RAJA, RAJAH ou RADJAH n. m., d'abord raia (v. 1525, Voyage d'Antoine Pigaphetta [Pigafetta]) puis raja (1638), rajah (1756) et radjah (1845), est emprunté à l'hindoustani raja, du sanskrit râjâ « roi », lui-même apparenté au groupe indoeuropéen important du latin rex (→ roi). Il est probable que, comme dans le cas de l'anglais raja ou rajah (XVIe s.), le portugais ait servi d'intermédiaire.
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Le mot désigne le roi, le noble par excellence, dans la tradition védique et, par extension, un noble indien. Une valeur spéciale concerne un prince vassal de la dynastie moghole qui régna sur l'Inde du XVIe au XIXe s. et, dans l'Inde anglaise, le grand vassal de la Couronne britannique, titre honorifique (1875).
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MAHARAJAH n. m., d'abord
marrajah (1758) puis
maha-rajah (1830), est emprunté à l'hindi
mahārājā « grand roi », formé de
mahā « grand », de la même racine indoeuropéenne que le latin
magnus (→ majeur) et de
rājā. Le mot, qui s'est aussi écrit
maharadjah (1878), est le titre donné en Inde aux rois et empereurs, puis aux princes feudataires.
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MAHARANI ou
MAHARANÉ n. f. est emprunté (1901) à l'hindi
mahārānī « grande reine », formé de
mahā et de
rānī « reine », du même type indoeuropéen que le latin
regina (→ reine). Le mot désigne l'épouse du maharajah, de même que
RANI n. f. (
ranie, 1846) désigne l'épouse d'un raja, mais est demeuré rare en français.
RAKI n. m., d'abord raqui (1628) puis raki (1827), est emprunté, dans le contexte de relations commerciales, au turc raki, déformation par aphérèse d'araki « eau-de-vie au marc de raisin ». Le français a aussi repris la forme arack à l'arabe ῾araq « liquide exsudé » auquel le turc est emprunté.
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Le nom s'est étendu, sous diverses formes locales, à diverses boissons enivrantes : dans l'Inde et la Malaisie, un spiritueux obtenu avec du riz fermenté, du lait de coco, de la sève de cocotier ; à Bourbon (La Réunion), l'alcool de canne à sucre.
❏ voir
ARACK.
1 RÂLE n. m., nom d'oiseau, est l'aboutissement de rascle (1164), puis rasle (fin XIIe s.), raalle (v. 1300), rale (1476), écrit râle au XVIIe s. (1636). Le mot serait le déverbal de râler*, doublet de racler*, et issu d'un latin populaire °rasclare, contraction pour °rasiculare « racler » en raison du cri rauque de cet oiseau.
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Le mot désigne un échassier migrateur dont certaines espèces vivent dans les marais (râle d'eau) et d'autres dans les champs.
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De râle est dérivé savamment RALLIDÉS n. m. pl. (1839), terme de classification zoologique désignant la famille d'oiseaux aux ailes courtes, au bec dur, pointu, comprimé latéralement, dont le type est le râle et qui comprend la poule d'eau, les foulques.
❏ voir
RACAILLE, RACLER, RÂLER, RASCASSE.
RÂLER v. intr., longtemps écrit rasler (1456), également raller (1549), l'accent circonflexe n'étant attesté que depuis le XIXe s., est le doublet français de racler*, d'origine méridionale. La signification première est conservée dans les dérivés éraler, déraler « écorcher » répandus dans les patois.
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Dès les premiers textes, le mot a le sens de « faire des façons, marchander », emploi disparu, et repris au
XIXe s. (1841), dont procède le sens populaire de « marchander âprement et sans fin » (1875), aujourd'hui compris comme une spécialisation du sens figuré moderne (ci-dessous).
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Au XVIe s. râler prend le sens de « faire un bruit rauque provoqué par l'embarras des bronches, en respirant » (1549), dont procède un emploi transitif rare « dire en râlant » (1857, Gautier). Par analogie, il se dit de certains animaux qui font entendre un bruit de gorge (1690, du cerf en rut).
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Par une extension figurée, il a pris le sens d'« être en colère, de mauvaise humeur » (1916), usuel dans l'usage familier en concurrence avec rouspéter. Cf. ci-dessous les dérivés râlant, 3 râleur, râlage.
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1 RÂLEUR, EUSE adj. et n., d'abord
ralleur (1571), a connu la même évolution que le verbe. Il a signifié « qui pousse des râles », et, par dérision, s'est dit d'un mauvais chanteur (1879, Huysmans). La valeur correspondant au premier sens de
râler « marchander » (1845) a disparu.
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De nos jours, il n'est plus employé qu'au sens familier de « personne qui proteste à tout propos » (1923), et aussi comme adjectif.
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2 RÂLE n. m., d'abord rasle (1611), désigne le bruit rauque de la respiration, quelquefois en concurrence avec le doublet RÂLEMENT n. m. (1611). Depuis 1845, râle est spécialement employé en pathologie médicale à propos d'une anomalie respiratoire.
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RÂLANT, ANTE, le participe présent de râler, est adjectivé (1834) avec le sens concret de « qui fait entendre un râle » et, ultérieurement, le sens familier correspondant à celui du verbe, « qui est de nature à mettre en colère » (v. 1930), devenu usuel et relativement indépendant de la série râler, râleur, prenant la valeur de « désagréable, ennuyeux » ou « vexant ». Cf. emmerdant, chiant.
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2 RÂLEUR, EUSE n. (1847) a d'abord été employé au sens de « marchande » (au féminin), spécialement « marchand du Temple chargé d'attirer les chalands » (1867). Ce mot a disparu avec les emplois correspondants de râler. 3 RÂLEUR, EUSE a été reformé (1920) sur râler « protester », comme adjectif et comme nom.
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RÂLAGE n. m. (1924), « protestation », est un mot familier peu usité.
❏ voir
1 RÂLE.
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RALINGUE n. f., d'abord raelinge (v. 1155) puis ralingue (fin XIVe s.), est d'origine incertaine, peut-être emprunté à l'ancien nordique °rár-lík « cordage de vergue », de rá « vergue » (au génitif rár) et lík « bordure d'une voile », ou bien du néerlandais correspondant ralijk (→ raban). Cependant, comme le fait remarquer P. Guiraud, la forme est romane (italien, provençal, espagnol) et les variantes en re- (relingue, raelingue) postuleraient un dérivé de élingue* « corde », confirmé par le sens : ralinguer une voile, c'est proprement la border d'une élingue.
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Le mot désigne le cordage cousu le long des bords d'une voile et destiné à la renforcer, spécialement dans voile en ralingue (1691) « voile qui reçoit mal le vent », et dans ralingue de chute, de fond, de têtière, d'envergure (1904, Larousse). Par analogie, il désigne le filin constituant la bordure d'un élément de filet (1812).
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Le dérivé RALINGUER v. (1687) signifie « orienter une voile de façon que la ralingue soit dans le lit du vent », sens aujourd'hui peu usité.
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Il signifie également comme intransitif « battre au vent » (1687), en parlant d'une voile (1701) et, transitivement, « pourvoir de ralingues (une voile ou un filet) » (1773).
RALLIER, RALLIEMENT → ALLIER
RALLONGER → LONG (ALLONGER)
RALLYE, RALLY ou
RALLIE n. m. est en partie un pseudo-anglicisme : avec son premier sens de « jeu équestre ou pédestre dans lequel un concurrent parti avant les autres laisse des papiers sur sa route » (1885), il représente l'abréviation de
rallie-paper (1877) puis
rally-paper (1882), anglicisation artificielle de
rallie-papier (1877), le terme employé en anglais étant
paper-chase (1856) ou
paper-hunt (1871), avec un second élément signifiant « chasse, poursuite ».
Rallie-papier était formé à l'aide de
rallie, emprunté à l'anglais
to rally « réunir, rassembler », lui-même emprunté au français
rallier* (→ allier), la forme
rallie étant américaine.
Rallye-ballon ou
rallie-ballon, formé (1899) sur le modèle de
rallye-papier à propos d'un sport consistant à rejoindre un aérostat à son point d'atterrissage, est également un pseudo-anglicisme ; il a aujourd'hui disparu.
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Quant à rallye au sens d'« épreuve automobile de régularité à moyenne horaire imposée » (1911, année de l'organisation du premier rallye de Monte-Carlo), c'est la forme elliptique de rallye-auto (1900), lui-même forgé sur le modèle de rallye-paper et éliminé par la forme simple.
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Rallye désigne en français contemporain l'épreuve automobile.
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Par extension, il s'applique aussi à un événement sportif réunissant un grand nombre de concurrents généralement partis de points divers (1931).
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Il se dit aussi d'un cycle de réunions dansantes ou de réunions ayant le bridge pour prétexte, de compétitions non sportives organisées dans les familles aisées pour permettre aux jeunes filles de rencontrer des jeunes gens. Le sens de « meeting, rassemblement » (1950), nouvel emprunt à l'anglais (qui l'a dès 1840), ne s'est pas diffusé.
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Le mot français a produit RALLYEUR, EUSE n. (1932) « personne prenant part à un rallye », ainsi que le synonyme RALLYEMAN n. m. (1966), de consonance plus britannique, également rare.
RAM, RAME, RAIM → RAMAGE, RAMEAU, RAMURE
RAMADAN n. m. est emprunté (1441) à l'arabe ramaḍān, nom du neuvième mois de l'année de l'Hégire pendant lequel les musulmans doivent s'astreindre au jeûne entre le lever et le coucher du soleil. Ce mot vient de la racine du verbe ramiḍa « être chauffé par le soleil », « être chaud », parce qu'à l'époque où il fut adopté, le mois du ramadan correspondait à l'époque des fortes chaleurs d'été (ce qui n'est plus le cas, l'année musulmane étant une année lunaire sans intercalation, le mois passant successivement par toutes les saisons). Le mot, prononcé par les Persans et les Turcs ramazān, a fourni les variantes ramasan (1542), ramazan (1624), à propos des musulmans d'Orient.
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Ramadan désigne le neuvième mois des musulmans et, par métonymie, les prescriptions religieuses, comparables à celles du carême chrétien d'autrefois (observer, faire le ramadan). D'emploi généralisé en français, le mot est moins usuel dans l'usage maghrébin et dans celui des musulmans francophones, où l'on emploie aussi carême. Cependant, en français du Maghreb, on emploie les adjectifs dérivés RAMADANESQUE et RAMADANIEN, IENNE, aussi écrits ramadh-.
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Ramadan a donné, avec changement de graphie et reprise de la prononciation arabe dialectale (d'Algérie) ramḍān, RAMDAM n. m. (1890), mot familier pour « tapage », par allusion à la vie nocturne bruyante du ramadan. Par extension, il s'est dit pour « désordre, événement brutal » (argot des Poilus) et, dans l'argot des prostituées (1918), pour « amour physique » (aller au ramdam, faire ramdam) ; les extensions traduisent l'emploi du mot par les soldats de l'armée d'Algérie, puis par toute l'armée. Un développement sémantique analogue se rencontre dans le provençal ramadan qui se dit du tapage que font les chats pendant la nuit (quelquefois déformé en roumedan) et du hurlement des loups dans la montagne.
1 RAMAGE n. m. est dérivé (v. 1160) de l'ancien français ram, raim « branche » (→ rameau) avec le suffixe -age, comme feuillage de feuille.
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En ancien français,
ramage est d'abord un adjectif qualifiant un oiseau (surtout l'épervier) vivant ou ayant longtemps vécu en forêt (v. 1160) ainsi qu'un animal sauvage, mal dressé (v. 1200). Parallèlement, il qualifiait une forêt touffue (
XIIIe s.), un lieu boisé (v. 1380).
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L'emploi qui s'est conservé est celui du nom (v. 1278) qui désignait collectivement l'ensemble des rameaux, sens qu'il a perdu au profit de feuillage, mais qui a survécu lorsque ramage se dit d'une représentation de feuilles et de branches sur une étoffe (1611) déjà ancien dans l'ancien provençal ramatge (XIVe-XVe s.). Ce mot désignait également, en droit féodal, le droit de couper des branches dans la forêt du seigneur (1298) ; c'était aussi un terme de généalogie (→ rameau, ramifier) s'appliquant à une branche d'une ligne généalogique (1328) d'où, par métonymie, à la race (v. 1460) et à la parenté (1611), sens assez vite disparu.
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Par l'intermédiaire d'un emploi adjectif dans l'expression chant ramage (v. 1540) employée jusqu'au XVIIe s. à propos du chant des oiseaux dans les branches, ramage s'est substantivé au sens de « chant d'oiseau dans les branches » (1538), puis en général « chant d'oiseau », emploi le plus vivant du mot.
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De là, il a pris divers sens figurés ironiques, « manière de parler d'un terroir » (1588), « discours inintelligible, confus » (v. 1784), « réprimande » (1808), tous sortis d'usage.
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L'emploi pour « babil enfantin » (1835) est senti comme une métaphore du chant des oiseaux.
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Ramage a produit
RAMAGER v. (1585), proprement « faire entendre son ramage (d'un oiseau) » ; ce verbe a aussitôt développé la valeur figurée de « dire doucement et à mi-voix » (1585), puis « chanter des chansons » (1625), « grommeler, répéter constamment la même chose » (1808), « babiller (d'un bébé) » (1907), tous à peu près disparus.
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En dérive RAMAGEUR, EUSE adj. (1895, Daudet), mot rare pour qualifier celui qui babille beaucoup.
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Ramage a aussi donné RAMAGÉ, ÉE adj. (1843, Gautier), d'usage littéraire, qualifiant ce qui présente des figures évoquant des ramages, des feuillages.
❏ voir
1 RAME, RAMEAU*.
RAMAS, RAMASSER, RAMASSIS → MASSE