FONCER → FOND
FONCTION n. f. est emprunté, d'abord sous la forme simplifiée funcion (1370) puis par réemprunt fonction (1566) au latin classique functio « accomplissement, exécution », et en bas latin juridique « service public », « office » ; functio dérive de functum, supin de fungi « s'acquitter de, accomplir ».
❏  Fonction est repéré isolément (1370) pour « exécution » et repris au XVIe s. ; il désigne l'exercice d'une charge (1566) et par une extension tardive (début du XIXe s.) la profession comme contribuant à la vie sociale. Le mot entre dans des locutions, comme faire fonction de « remplir une charge sans en être titulaire » (1835 ; 1671, faire la fonction de), des syntagmes, tel le terme de droit fonction publique (XXe s.). ◆  À propos des choses, fonction a depuis le français classique le sens général (1680) de « rôle actif caractéristique, dans un ensemble » (les fonctions de nutrition, les fonctions de l'esprit, etc.) et il est employé dans divers domaines scientifiques : en mécanique (1845), en chimie (1865), en grammaire (1803), etc. ◆  Le mot a aussi une spécialisation comme terme de mathématiques (1694) indiquant un type déterminé de relation entre deux quantités, d'où son emploi dans fonction directe, inverse et par extension le sens de « ce qui dépend de qqch. », dans des locutions comme en fonction de (mil. XIXe s.), être fonction de.
❏  Les dérivés ont sélectionné certaines des valeurs du mot.
■  FONCTIONNAIRE n. (1770, Turgot) se rattache au premier sens de fonction. Son succès est lié au développement du rôle de l'État dans l'administration civile et militaire et, au XIXe s., à celui de la bureaucratie*.
■  En dérivent, construits sur le radical, des termes didactiques : FONCTIONNARISME n. m. (v. 1850, au sens péjoratif de « prépondérance gênante des fonctionnaires dans un État »), FONCTIONNARIAT n. m. (1865), FONCTIONNARISER v. tr. (1931 ; 1933 au p. p.), probablement antérieur (d'après fonctionnarisation, 1912).
FONCTIONNEL, ELLE adj. (v. 1830) a un sens didactique (mathématiques, sciences), signifiant « relatif aux fonctions » ; dans un emploi plus courant il qualifie ce qui remplit une fonction pratique (mobilier fonctionnel).
■  FONCTIONNELLEMENT adv., attesté plus tôt que fonctionnel (av. 1755) au sens de « relativement à une charge », qui a disparu, s'emploie en biologie (1858) et d'après le sens courant de l'adjectif.
■  Le dérivé FONCTIONNALISME n. m. (1866) est didactique et correspond à l'aspect dynamique des processus étudiés par la science, notamment (depuis 1958) dans une perspective structurale (Cf. structure, structuralisme), comme FONCTIONNALISTE adj. et n. (v. 1936).
■  FONCTIONNALITÉ n. f. (av. 1966) signifie « caractère fonctionnel » et FONCTIONNALISER v. tr. (1965) « rendre (plus) fonctionnel ».
FONCTIONNER v. intr. (1787 ; 1637, functionner « remplir une charge ») a le sens général de « remplir sa fonction » en parlant d'un mécanisme, et dans le domaine abstrait (XIXe s.), à propos d'une personne, celui d'« exercer une fonction », « travailler », par analogie familière avec un mécanisme, et aussi employé ironiquement (1837).
■  Le dérivé FONCTIONNEMENT n. m. (1838) « action de fonctionner » se dit d'un mécanisme et ne s'emploie que familièrement pour des personnes. ◆  Les deux mots, très courants, ont un vaste registre d'emplois, allant de l'action des instruments, outils et mécanismes aux processus des organisations humaines, des systèmes abstraits, voire des organismes vivants. Comme l'adjectif fonctionnel, le verbe fonctionner et son dérivé, mis à part leurs usages familiers, trouvent leur unité dans le concept de « fonction », évolutif suivant l'état des connaissances dans différents domaines.
Enfin, de fonction au sens mathématiques vient FONCTEUR n. m. (1964) désignant un opérateur logique.
L + FOND et FONDS n. m. est issu (1080, funz ; ensuite fonz, fons, puis avec le d étymologique [1280]) d'un latin populaire fundus, °fundoris, en latin classique fundus, fundi « fond de tout objet » — d'où « limite, point extrême » et, par figure, « partie essentielle de qqch. » — « fonds de terre » et en droit « garant de qqch. ». Fundus est apparenté à un groupe de mots dont les formes différentes ne permettent pas de poser une racine indoeuropéenne, par exemple l'ancien haut allemand bodam « sol », le sanskrit budhnáḥ « sol, base », le grec puthmên « fond, pied (d'une montagne) ». Fond et fonds représentent en français deux variantes graphiques ; c'est à partir du XVIIe s. que chaque forme a pris des sens particuliers, mais la confusion entre fond et fonds, surtout pour les sens figurés, subsiste encore.
❏  Fond désigne (1080, funz) la région basse d'une chose creuse, qu'il s'agisse d'un récipient, d'une dépression naturelle ou, spécialement, du sol où reposent les eaux d'un lac, d'une mer, etc., d'où le sens de « profondeur d'eau » (1531), et de l'intérieur d'une exploitation minière (1872) ; par métaphore, le mot signifie « le point le plus bas » (le fond de la misère). ◆  Par extension, fond se dit de la partie la moins exposée au regard et au jour, en parlant d'un lieu (v. 1190) ; de là la locution le fin fond de « la partie la plus lointaine » (1580) ; ce sens a diverses spécialisations : en parlant d'un vêtement (1306, le fond de ses braies), de la scène d'un théâtre (1543). Fond se dit aussi de la partie opposée à l'ouverture (le fond d'un tiroir) ou à l'orifice (v. 1256 ; le fond de la gorge). Par métonymie, le mot désigne ce qu'il y a au fond de qqch. (vider ses fonds de tiroir).
■  Par métaphore, fond s'applique à ce qui est considéré comme l'élément véritable, au-delà des apparences de l'aspect sensible, en parlant des sentiments (v. 1200) et de la réalité intellectuelle (voir le fond des choses) ; de ces emplois viennent les locutions adverbiales au fond (1585, « en réalité ») ou familièrement dans le fond (1657), tout au fond (1539, « complètement »). ◆  À fond (1656), intensif, reprend métaphoriquement l'idée d'extrémité ; à fond de train (1872 ; ellipt à fond) « à toute allure » est probablement construit sur le modèle de locutions anciennes comme à fond de cave, à fond de cuve (1548, au figuré) en passant de l'idée de « profondeur maximale » à celle de « grande intensité » (Cf. la locution à fond la caisse « à toute vitesse », d'une voiture ou « caisse ») et la formule publicitaire à fond la forme. L'intensif à fond est suffisamment courant pour susciter son traitement en verlan en À DONF loc. adv. (v. 1990) « complètement, parfaitement ».
■  Fond désigne aussi, spécifiquement (1280), ce qui sert d'appui, de base, en particulier ce qui supporte un édifice ; de là vient la locution faire fond sur (1657), employée au figuré au sens d'« avoir confiance en » (proprement, « faire les fondations »). ◆  Les idées conjuguées de « ce qui sert d'appui » et de « ce qui est derrière » se retrouvent en arts décoratifs, où fond désigne le support sur lequel un décor est brodé, des motifs imprimés (1677) ; en peinture, c'est l'« arrière-plan » (1636 ; à propos d'un paysage, 1547). Par extension, fond se dit dans différents emplois de ce qui sert de base ou représente une base : bruit de fond (1885) ; fond musical ; en cuisine, fond de sauce ; le fond de l'air (1800) ; fond de teint (1910).
■  Fond, par figure, désigne (1585, en droit) un élément essentiel qui apparaît derrière l'accidentel. Il s'emploie en ce sens à propos d'une personne (1656), par exemple dans la locution avoir un bon fond (XIXe s.), ou d'un fait humain (un fond de vérité). Spécialement, fond se dit (1657) de ce qui fait la matière d'une œuvre ; la locution adjectivale de fond (1834, article de fond) équivaut à « essentiel ». ◆  Par extension, dans le domaine sportif (1757, à propos du cheval), le mot s'emploie pour « qualités physiques essentielles de résistance » (1863, course de fond ; 1869, en cyclisme ; 1909, en ski, en natation). Entré dans une terminologie sportive précise, celle des courses, le mot s'oppose au composé DEMI-FOND n. m. (1897) et à vitesse.
❏  FONDS n. m. ne correspond à l'origine qu'à un sens particulier de fond, anciennement funz, fonz (v. 1200), « terre qui est cultivée ou sur laquelle on bâtit ». Il s'est spécialisé au sens d'« immeubles ou meubles incorporels », par exemple dans fonds de terre (XVe s.), fonds de commerce (1680). Par extension (1591), fonds désigne le capital dont on dispose, par exemple dans les locutions être en fonds « avoir de l'argent disponible » (1704), les fonds sont bas (1762).
■  Couramment, le mot a pris le sens (1606) de « capital qui sert à financer une entreprise », d'où à fonds perdus (XVIIe s.), fonds publics (1757) ; par métonymie, il désigne (1924) l'organisme chargé de financer (au singulier seulement).
■  Par figure fonds se dit de l'ensemble des qualités d'un individu (1662) et par extension de l'ensemble des ressources qu'on peut exploiter (1690), d'où le fonds d'un musée (1847), le fonds d'une bibliothèque (1854).
■  BIEN-FONDS n. m. (av. 1794 ; de bien au sens matériel) « bien immeuble » est un terme de droit.
■  TRÉFONDS n. m. (XIIIe s. ; de tres-, du latin trans- « par-delà ») est vieilli comme terme de droit au sens de « sous-sol possédé comme un fonds » ; par attraction de fond, il désigne (1690) ce qu'il y a de plus profond, au propre et au figuré.
Sur fond ou l'ancienne forme fons ont été dérivés plusieurs mots et construits des composés.
■  FONCER v. (1375 au participe passé, « muni d'un fond ») s'emploie transitivement aux sens de « garnir d'un fond » spécialement en cuisine (1802 ; 1757, en pâtisserie), par ailleurs de « creuser » (1605), d'où, technique, « pousser au fond » (1752). ◆  Le verbe signifie aussi (1740) « charger en couleur pour rendre plus sombre », la teinte sombre paraissant comme enfoncée. Dans cette valeur, le participe passé FONCÉ, ÉE, devenu adjectif (1690), est très courant et s'oppose à clair. ◆  Dans un emploi intransitif foncer représente une altération de fondre et signifie « se jeter sur » (1680) d'où, par extension et familièrement, « aller devant soi, très vite » (1866) ; cette valeur est liée à l'emploi de à fond (voir plus haut) ; de là vient FONCEUR, EUSE n. et adj. (1914) « dynamique et audacieux ».
■  FONÇAGE n. m., terme technique, désigne l'action de garnir d'un fond (1840), celle de creuser un puits (1867), plus rarement d'enfoncer un pieu (1873), enfin l'opération par laquelle on enduit le papier peint d'une couche qui sert de fond (1874). ◆  De cet emploi vient FONCEUR n. m. (1872) et FONCEUSE n. f. (1946).
■  FONCIER, IÈRE adj. correspond à la fois à fonds et à fond ; d'une part il se dit (1370) de ce qui constitue un bien-fonds ou y est relatif, d'autre part il signifie (1470) « qui est au fond du caractère de qqn » (des qualités foncières), sens auquel se rattache aujourd'hui FONCIÈREMENT adv. « dans le fond, intimement » (av. 1755) ; cet adverbe existait comme terme de droit (1390) et a pris la valeur de « à fond, complètement » (av. 1475).
ENFONCER v. signifie en emploi transitif « faire aller vers le fond » (1278), d'où les locutions figurées enfoncer qqch. dans le crâne de qqn, enfoncer le clou « expliquer avec insistance », et le sens d'« entraîner (qqn) dans une situation comparable à un abîme ». ◆  En emploi intransitif, enfoncer c'est « aller vers le fond » (1544). ◆  Par extension, le verbe s'emploie (1635) pour « briser en poussant » et, par analogie, aux sens de « culbuter (une troupe) » (1580) et de « surpasser qqn » (1820) avec le sémantisme de battre.
■  Le dérivé ENFONCEMENT n. m. désigne une partie en retrait (XVe s.), la partie creuse de qqch. (1690) et l'action d'enfoncer, le fait de s'enfoncer (1690).
■  Enfoncer a servi à former ENFONCEUR n. m. (1585), surtout employé dans enfonceur de portes ouvertes, ENFONÇOIR n. m. (1839), nom d'outil, et ENFONÇURE n. f. réfection (v. 1580) de enfossure (v. 1365) « creux ».
Avec le préfixe re-, RENFONCER v. tr. (1549) s'emploie pour « enfoncer plus fort, plus profond ». Au figuré (1797), renfoncer ses larmes, un mot dans sa gorge, correspond à ravaler ; cet emploi a vieilli. Le participe passé RENFONCÉ, ÉE adj., signifie « enfoncé profondément ». ◆  RENFONCEMENT n. m. est d'abord un terme de peinture (1611), formé sur enfoncement, pour « forme de ce qui présente un retrait par rapport à un plan vertical », d'où « effet de perspective, profondeur apparente (dans un tableau, un décor) ». Depuis le XIXe s. (1832) le mot s'applique en général à ce qui forme un creux, niche, alcôve, recoin ou partie en retrait.
DÉFONCER v. tr. (XIVe s.), « briser par enfoncement » dans divers emplois techniques, a pris dans l'argot de la drogue (v. 1960) le sens de « provoquer un état hallucinatoire », en parlant d'un hallucinogène — de là vient DÉFONCE n. f. (1972) — et par extension, à la forme pronominale se défoncer, celui de « se donner à fond à une tâche, etc. ».
■  Le verbe a produit les dérivés techniques : DÉFONCEMENT n. m. (1653), DÉFONÇAGE n. m. (1797), DÉFONCEUSE n. f. (1855).
TIRE-FOND n. m., terme technique, de tirer (1549), désigne une longue vis dont la tête est un anneau et spécialement une grosse vis à bois qui sert à divers assemblages (1874). C'était aussi le nom d'un instrument chirurgical (1611).
■  En dérive TIREFONNER v. tr. (déb. XXe s.).
BAS-FOND n. m. (1690 ; de bas) désigne la partie du fond (d'une masse liquide) où l'eau est peu profonde. Un bas-fond est aussi un terrain bas, enfoncé (1803), d'où son utilisation figurée au pluriel (1840, Balzac) pour désigner les couches les plus misérables d'une société.
■  HAUT-FOND n. m. (1716 ; de haut), qui utilise une des spécifications de fond, a seulement le sens de « sommet sous-marin recouvert d'une eau peu profonde ».
■  ARRIÈRE-FOND n. m. (1842 ; de arrière) désigne la partie la plus secrète ou l'arrière-plan de qqch.
FONDRIÈRE n. f. est un dérivé savant (XIIe s., attestation isolée, repris en 1459) du latin médiéval fundora (VIIe s.), pluriel de fundus, -oris. ◆  Le mot désigne un affaissement de terrain souvent envahi d'eau (XIIe s.) et par analogie un trou bourbeux dans un chemin défoncé (1843).
❏ voir EFFONDRER, PLAFOND, PROFOND.
FONDATION, FONDATEUR → FONDER
FONDAMENTAL → FONDEMENT
FONDEMENT n. m. est emprunté (1119) au latin classique fundamentum « fondation, base » au propre et au figuré, « anus » en bas latin médical. Le mot est dérivé de fundare (→ fonder).
❏  Le sens figuré de « fesses, anus », devenu rare, constitue un euphémisme pour cul (comme derrière). ◆  L'emploi en architecture (1120) est aujourd'hui archaïque, le mot étant remplacé par fondation(s). Par extension, plutôt au singulier (v. 1175), fondement désigne ce sur quoi repose un ensemble de connaissances (Cf. la locution sans fondement). Il s'utilise par métaphore (v. 1265) le plus souvent au pluriel (les fondements de l'État).
❏  FONDAMENTAL, ALE, AUX adj. est un emprunt (av. 1475) au dérivé bas latin fundamentalis « qui constitue la base de qqch. ». Il conserve ce sens en français moderne, y compris dans des emplois particuliers : en musique, son fondamental (1701), note fondamentale (1721) « qui sert de base à un accord » ; en sciences, recherche fondamentale (1960) « orientée vers les domaines fondamentaux d'une discipline » s'oppose à appliquée. L'adjectif a servi à former plusieurs dérivés.
■  FONDAMENTALEMENT adv. signifiait en architecture (av. 1475) « jusqu'aux fondations » et correspond à l'adjectif (mil. XVIe s.).
■  FONDAMENTALISME n. m. désigne (v. 1920) un courant théologique qui s'en tient à une interprétation littéraire de l'Écriture (donc, aux fondements). Le mot s'est étendu (v. 1980) à d'autres religions, notamment l'islam, avec une valeur proche d'intégrisme.
■  FONDAMENTALISTE adj. et n. (1966), outre son sens en religion qui correspond à fondamentalisme, signifie « qui se livre à la recherche fondamentale ».
FONDER v. tr. est emprunté (déb. XIIe s.) au latin fundare « fonder, bâtir » et « établir », de fundus (→ fond).
❏  Il s'emploie dès l'origine au sens matériel d'« établir sur des fondations », d'où vient l'emploi métaphorique et littéraire de fonder sur le roc, sur le sable, métaphore biblique (XVIIe s.) en concurrence avec bâtir, construire. Fonder signifie aussi (1160) au figuré et comme en latin « instituer, établir » en parlant d'une ville, d'une entreprise, etc. et dans le domaine abstrait « établir (qqch.) sur une base déterminée » (v. 1190 ; fonder un raisonnement sur). ◆  Fonder signifie par ailleurs (1478) « pourvoir d'un fondement rationnel », surtout dans fonder en..., et en droit (1690) « fournir les fonds nécessaires à la création de qqch. » À cette acception correspond un emploi du pronominal se fonder (1561).
❏  FONDÉ, ÉE adj. « versé dans » est attesté au XIIe s. (v. 1160) : en vient fondé n. m. (1297) puis fondé en pouvoir (1601), aujourd'hui FONDÉ DE POUVOIR(S) n. m. (1792).
❏  Deux mots ont été empruntés au supin de fundare.
■  FONDATEUR, TRICE n. est une formation savante (1330) à partir du latin fundator « celui qui fonde ou a fondé ». Il a éliminé en ce sens l'ancien français fondeor, fondeur (1150) issu par voie orale de fundator.
■  FONDATION n. f. reprend (XIIIe s.) le latin chrétien fundatio, -onis « action de fonder » et « fermeté » ; seulement pluriel en latin classique, fundationes était un terme d'architecture (« fondement, base »). ◆  Fondation désigne l'action de fonder, d'établir au propre et au figuré ; spécialement, il se dit (mil. XVIe s.) pour la création d'un établissement d'utilité publique par voie de donation et, par métonymie (1690), pour l'établissement lui-même.
■  Fondation a également conservé (1391) le sens du latin classique et désigne l'ensemble des travaux et ouvrages qui assurent les fondements d'une construction, sens où il a supplanté fondement. Il est alors le plus souvent au pluriel et a des emplois métaphoriques et figurés.
REFONDATION n. f. (1991) et REFONDATEUR, TRICE adj. et n. (1989), s'emploient en politique à propos de la réforme en profondeur d'un parti, d'une organisation politique (d'abord du parti communiste, en France). Le verbe REFONDER (1993) est peu usité.
FONDOUK n. m. est un emprunt (1659) à l'arabe funduk ou fundak, d'abord (1637) sous la forme fondique (finale altérée), plus ancien en ancien occitan (fondech et fondeque) où on le dit dès le XIIIe siècle et en moyen français (fondique, v. 1400), peut-être alors par l'italien.
❏  Le mot est un emprunt culturel, et ne concerne que les pays arabes. Il désigne l'emplacement d'un marché, avec entrepôts (→ magasin) et auberge. C'est un quasi-synonyme de caravansérail, plus marqué (usage des voyageurs, des spécialistes ou des écrivains de langue maternelle arabe).
L FONDRE v. est l'aboutissement (v. 1050, intr.) du latin fundere « répandre » et « fondre (un métal) », puis « disperser » et « abattre ». Fundere vient d'une racine indoeuropéenne °gheuw- ou °gheu- exprimant l'idée d'un liquide versé abondamment et de façon continue, et représentée en grec par kheein « verser, répandre » (→ chyle), ainsi que dans plusieurs langues germaniques (par ex. le vieil islandais geysir « geyser* », l'allemand giessen « verser », etc.).
❏  D'abord employé au sens de « s'effondrer, être détruit », relevé jusqu'au XVIIIe s., fondre prend au XIIe s. ses principales valeurs modernes : il signifie en emploi transitif « répandre, verser » (1112) et en emploi intransitif « couler » (v. 1160), d'où viennent la locution figurée fondre en larmes (v. 1223) et le sens de « s'épancher, se laisser attendrir » (déb. XIVe s. ; Cf. faire fondre la glace). ◆  Parallèlement, le verbe s'emploie transitivement avec une valeur technique (1174-1176) pour « fabriquer au moyen d'une matière en fusion », en particulier « rendre liquide en chauffant » (v. 1190), puis intransitivement pour « devenir liquide » (déb. XIIIe s.) ; il se spécialise plus tard en métallurgie (1708). ◆  Par ailleurs, abstraitement fondre v. tr. veut dire (XIIIe s.) « combiner en un tout », spécialement en peinture (1685, au p. p. ; 1770, se fondre) et, attesté au XVIe s. mais probablement antérieur, « dissoudre dans un liquide » (1580). Par figure, fondre v. intr. signifie « diminuer rapidement » (1575) et, en parlant de personnes, « maigrir beaucoup » (fin XIVe s.). ◆  Enfin, fondre sur « s'abattre avec violence, se précipiter sur » (1195), d'abord terme de fauconnerie, s'est répandu à partir du XVIe s. mais est resté littéraire.
❏  FONDU, UE adj. et n. m. (1170, « détruit, effondré ») se dit de ce qui est conduit à l'état liquide (XIIe s.) et par extension de ce qui est flou (1685), d'où en peinture le fondu (1851). ◆  Fondu n. m. désigne dans le domaine de l'audiovisuel (1908, cinéma) une apparition ou une disparition graduelle de l'image, du son, d'où (1922) fondu(-)enchaîné. La métaphore de la liquéfaction a fourni une expression de plus à l'idée de folie, donnant à l'adjectif cette valeur (il est complètement fondu), à partir de 1925.
■  FONDUE n. f., participe passé de fondre, a été substantivé au féminin au sens de « fonte » (1432). Il a désigné un mets composé d'œufs brouillés et de fromage fondu (1735 ; fondue d'œufs « fondue aux œufs », 1669) puis, avec un sens spécialisé propre au domaine franco-provençal (Savoie, Dauphiné, Suisse), un plat fait de fromage fondu dans lequel on trempe du pain (Cf. raclette). De ce sens vient fondue savoyarde et fondue bourguignonne (d'abord en Suisse) où on cuit soi-même des morceaux de viande dans un corps gras bouillant, par analogie de préparation, puis fondue chinoise, etc. ◆  En français de Belgique, fondue au fromage désigne des croquettes de pâte au fromage, panées et frites.
FONDANT, ANTE adj. tiré du participe présent, d'abord attesté au sens de « où l'on enfonce » (1553) puis de « qui fond » (1611), a pris des valeurs figurées (1874, tons fondants « dégradés ») et s'est spécialisé en confiserie, dans bonbons fondants « qui fondent dans la bouche » d'où, en français de Suisse, des fondants. ◆  En métallurgie (1732), le mot est aussi substantif pour « substance ajoutée à une autre pour en faciliter la fusion ».
Plusieurs dérivés sont liés au sens technique de fondre « fabriquer avec une matière fondue ».
■  FONDERIE n. f. désigne la technique et l'industrie de la fonte des métaux (1680) et l'usine où l'on fond le minerai (v. 1540). On trouve auparavant (1373) fondrie au sens de « action de fondre, fusion ».
■  FONDEUR n. m. (déb. XIVe s.), réfection de fonderes (1260), désigne celui qui fait des objets en métal fondu.
■  FONDEUSE n. f. est un terme de métallurgie (1907).
1 FONTE n. f. est probablement issu de °fundita, féminin substantivé du latin tardif °funditus (au lieu de fusus), ou bien est formé sur fondre. On relève au XVe s. l'expression fer de fonte « alliage obtenu par le traitement des minerais de fer » (1472), mais fonte est antérieur comme l'atteste le dérivé fontaille « fonte » (1227). ◆  Fonte désigne l'action de fondre ou de se fondre (1488, la fonte des neiges), spécialement des métaux et, par extension, la fabrication d'objets avec du métal fondu (1551 ; 1567, en typographie).
■  Par métonymie, le mot se dit (1477) d'un alliage de fer et de carbone. Comme fonderie, fonte dans ce sens fait partie de la terminologie métallurgique ; les spécialisations et la diffusion de ces mots sont liées à l'histoire des techniques, et à leur importance grandissante aux XVIIIe-XIXe siècles. L'alliage était extrêmement lourd, il sert à désigner les poids et haltères, dans l'argot sportif (lever la fonte, 1932), puis lever, soulever de la fonte (années 1980).
REFONDRE v. tr. s'emploie en métallurgie (v. 1130) et, par figure (1679), pour « refaire en fondant des parties les unes avec les autres » ; en dérive REFONTE n. f. (1594).
■  Le composé PARFONDRE v. tr. (XVIe s. ; 1382, « fondre complètement ») est un terme technique.
❏ voir MORFONDRE, FUSION.
FONDS → FOND
FONGIBLE adj. est un dérivé de la langue juridique (1752) du verbe latin fungi « s'acquitter de » et « consommer ». En droit, il qualifie les biens qui se consomment par l'usage et ne sont pas restituables (ces derniers sont appelés non fongibles).
FONGUS n. m. est un emprunt, d'abord francisé en fonge (XIVe s.), puis sous la forme latine fungus (1560) écrite fongus (1752), au latin fungus « champignon » et par analogie de forme, en médecine « excroissance de chair » ; fungus est sans doute emprunté à une langue méditerranéenne comme le grec spongos « éponge* ».
❏  Le mot est conservé en botanique (XIVe s.) et en médecine (v. 1560, Paré).
❏  FONGUEUX, EUSE adj. (v. 1560), emprunt au bas latin fungosus « spongieux », et son dérivé FONGOSITÉ n. f. (1561) sont des termes de médecine. ◆  FONGIQUE adj. (1846) qualifie ce qui est de la nature des champignons ou est causé par un champignon.
■  On a tiré de fongus les éléments FONGI-, FONGO- pour former des termes didactiques :
■  FONGICIDE adj. (1867 ; de -cide*), FONGIFORME adj. (1836 ; de forme), etc.
■  Cependant, en botanique et à la différence de l'anglais, où les emplois de fungus (scientifique) et mushroom (usuel) sont nettement répartis, c'est champignon qui est utilisé, sauf exception, en français.
FONIO n. m. est emprunté à la langue mandé avec son sens d'origine. En français d'Afrique et dans l'usage des spécialistes, il désigne une variété de millet à grains fins, employé notamment pour les potages, la semoule du couscous. On le trouve en français dans les années 1930.
L FONTAINE n. f. est issu (v. 1130) du bas latin fontana « source, fontaine », féminin substantivé de l'adjectif classique fontanus « de source », de fons, fontis « source », mot sans doute d'origine religieuse (Cf. fonts). Les mots issus de fontana ont été utilisés au sens de « source » ou de « fontaine » dans toutes les langues romanes : ancien provençal fontana, vieil espagnol hontana, italien fontana « fontaine » et fonte « source » qui correspond à fon, fons dans le sud de la France (Cf. en occitan Font-Romeu).
❏  Du sens initial d'« eau vive sortant d'une source », par exemple dans fontaine de jouvence (XVe s.), on passe par extension (fin XIVe s.) à celui de « construction aménagée pour l'écoulement de l'eau » et spécialement (1690) « construction monumentale avec un ou plusieurs bassins ». De là borne-fontaine n. f. au XIXe s. (1835). ◆  Fontaine, par analogie, désigne aussi (1281) un récipient qui contient de l'eau pour les usages domestiques et en pâtisserie un creux ménagé dans de la farine (1845). ◆  Le mot s'est employé pour « fontanelle » (v. 1290) et comme désignation de la partie supérieure de la tête du cachalot (1872).
❏  FONTAINIER n. m. (XIVe s.) ou FONTENIER (1292), autrefois fabricant et vendeur de fontaines, a désigné celui qui s'occupe de fontaines publiques (1396) puis celui qui fait des sondages pour découvrir les eaux souterraines (1538).
FONTANELLE n. f. représente une réfection (1690), d'après le latin médical fontanella (XVIe s.), de l'ancien français fontenel(l)e (XIIe s.) « petite fontaine » et (1200) « haut du crâne », diminutif de fonteyne attesté dans ce sens au XIIIe siècle. ◆  Le mot désigne, par analogie avec la forme d'un bassin de fontaine, l'espace membraneux situé entre les os du crâne des nouveau-nés.
FONTAINEBLEAU n. m. (années 1930), pour fromage de Fontainebleau, la ville, désigne un fromage blanc frais additionné de crème, et fouetté.
FONTANGE n. f., relevé chez Regnard (1688), est certainement antérieur : on le trouve dans un texte anglais publié entre 1681 et 1689. Le mot vient du nom de la duchesse de Fontanges qui fut la maîtresse de Louis XIV en 1679 et 1680 : au cours d'une partie de chasse elle noua ses cheveux d'un ruban au-dessus du front ; la coiffure plut au roi et devint à la mode ; elle était encore portée au XVIIIe siècle.
1 FONTE → FONDRE
2 FONTE n. f. est une adaptation (1733), par attraction de 1 fonte (→ fondre), de l'italien fonda « bourse » (fin XIIIe s.) et « étui à pistolets » (1696), du bas latin funda « petite bourse », en latin classique « fronde » (Cf. l'ancien provençal fonda « petite bourse où l'on met un projectile »).
❏  Le mot désigne, le plus souvent au pluriel, chacun des étuis de cuir attaché à l'arçon d'une selle pour y placer des pistolets.
L FONTS n. m. pl. est une réfection (v. 1462) de funz (1080), fons (v. 1160), issu du latin ecclésiastique fontes, pluriel du latin classique fons, mot dont un dérivé a donné fontaine*.
❏  C'est encore un terme de liturgie, presque toujours employé dans le syntagme les fonts baptismaux (1524).
FOOTBALL n. m. est un emprunt (1888 ; 1872 dans un contexte britannique) à l'anglais foot-ball (XVe s.), d'abord « ballon de pied » puis « jeu avec ce ballon », composé de foot « pied », d'une forme germanique de même racine que le latin pes (→ pied), et ball « ballon ».
❏  Le mot, déjà signalé dans un texte français comme mot anglais (1698 puis 1728), désignait à la fois ce qu'on appelle en France football et le rugby (→ rugby), ceci jusque vers 1900 ; on distinguait le football association (familièrement, l'assoce) et le football rugby ; seul le premier a continué à être appelé football. ◆  En français du Canada, football désigne au contraire ce qu'on appelle parfois en France football américain ou rugby américain et le jeu de pied se dit, comme en anglais, soccer : le premier de ces sports, typiquement nord-américain, n'est que rarement désigné en Europe, sauf sous le nom de rugby américain. ◆  Par analogie, football désigne un jeu de table, nommé couramment baby-foot, pseudo-anglicisme.
❏  FOOTBALLEUR n. m. (1892) et FOOTBALLEUSE n. f. (v. 1960) sont les seuls dérivés de football (Cf. l'anglais footballer, 1880).
■  L'abrégement FOOT n. m. (1924) est très courant en France pour « football ». Il a donné en 1980 le dérivé familier FOUTEUX, EUSE adj. et n. « (personne) qui pratique ou qui aime le foot ».