L
FILLEUL, EULE n. est une réfection (XIIIe s.) de filiol (1121), filluel (XIIe s.), issu du latin classique filiolus « fils (en bas âge, ou chéri) », diminutif de filius (→ fils), et qui a pris en bas latin la valeur de « personne qui a été tenue sur les fonts baptismaux ».
❏
Filleul conserve le sens du bas latin et est attesté (XVIe s.) dans l'emploi du latin classique, sorti d'usage.
FILM n. m. est un emprunt à l'anglais film « membrane » (XIe s.), de l'ancien anglais filmen. Ce mot trouve des correspondants dans de nombreuses langues indoeuropéennes (vieil allemand fell, vieil islandais fjall, lituanien plenè, latin pellis « peau », radical du grec pelma « semelle [en peau] », etc.). On rattache ces termes à une racine °pel « envelopper ». En anglais, film a signifié « feuille très mince » à partir du XVIe s. et est attesté en photographie depuis 1845, pour « couche de gélatine étendue sur la plaque ou le papier », d'où « pellicule pour la photographie » (v. 1880).
❏
Ce dernier sens est repris en français (v. 1889). Film désigne ensuite une « pellicule pour le cinéma » (1896) et par métonymie (1896) une œuvre cinématographique puis l'art cinématographique (l'art du film). Les variétés de films sont exprimées par toute une terminologie, grâce à des adjectifs et des compléments (documentaire, de fiction), et des qualificatifs divers, parmi lesquels film X (pornographique). Au figuré, le mot signifie (1922) « déroulement d'événements », avec des valeurs figurées (fin XXe s.) comme j'ai pas suivi le film, « l'histoire, l'affaire », ou il a rien compris au film.
◆
Dans un emploi technique réemprunté à l'anglais, film désigne (1931) une mince couche d'une matière (film d'air ; film dentaire, 1933) ; l'équivalent français proposé est feuil.
❏
Le français a produit des dérivés et des composés.
■
FILMER v. tr. signifie « enregistrer par une prise de vues cinématographique » (1908) et, en technique, « recouvrir d'une pellicule, d'un film » (v. 1930).
■
Du verbe dérivent FILMAGE n. m. (1912), FILMEUR, EUSE n. (1917), rare, et FILMABLE adj. (1925).
■
FILMIQUE adj. « relatif au film, au cinéma » (1936) est didactique comme FILMIQUEMENT adv. (1952).
◈
Plusieurs composés, où
film a le sens de « œuvre ou art cinématographique », sont entrés dans l'usage courant.
■
FILMOGRAPHIE n. f., composé avec -graphie, d'après bibliographie, a signifié (1922) « cinématographie » et désigne aujourd'hui (1947) la liste des films d'un auteur, d'un acteur, d'un genre, etc.
■
FILMOTHÈQUE n. f. (1969 ; 1958, filmathèque) désigne une collection de microfilms — et non pas de films — (Cf. cinémathèque, plus courant).
■
FILMOLOGIE n. f. (1946) « étude du cinéma » est un terme didactique, comme son dérivé FILMOLOGIQUE adj. (1946).
◈
MICROFILM n. m. (1931) désigne une reproduction réduite de documents sur film ; en dérive
MICROFILMER v. tr. (1931).
FILON n. m. est un emprunt (1562) à l'italien filone, terme de minéralogie (av. 1537), augmentatif de filo « fil », du latin filum (→ fil).
❏
Le mot désigne d'abord une masse allongée de substances minérales, d'où son emploi figuré, comme source, veine (av. 1791). Il signifie « moyen de s'enrichir », d'abord en argot (1882, Goncourt, « affaire pour malfaiteurs »).
❏
Le dérivé FILONIEN, IENNE adj. (1877) est didactique.
?
FILOSELLE n. f., réfection (1564) de filloisel n. m. (1369), filozelle (1542), est un emprunt à l'italien dialectal filosello « bourre de soie » (à Sienne, v. 1301) ; on relève aussi la forme follisello (XIVe s., « cocon de ver à soie ») que l'on peut comparer à l'italien filugello. Le mot est peut-être issu d'un latin populaire °fillocellus « petit sac », altération du classique folliculus, diminutif de follis « sac » (→ follicule et fou), avec attraction de filo « fil ». Selon P. Guiraud, filoselle serait plutôt une forme apparentée à filasse, filoche, d'un latin populaire °filocellus « petit sac » d'où « enveloppe de la larve d'un insecte », mot qui correspondrait à une variante de °funicella (→ ficelle).
❏
Filoselle désigne de la bourre de soie mêlée à du coton, employée en bonneterie.
?
FILOU n. m., attesté au XVIe s. (1564), pourrait être une forme dialectale de fileur, dérivé de filer « étirer en fil » (→ filer) — filer la carte signifiait autrefois « tricher ». Pour P. Guiraud, le filou est celui qui attire ses victimes dans ses filets ; ce serait un dérivé d'enfiler au sens de « tromper » (encore dialectal, 1845), qui correspondrait au moyen français enfilé « pris dans un filet » ; cette hypothèse semble inutilement complexe.
❏
Filou désigne d'abord une personne qui triche au jeu ou vole avec ruse et par extension, d'abord comme adjectif (1714) une personne malhonnête ; le mot s'applique difficilement aux femmes. Il s'emploie familièrement (fin XIXe s.) en parlant d'un enfant espiègle, comme gredin, coquin, bandit (petit filou !).
❏
Le dérivé FILOUTER v. tr., vieilli au sens de « voler adroitement (qqch. à qqn) » (1656), signifie aujourd'hui « voler (qqn) » (1688) ; sur filouter ont été construits FILOUTAGE n. m. (v. 1673-1676), rare, et FILOUTERIE n. f. (1644) vieilli.
L
FILS n. m. représente (v. 980) le cas sujet de l'ancien français (fil correspondant au cas régime de filium) ; fieu (XIIIe s.) est la forme picarde, encore utilisée dialectalement. Le mot est issu du latin classique filius « fils, enfant de sexe masculin » et en bas latin au pluriel « descendants », dont le féminin est filia (→ fille). Comme fecundus (→ fécond) filius se rattache à une racine indoeuropéenne °dhē- « téter, sucer » ; il a d'abord signifié « enfant qu'on élève, nourrisson », avant de remplacer le nom indoeuropéen initial du fils, peut-être frappé d'interdit.
❏
Fils s'emploie dans
fils de Dieu (v. 980,
fils Deu),
fils de l'homme, désignant Jésus-Christ. Hors d'un contexte religieux il s'applique (v. 1050) à tout être humain de sexe masculin considéré par rapport à son père et à sa mère ; il figure avec cette valeur dans diverses locutions comme
le fils de la maison.
■
Fils reprend également le sens latin de « descendant » (v. 1120) et par figure le mot s'emploie au sens de « résultat, effet » en parlant de choses du genre masculin (fin XIXe s.), ainsi que dans des expressions comme fils spirituel « disciple », fils de ses œuvres « homme qui a réussi par lui-même et non par sa famille » qui s'oppose à fils de famille (1606) « enfant de famille aisée » et fils à papa, locution péjorative récente.
■
Par extension, fils s'est employé depuis le XIIe s. (v. 1196) pour « enfant du sexe masculin », sans se substituer au mot normal, garçon. Cet emploi ne subsiste que lorsque le garçon désigné est considéré comme un fils (1273), usage qui subsiste en appellatif (mon fils !, fils !), notamment en français du Midi.
◆
La prononciation ancienne fi, évoquant l'exclamation péjorative fi !, a pu susciter des termes d'injures (fils de garce, fils [fi] de pute, etc.).
❏
Le dérivé
FISTON n. m. (1585) s'utilise familièrement comme appellatif pour un jeune garçon ou pour désigner un garçon par rapport à ses parents.
■
Le composé BEAU-FILS n. m. (1468), de beau*, désigne celui dont on a épousé le père ou la mère ; au sens d'« époux de la fille » (1557), il est moins courant que gendre.
■
Pour la désignation des liens de parenté ont été aussi formés PETIT-FILS n. m. (XIIIe s.), ARRIÈRE-PETIT-FILS n. m. (1556) et, rare, BEAU-PETIT-FILS n. m. (1917).
❏ voir
FILLE et aussi FILIAL, FILIATION, FILLEUL.
FILTRE n. m. est un emprunt (1560) au latin médiéval des alchimistes filtrum (1235), adaptation du francique °filtir (→ feutre).
❏
Le mot désigne un appareil qui permet de débarrasser un liquide de ses impuretés, d'où filtre à café (1885). Le mot a des emplois spécialisés en sciences (1904) et désigne couramment le dispositif adapté à une cigarette pour absorber une partie de la nicotine : cigarette avec ou sans filtre. Au figuré il signifie « ce qui retient en partie » (déb. XXe s.).
❏
Le dérivé
FILTRER v. (1560, mais probablement antérieur) s'emploie transitivement, par exemple dans
filtrer un liquide et, par analogie,
la lumière (1836), etc. ; au figuré (déb.
XXe s.), il se dit à propos de personnes et de choses abstraites
(filtrer des informations).
◆
Filtrer se construit intransitivement au sens de « s'écouler en passant à travers un filtre » (av. 1714) et, par extension, de « passer en partie » (1838), le sujet désignant la lumière, etc.
■
Du verbe dérivent FILTRATION n. f. (1578), didactique, FILTRABLE adj. (1754 en sciences naturelles), FILTRANT, ANTE adj. (1752), FILTRAGE n. m. (1842, en chimie) qui s'emploie au propre et au figuré, et FILTRAT n. m. (1891).
◈
INFILTRER v. tr. et pron. est attesté avant
filtrer (v. 1370) ce qui laisse supposer un latin populaire
°infiltrare tiré de
filtrum.
◆
Le verbe transitif est aujourd'hui vieilli ou littéraire, mais on emploie couramment
s'infiltrer v. pron. « pénétrer dans un corps d'une manière lente et progressive » (1762), d'où vient le sens figuré de « passer insensiblement » (déb.
XIXe s.) et, en parlant de personnes, « pénétrer sans se faire remarquer », spécialement en termes militaires. Un nouvel emploi transitif
(infiltrer une organisation) en est résulté (att. 1965).
■
Le dérivé INFILTRATION n. f. (v. 1370, en médecine) a suivi l'évolution sémantique du verbe (1762, « action, fait de s'infiltrer » ; 1834 pour le sens figuré).
■
Infiltrer a aussi fourni les mots didactiques INFILTRABLE adj. (1857) et INFILTRAT n. m. (v. 1925).
L
1 FIN n. f. est issu (2e moitié du Xe s.) du latin finis, mot d'origine inconnue signifiant « borne, limite d'un champ », « frontière » (au pluriel ; → confins) et, au figuré, « terme, but » (finis, en ce sens, traduit le grec telos dans le vocabulaire philosophique) et « degré suprême de qqch. ».
❏
Fin désigne l'arrêt d'un phénomène dans le temps, en particulier la cessation de la vie (2e moitié du Xe s.) et par extension la dernière partie (de qqch.) [1080], le point auquel s'arrête qqch. (v. 1283), d'où spécialement fins n. f. pl. « frontières » (XIIIe s.) jusqu'à la fin du XVIIe siècle. Fin s'applique à tous les mots désignant une durée (en fin de journée, à la fin du mois...). Au Québec, on distingue la fin de la semaine et la fin de semaine, qui permet d'éviter l'anglicisme week end. Le nom s'emploie dans des locutions adverbiales : à la fin (1273), sans fin, toucher à sa fin, mener à bonne fin, par figure faire une fin « se marier » (fin XVIIe s.). Fin signifie aussi (v. 1300) « terme auquel on tend » (qui veut la fin veut les moyens) ; c'est un terme de droit (1462) au sens de « but juridiquement poursuivi » d'où fin de non-recevoir (1549). Les locutions en fin de compte, à la fin du compte ont pris le sens étendu de « enfin ; pour conclure ». L'expression aux fins de pour « afin de, pour » est d'usage administratif, fréquente en français de Belgique.
❏
Des dérivés du nom reste
FINAGE n. m., sous l'Ancien Régime « étendue de territoire soumis à une juridiction » (1231,
fignaige) ; le mot, d'usage régional (Bourgogne, Franche-Comté), se dit encore pour « terrain », et spécialement (
XVIe s.) « étendue d'une terre exploitée », en agriculture.
◈
FINIR v. est une réfection (
XIIIe s.), d'après
fin, de la forme dissimilée du moyen âge
fenir (1080 ; la variante
finer est moins courante), qui était issue du latin classique
finire (dérivé de
finis) « limiter, achever », d'où
finiri « mettre un terme (à la parole) » et, au passif, « se terminer, mourir ». En bas latin, le verbe a pris le sens de « avoir un terme ». P. Guiraud propose, pour aboutir à cette forme
fenir, un latin populaire
°finiscere à valeur progressive, qui expliquerait l'idée d'« amener à sa fin » d'où, celle d'« achever », puis de « parfaire ». Le sens progressif du latin s'est conservé localement. En Auvergne, Limousin, en Dordogne, on emploie les tournures
finir d'arriver pour « rentrer chez soi ». Ce sens progressif est aussi réalisé dans
finissez d'entrer ! « entrez donc ! » qui correspond, plus au Sud, à un calque de l'occitan, pour « achevez d'entrer ! ».
■
Finir conserve les sens du latin et a le sens général de « mener à sa fin » (1080, tr.) — d'où « à un point de perfection » (av. 1660). Comme intransitif, il signifie « arriver à sa fin, dans le temps ou dans l'espace » (v. 1130), plus tard « avoir telle issue » (1669). Par ailleurs, la forme finer, issue du latin classique finire, a signifié « mettre à son terme (une transaction) », d'où « payer » (XIIe s.), sens disparu qui est à l'origine de finance*.
◆
Au sens général du verbe d'autres constructions apparaissent en français moderne : finir en (1671), finir par (et infinitif) [1805]. Finir prend aussi le sens (XIIIe s.) de « mettre fin à » ; en particulier dans les constructions finir de (et infinitif) [1573], en finir (1798).
■
Le verbe a servi à former des termes techniques, comme FINISSEUR, EUSE n., réfection de fenisseor (2e moitié du XIIIe s.), qui est employé au masculin (1756) puis au féminin (1828), et FINISSAGE n. m. (1786).
■
FINI, IE p. p. adjectivé, a des emplois spéciaux, « mené à son terme » (1688), d'où le fini n. m. (1771), « parfait dans son genre » (av. 1850 : un coquin fini) ; « diminué, discrédité » (1835, un homme fini). En philosophie, il exprime l'idée de « limité » (1580) et s'oppose à infini. La notion de nombre (entier) fini (attesté 1872) est essentielle en mathématiques.
◆
Au sens de « terminé », l'adjectif donne lieu à l'expression familière n, i, ni, c'est fini ! (1796).
◆
Quelques termes didactiques sont formés à partir du participe passé fini : FINITUDE n. f. (1920), d'après l'anglais finitude (1644), FINITISME n. m. et FINITISTE adj. (XXe s.), rares.
◆
Le composé SEMI-FINI, IE adj. (1927) se dit en économie, en commerce, de produits transformés incomplètement.
■
FINISSANT, ANTE adj. tiré du participe présent, est lexicalisé au XIXe s. (le mois d'août finissant, Balzac, Le Lys dans la vallée, 1836).
◈
FINITION n. f. (
XIVe s.,
finicion « fin »), repris au
XIXe s. (1820), est emprunté avec son sens au dérivé latin classique
finitio « limite, achèvement » et désigne aussi l'action d'achever (1846).
◈
IN FINE loc. adv. reprend (1899, Valéry) la locution latine
in fine « à la fin » et s'emploie dans une référence au sens de « dans les dernières lignes (d'un ouvrage) ».
◈
À côté de
finis, son dérivé
finalis a fourni une série de formes.
FINAL, ALE, ALS ou AUX, ALES adj. emprunte avec son sens (v. 1174) le dérivé bas latin
finalis « qui est à la fin » ; il s'applique aussi à ce qui correspond à un but en philosophie (v. 1361), valeur qui existait en latin médiéval (v. 1170 ;
→ ci-dessous finalité).
■
FINALEMENT adv. (v. 1280, finalment) s'est substitué à finablement (v. 1185) et s'emploie couramment comme adverbe de phrase avec la valeur de « pour conclure, enfin ».
■
1 FINALE n. f., forme féminine de l'adjectif, est d'abord un terme de grammaire (1718, « élément en dernière position »), puis de danse, de musique (1721) [→ 2 finale, ci-dessous] et de sport (1895) où il est devenu plus courant, ainsi que le composé DEMI-FINALE n. f. (1898) et que quart de finale. De ce dernier emploi vient 1 FINALISTE n. « personne qui dispute une finale » (1924).
■
2 FINALISTE n. et adj. est aussi un terme de philosophie (1808, n. ; 1919, adj.) tiré de cause finale (on disait cause-finalier, 1764), comme FINALISME n. m. plus récent (1890, Renan).
■
FINALITÉ n. f. (1819) désigne en philosophie le caractère de ce qui tend à un but et spécialement, en biologie, l'adaptation (d'un organe, d'un être vivant) à une fin (1864, Renouvier).
■
FINALISÉ, ÉE adj. (XXe s.), d'abord « à quoi on donne une fin », a pris aussi le sens de « mis au point de façon détaillée » par calque de l'anglais finalized, dérivé d'un verbe de même origine. Le dérivé FINALISATION n. f. (attesté en 1927) est à la mode.
◈
2 FINALE n. m. est emprunté (1779) à l'italien
finale, terme de musique (av. 1742), de
fine « fin », lui-même du latin
finis. C'est un terme de musique, désignant le dernier morceau d'un mouvement ou d'une composition. L'emploi féminin (1797,
une finale) se confond avec la substantivation de l'adjectif
final ; on écrit aussi
un final (1802).
❏ voir
AFIN, CONFINS, DÉFINIR, ENFIN, 2 FIN, FINANCE, INFINI.
L +
2 FIN, FINE adj. vient du même mot latin finis (→ 1 fin) pris adjectivement, à partir de l'emploi figuré de « qui est le point extrême » et correspond au latin médiéval finus « raffiné ».
❏
Appliqué à ce qui présente un caractère de perfection (1080),
fin dans des emplois concrets se trouve dans des locutions comme
argent fin, d'où par ellipse
du fin (
XIIe s.) « de l'argent »
(Cf. finance*), or fin (1080, d'où
du fin n. m. 1690),
fine fleur, au propre et au figuré,
fines herbes (1829), d'abord
herbes fines (1690), c'est-à-dire « au parfum subtil »,
Eau-de-vie fine substantivé en
fine n. f. (1877) ou encore
le fin du fin n. m. « ce qu'il y a de mieux dans le genre »,
huîtres fines d'où
des fines de claire n. f. pl.
◆
Dans un emploi abstrait,
fin se dit (mil.
XIIIe s.) de ce qui est d'une extrême acuité, au propre et au figuré ; il qualifie une personne habile et rusée (v. 1320 ;
un fin renard) ou très adroite (1770 ;
un fin joueur).
◆
En français québécois,
fin se dit pour « intelligent, malin », et aussi pour « gentil, charmant » ; en parlant de choses, « pratique, bien conçu » . L'adjectif est souvent renforcé par l'adverbe
ben (bien), ou encore redoublé
(fin-fin).
◆
Fin dans un emploi adverbial signifie « complètement » (
XIIe s. ;
être fin prêt), précédé à l'époque classique de
tout pour renforcer un adjectif (
XIIIe s.) :
tout fin. Cet adverbe
fin est resté vivant, notamment dans
être fin soûl « complètement ».
◆
L'adjectif s'est appliqué à ce qui est dans la partie la plus éloignée (fin
XVe s.), emploi sorti d'usage sauf dans des locutions comme
le fin fond (1507),
le fin mot (
d'une histoire, etc.) [1865] ; on disait en moyen français (
XIVe s.)
savoir le fin de qqch. « en connaître les raisons et le détail ».
Fin s'applique également à ce qui est très petit (1432), qualifiant en alimentation les petits pois (1806, pois fins, très fins) et, couramment, à ce qui est mince (1450), très aigu (1690 ; pointe fine). À cette valeur, correspond aussi un emploi adverbial, par exemple dans écrire fin (1890).
❏
L'adjectif a de nombreux dérivés.
■
FINEMENT adv. est le premier attesté (v. 1176).
■
L'évolution de FINESSE n. f. est parallèle à celle de l'adjectif. Le mot a signifié « ruse, tromperie » (déb. XIVe s.) et désigne la qualité de ce qui est fin (XVe s.), d'où par extension (1580), surtout au pluriel, une chose difficile à comprendre et la délicatesse de forme ou de matière (XVe s.).
■
On est passé de finesser (1649) à FINASSER v. intr. (1680) par la suffixation péjorative en -asser. Ce verbe a pour dérivés FINASSERIE n. f. (1718), FINASSIER, IÈRE (1718) et FINASSEUR, EUSE adj. et n. (1740), qui ont vieilli.
◈
FINETTE n. f. « sorte de vêtement de coton » représente la substantivation de
finet, ette (fin
XVe s.,
satin finet), diminutif de
fin, fine.
◈
FINAUD, AUDE adj. (av. 1762 ;
XVe s., dialectal) est lui aussi dérivé de l'adjectif
fin.
■
Il en va de même pour FIGNOLER v. tr., d'abord (1743, intr. ; variante finioler) « raffiner », aujourd'hui « exécuter avec un soin méticuleux » (1872).
◆
Ce verbe a servi à former FIGNOLEUR, EUSE adj. et n. (1845) et FIGNOLAGE n. m. (1874).
■
FINES n. f. pl. (1865), substantivation du féminin de l'adjectif, et FINERIE n. f. (fin XIXe s.) sont des termes de métallurgie.
◈
Sur
fin ont été construits plusieurs préfixés :
EXTRAFIN, INE adj. (1827),
SUPERFIN, INE adj. (1688),
SURFIN, INE adj. (1828), appliqués à des produits commerciaux très fins, et, pour
superfin, à diverses choses (concrètes et abstraites).
◈
AFFINER v. tr. « rendre plus délicat » (1223) et « purifier » (1285) a signifié « tromper en usant de finesse » (v. 1510) encore au
XIXe siècle. De ce verbe dérivent
AFFINEUR, EUSE adj. et n. (1302),
AFFINAGE n. m. (1390) et
AFFINEMENT n. m. (1576 ; 1532, « tromperie »).
■
Le composé en re- de affiner, RAFFINER v. tr., est employé au sens concret (1468, raffiner le sucre) et abstrait (1650) et, comme verbe intransitif, au sens de « rechercher la finesse ».
◆
Au sens concret correspondent les dérivés RAFFINAGE n. m. (1611), RAFFINEUR, EUSE n. (1611) et RAFFINERIE n. f. (1666), ce dernier récemment appliqué au pétrole ; au sens abstrait, RAFFINEMENT n. m. (1600), et RAFFINÉ, ÉE adj. qui se dit (1690) d'une matière rendue plus pure et s'emploie aussi au sens abstrait (1642).
FINANCE n. f. dérive (v. 1280) de l'ancien français finer « mener à sa fin (une transaction) » (1080) d'où « payer » (XIIe s.), altération de finir sous l'influence de fin « argent » (XIIe s.) [→ finir, à 1 fin]. Le latin médiéval finare (fin Xe s.), dérivé de finis, a d'abord signifié « mener à bout » puis « exiger de l'argent » (1212) et « donner de l'argent » (1234).
❏
En français, finance a signifié d'abord « versement, rançon », d'où « argent » (1377) — sens conservé dans la locution moyennant finance et dans l'emploi familier la finance (XIVe s.). En français de Suisse, finance se dit pour « contribution en argent, somme à verser ».
◆
Le mot désigne (1400) les ressources dont on dispose, sens encore en usage au pluriel (l'état de ses finances).
◆
Au pluriel (1314, fineances), finances se dit toujours des revenus de l'État (Trésorier des Finances, XVe s.), par métonymie des services qui gèrent les fonds publics (1832 ; 1690, « fisc »). Au singulier, le mot était sous l'Ancien Régime le nom de la régie des impôts (1549 ; Cf. ferme) ; il désigne aujourd'hui l'activité bancaire (1678) et par métonymie l'ensemble des personnes qui ont de grosses affaires d'argent (1770, la haute finance). La graphie cocasse phynance est due à Jarry (la pompe à phynances).
❏
FINANCER v. ne s'utilise plus, sauf par plaisanterie, au sens de « fournir de l'argent » (1544 ;
intr.) ni pour « payer une somme comptant » (1636 ;
tr.). Le verbe signifie aujourd'hui (fin
XIXe s.) « soutenir financièrement (un projet, une entreprise, etc.) », d'où le dérivé
FINANCEMENT n. m. (1845, attestation isolée), diffusé au
XXe s., et les composés
AUTOFINANCÉ, ÉE adj. (1952),
S'AUTOFINANCER v. pr. (1966) et
AUTOFINANCEMENT n. m. (1943).
◈
FINANCIER, IÈRE n. et adj. (v. 1420,
financhiere « celui qui finance » ; 1440, « propriétaire ») désigne (fin du
XVe s.) une personne qui manie des affaires d'argent et, par extension (1776), qui s'entend à la gestion de l'argent. Sous l'Ancien Régime, le mot désignait depuis le
XVIe s. (1549) celui qui gérait des finances publiques, fermier général ou autre. C'est la deuxième moitié du
XVIIIe s. et le
XIXe s. qui ont vu le développement des activités financières capitalistes ; le passage des affaires d'argent de l'État, dominantes du
XIVe s. au
XVIIe s., aux affaires privées, est sensible dans les datations du vocabulaire, notamment dans l'apparition de l'adjectif
financier (1752), puis du dérivé
FINANCIÈREMENT adv. (1829).
■
FINANCIÈRE n. f. (1755) ou sauce financière (1778 ; autrefois aussi à la financière), nom d'une sauce garnie d'éléments coûteux (ris de veau, truffes, etc.), évoque la table riche des anciens fermiers généraux.
◈
PRÉFINANCER v. tr. (mil.
XXe s.) correspond à « accorder un crédit permettant l'étude et le lancement de (un projet) », avant le financement définitif.
PRÉFINANCEMENT n. m. (1963) désigne l'accord de ce crédit et le crédit lui-même.
FINISH n. m. est un emprunt (av. 1863) à l'anglais finish « fin » (XVIIIe s.), et spécialement « fin d'une course, d'une chasse, d'un combat » (XIXe s.), du verbe to finish « terminer », issu au moyen âge du français finir (→ 1 fin).
❏
En français, le mot a désigné un établissement où l'on va finir une soirée, puis la fin d'une épreuve sportive (1887), surtout comme terme de turf. Il s'est particulièrement répandu en boxe et pour parler de l'aptitude à se surpasser à la fin d'une compétition (1934 ; gagner au finish).
FINLANDAIS, AISE adj. et n. est dérivé (attesté en 1701) du nom francisé Finlande (de Finn land « terre des Finns », → ci-dessous finnois) pour qualifier et nommer ce qui est relatif à l'État de Finlande.
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Les dérivés FINLANDISER v. tr. et FINLANDISATION n. f. s'emploient en histoire à propos de la neutralisation de la Finlande, puis d'autres pays, par l'Union soviétique, la Finlande n'ayant conservé son indépendance en 1945 qu'en acceptant de limiter sa souveraineté.
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FINNOIS, OISE adj. et n., est dérivé, au milieu du XVIIIe siècle, soit de la forme francisée finne (attestée en 1720), soit du latin Finni, Fenni, nom donné à des peuples de Scandinavie et pris à l'ancien nordique. Ce vocable germanique l'a emporté internationalement sur le mot autochtone, suomi. Finnois qualifie et désigne ce qui appartient à la langue et à la civilisation majoritaire de la Finlande (à côté d'une importante minorité suédoise). Le finnois, cette langue, englobe le suomi de Finlande, l'este d'Estonie, et appartient à une famille linguistique appelée FINNO-OUGRIEN n. m. (aussi adjectif) regroupant le finnois, le hongrois (on a dit finno-ongrien, 1872), le lapon et plusieurs langues ouraliennes ou sibériennes (mordve, mari...). En Europe, les langues finno-ougriennes sont avec le basque les seules à ne pas appartenir à l'ensemble indoeuropéen.
FIOLE n. f. est emprunté (v. 1180) au latin médiéval fiola « petite bouteille », forme altérée du latin classique phiala « coupe », emprunt au grec phialê.
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Fiole conserve le sens latin et s'emploie pour « tête » (1848 ; se payer la fiole de qqn) par une métaphore usuelle (Cf. carafe, carafon).
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FION n. m. est un mot d'origine obscure, attesté (1744) au sens de « coup » (ficher un fion) puis de « dernière touche qu'on donne à un ouvrage » (1792), aujourd'hui familier et vieilli, sans doute plus ancien car le mot est passé en québécois. Il est resté vivant dans coup de fion « dernière touche (à un ouvrage) ». Il représente peut-être une altération d'un dérivé de fignoler (→ fin) ou est d'origine onomatopéique comme terme évoquant un coup ; cette valeur est conservée en Suisse où fion s'emploie pour « remarque blessante, injure mordante » (dep. 1793). P. Guiraud propose de reconnaître plutôt dans fion le résultat, par dissimilation du premier -n-, de l'évolution d'un latin populaire °finionem (dérivé de finis → fin) qui aboutit à fignon.
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L'hypothèse expliquerait le sens de fion « derrière, postérieur », c'est-à-dire ce qui est à l'extrémité du corps (1880).
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FIGNE, FIGNON n. m. (1881 et 1898, précédés par fignard, 1847) a le même sens, et de nombreux dérivés argotiques, FIGNEDÉ (1883), FIGNARÈS (1935), pour « anus », surtout dans le contexte de la sodomie.
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L'hypothèse sur fion éclaire le sens du composé TROUFIGNON n. m. ou TROUFION « anus » (v. 1610), compris au XVIIIe s. comme altération de trou mignon, et « chance » par figure (XXe s. ; Cf. cul).
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Troufion s'emploie (fin XIXe s.) pour « soldat », argotisme obtenu par substitution de finale de troupier (Cf. par ailleurs troubade, 1859), sous l'influence de troufion « anus » et, par figure, comme pour cul, con, au sens de « homme sot » (1875, en argot).
FIORITURE n. f. est introduit au pluriel (1823) par Stendhal comme mot italien, avec le sens d'« ornement » ; c'est le pluriel de l'italien fioritura « floraison » puis « ornements » dans le domaine musical (XVIIIe s.), dérivé avec un suffixe collectif de fiorire « fleurir », de même origine que le français.
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Fioriture, souvent au pluriel, est d'abord un terme de musique employé dans d'autres domaines (mil. XIXe s.), en particulier pour parler d'une ornementation excessive.
FIOTTE n. f. serait la contraction du dialectal fillotte (Franche-Comté), variante de fillette.
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Le mot, argotique, désigne de manière insultante un homosexuel (1879) et, par injure, un homme quelconque.
FIRMAMENT n. m. est emprunté (1119) au latin chrétien firmamentum désignant la voûte céleste auquel les astres semblaient fixés, en latin classique « soutien, appui », au propre et figuré. C'est un dérivé de firmare « rendre ferme, solide » (→ fermer).
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Le mot français, d'abord religieux, est resté d'emploi poétique et évocateur.
FIRMAN n. m., mot « de relation » employé en français du XVIIe au XIXe siècle, puis terme d'histoire, est emprunté au turc par l'anglais (1665, traduction des Mémoires de Roe, 1616) à propos de l'Algérie ottomane.
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Le mot désigne un édit du souverain, dans l'Empire ottoman et en Iran. Le mot est persan (farmān « ordre royal »), passé au turc et à l'arabe (faramāne) à propos de décrets, papiers officiels, laissez-passer. Il s'est employé au XIXe siècle (P. L. Courier, Balzac) pour « décret émanant d'une autorité », puis ce sens a disparu.
FIRME n. f. est emprunté (1844) à l'anglais firm « signature » (1574), puis « raison sociale » (1744) et « maison de commerce » ; l'anglais est emprunté, comme l'allemand Firm, à l'espagnol firma « signature », issu du latin firmus, comme farm en anglais (→ 2 ferme) ; Cf. aussi le latin médiéval firma « convention avec garantie ».
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Firme a signifié « raison sociale » (1844), d'abord en Belgique selon Littré. Il est utilisé aujourd'hui pour désigner une entreprise commerciale ou industrielle.