RAND n. m., nom de l'unité monétaire de la république d'Afrique du Sud et de la Namibie (attesté en 1964 en français), est un emploi de l'anglais rand « bordure, marge ».
RANDOMISER v. tr. est la francisation (attestée en 1963, mais antérieure) de l'anglais to randomize (1926), de random, dans at random « au hasard », de même origine que l'ancien français randon, conservé dans randonnée*. En statistique, le verbe signifie « échantillonner de manière à supprimer ou réduire l'interférence de variables autres que celles que l'on étudie ».
❏  RANDOMISATION n. f. est emprunté (années 1950) à l'anglais randomization (1926), de randomize, pour désigner l'opération évoquée ci-dessus, qu'on a tenté d'appeler hasardisation.
? RANDONNÉE n. f., d'abord écrit randonée (v. 1131) puis randonnée (v. 1330), est le participe passé féminin substantivé de l'ancien verbe randoner, randonner (XIIe s.) « courir rapidement, impétueusement », sorti d'usage à l'époque classique et encore répertorié par le dictionnaire de l'Académie en 1842. Un sens transitif, « poursuivre avec impétuosité », a survécu dans les parlers de la Normandie et de la Picardie avec la nuance de « courir après (qqn) en faisant du bruit » et « battre ». Le verbe est tiré des locutions d'ancien français de randon, à randon « à toute vitesse, avec force », formées avec randon « violence, jet impétueux et violent » (emprunté par l'anglais random, employé dans des locutions adverbiales exprimant la rapidité puis le hasard : at random, voir randomiser). Randon vient d'un autre verbe employé en ancien français, randir « courir, galoper », transitivement « parcourir rapidement », et, au figuré, « s'étendre ». Ce verbe est dérivé, selon Wartburg, d'un ancien substantif °rant (comme brandir vient de brant), lui-même issu du francique °rant « course », substantif verbal correspondant au verbe allemand rennen que l'on retrouve dans les dialectes allemands méridionaux (Bavière, Suisse, Lorraine). P. Guiraud, en rapprochant à randon de à l'andan « vite » et de landonner, préfère supposer un verbe °ander issu d'un latin populaire °ambitare « aller autour », d'où « courir », de ambire « entourer » (→ ambition), avec un préfixe re- augmentatif qui a pris une valeur itérative (d'où l'idée de « revenir au point de départ »). Aucune des deux origines, la germanique et la romane, n'est solidement appuyée.
❏  Randonnée, après avoir été usuel jusqu'au XVIe s. au sens de « course impétueuse, rapide », s'est restreint au vocabulaire de la vénerie (1574) pour désigner le circuit que fait un animal autour de l'endroit où le chasseur l'a lancé.
■  Par extension, il est passé dans l'usage commun au sens de « longue promenade ininterrompue et en général circulaire » (1798), devenu usuel à la fin du XIXe siècle. Il s'est spécialisé en sports (XXe s.) pour une marche en pleine nature sur des sentiers balisés (d'où sentiers, chemins de grande randonnée) et pour une promenade à skis en dehors des pistes (1908, randonnée en skis).
❏  Sous l'influence des sens modernes de randonnée, l'ancien verbe RANDONNER v. intr. a été repris (1875) d'abord comme terme de chasse au sens de « tourner, battre et entourer le canton dans lequel un lièvre a été attaqué ». Il est plus courant avec l'acception de « faire une randonnée » (1896) et en sports (attesté v. 1950).
■  Le verbe est moins usité que son dérivé RANDONNEUR, EUSE n. (1909) qui désigne une bicyclette équipée pour la randonnée et la personne qui pratique la randonnée, spécialement à bicyclette (1921), et à skis (1962).
G + RANG n. m., réfection (v. 1175) de renc (1080), est issu du francique °hring « anneau, cercle », d'où viennent l'allemand Ring, l'anglais ring (→ ring) qui a dû prendre le sens d'« assemblée judiciaire, militaire » selon les mœurs des anciens Germains qui tenaient des assemblées de ce genre (→ harangue). De là s'explique le développement du mot français vers l'idée de disposition de personnes assemblées, à la fois concrètement et symboliquement, puis d'ordre hiérarchique.
❏  Dès les premiers textes, le mot est employé concrètement à propos d'alignement des hommes côte à côte dans une formation guerrière (par opposition à file). Ce sens, qui pourrait correspondre au passage du mot francique dans le contexte de la guerre, a donné plus tard des locutions correspondant à des ordres donnés par les supérieurs, comme serrer les rangs (1636), au figuré « se grouper pour s'entraider » (av. 1848), ou bien à vos rangs, fixe ! qui se dit lorsqu'un officier supérieur entre dans un lieu où se trouvent des soldats. ◆  Par extension, le pluriel rangs est employé pour l'ensemble des hommes d'une armée (1869) tandis que le rang désigne collectivement l'ensemble des hommes de troupe (1893), comme dans les locutions sortir du rang (1893), au figuré « avoir réussi après avec occupé une place modeste », et rentrer dans le rang (av. 1951), allusion à l'officier qui redeviendrait simple soldat.
■  Des extensions analogiques et figurées se développent à partir de l'époque classique, comme se mettre sur les rangs (1678), « se joindre à un groupe de concurrents », antérieurement au sens propre, « se présenter à un tournoi » (1636) d'après le sens ancien de renc, rang « piste pour la joute ». La valeur figurée plus vague de « nombre, masse » est réalisée dans la locution grossir, rejoindre les rangs de... (1875).
■  En marge de sa valeur militaire, rang désigne un ensemble de personnes placées côte à côte (fin XIe s.), et une suite d'objets disposés en largeur sur la même ligne (v. 1130) d'où la locution en rang « en file » (1080) et, avec une pure valeur temporelle, de rang « de suite » (v. 1460). ◆  Les extensions spécialisées sont nombreuses : rang désigne une ligne de perles (1690), le nombre de mailles de tricot faites sur une même ligne, dans rang de mailles (1910), puis absolument (1936) ; en technique, le nom s'applique à une assise d'une construction (1869) et, par métonymie, à l'endroit où des objets semblables sont disposés les uns auprès des autres, en imprimerie (1812) et en termes de pêche (1845). ◆  En français d'Afrique, on dit faire le rang pour « faire la queue ».
Avec le sens d'« alignement », le mot a pris au Canada (1698) le sens de « peuplement rural dispersé avec des exploitations agricoles s'étendant en lignes parallèles de part et d'autre d'une voie qui les dessert ». Les rangs relèvent d'une seigneurie, puis d'un canton. Aux XVIIe et XVIIIe s., on parle de rangs d'habitations, de colonies (groupes de colons) disposées de rang. La lexicalisation du mot en ce sens semble acquise à la fin de ce qu'on a appelé la colonisation seigneuriale, mais les premiers emplois dans des expressions où le rang est désigné par un numéro ou par un nom propre (le troisième rang, le rang Saint-Jean, le rang Thibault...) remontent à la fin du XVIIe siècle. Les rangs du bas (plus près d'un cours d'eau) sont les premiers à avoir été installés. Rang double « disposé de part et d'autre du chemin d'accès ». Les lots d'un rang, l'école du rang... Plusieurs sens métonymiques ont eu cours (attestés dans les années 1880), « chemin desservant un rang » ; « population d'un rang ». On a dit les rangs pour « la campagne ». Aujourd'hui, tous les emplois sont historiques ou géographiques.
En moyen français, la notion militaire d'ordre prenant le pas sur celle d'alignement, rang désigne aussi la place occupée dans la hiérarchie sociale (1462), surtout en parlant des places les plus élevées, et alors en emploi absolu (1462) : une personne de rang, tenir son rang. Puis le mot désigne la place occupée dans une hiérarchie administrative, militaire, politique (1549) et, spécialement, la place d'un dignitaire ou d'un fonctionnaire dans l'ordre des préséances (1687). ◆  Par extension, il désigne la situation d'une personne ou d'une chose dans une classification (1462), sens auquel s'ordonnent divers emplois spécialisés, dans l'ancienne marine où le mot désignait la position assignée aux grands bâtiments d'après leur structure et leur armement (1690), et de nos jours (attesté mil. XXe s.) avec une valeur abstraite, en mathématiques (rang d'une matrice) et en linguistique structurale.
■  Par extension, rang est employé à propos du degré d'importance, de la valeur attribuée à une chose, d'un être parmi d'autres de la même catégorie (1640, Corneille) et, l'idée de hiérarchie passant au second plan, de la place d'une personne ou d'une chose dans un ensemble quelconque (1538). C'est ce dernier sens qui est représenté dans la locution classique mettre une chose au rang des péchés oubliés (v. 1590) et prendre rang (1875), être au rang de (1875), toujours en usage dans une langue soutenue.
❏  1 RANGER v. tr., dérivé de rang, est la réfection (XIIIe s.) de rengier (v. 1160) et rangier (v. 1175) probablement antérieur (Cf. dérangier, fin XIe s.). Il est employé transitivement au sens de « disposer côte à côte (des personnes, des objets en ligne) » d'où, au figuré, « classer (qqn, qqch.) » dans un ensemble (déb. XVIIe s.).
■  L'accent étant mis sur la valeur normative, contraignante d'une telle action, le verbe a pris le sens figuré de « réduire à » (1559) et de « mettre (qqn) dans la voie du devoir » (1585), courants dans la langue classique, puis archaïques. En revanche, ranger signifie toujours « soumettre (les individus d'une communauté) à une contrainte matérielle ou morale » (1636) et, par analogie, « amener (qqn) à se rallier à ses convictions » (1734).
■  Plus couramment, le verbe implique l'idée de « disposer (des objets concrets) dans un ordre nettement et soigneusement établi » (1373), spécialement afin de laisser un passage dégagé (1660) et, par extension, de « mettre en ordre (un lieu) pour qu'il paraisse bien tenu » (1680), acception très usuelle dans l'usage spontané, à côté de synonymes plus marqués (serrer, régional, mettre en ordre). ◆  Par extension, ranger s'emploie pour « mettre (une chose) à un endroit déterminé » ou « remettre à sa place habituelle » (1792), avec complément ou plus récemment sans complément (1939).
■  Son emploi à propos du classement d'objets abstraits remonte au XVIIe s., époque où l'on employait le verbe au sens intellectuel large de « disposer selon un certain plan » (1636) et de « décider, arrêter un choix en l'organisant » (1672) ; de nos jours, ranger implique davantage l'idée d'un classement simple selon un ordre déterminé.
■  Une ancienne extension spatiale pour « marcher à travers, parcourir » (v. 1188) est encore vivante en marine où ranger la terre, la côte signifie « la longer » (1559) ; de là l'expression ranger à l'honneur (1834) « passer à la poupe du vaisseau amiral » et, par extension, « passer le plus près possible d'un objet ».
■  Aussi courante que l'actif, la forme pronominale SE RANGER (1207) a suivi le même type de développement, à partir de son sens propre « se disposer côte à côte sur une ou plusieurs lignes, se placer dans un certain ordre ». ◆  Le sens figuré, « accepter de se soumettre à une autorité, à une contrainte », apparaît en moyen français (fin XVe s.) d'où, par analogie, se ranger à « adopter les façons de voir, de penser, de juger d'un individu ou d'un groupe » (1559).
■  Au XVIIe s., se ranger a, d'après le sens militaire de rang, signifié aussi « servir dans les troupes commandées par tel chef » et, dans la locution aujourd'hui disparue se ranger sous les drapeaux, « devenir soldat » (1673). ◆  Aujourd'hui, il est employé absolument avec l'idée normative de « revenir à une vie régulière et ordonnée » (1732), également réalisée dans la locution populaire se ranger des voitures (1873, dans Larchey). Par une autre figure, il se dit pour « avoir une place dans une série » (1862).
■  Le second emploi concret de se ranger, l'accent étant mis sur la finalité de l'action, correspond à « s'écarter pour ne pas gêner le passage ou se préserver d'un danger » (1668). C'est de cette acception que procède, en parlant d'un véhicule, le sens de « se placer dans un lieu de stationnement » (1845).
Ranger a plusieurs dérivés : le premier attesté, le déverbal RANGE n. f., d'abord écrit renge (1050), désignait en ancien français une ceinture de guerre servant à pendre le baudrier ou l'épée, et un rang, une file d'hommes (v. 1175) puis une file d'objets (v. 1354). C'est ce mot qui est à l'origine de l'anglais range, d'où vient, par le verbe to range, ranger (→ ranger). Ce nom est devenu au XVIIe s. un terme technique pour une disposition en ligne, en parlant des pavés (1694), puis il est sorti d'usage, éliminé par rangée. ◆  Son diminutif RANGETTE n. f. (1757), « fer forgé », a lui aussi disparu.
RANGÉE n. f. est le participe passé féminin de ranger, substantivé sous la forme rengie (fin XIIe s.), rengée (1227), correspondant à renc, puis rangée (XVe s.), pour désigner une suite d'objets ou de personnes disposés sur une même ligne.
■  Parmi ses divers emplois correspondant à ceux du verbe, le participe passé RANGÉ, ÉE est adjectivé (1196) dans la locution bataille rangée. ◆  Qualifiant une personne, cet adjectif s'est dit au XVIIe s. d'une personne bien installée quelque part (1675, Mme de Sévigné), puis d'une personne faisant preuve d'ordre dans son travail, dans l'administration de ses affaires, de sa maison (1732) ; ces acceptions ont vieilli. ◆  De nos jours, il correspond à « sérieux, menant une vie réglée » (1694), et se dit de ce qui dénote un esprit respectueux des normes de la morale bourgeoise (1869). La locution familière être rangé des voitures (1873) forme jeu de mots entre être rangé et se ranger.
RANGEUR, EUSE n., d'abord rengeur (v. 1298), autre dérivé du verbe, a signifié d'abord « gouverneur » d'après le sens normatif de ranger. Il a été repris en technique, pour « ouvrier d'une briqueterie qui pétrit la terre » (1776). ◆  Il est peu usité en parlant d'une personne qui met de l'ordre (1844), sens pourtant le plus usuel du verbe.
■  RANGEMENT n. m., nom d'action correspondant à ranger, est relativement tardif (1630) ; il est surtout employé concrètement, surtout dans de rangement après un nom d'objet servant à ranger des affaires (1869). ◆  Dialectalement, il signifie « fait de mener une vie rangée » (1848, Sand).
RANGE-CD n. m., composé transparent (v. 1990), désigne un dispositif, un meuble pour ranger les disques compacts.
Le préfixé DÉRANGER v. tr., attesté avant le verbe simple (1080), a d'abord eu le sens de « sortir des rangs », en ancien et en moyen français. L'usage transitif (XIIIe s.) correspond au sens propre de « mettre les rangs en désordre » et, par extension, à « déplacer de son emplacement assigné », acception la plus courante (1596).
■  Les extensions figurées datent de l'époque classique : déranger signifie alors « changer de manière à troubler le fonctionnement d'une chose » (fin XVIIe s., Mme de Sévigné) et « obliger (qqn) à se déplacer, à interrompre ses occupations, etc. » (av. 1693). Par une extension naturelle, il est devenu synonyme de troubler, gêner (1752), valeur exploitée dans déranger l'esprit, moins usuel que dérangé (ci-dessous).
■  DÉRANGEMENT n. m., le nom d'action tiré du verbe (1636), signifie d'abord « sortir de son rang », valeur rare par rapport à « mise en désordre », et « action de gêner qqn » (fin XVIIe s., Mme de Sévigné). Le sens figuré, « introduction d'un changement dans des relations » (1675), le sens spécialisé de « gêne pécuniaire » (1680) et, par métonymie, « état de ce qui est perturbé, altéré » (1694), ont disparu au cours du XVIIIe siècle. ◆  La langue moderne emploie le mot en parlant de l'état d'une chose troublée dans son fonctionnement, que ce soit un organisme (1718), une machine, un appareil (1835), spécialement dans la locution en dérangement (XXe s.) qui est synonyme de hors service. ◆  Le sens d'« action de se déplacer », qui correspond à l'emploi pronominal se déranger, est attesté depuis 1835.
■  Dans l'histoire du Canada, on emploie (surtout en français du Canada) l'expression le grand dérangement à propos de l'expulsion de nombreux Acadiens, qui se réfugièrent en Louisiane, par les Anglais.
■  Parmi plusieurs emplois spéciaux, DÉRANGÉ, ÉE adj., du participe passé du verbe, a été synonyme de « dévoyé, débauché » (1694) ; Cf. dévergondé. Il qualifie spécialement des facultés mentales altérées (1713) et, familièrement, une personne un peu folle.
■  DÉRANGEANT, ANTE adj. « troublant, gênant », figure chez Maupassant (1884).
❏ voir ARRANGER, HARANGUE, RANCH, RANCHO, RANZ, RING ; RADAR.
2 RANGER n. m. est emprunté (1844) à l'anglais ranger au sens américain de « milicien, policier ». Le mot anglais a signifié d'abord (XIVe s.) « garde-chasse » ; il est dérivé de to range « placer en ligne, disposer » puis « prendre une position », lequel vient d'un nom range « file », « ligne », qui est emprunté à l'ancien français range* (→ rang), mot d'origine germanique.
❏  Le mot a d'abord désigné un membre de la police montée américaine, puis (1869) un garde des réserves et parcs nationaux des États-Unis. Il s'est appliqué aussi (1947) à certains soldats de corps d'élite de l'armée américaine.
■  Un sens propre au français est « brodequin, chaussure à tige montante de certaines unités de choc, parachutistes, etc. ».
RANI → RAJA
RANIDÉS n. m. pl. est l'un des exemples de ces mots savants qui, la langue courante ayant effacé la trace de l'origine latine, la récupèrent. En l'occurrence, le latin rana, caché dans grenouille et même dans rainette*, est explicite dans ce dérivé, qui succède aux ranacés (Jourdan, 1834), pour désigner la famille de batraciens qui comprend grenouilles et rainettes.
RANIMER → ANIMER
RANTANPLAN ou RATAPLAN interj. et n. m. est une combinaison d'onomatopées (on a dit plan-plan au XVIIe s.) imitant les roulements de tambour.
RANZ n. m. est une variante graphique de Suisse (1767) du mot rang*, employé pour traduire l'alémanique Kühreihen. Ce mot est composé de Kuh « vache » (correspondant à l'anglais cow) et Reihen, Reigen « danse, air, chant », confondu, lors de l'emprunt, avec l'allemand Reihe « file, rang » ; il désigne des chansons pastorales en Suisse allemande. On peut évoquer l'emploi de rang en moyen français dans la locution rang de vaches (v. 1580) pour désigner une file de vaches en route vers un pâturage.
❏  Le mot, attesté dans le Dictionnaire de musique de Rousseau (« le célèbre ranz des vaches... cet air si chéri des Suisses »), désigne un air de berger, une chanson pastorale suisse dont il existe de nombreuses variantes locales ou dues à des musiciens professionnels.
❏ voir RANG.
RAOUSSE interj. est un emprunt oral, en argot, de l'allemand heraus « dehors ! », employé par les soldats allemands lors de l'occupation de la France, de la Belgique, pour expulser des personnes. On le trouve aussi écrit raus (emprunt écrit) et, par attraction de ouste !, raouste.
RAOUT n. m., d'abord rout (1776), écrit raout d'après la prononciation anglaise (1824), est emprunté à l'anglais rout au sens de « grande réception, soirée mondaine » (1742), employé au XVIIIe et au XIXe siècle. Celui-ci est une spécialisation de rout « troupe, compagnie, bande » (XIIIe s.), emprunté à l'ancien français route (→ 2 routier), également rote, rotte « bande, compagnie » qui contient l'idée de « chose rompue » (rupta). → 1 route.
❏  Le mot n'évoque plus que la vie mondaine du XIXe s. (à partir de Stendhal, Balzac). Il a bénéficié d'un regain de vie à quelques moments du XXe s., dans un contexte assez snob.
RAP n. m. est un emprunt (1983) à l'anglo-américain rap (v. 1970 dans ce sens ; 1967 style de réparties, « conversation de rue »), de to rap « donner des coups secs, répétés », formation onomatopéique.
❏  Le mot désigne un style de poésie populaire créé et diffusé par les Noirs américains, caractérisé par des paroles souvent contestataires, mises en rythme musical. En France, le rap est, avec le tag, caractéristique de la culture populaire des banlieues, dite hip hop.
❏  Le dérivé RAPPEUR, EUSE n. aussi écrit RAPEUR désigne un, une spécialiste du rap. Le verbe RAPPER ou RAPER (années 1980) est plus rare.
RAPACE adj. et n. m. est emprunté (v. 1310) au latin rapax, -acis « qui entraîne à soi » au propre, et au figuré « ravisseur » et « voleur, pilleur », secondairement « avide » et « prompt ». L'adjectif latin est dérivé de rapere « entraîner avec soi, emporter vite et de force » (→ ravir).
❏  La première forme attestée est le pluriel rapax qui, du fait que l'on identifiait la graphie -ax du mot latin à la terminaison française -aus du pluriel (souvent écrite -ax), correspond à un singulier rapal. Celui-ci a été refait en rapace (v. 1460). ◆  Le mot qualifie une personne âpre au gain et sans scrupules, cherchant à s'enrichir aux dépens d'autrui. Par métonymie, il se dit aussi de ce qui laisse transparaître cette âpreté (1845). ◆  Par analogie, mais sans connotation péjorative, il s'applique à un animal, en particulier un oiseau de proie (av. 1502). Il est substantivé dans ces deux acceptions : il désigne en zoologie un super-ordre d'oiseaux carnassiers (1768) et, au singulier, un oiseau appartenant à ce super-ordre. ◆  Par substantivation de l'adjectif, un rapace désigne aussi une personne âpre au gain (1845). Ce dernier sens est souvent perçu, à tort, comme un développement métaphorique du sens d'« oiseau », devenu de loin le plus usuel (Cf. vautour, faucon).
❏  RAPACITÉ n. f. est emprunté directement (1380) au dérivé latin rapacitas, -atis « penchant au vol ».
■  Il exprime le caractère avide d'une personne qui s'empare du bien d'autrui, et, par analogie, l'avidité avec laquelle un animal (oiseau) se jette sur sa proie (1530). À la différence de rapace, le mot ne s'applique, dans l'usage actuel, qu'aux humains.
RAPAILLER → 1 RÂPE
RAPATRIER → PATRIE
G 1 RÂPE n. f., étant donné son ancienneté, attestée à la fois par son dérivé râpé (v. 1175) et par la forme latinisée raspa (1202), ne peut guère être considéré comme le déverbal de râper. On suppose que, sous une forme raspe (attestée seulement en 1374) puis râpe (XVIe s.), il est directement formé d'après le francique °raspôn « gratter », attesté d'après l'ancien haut allemand raspôn et auquel remonte, probablement par l'intermédiaire d'un latin populaire °raspare, le français râper. L'italien a de même raspare, l'espagnol et l'ancien provençal raspar « gratter, racler ». Par ailleurs, l'italien et l'ancien provençal ont raspa pour une grappe de raisin dépouillée de ses grains.
❏  Dès les premiers textes, râpe désigne le reste de la grappe qui a été pressée, le marc de raisin, résultat de l'action de racler. ◆  Par extension, il s'applique à l'ensemble du pédoncule et des pédicelles d'une grappe de raisin ou de groseille (fin XVIe s.), à ce qui reste d'un épi de blé dont on a enlevé les grains (1752). ◆  En moyen français, il a aussi désigné le bois coupé provenant des taillis, une grosse branche ou baliveau d'arbre de futaie, sens qu'il a conservé dans le nord de la France et dans les pays wallons.
❏  Avec le sens de « marc de raisin », râpe a produit 1 RÂPÉ, d'abord employé comme adjectif dans le syntagme vin raspé (1175), puis substantivé (v. 1200) en parlant d'un vin fabriqué en faisant passer un vin faible dans un tonneau dont on a rempli un tiers de raisin nouveau. Par extension, il désigne une boisson fabriquée en faisant passer de l'eau sur le marc (1600), un vin éclairci avec des copeaux (rappé 1650 ; rapé de copeaux). ◆  Il désigne également les restes de vin que l'on mélangeait pour les servir à certains clients dans les cabarets (1750).
RÂPER v. tr., d'abord rasper, seulement attesté au XIVe s. mais probablement antérieur (l'ancien provençal a raspar « gratter un vaisseau »), est issu, soit de 1 râpe, soit directement du francique °raspôn, peut-être par un verbe latin populaire °raspare (ci-dessus râpe).
■  Le verbe, qui signifiait « gratter », a pris, sous l'influence de son déverbal 2 râpe, le sens de « réduire en poudre ou en pulpe au moyen d'une râpe » (1568), et techniquement « travailler la surface d'un corps à la râpe » (1596). Il est employé au figuré à propos d'un mauvais vin âpre (1606). Sous l'influence du participe passé adjectivé 2 râpé « élimé jusqu'à la corde » (1761), il a pris le sens d'« user (un vêtement) jusqu'à la corde » (av. 1834), surtout à la voix passive.
La dérivation de râper est riche.
■  Le déverbal 2 RÂPE n. f., distinct de 1 râpe, d'abord écrit raspe (1269), désigne une grosse lime d'acier à entailles profondes ou à grosses dents pour gratter (râper), user une matière. Par analogie, il désigne couramment un ustensile de ménage servant à réduire une substance en poudre ou en très petits morceaux (1559). Par extension du sens technique, il est employé en médecine dans bruit de râpe (1869) caractérisant un souffle observé dans certaines maladies de cœur. ◆  Le Dictionnaire universel de Pierre Larousse enregistre en 1875 deux autres spécialisations techniques : des noms d'outils employés dans les distilleries et cidreries ainsi que dans la fabrication des aiguilles.
■  Au figuré, râpe se dit en français de Suisse (depuis 1960) pour « personne avare, cupide », sans doute d'après le dérivé râpin « avare », attesté non seulement en Suisse romande, mais à Saint-Étienne, en Anjou et jusqu'à Nantes, ces emplois dialectaux pouvant aussi remonter selon Wartburg, au latin rapina (mais l'origine germanique de râpe est plus probable). On dit familièrement c'est une râpe et il est râpe, dans ce sens.
■  2 Râpe a produit RÂPEUX, EUSE adj., d'abord raspeux (1577), qui pourrait bien être le même que raspos (v. 1175), ce qui tendrait à avancer la date de 2 râpe « lime » et, donc, de râper. Le mot qualifie ce qui est rude au toucher et se dit, par extension, de ce qui est âpre au gosier (av. 1880), d'un son qui évoque celui d'une râpe frottant sur une matière dure (1869).
■  2 Râpe a également donné RÂPURE n. f. (1646), mot technique pour ce que l'on enlève en râpant (le moyen français a eu raspure « rafle de raisin » dérivé au XIIIe s. de 1 râpe). ◆  En français d'Acadie, le mot désigne un plat traditionnel à base de pommes de terre râpées.
■  RÂPEUR, EUSE n. (1611) désigne la personne qui râpe, spécialement l'ouvrier chargé de râper le tabac (1765).
■  RÂPEMENT n. m. (1611) fournit un nom d'action d'usage plus littéraire que RÂPAGE n. m. (1775, après un râpage « grapillage », 1616, qui vient de 1 râpe).
■  RÂPERIE n. f. (1872) est un mot technique pour l'atelier dans lequel on râpe les betteraves et le bois destiné à fabriquer le papier (1962, dans le Grand Robert). On le rencontre une première fois en 1682 à propos d'une maison de détention dans laquelle les détenus doivent râper les bois durs et un établissement dans lequel les pauvres doivent se livrer au même labeur.
■  Enfin, 2 RÂPÉ, ÉE, le participe passé de râper, courant pour qualifier une matière débitée à la râpe (fromage râpé) et au figuré une étoffe, un vêtement très usé (1761), a été substantivé pour désigner le tabac à priser (1759), puis reformé (1920) pour désigner le fromage râpé. En français de Lorraine, un râpé désigne une galette de pommes de terre cuite, traditionnellement au lard. La même préparation, en Auvergne et dans la vallée du Rhône, est appelée RÂPÉE n. f. (le mot est employé à Saint-Étienne). ◆  Il est adjectivé dans l'usage familier avec un sens figuré de « raté », c'est râpé ! correspondant à « c'est fini, tout est perdu » (v. 1972) souvent senti comme un jeu de mots (paronymie) avec raté. On ne peut séparer, dans ces emplois figurés, 1 et 2 râpé.
L'ancien sens de râper « grappiller (le raisin) » (1609) se maintient dans le suffixé verbal RAPAILLER v. tr., employé dans certaines régions de France, puis en français du Canada (1894), pour « ramasser des objets ici et là, rassembler des personnes » (Cf. rapiat). De là, au figuré, rapaillé, qui correspond à « raccommodé, fait de pièces hétéroclites ». L'homme rapaillé est le titre d'un recueil de poèmes de Gaston Miron. Le verbe, en français québécois, s'emploie pour « rassembler », au concret comme à l'abstrait (rapailler ses souvenirs).
❏ voir RAPIAT, RAPIÈRE, RAPIN.
RAPADOU n. m. est un emprunt du français d'Haïti au créole (peut-être du radical de râpe et de doux) pour désigner le sucre de canne non raffiné, le sucre candi, cristallisé en blocs (pains de sucre).
? RAPERCHER ou RAPPERCHER v. tr. (attesté en 1801) semble pris au verbe dialectal rapertsi, qui correspond au français rapprocher (→ approcher), mais est aussi senti comme un composé parasynthétique de perche, les deux étymons latins appropriare et pertica, n'étant pas départagés. C'est un verbe passé en français dans la zone franco-provençale, surtout en Suisse, pour « rassembler, réunir (des personnes, des bêtes, des objets) ». Aller rapercher correspond à « aller chercher (ce qui était égaré, perdu) ». En emploi absolu, rapercher s'est dit pour « rassembler et ramener le bétail ». Le verbe a des points communs avec rappondre (→ appondre), et avec le rapailler du français québécois.
RAPETASSER v. tr., attesté depuis 1532 (Rabelais, repetasser), est originaire du domaine franco-provençal (en particulier de la région de Lyon) où il signifie « réparer grossièrement ». Il vient de l'élément ra-, de r(e)- et de a- tiré du latin ad- marquant le mouvement et de l'ancien occitan petassar « rapiécer » ou de l'ancien franco-provençal petasser de même sens. Ces verbes viennent de l'ancien occitan et de l'ancien provençal petas « morceau (de cuir, d'étoffe) pour réparer ». Petas est issu du latin impérial pittacium « morceau de cuir ou de parchemin, emplâtre » qui, à basse époque, avait pris le sens de « pièce sur un vêtement, une chaussure » ; disparu en français central, petas est encore vivant en français régional d'Occitanie (notamment en Auvergne) → petas. Celui-ci est emprunté au grec hellénistique et tardif pittakion « feuille de tablette à écrire, billet » d'où, par métonymie, « liste des membres, association », et, par un autre développement, « emplâtre ». Ce mot est d'origine obscure : il faut renoncer à un rapport avec pitta « poix, résine » et, peut-être, rapprocher le mot, en vertu de certains des sens de pittacium en latin, de pisungos « cordonnier », qui est lui-même un emprunt d'origine inconnue. L'espagnol pedazo, « pièce, morceau » avec un d mal expliqué se retrouvant dans une autre forme de l'ancien provençal pedas, remonte également au latin.
❏  Le verbe, d'usage familier, signifie « racommoder grossièrement (des vêtements) avec des pièces ». Il est employé au sens figuré et familier de « corriger, remanier (une œuvre) en y ajoutant des morceaux pris de tous côtés » (av. 1615), employé aussi absolument (1775, Voltaire).
❏  Son dérivé RAPETASSEUR, EUSE n. se rencontre également chez Rabelais (av. 1553) avec le sens figuré de « personne composant des ouvrages décousus faits d'emprunts mal assimilés ». Par le hasard des attestations, le sens propre, « personne qui fait métier de réparer sommairement toutes sortes d'objets », est attesté plus tard (1659).
■  L'autre dérivé, RAPETASSAGE n. m. (1609), se dit de l'action de rapetasser (Cf. raccommodage), et, au figuré, des corrections successives qui dénaturent un ouvrage littéraire (1751).