INAUGURER v. tr. est emprunté (v. 1355, Bersuire) au latin inaugurare « prendre les augures » et « consacrer officiellement la nomination de qqn (prêtre, consul, etc.) », « consacrer (un lieu) » ; le verbe latin est formé de in- (→ 2 in-) et de augurare « prédire », dérivé de augur (→ augure).
❏
Le verbe est employé depuis le XIVe s. dans un contexte religieux, au sens latin de « consacrer (une personne ou un lieu) par une cérémonie solennelle » ; il est rarement attesté avant le XVIIIe s. et, dans cet emploi, n'est plus utilisé en parlant d'une personne ; il est en revanche usuel à propos des lieux des expositions, etc. Inaugurer et inauguration sont devenus au XXe s. le symbole de l'activité présidentielle creuse (inaugurer les chrysanthèmes).
◆
Le verbe signifie figurément (1817, Mme de Staël) « mettre en pratique pour la première fois » et, par extension (1832, A. Karr), « utiliser pour la première fois ».
◆
Par ailleurs on le relève comme terme d'Antiquité romaine au sens de « prendre les augures » (1752, Trévoux), encore attesté dans les dictionnaires du XIXe siècle.
❏
INAUGURAL, ALE, AUX adj. est dérivé de
inaugurer (v. 1670) sur le modèle d'
augural.
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INAUGURATEUR, TRICE n. désigne une personne qui inaugure qqch. (av. 1841) et une personne qui marque (par ses actes) le début de qqch. (1857, Michelet) ; il est rare.
■
INAUGURATION n. f., emprunt au dérivé bas latin inauguratio « consécration (d'un lieu, d'une personne) par une cérémonie solennelle » et « commencement », dérivé du supin de inaugurare, s'emploie d'abord dans un contexte religieux (v. 1355, inauguracion, Bersuire) comme inaugurer.
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Rare jusqu'au XVIIIe s., sorti d'usage pour « sacre », le mot est devenu courant pour désigner la consécration d'un monument, d'un temple puis d'une manifestation, d'une exposition, d'où spécialement discours d'inauguration (1798, d'un professeur qui prend possession de sa chaire). Il s'emploie par extension (1783, Restif de La Bretonne) pour désigner le fait de se servir pour la première fois de qqch. et, dans un usage littéraire, au sens de « commencement, début » (1817, Mme de Staël).
INCA adj. inv. et n. s'est substitué (1672) aux formes Inge (1558), puis Inga (1557 Thevet), variante Ynca (1633). Le mot vient du quichua ; les Indiens de l'ancien Pérou désignaient ainsi leurs souverains. Il a très probablement été emprunté par l'intermédiaire de l'espagnol.
❏
Le mot se dit, au singulier, du titre porté par les souverains de cet empire nommé Empire inca (adjectif). Il s'emploie ensuite (1622) pour désigner la langue parlée par les Indiens du Pérou et nommée aujourd'hui quichua*. Enfin, les Incas est le nom donné (1868) aux sujets de l'Empire inca. Les spécialistes utilisent aussi la graphie Inka et un pluriel invariable.
❏
Inca a fourni le dérivé didactique
INCASIQUE adj. (1888, au sens de
inca) ;
INCAÏSME est attesté isolément chez P. Morand (1932).
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PRÉINCASIQUE adj., déjà attesté en 1888 « des anciens Incas », s'applique (1903) à ce qui est antérieur à la civilisation dite des Incas, avant l'an 1000, dans la même zone d'Amérique andine.
INCANDESCENT, ENTE adj., attesté chez Lavoisier (1781), est un emprunt au latin incandescens, participe présent de incandescere « être en feu », « s'échauffer, chauffer à blanc », formé de in- (→ 2 in-) et de candere « être enflammé, brûler », avec l'infixe inchoatif -sc- (→ chandelle).
❏
L'adjectif a d'abord le sens de « chauffé à blanc ou au rouge vif » ; il s'applique figurément (comme ardent, brûlant) à une personne pleine d'ardeur, d'exaltation (1819) ; par analogie incandescent signifie « rouge vif ».
❏
Le dérivé INCANDESCENCE n. f. s'emploie au propre (1779 ; 1764, selon Bloch et Wartburg) et au figuré (av. 1821).
INCANTATION n. f. a été emprunté (XIIIe s.) au bas latin incantatio « formule magique, enchantement, sortilège », du supin du latin classique incantare « chanter une formule magique », « consacrer par des charmes » (→ enchanter), composé de cantare (→ chanter).
❏
Incantation, d'abord dans un contexte religieux, désigne l'emploi de paroles magiques pour opérer un charme, un prodige. Le nom, à partir du XIXe s., s'emploie au figuré pour « action d'agir avec force par l'émotion » (1836, Quinet).
❏
Les dérivés sont formés vers la fin du
XIXe siècle.
■
INCANTATOIRE adj. (1886, Mallarmé) et INCANTER v. tr., didactique ou littéraire, doublet d'enchanter* (1890, H. de Régnier), tiré du nom ou emprunt au verbe latin.
■
INCANTATEUR, TRICE n. et adj. est un emprunt savant au bas latin incantator « enchanteur, sorcier » (→ enchanteur) ; attesté isolément (1495) au sens de « sorcier » ; le mot, repris en 1854 (M. du Camp) comme nom et en 1902 comme adjectif, est très rare.
INCARCÉRER v. tr., réfection du XVe s. (1488) d'une forme picarde en en-, attestée dans encarcere « emprisonné » (1re moitié XIIIe s.), est emprunté au latin médiéval incarcerare « emprisonner ». Ce verbe est formé de in- (→ 2 in-) et du latin classique carcer « enclos, barrières formant la piste des chars » (surtout au pluriel carceres), d'où « prison » ; carcer avait abouti à chartre (Xe s.), éliminé au XVe s. par prison (→ carcéral ; Cf. l'italien carcere « prison » et le gotique karkara, de carcar, forme du latin impérial). Carcer se rattache à une racine indoeuropéenne °karkr-, °kankr-, exprimant l'idée d'enclos.
❏
Le verbe, attesté en 1488 et à nouveau à la fin du XVIe s., est rare jusqu'au XVIIIe s. (1766, Voltaire). Il est employé en médecine (1858, pronominal, Littré et Robin) pour « s'étrangler », en parlant d'un organe qui se bloque dans un espace restreint.
◆
Par extension du premier sens, incarcérer signifie usuellement « enfermer » (fin XIXe s.).
❏
Incarcérer a fourni les dérivés
INCARCÉRABLE adj., terme de droit (1784), et
INCARCÉRATEUR n. m. (1788, S. Mercier), rares.
■
INCARCÉRATION n. f., sorti d'usage comme terme de médecine (1314, attestation isolée ; puis 1858, Littré et Robin), désigne l'action de mettre en prison (1418 ; repris à la fin du XVIIIe s.).
◈
DÉSINCARCÉRATION n. f. (1972) se dit du dégagement des personnes prisonnières d'un véhicule accidenté. Cet emploi a entraîné celui du verbe
DÉSINCARCÉRER v. tr. (1980) et des sens nouveaux pour
être incarcéré et
incarcération.
INCARNAT, ATE adj. et n. m., réfection (1528) de incarnade (v. 1515), a été emprunté à l'italien incarnato (fin XIVe-déb. XVe s., comme adjectif de couleur), dérivé de carne « chair » d'après le participe passé de incarnare « incarner », formé sur le latin classique caro, carnis « chair » (→ incarner).
❏
L'adjectif se dit d'une couleur rose vif, rappelant celle de la chair ; il est d'emploi littéraire et plus courant comme nom masculin (1562).
❏
D'abord sous la forme incarnatin (1580), INCARNADIN, INE adj. (v. 1582) est un emprunt à l'italien incarnatino, puis à sa variante dialectale incarnadino (fin XVIe s.), diminutif de incarnato.
◆
D'emploi littéraire, il signifie « d'une couleur d'incarnat pâle » et, comme nom masculin, désigne cette couleur (1661).
1 INCARNER v. tr., d'abord attesté au participe passé (v. 1350), est emprunté au latin ecclésiastique incarnare, incarnatus « entrer dans un corps », spécialement en parlant du Christ « revêtir la forme humaine » ; le latin est formé, par préfixation (→ 2 in-), à partir du latin classique caro, carnis « chair », qui se rattache à une racine indoeuropéenne °(s)ker- « couper, séparer, partager » (→ chair). Incarner a remplacé l'ancien français encharner (1119, soi encharner) de même sens, aboutissement normal de incarnare.
❏
Le verbe, d'abord employé en latin dans le contexte religieux, signifie « revêtir (un être de nature spirituelle) d'un corps charnel, d'une forme humaine ou animale » ; il s'emploie plus couramment au participe passé adjectivé INCARNÉ, ÉE, où il est d'abord attesté, et comme verbe pronominal (1681).
◆
Incarner a pris le sens figuré de « représenter (qqch. d'abstrait) sous une forme matérielle » (1580, Montaigne). Par extension, le verbe signifie « représenter (un personnage) dans un spectacle », le sujet désignant l'acteur (1874, Mallarmé).
❏
Le nom d'action
INCARNATION n. f. est emprunté au latin ecclésiastique
incarnatio « action de prendre un corps » en parlant du Christ, dérivé du supin de
incarnare. Il est employé dans le domaine religieux (1121-1134,
incarnatiun), en particulier dans
incarnation de Jésus-Christ, ou absolument
l'incarnation, et au figuré (1831, Balzac), d'après les valeurs du verbe
incarner.
■
Sur incarner a été composé SE RÉINCARNER v. pron. qui n'est attesté qu'au début du XXe s., mais le dérivé RÉINCARNATION n. f. est relevé en 1875.
◆
De DÉSINCARNÉ, ÉE adj. (1891), formé de dé- et d'incarné, vient DÉSINCARNER v. tr. (v. 1922) et DÉSINCARNATION n. f. (1913).
◈
INCARNÉE, ÉE adj., d'où
2 INCARNER (S') v. pron. est un dérivé savant (1833,
ongle incarné ; 1873,
v. pron.), par préfixation
(→ 2 in-), du latin
caro, carnis (→ chair). Jusqu'au
XVIe s., les formes populaires
encharner et
incarner étaient employées en médecine ancienne (en moyen français) au sens de « cicatriser », « reprendre de nouvelles chairs », en parlant d'une plaie.
◆
S'incarner, en parlant d'un ongle, signifie « s'enfoncer dans la chair », mais la forme verbale est moins courante que l'adjectif
incarné.
❏ voir
INCARNAT.
INCARTADE n. f. a été emprunté (1612) à l'italien inquartata et adapté d'après d'autres mots en -ade ; ce terme d'escrime italien (XVIe s.) signifie « parade rapide qu'on porte à un coup droit de l'adversaire, en se jetant brusquement de côté », ainsi nommée soit parce que l'attaqué décrit un quart (italien quarto) de tour sur lui-même, soit parce que l'attaque a lieu dans la ligne de quarte* (italien quarta).
❏
Le nom est passé en français au figuré pour désigner une boutade blessante lancée brusquement et inconsidérément ; ce sens a vieilli. Le mot s'emploie ensuite (1643) pour « léger écart de conduite ». Il a été repris avec une valeur concrète au XXe s., comme terme d'équitation, au sens de « brusque écart ».
INCENDIE n. m. est un emprunt savant (1605) au latin incendium « embrasement, feu », au figuré « ardeur » (des sentiments, des passions), de incendere « allumer », formé de in- (→ 2 in-) et de candere « faire brûler, enflammer » (→ incandescent). On relève aussi, dans le domaine occitan, encendi (mil. XIe s.), encende (1560) en ancien provençal, encendy et incendy (1570) en ancien gascon.
❏
Le mot est introduit avec le sens de « grand feu qui se propage en causant des dégâts » ; au XVIIe s., il a été critiqué par Vaugelas comme vulgaire par rapport à embrasement, mais il reste usuel.
◆
Par figure, incendie prend le sens (1671, Fléchier) de « bouleversement important qui affecte l'ordre établi » et Voltaire l'emploie pour parler des dévastations par le feu provoquées par une armée (1767).
◆
Par analogie avec les lueurs du feu, le nom désigne (1762, Rousseau) une lumière intense éclairant une grande étendue, puis (XIXe s.) une sensation d'irritation, en parlant d'un aliment épicé, par analogie avec les brûlures provoquées par le feu (Cf. brûlure). Il signifie aussi, par figure plus que par reprise du sens latin, « explosion de sentiments violents » (XIXe s.).
❏
Le dérivé
INCENDIER v. tr. (1596), « mettre le feu », s'emploie par figure aux sens d'« enflammer, exciter » (1824), « propager des idées subversives » (1823) et par analogie (1833) « colorer d'une lueur ardente ».
◆
Dans un emploi familier
incendier qqn (1905) se dit pour « accabler (qqn) de reproches », les reproches détruisant et aussi faisant rougir.
◈
INCENDIAIRE n. et adj., emprunté au dérivé latin
incendiarius adj. et n. désigne (
XIIIe s.,
n.) une personne qui allume volontairement un incendie. L'adjectif qualifie ce qui peut causer un incendie (
XIVe s.).
Incendiaire, dans un emploi littéraire, qualifie ou désigne (déb.
XVIIe s., d'Aubigné) aussi la personne qui agite les esprits, allume la révolte (1777,
adj., Voltaire).
◆
L'adjectif qualifie par figure (1830) ce qui éveille les désirs amoureux et, par analogie, ce qui produit une sensation de brûlure (fin
XVIIIe s.), ce qui est d'une teinte vive (
XIXe s.).
INCESTE n. est un emprunt savant (fin XIIIe s.) au latin classique incestus, us « sacrilège », parallèlement à l'adjectif incestus, i « impur, souillé », qui correspond à castus, us « abstinence ; rite de pureté », de la racine °kes- de carere « manquer de », terme de la langue religieuse signifiant « qui se conforme aux règles et aux rites ». Castus s'est confondu avec castus dérivé direct de carere, et a signifié « exempt d'impureté », « vertueux », « chaste » (→ chaste, châtier) ; au premier sens, il correspond au sanskrit çiṣṭáḥ « instruit, éduqué, bien dressé ». La spécialisation de sens a eu lieu en latin, pour incestus et incestum, l'acte sexuel entre proches parents étant considéré comme l'impureté par excellence.
❏
Inceste, nom masculin, désigne des relations sexuelles entre proches parents (du premier degré) et, en droit, entre un homme et une femme parents ou alliés à un degré qui entraîne la prohibition du mariage.
◆
Le mot est ensuite employé comme adjectif (fin XIVe s.) pour « qui a commis un inceste », puis « qui a le caractère d'un inceste » (v. 1480) ; dans ces emplois, sortis d'usage comme la substantivation (un, une inceste « personne qui a commis un inceste », 1524), le mot français représente un emprunt au latin incestus.
◆
Inceste, nom masculin, est utilisé dans des domaines spécialisés, en droit canon (1685) où il se dit de relations sexuelles entre personnes unies par un lien spirituel (par ex., parrain et filleule), en anthropologie et en psychanalyse (interdit de l'inceste).
❏
INCESTUEUX, EUSE adj. est un emprunt (v. 1355, Bersuire) au bas latin
incestuosus « incestueux, impudique », dérivé de
incestus, -us n., synonyme de
incestum.
■
Il signifie d'abord « qui constitue un inceste » et s'applique ensuite à une personne coupable d'inceste (1594), puis signifie « issu d'un inceste » (1765). Il est substantivé depuis le XVIIe s. (1677).
■
Le dérivé INCESTUEUSEMENT adv. (fin XVe s.) est rare.
INCH ALLAH interj. est une transcription de l'arabe, évoquant la volonté divine, passée en français au sens de « advienne que pourra ». En français des pays d'islam (Maghreb, Liban, Afrique subsaharienne), l'expression conserve le sens religieux : « si Dieu le veut ».
INCHOATIF, IVE adj. et n. m. est un emprunt savant, d'abord comme nom féminin (une inchoactive, déb. XIVe s.) puis comme adjectif (XIVe s.), au bas latin inchoativus adj., terme de grammaire, dérivé de inchoatum, supin du latin classique inchoare « commencer, entreprendre », d'origine obscure.
❏
Inchoative, nom féminin, a désigné (déb.
XIVe s.) l'intention de commettre une action, par jeu de mots sur l'emploi en grammaire, où l'adjectif s'applique (
XIVe s.) à ce qui exprime une action commençante, une progression.
■
Inchoatif, nom masculin se dit (1557) de l'aspect inchoatif, puis du verbe inchoatif (1835).
◆
L'adjectif est aussi employé (XXe s.) en philosophie au sens de « qui est à son commencement ».
INCIDENT n. m. est un emprunt savant (fin XIIIe s.) au latin incidens, -entis, participe présent de incidere « tomber dans, sur », « venir par coïncidence », formé de in- (→ 2 in-) et de cadere, au participe passé casus « tomber » (→ choir).
❏
Incident désigne d'abord un petit événement qui survient ; par extension, il s'est employé (v. 1460, Villon) pour « digression », s'est spécialisé en droit (fin XIVe s.) pour désigner ce qui survient accessoirement dans un procès, d'où la locution l'incident est clos « arrêtons là la querelle » et l'emploi à propos d'une objection qu'une personne soulève dans un débat (1675). Le nom se dit spécialement en parlant d'une pièce, d'un roman pour « événement accessoire qui survient dans le cours d'une action principale », aujourd'hui terme d'histoire littéraire (apr. 1650 ; 1641, en peinture).
◆
Depuis le XIXe s., le nom désigne par figure du sens juridique une difficulté passagère, qui ne modifie pas le déroulement d'une opération, d'où sans incident « normalement » ; à partir du début du XXe s., il s'emploie spécialement au sens de « petite difficulté imprévue, d'importance limitée mais dont les conséquences peuvent être graves » (incident diplomatique) ; par extension il équivaut ensuite à « désordre » (provoquer des incidents).
❏
De l'emploi juridique est issu
INCIDENT, ENTE, adj. « qui survient accessoirement dans un procès » (1468), d'où le sens courant « qui est accessoire, secondaire » (1549).
◆
Une autre valeur, en physique (
rayon incident, 1720), est empruntée à l'anglais
incident (1667 dans cet emploi) de même origine que le français, pour qualifier le rayonnement qui tombe sur une surface réfléchissante ou réfringente.
◆
L'adjectif s'emploie aussi en grammaire (1732) pour qualifier une proposition qui introduit un énoncé accessoire dans la phrase
(Cf. incise) ; en ce sens, l'adjectif est substantivé au féminin (1765).
◈
Du nom dérive
INCIDENTER v., en droit « faire naître des incidents au cours d'un procès » (av. 1679, Retz), verbe sorti d'usage au sens général de « soulever les difficultés » (1688) et devenu rare au sens de « compliquer par des incidents » (1857, Michelet).
■
INCIDENTEL, ELLE adj. (1783) « relatif à un incident » est d'emploi didactique ou littéraire, comme sa variante plus ancienne INCIDENTAL, ALE, AUX adj. (1495).
◈
L'adjectif a fourni
INCIDEMMENT adv. « sans y attacher une importance particulière » (v. 1310,
incidamment) et « par hasard » (
XXe s.).
■
INCIDENCE n. f., autre dérivé de l'adjectif, est d'abord employé pour « incident » (fin XIIIe s.), « digression (dans une chronique) » (XVe s.).
◆
Le mot est repris ensuite en physique, désignant la rencontre d'une ligne, d'une trajectoire avec une surface (1626, Mydorge) ; c'est alors un emprunt au latin médiéval incidentia (v. 1240), qui apparaît en même temps en anglais (1626, Bacon). De cette acception vient angle d'incidence (1637, Descartes) et point d'incidence.
◆
Incidence s'emploie en économie (1876) et désigne le fait, pour un impôt, de frapper indirectement une autre personne.
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L'emploi devenu usuel pour « conséquence, effet » (attesté 1928, Malraux) est peut-être un emprunt à l'anglais incidence, qui possède ce sens depuis 1846 ; en médecine incidence se dit (1966) du nombre de cas de maladie apparus pendant une période de temps donnée.
INCINÉRER v. tr. est un emprunt (1488) au latin médiéval incinerare, employé en médecine pour « détruire un cadavre par le feu » (XIIe s.) et au sens plus général de « réduire en cendres » (XIIIe s.). Ce verbe est formé de in- « vers, dans » (→ 2 in-) et du latin classique cinis, cineris (→ cinéraire ; cendre).
❏
Incinérer reprend le premier sens du verbe latin (1488), puis le second au début du XVIe siècle ; il est peu employé avant 1830, sa reprise étant postérieure à celle d'incinération (ci-dessous).
❏
Le dérivé
INCINÉRATEUR n. m. (1894) désigne un appareil où l'on incinère.
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Le nom d'action INCINÉRATION n. f. est emprunté (fin XIVe s.) au dérivé latin médiéval incineratio, -onis « action d'incinérer » (XIIe s.) ; il est d'usage rare avant le XVIIIe s. (1762, Académie).
INCIPIT n. m. inv., introduit en français au XIXe s. (1840), est la substantivation de la 3e personne du singulier de l'indicatif présent du verbe latin incipere « prendre en main », « commencer », formé de in- (→ 2 in-) et de capere « prendre », qui se rattache à une racine indoeuropéenne °kap- « prendre » (→ capter, chasser).
❏
D'emploi didactique, incipit désigne les premiers mots d'un manuscrit, d'un texte, par référence à la locution latine des manuscrits latins du moyen âge, incipit liber « ici commence le livre » (Cf. le contraire explicit) ; par extension, le mot se dit des premières notes d'un ouvrage, en musique.
INCISE n. f. a été formé (1770, Rousseau) à partir du latin incisa « coupée », participe passé féminin substantivé de incidere (→ inciser) ; au sens grammatical, le latin employait incisum, participe passé neutre substantivé.
❏
Incise, terme de musique, désigne d'abord un groupe de notes formant une unité rythmique à l'intérieur d'une phrase musicale ; repris en grammaire (1771), le mot se dit d'une proposition insérée dans le corps de la phrase ou rejetée à la fin (Cf. incidente).
◆
Dans le vocabulaire technique de l'imprimerie, les incises (n. f. pl.) désigne (XXe s.) des caractères typographiques qui s'inspirent des inscriptions des monuments antiques.
INCISER v. tr. représente une réfection (av. 1418), d'après incision qui est antérieur (voir ci-dessous), de l'ancien français enciser « couper, trancher » (1121-1134), issu d'un latin populaire °incisare, construit à partir de incisum, supin du latin classique incidere « couper » ; ce verbe est formé de in- (→ 2 in-) et de caedere « tailler, couper ».
❏
Inciser est d'abord employé au sens de « fendre avec un instrument tranchant », usité spécialement en chirurgie (1475 ; 1314, encisier), en arboriculture (XVe s.), en gravure pour « entailler (une matière servant de support) pour inscrire un dessin » (1596 ; 1690, en parlant d'une eau-forte) et au participe passé (1783) en botanique (feuille incisée).
❏
Le verbe a fourni
INCISEUR n. m., d'abord « chirurgien » (1508), puis employé dans
instrument insciseur (1598), mot d'emploi didactique ou technique à peu près abandonné. Il a été repris en chirurgie (1878) et en arboriculture (1902).
◈
INCISION n. f. est emprunté (1314) au bas latin
incisio « coupure, entaille », dérivé de
incisum ; en latin classique
incisio signifiait « incise, césure », sens attesté en français au
XVIe s. (1521). Le nom désigne l'action d'inciser, d'abord dans le domaine médical (1314) puis en emploi général (
XVe s. ;
Cf. 1482, « décapitation »).
■
INCISIF, IVE adj., attesté lui aussi en 1314 (Mondeville), est construit sur le radical d'incision ou emprunté au latin médiéval incisivus « tranchant » (XIIIe s.), dérivé de incisum.
◆
L'adjectif s'est appliqué jusqu'au XIXe s. à une préparation propre à dissoudre les humeurs (1314, médecine incisive ; 1549, n. m. pl.). Il s'est aussi employé aux sens concrets (1545, Paré) de « qui sert à couper », « qui attaque les métaux » (1690), sortis d'usage.
◆
L'adjectif est resté courant au sens figuré (1827, Hugo) de « qui attaque ou touche profondément, a un caractère tranchant », en parlant d'une idée, de l'expression, etc. (Cf. mordant, tranchant) ou d'une personne (1830, Stendhal).
◆
L'adverbe dérivé INCISIVEMENT (1845) est rare.
◈
INCISIVE n. f., dérivé savant d'
incision (1545, Paré, au pluriel), désigne chacune des dents de devant, aplatie et tranchante, qui sert à couper les aliments.
■
INCISURE n. f. est une réfection de enciseure (fin XIIIe s.) d'après le latin impérial incisura « incision », « ligne de la main », « nervure », « contour (en peinture) », de incisum.
◆
Le nom s'est dit pour « incision » (XVe s., inciseure) et pour « ligne de la main » (1549). Il s'emploie en anatomie (1638, « découpure de certains organes ») et en botanique (mil. XIXe s.).
❏ voir
INCISE.
INCITER v. tr. représente soit un emprunt au latin classique incitare, soit une réfection (fin XIVe s.) de l'ancien français enciter (fin XIIe s., enciteir), emprunté lui aussi au latin incitare « lancer en avant », « pousser vivement », « exciter ». Ce verbe est formé de in- « vers » (→ 2 in-) et de citare, fréquentatif de ciere, participe passé citus, « faire mouvoir », de la famille d'une racine indoeuropéenne °kei-, °ki- « mouvoir ». Citare a éliminé ciere à l'époque impériale (→ citer).
❏
Le verbe, dans inciter (qqn) à, signifie « pousser (qqn) à qqch., à faire qqch. » ; la construction inciter qqch. « mettre en mouvement » (fin XIVe s., inciter le désir) est à peu près sortie d'usage.
❏
Le participe présent
INCITANT, ANTE adj. et n. m. est vieilli dans un emploi non technique (1538) mais subsiste comme terme médical (1798). Un emploi substantivé pour « incitateur » (1611) est sorti d'usage après l'époque classique.
◈
INCITATION n. f., emprunt au latin
incitatio, -onis « mouvement rapide », « action de mettre en mouvement », « excitation, impulsion », dérivé de
incitatum (supin de
incitare), s'emploie avec une valeur générale (fin
XIVe s.) pour « action d'inciter » ; il est sorti d'usage en médecine (1809) au sens d'« excitation » et s'utilise spécialement (v. 1964) comme terme d'économie et de finances.
■
INCITATIF, IVE adj., terme didactique formé à partir du radical d'incitation (1488), s'emploie aussi de nos jours en économie.
■
INCITATEUR, TRICE n. et adj. est un emprunt (1470, n. ; 1873, adj.) au dérivé bas latin incitator, -trix « celui qui incite ».