, par extension, se dit de ce qui est anormalement important (1865).