ILLICO adv. est un emprunt (1417-1435, dates attribuées à un auteur chez qui le mot a un statut de latinisme, l'usage familier semblant apparaître tard au XIXe s.) au latin ilico « sur le champ », « sur la place », tardivement illico, par rapprochement avec illic « là-bas ». Cet adverbe, peu usité après Cicéron, est composé de in « dans » et de loco, ablatif de locus « lieu, moment » (→ lieu).
❏
Cet adverbe s'emploie familièrement pour « sur-le-champ », comme la locution adverbiale illico presto, de l'italien presto.
ILLOCUTOIRE adj. et n. m. est emprunté (1970) à l'anglais illocutory (1955, Austin), de illocution, composé de locution « action de parler », de même origine que le mot français locution.
❏
Illocutoire qualifie ce qui produit un effet par l'acte de parole même.
❏
ILLOCUTIONNAIRE adj. (1965), emprunt à l'anglais illocutionary (1962, Austin ; de illocution), est un doublet inutile et lourd.
ILLUMINER v. tr. est un emprunt (v. 1200) au latin classique illuminare « éclairer, illuminer », « orner », au figuré « mettre en lumière, rendre illustre », qui a pris en latin chrétien le sens de « rendre la vue », « éclairer, instruire » et, spécialement, « éclairer l'âme par la grâce, inspirer ». Le verbe est formé de il- pour in- et de lumen, -inis « moyen d'éclairage » puis « lumière » (→ lumière), issu de °leuk-s-men, d'une racine indoeuropéenne °leuk- « être lumineux, éclairer ». °Leuk- a donné naissance à une importante famille de mots, d'où viennent le latin lux, lucis (→ luire) et le grec leukos « blanc » (→ leuco-).
❏
Illuminer a d'abord signifié, comme en latin chrétien, « rendre la vue (à un aveugle) » puis (v. 1350) « éclairer (qqn) par la lumière de la vérité », dans un contexte religieux, et « éclairer d'une vive lumière ». Il s'est employé du XIVe (av. 1350) jusqu'au XVIIe s. au sens d'enluminer* et signifie ensuite (1694) « orner de lumières (un monument, une rue, etc.) ».
❏
ILLUMINÉ, ÉE adj. et n. signifiant « éclairé d'une vive lumière » a eu les sens abstraits (1564) d'« intelligent » et de « saisi brusquement (par une idée) »,
un illuminé désignant (1625) un esprit éclairé. Le nom désigne en histoire des religions un mystique croyant à l'illumination intérieure (1625) et un visionnaire (1690) ; par extension, il se dit d'une personne dont le comportement suit aveuglément les inspirations (1791).
■
Plusieurs dérivés se rattachent au sens religieux du verbe.
◆
ILLUMINATIF, IVE adj. (av. 1429) signifie « qui illumine » (de la lumière céleste) ; il a eu un emploi concret (1488).
◆
ILLUMINISME n. m. (1791) désigne en histoire des religions le mouvement et la doctrine de mystiques comme Swedenborg, Saint-Martin, dits illuminés ou ILLUMINISTES adj. et n. (XXe s.). Par ailleurs le mot, alors emprunté à l'italien illuminismo, de même origine, se dit du courant rationaliste du XVIIIe s. italien, correspondant à la philosophie des Lumières en France. Illuminisme est aussi employé en médecine (XXe s.) pour désigner un état d'exaltation pathologique accompagnée d'hallucinations.
■
ILLUMINABLE adj., d'abord terme de théologie (1866), s'emploie aussi (XXe s.) au sens concret.
◈
ILLUMINATION n. f. est emprunté au dérivé bas latin
illuminatio « action d'éclairer » et en latin chrétien « apparition », « lumière de la vérité religieuse », « inspiration, conversion ».
◆
En français, le mot s'emploie d'abord (1370-1372, Oresme) dans un contexte religieux, au sens de « lumière que Dieu répand dans l'âme d'un homme ». Il désigne ensuite (mil.
XVIe s.) l'action d'éclairer et son résultat
(Cf. éclairage, éclairement), spécialement (1611) l'action d'illuminer par de nombreuses lumières décoratives et, par métonymie, l'ensemble de ces lumières.
◆
Illumination, d'après le sens correspondant de
illuminer et
illuminé, s'est dit pour
illuminisme (1796) et équivaut à « inspiration subite ».
◆
Dans le titre du recueil de Rimbaud,
Les Illuminations (1873-1875), le mot signifie « enluminure », sens ancien repris (1636) à l'anglais
illumination (de
to illuminate « enluminer ») : Verlaine écrit
Les Illuminécheunes dans une lettre du 27 octobre 1878.
■
ILLUMINATEUR, TRICE adj. et n. (1403 ; 1447, selon T. L. F.) est un emprunt au latin chrétien illuminator, du supin de illuminare, « celui qui éclaire » (au figuré), « celui qui rend la vie », « qui révèle, qui inspire », d'où « maître ».
◆
Le nom est attesté au masculin dans les emplois de « personne, chose qui illumine ». Au figuré il est repris comme dérivé du verbe, au sens de « personne qui s'occupe des éclairages » dans un théâtre (1803) (Cf. éclairagiste). L'adjectif, rare au sens propre, est littéraire au figuré (XXe s.).
ILLUSION n. f. a été emprunté (v. 1120) au latin classique illusio « ironie » en rhétorique, qui a pris en latin chrétien les sens de « moquerie, objet de dérision » et aussi « erreur des sens, tromperie », « mirage, déception ». Le mot est dérivé de illusum, supin de illudere « se jouer, se moquer de », formé de il- (→ 1 in-) et de ludere « jouer », de la famille de ludus « jeu » (→ ludique).
❏
Illusion est introduit en français avec les sens du latin chrétien « moquerie », « objet de risée » qui ont disparu. Le mot désigne ensuite (v. 1223) une fausse apparence, l'erreur de perception dont elle est la cause, d'où spécialement illusion d'optique (1756) ou illusion optique (1761, Rousseau), au figuré « erreur de point de vue ». Par extension, illusion se dit d'un trucage, d'un tour de passe-passe (1611), notamment (1765) en art dramatique.
◆
Abstraitement le mot désigne une opinion fausse que forme l'esprit et qui l'abuse par son caractère séduisant (1611), par exemple dans les locutions sans illusions, se faire des illusions, faire illusion « tromper » (1767).
◆
L'abréviation ILLUSE n. f. semble dater des années 1930 ou 1940.
❏
ILLUSIONNER v. tr. « séduire ou tromper (qqn) par l'effet d'une illusion » (1801) est beaucoup moins courant que
S'ILLUSIONNER v. pron. (1822).
■
Le dérivé ILLUSIONNISME n. m., attesté isolément (1845) au sens de « tendance à illusionner les autres ou soi-même », est repris en 1891 en arts. Le mot désigne ensuite (1922) l'art de créer une illusion par des tours de prestidigitation, des trucages. Par analogie, le mot désigne en philosophie (1947, Sartre) la recherche de l'illusion du réel dans le roman, la peinture, etc.
◆
ILLUSIONNISTE adj. et n. (1888) a des valeurs parallèles à celles de illusionnisme.
■
ILLUSIONNEL, ELLE adj. « qui correspond à une illusion » est littéraire (av. 1886, Villiers de l'Isle-Adam).
■
ILLUSOIRE adj. est emprunté (fin XIVe s.) au bas latin illusorius « qui est propre à engendrer l'illusion », dérivé de illusio. Le sens repris au latin est sorti d'usage et l'adjectif s'applique aujourd'hui à ce qui peut faire illusion mais ne repose sur rien de réel.
◆
Le dérivé ILLUSOIREMENT adv. (v. 1530) qui a les deux sens successifs d'illusoire est littéraire.
ILLUSTRE adj. est un emprunt (1440-1475) au latin illustris « éclairé, bien en lumière », « éclatant, manifeste », d'où « brillant, en vue », mot formé de il- (→ 2 in-) et de °lustrum « éclat », dérivé non attesté de lux, lucis « lumière » (→ lucide), avec influence de illustrare (→ illustrer).
❏
Illustre s'applique à une personne dont le renom est éclatant du fait de ses qualités, d'où naissance illustre « noble » ; le mot s'est employé comme nom masculin au XVIIe s. (av. 1660, Scarron). L'adjectif signifiait aussi (XVIIe s.), comme en latin, « bien en vue, manifeste, éclatant », en bonne ou en mauvaise part. Illustre est aujourd'hui moins courant et plus littéraire que célèbre.
❏
ILLUSTRISSIME adj., emprunt (1481) à l'italien
illustrissimo (
XIVe s.) (superlatif de
illustre, latin
illustris), est encore utilisé comme terme d'adresse pour certains dignitaires ecclésiastiques, et dans la langue générale, pour « très illustre », souvent ironiquement.
■
ILLUSTREMENT adv. (1555) est littéraire et rare.
◈
Enfin, le verbe
ILLUSTRER, en relation sémantique étroite avec
illustre du
XVe au
XVIIIe s., s'en est détaché
(→ illustrer), notamment après les emprunts à l'anglais qui lui ont donné, comme à
illustration, une tout autre valeur.
ILLUSTRER v. tr. a été emprunté en moyen français (1486 ; v. 1350, selon F. e. w.) au latin illustrare « éclairer, illuminer » et au figuré « mettre en lumière », « donner de l'éclat » ; le verbe est formé de il- (→ 2 in-) et de lustrare « éclairer » (différent de lustrare « purifier »), dénominatif de °lustrum « éclat », dérivé non attesté de lux, lucis « lumière », de la famille indoeuropéenne de °leuk- « être lumineux, éclairer » (→ illustre, lucide, lumière).
❏
Illustrer signifie d'abord (1486) « éclairer », en parlant de Dieu, de la foi, sens en usage jusqu'à la fin du
XVIe s. (1580, Montaigne).
◆
Le sens de « rendre illustre » (1508) s'est employé plus longtemps, mais est archaïque ; il a été remplacé par
enrichir, orner (une œuvre ou la langue).
◆
Illustrer reprend au début du
XVIe s. le sens latin de « rendre plus clair (par des explications) », « mettre en lumière (par des exemples) » (1509).
■
C'est par emprunt (1825) à l'anglais to illustrate, de même origine que le verbe français, que illustrer prend le seul sens courant aujourd'hui, « orner d'images en rapport avec un texte ».
❏
ILLUSTRANT, ANTE, participe présent adjectivé (av. 1475), a signifié « brillant, illustre » ; cet adjectif a disparu.
■
ILLUSTRÉ, ÉE adj. et n. m. ne se rattache qu'à la valeur empruntée à l'anglais « orné d'illustrations » ; il désigne par métonymie (1894) un périodique qui comporte de nombreuses illustrations, en particulier des bandes dessinées ; ce sens a vieilli.
■
ILLUSTRATION n. f. est un emprunt (2e tiers du XIVe s. ; XIIIe s., isolément) au latin impérial illustratio « action d'éclairer, de rendre brillant », terme de rhétorique qui a pris en latin chrétien les sens de « glorification, gloire », « apparition lumineuse », « inspiration » ; le mot dérive du supin de illustrare.
◆
Illustration s'est d'abord employé dans le vocabulaire religieux au sens de « lumière resplendissante » et désigne ensuite dans le vocabulaire théologique (1636) l'illumination que Dieu répand dans l'esprit.
◆
Il a repris au XVIe s. (1509) les sens latins, également sortis d'usage, d'« action de rendre illustre », « honneur » et, spécialement, « marque d'honneur qui illustre » (1549, Du Bellay, Deffence et illustration de la langue françoise). Une illustration pour « un personnage célèbre » (1834) est archaïque et littéraire.
■
C'est par emprunt à l'anglais, de même origine que le français, qui avait pris à la fin du XVIe s. les sens d'« éclaircissement » (1581), « exemple » (1585), que illustration signifie ensuite (1611) « action d'éclairer par des explications, des commentaires, des exemples » ; le mot est encore chez Littré au sens de « note ». Il se dit plus tard (1870) de ce qui éclaire en confirmant, mais cette valeur n'est pas entrée dans l'usage au même titre que le sens iconographique.
◆
Au XIXe s., comme le verbe illustrer, illustration change de domaine également par emprunt à l'anglais ; il se dit (1825) d'une figure illustrant un texte imprimé, puis désigne (1845) l'ensemble des techniques mises en œuvre pour illustrer les textes, le genre artistique lui-même et le fait d'illustrer un texte ; l'anglais illustration, de même origine que le mot français, était récent dans ce sens : « illustration destinée à éclairer un texte » (1813) et « dessin, gravure rehaussant un texte » (1816).
■
ILLUSTRATEUR, TRICE n. s'est employé au masculin (mil. XIIIe s.) au sens du latin chrétien illustrator « celui qui donne du lustre, de l'éclat » ; le mot latin se disait aussi pour « inspirateur », en parlant de Dieu.
◆
Au XIXe s., alors rattaché à illustrer « orner de figures » et à illustration, le mot désigne un artiste spécialisé dans l'illustration (1845, Gautier). Il se dit (apr. 1850) d'une personne qui orne qqch. par une œuvre d'art.
■
ILLUSTRATIF, IVE adj. s'applique à ce qui est explicatif, d'abord en philosophie (1847, V. Cousin) ; là aussi, le mot est un emprunt à l'anglais illustrative « qui sert à expliquer » (1643), dérivé de to illustrate.
◆
Illustratif, lié à illustration, signifie parfois « relatif à l'illustration en tant que genre ».
ILLUVIAL, AUX adj. est un dérivé savant (XXe s.) du latin illuvio « débordement (d'un cours d'eau) », d'après alluvial.
❏
L'adjectif qualifie ce qui résulte de l'apport d'éléments étrangers dans une couche du sol, en géologie et pédologie.
❏
ILLUVIATION n. f. est un emprunt à un dérivé régulier du latin
illuvio, pour désigner le processus lui-même.
■
ILLUVIUM n. m. est formé en latin scientifique pour cette accumulation d'éléments dissous dans l'horizon d'un sol.
ILOTE n. m. est un emprunt savant (av. 1593) au latin ilotae, lui-même emprunté au grec heilôs, -ôtos, « ilote », mot désignant les esclaves de l'État à Sparte, généralement des serfs attachés à la terre, dont les conditions de vie étaient très dures. Le mot, que l'on a rapproché sans raison valable d'un verbe grec signifiant « prendre, capturer », est sans étymologie. La forme grecque explique les graphies hélote (1662), heilote (1752), hilote (1812) beaucoup plus rares.
❏
Ilote est introduit avec le sens de l'étymon, en parlant de l'Antiquité grecque ; par référence à la tradition selon laquelle les Spartiates enivraient les ilotes pour inciter leurs enfants à la sobriété, la locution un ilote ivre (1794, A. Chénier) désigne une personne qui a un vice dont le spectacle préserve les autres. Par analogie, ilote a désigné un opprimé (1793, Robespierre) et, dans un usage très soutenu (1819), une personne asservie, réduite à la misère ou au dernier degré de l'ignorance.
❏
ILOTISME n. m., terme didactique, désigne (1819) la condition d'ilote dans l'Antiquité ; le mot a remplacé ilotie nom féminin (1568 ; repris en 1748, par Montesquieu), emprunt au grec heilôteia. Ilotisme s'emploie aussi au sens figuré de ilote (1833, Balzac).
+
IMAGE n. f. est une réfection (v. 1160) de la forme imagine, imagene (v. 1050) ; c'est un emprunt au latin imaginem, accusatif de imago « image », puis « représentation », « portrait », « fantôme » et « apparence » par opposition à la réalité, également terme de rhétorique comme figura. Imago suppose un radical im-, d'origine obscure qui serait à la base du verbe imitari (→ imiter).
❏
Image a d'abord eu le sens latin de « statue » ; dès le
XIIe s., le mot désigne aussi (v. 1160) une vision au cours d'un rêve et se dit également (1176,
ymage), par extension du premier sens, de la représentation graphique d'un objet ou d'une personne, sens d'où viennent les locutions
une belle image « une femme au visage inexpressif » (1690), sortie d'usage à la différence de
sage comme une image (1690) ; ces deux expressions — comme l'usage du mot
idole dans ce sens — font allusion à l'immobilité de l'image par rapport à l'être représenté. Le mot s'emploie aussi pour désigner ce qui reproduit ou imite qqch. ou qqn, en particulier dans
à l'image de « à la ressemblance de » (v. 1180).
◆
Enfin, dès l'ancien français,
image signifie (1180, Marie de France) « reproduction inversée qu'une surface polie donne d'un objet qui s'y réfléchit ».
◆
Abstraitement,
image entre comme en latin dans le vocabulaire de la rhétorique (1265, B. Latini,
par ymage u par comparison) ; le mot se réfère à l'évocation dans le discours d'une réalité différente de celle à laquelle renvoie le sens propre du texte, mais qui reste liée à elle par une relation d'analogie ; la locution
faire image correspond à « évoquer qqch. » (en tant qu'image)
[→ imagé]. Image désigne ensuite (1550) la manifestation sensible de qqch. d'abstrait ou d'invisible et ce qui évoque une réalité de nature différente, en raison d'un rapport de similitude
(Cf. figure, symbole).
◆
À partir du
XVIIe s.,
image devient un mot-clé de la psychologie ; le mot désigne (1647, Descartes) la reproduction mentale d'une perception ou d'une impression, en l'absence de l'objet qui lui avait donné naissance ; en ce sens, lié à
imagination (ci-dessous), on a utilisé indistinctement
idée ou
image jusqu'au milieu du
XVIIIe siècle ; ensuite
image s'oppose d'une part à la réalité, aux choses, d'autre part au concept, à l'idée abstraite. Par extension (
XVIIe s.),
image se dit d'une vision intérieure plus ou moins exacte de qqch., et d'un produit de l'imagination.
◆
Par extension du sens d'« apparence visible », le mot s'emploie aussi, littérairement, pour « aspect particulier, évocateur » (1795, M
me de Genlis,
l'image du repos).
◆
Au
XIXe s., l'importance des représentations planes, jusqu'alors limitées à un nombre restreint, notamment par la gravure, s'accroît avec l'apparition de nouvelles techniques. Mises en rapport ou non avec des textes imprimés
(Cf. illustration, illustrer*, repris à l'anglais à cette époque), les images sont reproduites
(Cf. reproduction) par la photographie (
image est attesté dans ce contexte en 1840), puis par diverses techniques (1850).
Image d'Épinal (1873) désigne une image de facture souvent naïve, produite par la célèbre imprimerie d'Épinal au
XIXe s., puis toute image populaire et naïve ; par figure, l'expression se dit d'un lieu commun largement répandu. En ce sens, un côté naïf ou religieux reste souvent attaché à
image par rapport à
illustration ou à
reproduction (
les belles images, etc.). En histoire, on parle de
querelle des Images à propos des conflits sur la représentation de Jésus et des saints, à Byzance
(→ icône, iconoclaste).
◆
Au sens de « représentation mentale », jusqu'à la fin du
XIXe s., le mot ne s'applique qu'aux images de la vue ; puis il s'étend aux autres impressions sensorielles (1883,
image sonore, auditive ; déb.
XXe s.,
image acoustique, graphique d'un signe, en linguistique chez de Saussure).
◆
Au
XXe s.,
image désigne aussi l'élément visuel, au cinéma ou à la télévision
(arrêt sur l'image).
■
Par ailleurs la locution image de marque se dit (av. 1960) de la représentation qu'a le public d'un produit, d'une marque commerciale, etc. et, par extension, signifie « représentation collective d'une personne, d'une institution ».
❏
IMAGIER, IÈRE n. et adj. désigne d'abord, en relation avec le premier sens d'
image, un sculpteur (1260,
ymagier ; 1364,
ymager), puis un peintre (1549, Ronsard,
imager), sens qui évoque aujourd'hui le moyen âge. Le mot se dit ensuite (1636) avec sa variante
imager (1680) de qqn qui vend des images. Il équivaut enfin à
enlumineur (1833,
maître imagier).
◆
L'adjectif est rare au sens d'« imagé » (1899, Bloy).
■
IMAGERIE n. f. s'est d'abord dit (fin XIIIe s.) d'un ensemble d'objets sculptés. Le mot est repris au XIXe s. pour désigner la fabrication et le commerce d'images (1829), puis un ensemble d'images de même origine, au propre (1860, Baudelaire, l'imagerie orientale ; 1866, l'imagerie d'Épinal) et au figuré (1867, Baudelaire).
◆
Dans un usage didactique (XXe s.), imagerie se dit d'un ensemble d'images dans un discours et d'un ensemble d'images mentales.
◆
Le mot est repris en technique pour désigner un ensemble de productions d'images par divers procédés. Imagerie médicale s'applique à l'ensemble des procédés techniques (radiographie, résonance magnétique, etc.) produisant des images destinées aux diagnostics.
■
IMAGÉ, ÉE adj. est d'abord attesté (XIVe s., hymagié) au sens ancien de « reproduit par l'image », puis de « orné d'images, décoré » (1481, ymaigié).
◆
Il s'emploie pour « qui contient des images rhétoriques » (1795, une langue imagée) et en parlant d'un écrit (1842).
■
Le verbe IMAGER v. tr. (1584) est beaucoup moins courant que imagé.
■
IMAGEANT, ANTE adj. (1940, Sartre) « qui produit des images mentales » est un terme de philosophie.
■
IMAGISTE adj. et n. a désigné (1775) un vendeur d'images. Au sens de « qui concerne un mouvement poétique anglo-saxon du début du XXe s. », c'est un emprunt à l'anglais imagist ou imagiste (1912, Ezra Pound), dérivé d'image, lui-même emprunté au français.
■
IMAGISME n. m. (1931 ; de l'anglais imagism ou imagisme, 1912, Ezra Pound) désigne le mouvement des imagistes.
◈
IMAGINER v. tr. est emprunté (1290) au latin impérial
imaginari « se figurer, s'imaginer », dérivé du latin classique
imago.
◆
Le verbe s'emploie d'abord au sens de « former dans son esprit l'image d'un être, d'une chose », puis de « concevoir l'existence de qqch. » (1314,
imaginer que) et « avoir l'idée de qqch., inventer » (1440-1475).
S'imaginer (1553) prend ensuite le sens (1636) de « croire à tort » ; la construction
s'imaginer de (suivie de l'infinitif) est sortie d'usage.
■
IMAGINANT, ANTE adj., tiré du participe présent, est attesté au sens de « fin, habile » (v. 1360) ; il a ensuite eu le sens de « qui imagine », en parlant des facultés (av. 1662, Pascal) ; noté « vieux » au XIXe s., l'adjectif est aujourd'hui rare.
■
IMAGINATEUR, TRICE n., utilisé au XVIe s. au sens de « personne qui se livre aux écarts de l'imagination » (1578, H. Estienne ; Cf. latin moderne imaginator, 1564), a été repris au XIXe s. pour « personne qui a de l'imagination, invente » (1856, Goncourt) ; le mot est rare, comme l'est imagineur, attesté chez Valéry (1899).
◈
Les dérivés de
imago et de
imaginari ont fourni plusieurs emprunts.
■
IMAGINABLE adj., emprunté (v. 1375, ymaginable) au bas latin imaginabilis « que l'on ne peut concevoir », conserve le sens de l'étymon et est employé (XVIIe s.) avec une valeur intensive ; l'antonyme préfixé INIMAGINABLE adj. est attesté en 1580 (Montaigne). Il est plus courant que imaginable, surtout au sens affaibli de « scandaleux, inacceptable et étonnant ». Cf. Invraisemblable.
◆
Le dérivé INIMAGINABLEMENT adv. (1838) est rare.
■
IMAGINATIVE n. f. est emprunté (1314) au latin médiéval imaginativa « faculté, puissance d'imaginer » (v. 1270, dans le domaine anglais) ; encore employé comme archaïsme plaisant au XIXe s., le mot a été remplacé par imagination.
■
IMAGINATIF, IVE adj. a, par emprunt au latin médiéval imaginativus (1250 dans le domaine anglais), le sens de « habile, fin » (dernier quart du XIVe s.). Le sens moderne « qui a l'imagination fertile » apparaît au XVIe s. (La Boétie, av. 1563).
◆
En dérive IMAGINATIVEMENT adv. (1847), rare.
◈
IMAGINATION n. f. est un emprunt (v. 1175) au latin impérial
imaginatio « image, vision », de
imaginatus participe passé de
imaginari, et se dit d'abord d'une image de rêve.
◆
Par extension, le mot désigne (1269-1278) la faculté d'inventer des images et, depuis le
XIVe s., de former des combinaisons nouvelles d'images.
◆
Se détachant de l'idée d'image, le mot en vient à une valeur plus abstraite, « faculté de créer en combinant des idées », spécialement « inspiration artistique ou littéraire ».
Une imagination, par métonymie, se dit (v. 1370, Oresme) de ce qui est conçu par l'esprit ; il est également employé (av. 1593, Montaigne) pour désigner la faculté d'évoquer les images des objets qu'on a déjà perçus, sens plus usuel jusqu'au début du
XVIIIe siècle.
■
IMAGINAIRE adj. et n. m. est emprunté (1496) au latin impérial imaginarius « simulé », « qui n'existe qu'en imagination », dérivé de imago.
◆
L'adjectif s'applique d'abord à ce qui n'a de réalité qu'en apparence. Au XVIIe s., il est employé par Descartes en mathématiques (1637, racines imaginaires, nombre imaginaire ; av. 1650, espaces imaginaires), et par Pascal (1658) au sens de « qui n'existe que dans l'imagination » (1673, malade imaginaire).
◆
L'imaginaire n. m. (1820, Maine de Biran) désigne l'ensemble des produits de l'imagination, le domaine de l'imagination ; le mot est utilisé en psychanalyse (1966, Lacan) pour désigner un des registres du champ psychanalytique, caractérisé par la prévalence de la relation à l'image du semblable.
■
Le dérivé IMAGINAIREMENT adv. (1540) est d'emploi didactique ou littéraire.
◈
Le dernier mot de la série est un emprunt de la langue scientifique au latin :
imago (→ image). IMAGO n. f. désigne en biologie (1866) la forme adulte définitive de l'insecte sexué à métamorphoses ; le mot
image a été utilisé en ce sens (1845).
◆
Imago est devenu (1929) un terme de psychanalyse, par emprunt à l'allemand, d'abord dans le roman
Imago de Spitteler (1906), puis chez Jung (1911) et Freud (av. 1915) ; le mot désigne un prototype inconscient acquis par le sujet dans l'enfance (en particulier, image du père, de la mère) et qui oriente ses relations interpersonnelles.
◆
De ce sens dérive
IMAGOÏQUE adj. (mil.
XXe s.).
■
IMAGINAL, ALE, AUX adj., dérivé savant (1893) du latin imago, imaginis, correspond à l'emploi de imago en biologie.
IMAM ou IMAN n. m. est un emprunt d'abord transcrit iman (1559 ; 1697, imam) à l'arabe ᾿imām « celui qui se tient devant », « président », d'où « ministre de la religion musulmane », celui qui se met devant les fidèles en prière. C'est un dérivé de ᾿amma « marcher en tête », « présider ».
❏
Dans ses premières attestations, le mot désigne en français un ministre de la religion musulmane, qui préside à la prière dans une mosquée. Le mot s'emploie ensuite comme titre de Ali (1653), de Mahomet (1697) et de leurs successeurs (dans l'islam chiite), puis (1721) comme titre du chef de chacune des quatre écoles juridiques et théologiques sunnites. Imam a été utilisé (1752) comme titre du souverain du Yémen.
◆
Par extension du premier sens, le mot a désigné au XVIIIe s. (1771, d'Alembert) tout ministre d'une religion, de manière plaisante et péjorative.
❏
IMAMAT n. m. signifie (1697) « dignité d'imam » et désigne aussi un territoire dépendant de l'autorité d'un imam (1867, Littré). La variante imanat (1765) est en usage en français du Maghreb.
IMBÉCILE adj. et n. représente un emprunt (1495-1496) au latin imbecillus, proprement « sans bâton, sans soutien » d'où « faible (de corps, d'esprit) » et « sans caractère ». Le mot est formé de im- (→ 1 in-) et de bacillum, diminutif de baculum « bâton », qui se rattache à une racine indoeuropéenne °bak- « bâton ». La graphie imbecille (1508), courante au XVIIe s., se rencontre encore au début du XIXe siècle.
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Imbécile s'est d'abord dit, comme en latin, d'une personne physiquement faible ; ce sens est toujours vivant à l'époque classique, ainsi que la locution
le sexe imbécile (1580, Garnier) pour désigner les femmes.
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L'adjectif signifie ensuite « dépourvu d'intelligence » (1541,
imbecille jugement ; 1595, en parlant des personnes). Cet emploi vient d'expressions comme
imbecille de sens « faible d'esprit » (1509) où l'adjectif a encore la valeur originelle de « faible ». Le sens moderne donne lieu à diverses expressions comme
imbécile heureux « personne bête et satisfaite d'elle-même ». Comme terme d'injure, le mot est plus ou moins vidé de son sens
(espèce d'imbécile) et a des emplois analogues à ceux de
idiot, crétin.
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Le mot a pris au XVIe s. le sens latin de « dépourvu de force morale ou intellectuelle » (1541), courant à l'époque classique, ainsi que imbécile (à, pour) « incapable (de) ». Imbécile s'est employé (1671) en médecine pour « faible d'esprit ». Ces valeurs sont archaïques.
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IMBÉCILEMENT adv. (1542,
imbécillement) a eu le sens de « faiblement », le sens courant moderne étant attesté chez Saint-Simon (déb.
XVIIIe s.).
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Les verbes dérivés
IMBÉCILLIFIER v. tr. (1875 au participe passé, Goncourt) et
IMBÉCILLISER v. tr. (1888, Léon Bloy) n'ont pas vécu.
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IMBÉCILLITÉ n. f. est emprunté (3e quart du XIVe s.) au dérivé latin imbecillitas « faiblesse physique », « faiblesse d'esprit, de caractère ».
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Le nom, dans ses premiers emplois, signifie « manque de force physique », sens encore vivant au XVIIIe siècle.
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Il désigne ensuite (1509) un grave manque d'intelligence, seul emploi aujourd'hui vivant, et s'est dit (1541) pour « faiblesse morale ». Il s'emploie, comme imbécile, au sens médical (1680). Il se dit enfin (1756, Voltaire) par métonymie d'un acte, d'une parole imbécile (une, des imbécillités), valeur souvent affaiblie en « parole, acte, chose inintéressante, insignifiante ». Tous les emplois sont proches de ceux d'idiotie.
IMBERBE adj. est un emprunt savant (1509, O. de Saint-Gelais) au latin imberbis « qui est sans barbe », formé de im- (→ 1 in-) et d'un dérivé de barba (→ barbe).
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Imberbe est introduit avec le sens du latin qui équivaut à glabre. Au figuré, l'adjectif équivaut à « très jeune, sans expérience », c'est-à-dire comme un jeune homme qui n'a pas encore de barbe (Cf. blanc-bec).
IMBIBER v. tr. est un emprunt, d'abord attesté au participe passé (1478), au latin imbibere « absorber », « se pénétrer de », formé de im- (→ 2 in-) et de bibere (→ boire).
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Imbibé signifie d'abord « qui a pénétré dans qqch. » ; s'imbiber (v. 1500) puis imbiber, transitif (1555), s'emploient ensuite pour « pénétrer d'un liquide » et, depuis le XVIIe s., avec un sujet désignant le liquide. Au XVIIIe s., le verbe s'utilise au figuré comme imprégner. Dans l'usage familier s'imbiber signifie « boire beaucoup » (1873, probablement antérieur) et imbibé, ée s'emploie pour « ivre ».
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IMBIBITION n. f. est un emprunt (v. 1377, imbibicion) au latin médiéval imbibitio « absorption » (1250). Le nom désigne l'action d'imbiber, de s'imbiber, et son résultat ; comme le verbe, il s'emploie au figuré pour « imprégnation » (1857, Michelet).
IMBRIQUÉ, ÉE adj. est précédé par une imbriquée, nom féminin, dérivé savant (1555) du latin classique imbrex, -icis « tuile creuse », sur le modèle des adjectifs latins en -iceus, pour désigner une tuile concave. L'adjectif actuel est un emprunt (1584) au latin classique imbricatus « ayant la forme d'une tuile creuse », « disposé comme les tuiles », participe passé de imbricare, dérivé de imbrex. Ce nom dérive de imber « pluie », d'origine incertaine, supplanté par pluvia dans les langues romanes (→ pluie) et emprunté isolément au XVIe s. (1510, ymbre).
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L'adjectif se dit de ce qui est formé d'éléments se recouvrant partiellement, à la manière des tuiles d'un toit. Il s'emploie au pluriel (mil. XIXe s.) en parlant d'éléments attachés les uns aux autres et signifie figurément (mil. XXe s.) « dans des rapports d'étroite dépendance ».
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Les dérivés IMBRIQUER v. tr. (1836), plus courant au pronominal s'imbriquer, au propre comme au figuré, et IMBRICATION n. f., également employé au propre (1812) et au figuré (av. 1922, Proust), sont moins usuels que l'adjectif.
IMBROGLIO n. m., attesté en français chez Bossuet (fin du XVIIe s.), est un mot repris à italien (XIVe s.), déverbal de imbrogliare « embrouiller ». Le verbe est un préfixé de brogliare, du provençal brolhar, équivalent du français brouiller*. Le mot a été francisé au XVIIIe s. sous les formes imbroille (dictionnaire de l'Académie, de 1762 à 1835), disparue, et embrouille*.
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Imbroglio, d'abord au sens de « confusion, embrouillement », signifie depuis le XVIIIe s. (1762-1779, Diderot) « situation embrouillée ». Le mot s'emploie spécialement (déb. XIXe s., 1829, chez Sainte-Beuve), en parlant d'une pièce de théâtre, pour « intrigue difficile à suivre » ; par métonymie, il désigne la pièce qui a une telle intrigue (1839, Balzac).
IMBU, UE adj. représente une réfection (XVe s., imbëu) de embu, participe passé de emboire*, d'après le latin imbutus « imbibé, imprégné », participe passé de imbuere « imprégner », au physique et au moral, sans origine connue. Il a été emprunté au début du XVIe s. sous la forme imbuer pour « pénétrer », « imprégner » (1500) et « instruire » (1542).
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Imbu signifie, en parlant de personnes, « pénétré (de sentiments, d'idées, etc.) » et être imbu de soi-même se dit pour « se croire supérieur aux autres » (déb. XXe s.).
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L'adjectif s'est aussi employé au sens concret d'« imbibé » (1438, imbeu de vin).
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IMBOIRE v. tr., réfection d'après imbu du verbe emboire*, est d'emploi très littéraire au sens d'« imprégner (d'une influence) » (1572, « se pénétrer de ») et d'usage technique (1845) comme synonyme de emboire.
IMITER v. tr. est un emprunt du moyen français (av. 1493) au latin classique imitari « reproduire par imitation », « être semblable à » et, en parlant d'une peinture, « exprimer, représenter », puis en latin chrétien (VIIe s.) « reproduire des exemples de vertu, un modèle idéal » ; le radical im- de imitari, d'origine obscure, se retrouve dans imago (→ image).
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Imiter signifie d'abord « chercher à reproduire ce que fait qqn, à suivre son exemple », spécialement dans le domaine religieux (imiter Jésus). Puis, le verbe s'emploie dans le domaine des arts, de la littérature (1549, Du Bellay) au sens de « prendre pour modèle (une œuvre) ». Imiter depuis le début du XVIIe s. (1611) se dit pour « chercher à reproduire » (le comportement d'une personne, d'un animal ; des voix, etc.). Par extension, le verbe signifie (1663, Boileau) « contrefaire (une marchandise, une écriture, etc.) » et « agir comme (qqn) ».
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Dans le domaine des arts, il s'emploie (1674, Boileau) au sens de « reproduire l'aspect sensible de la réalité » ; cet emploi est aujourd'hui péjoratif, le mot n'ayant plus les connotations positives d'imitation, au sens de mimesis (ci-dessous). Imiter signifie ensuite (1690) « produire le même effet que (qqch.) ».
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IMITATION n. f. est un emprunt (v. 1236,
imitacion ; 1488,
ymitation) au dérivé latin
imitatio « imitation, copie », « faculté d'imiter » et, en latin chrétien (
VIIe s.), « imitation d'exemples de vertu ».
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Le nom désigne d'abord l'action de chercher à reproduire (une attitude, un geste, etc.) et, spécialement, le fait de prendre qqn pour modèle dans l'ordre moral. C'est le sens qu'a le mot dans L'Imitation de Jésus-Christ, ouvrage adapté en vers par Corneille (1651) et attribué à Thomas a Kempis (v. 1380-1471) sous le titre Imitatio Christi, d'abord traduit en 1447 sous le titre Internelle Consolation.
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Imitation s'emploie ensuite dans le domaine littéraire (1549, Du Bellay) pour « action, fait de prendre une œuvre pour modèle », sens aujourd'hui péjoratif, mais qui ne l'était pas avant le XIXe siècle ; les théoriciens du théâtre, au XVIIe s., conservent à imitation le sens du latin imitatio traduisant le grec mimesis : « production par l'art d'effets analogues à ceux de la réalité » ; les textes classiques, qui se réfèrent aux concepts aristotéliciens, donnent à la notion la valeur active qu'elle a chez Aristote : « processus de création respectant un certain nombre de qualités naturelles ». Imitation se dit par métonymie (1690) d'une œuvre qui est le produit de ce processus, puis, péjorativement, d'une œuvre sans originalité.
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Le mot prend au XVIIIe s. le sens de « reproduction volontaire ou involontaire (d'actes, etc.) » (1762, Rousseau) ; il est sorti d'usage pour désigner une œuvre imitée de la nature, valeur attestée elle aussi chez Rousseau (1763).
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Au XIXe s., imitation équivaut à « contrefaçon, reproduction (d'un objet, d'une matière) » (1845), d'où en imitation « en matière imitée » (1861). Arts d'imitation (1857, Delacroix) désignait la peinture et la sculpture, par opposition à la musique, la poésie, pourtant relevant aussi de la mimesis chez Aristote et chez les théoriciens du XVIIe siècle.
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IMITATEUR, TRICE n. et adj., « personne qui imite », est un emprunt (1422, immitateur) au latin imitator, féminin imitatrix, de imitatum, supin de imitari ; le féminin imitatrice est attesté en 1530.
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Un emploi spécial récent concerne un artiste qui imite la voix et le comportement de personnes célèbres.
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IMITATIF, IVE adj. (1466), emprunt au dérivé bas latin imitativus « qui reproduit », « qu'on fait par imitation ». Il s'emploie notamment dans les syntagmes musique imitative (1761) et harmonie imitative (1771).
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IMITABLE adj. est dérivé (av. 1520) de imiter ou emprunté au latin imitabilis, dérivé de imitari ; en dérive IMITABILITÉ n. f. (XXe s.).
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L'antonyme INIMITABLE adj. est emprunté (déb. XVIe s.) au latin inimitabilis, de in- négatif. Il a pris une valeur majorative « si excellent qu'on ne peut l'imiter ».
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Les dérivés INIMITABLEMENT adv. (1801) et INIMITABILITÉ n. f. (XXe s.) sont rares.