?
REPS n. m., d'abord noté retz (1730), puis reps (1812), est d'origine incertaine, l'hypothèse de l'emprunt à l'anglais rep étant à écarter. En effet, ce mot, postérieur au français, écrit rep (1860) puis reps (1867) semble lui-même emprunté au français. On a évoqué l'anglais reb, forme dialectale de rib « côte » (ce tissu étant à côtes), employée au pluriel rebs (la forme ribs est à l'origine de l'allemand Rips) et, plus vraisemblablement (P. Guiraud), la forme picardo-wallonne réper « racler, râper », les côtes de ce tissu formant comme une sorte de râpe, de râper*. On pourrait aussi imaginer une forme lorraine de râper, réper, dont reps procéderait par métathèse du s (Cf. raps « râpe » en Wallonie). Toutefois, aucune base historique ne corrobore cette hypothèse.
❏
Le mot désigne techniquement la combinaison de croisement de fils de trame et chaîne ; par métonymie, il dénomme une étoffe à côtes perpendiculaires aux lisières, souvent employée dans l'ameublement.
REPTATION n. f. est emprunté dans l'usage didactique (1834 ; peut-être 1810) au latin reptatio, -onis : « action de se traîner », dérivé du supin (reptatum) de reptare « ramper », fréquentatif (surtout usité dans la langue poétique) du latin classique repere « ramper », « se traîner », « cheminer lentement, se glisser ». Ce dernier a des correspondants exacts pour le sens et proches pour la forme dans les langues baltes : lette ràpuôs, raptiês « ramper », lituanien rėplióti « aller à quatre pattes ». Le verbe latin indiquant la progression particulière au serpent était plutôt serpere (→ serpent). En français, les verbes latins ont été remplacés par un mot germanique détourné de son sens premier, ramper*.
❏
Le mot désigne le mode de locomotion de certains animaux pourvus de pattes très courtes ou dépourvus de pattes et se propulsant par ondulations et rétractations alternatives. Par analogie, il se dit d'un mode de progression semblable chez l'être humain à plat ventre (1935).
■
Comme ramper, auquel il sert de nom d'action, il a développé une valeur figurée péjorative, désignant l'attitude d'une personne qui s'abaisse devant des gens puissants ou influents (XXe s.).
■
Il a été repris en géomorphologie pour un type de très lente descente du sol (1964), et en physique pour le déplacement progressif des cycles des valeurs prises par l'induction magnétique dans un corps ferromagnétique (1975). Reptation est recommandé officiellement pour remplacer l'anglicisme snaking (de snake « serpent »), dit des oscillations d'un aéronef autour de l'axe de lacet.
❏ voir
REPTILE.
REPTILE adj. et n. m. est emprunté (1304) au bas latin reptilis « qui rampe », employé substantivement au neutre reptile pour désigner un animal rampant, du latin classique reptum, supin de repere, « ramper » (→ reptation).
❏
Le mot, repris comme nom pluriel (
reptilles, 1314), le singulier n'étant attesté que depuis 1530, s'entendait autrefois dans l'acception large d'« animaux rampants », s'appliquant aussi bien aux serpents qu'aux vers et aux chenilles. La distinction ultérieure entre vertébrés et invertébrés le fit se restreindre aux seuls serpents, ce qui est conforme à l'usage courant moderne, où les concepts de
reptile et de
reptation sont perçus comme liés. En zoologie, cependant, et depuis Brisson (1756), le mot, précisé par Lamarck (1804), Brongniart, Cuvier, Duméril, sert à désigner une vaste classe de vertébrés à respiration pulmonaire, à température variable, à peau écailleuse, comprenant non seulement les serpents, mais les tortues, lézards, crocodiles... (sauriens), etc. et, identifiés au cours du
XIXe s., de très nombreuses espèces fossiles du secondaire, parmi lesquelles les dinausoriens, sauroptérygiens, ichtyosauriens, le ptérodactyle, etc. Au
XIXe s., les reptiles (depuis Brongniart et Duméril) [1807] incluent les batraciens*, parfois appelés
reptiles nus (Blainville, 1816) ; l'extension du terme se réduit ensuite.
■
L'emploi adjectivé du mot au sens de « qui rampe » (1304) a vieilli, sauf acception métaphorique dans le style littéraire (1697). Le même type de métaphore fit appliquer péjorativement le nom à un homme bas, méprisable, « rampant » (av. 1778).
■
D'après une métaphore d'un discours de Bismarck en 1869, le mot s'est employé à propos d'un journaliste payé sur des fonds secrets (1888), fonds par lesquels Bismarck soudoyait la presse officieuse et qui reçurent l'appellation de fonds des reptiles (1874), d'après l'allemand reptilien Fonds.
❏
De reptile dans cette acception circonstancielle est dérivé REPTILIEN, IENNE adj. (1888) dit de ce qui était payé sur des fonds secrets.
◆
Le sens général neutre de « qui se rapporte aux reptiles, rappelle les reptiles » (1874) est peut-être un emprunt à l'anglais reptilian, qui, dans ce sens, est attesté au milieu du XIXe siècle. Cerveau reptilien est calqué sur l'anglais reptilian brain, et désigne la partie la plus primitive des trois distinguées par Mac Lean au cours de l'évolution du cerveau des primates, et donc de l'être humain.
REPU, REPUE → REPAÎTRE (art. PAÎTRE)
RÉPUBLIQUE n. f. est emprunté (v. 1140) au latin classique respublica qui désigne le bien public, la propriété d'État, puis l'État, les affaires publiques, la vie politique, spécialement le gouvernement dans ses rapports avec l'extérieur et aussi une forme de gouvernement. Le mot est issu de la soudure de res publica « chose publique » (par opposition à privatae res), de res « chose » (→ rien), lui-même employé elliptiquement pour res publica, et de publica, féminin de publicus (→ public).
❏
Le mot a été repris avec le sens restreint, aujourd'hui courant et majoritaire, de « forme d'État dans lequel les citoyens exercent la souveraineté, soit en désignant par leurs votes un président et des représentants, soit en élisant des représentants qui à leur tour désignent le président ». Avant la Révolution cependant, le mot, rare avant le
XVIe s., époque où il évoque l'Antiquité romaine, n'eut pas de définition juridique, les dictionnaires des
XVIIe et
XVIIIe s. le définissant comme « État ou gouvernement populaire » comprenant la démocratie et l'aristocratie, mais excluant leurs déformations (oligarchie, démagogie). Le sens latin de « chose publique » (1520) a vieilli lorsque le sens politique restreint, défini juridiquement avec la Révolution, s'est imposé. Il subsiste toutefois dans les emplois historiques où le mot renvoie à la notion antique et ancienne, notamment dans les titres de traités de Platon, Cicéron, en français Jean Bodin (1576), La Bruyère ; la tragédie classique diffuse ce sens historique du mot, se référant au type de régime que connut la Rome antique entre la fin des Tarquins et l'Empire (1651, Corneille,
Nicomède). Par ailleurs, des régimes modernes sont aussi désignés par ce mot (
république de Hollande, par exemple) dès le
XVIIe siècle, établissant une opposition avec
royauté.
■
Du sens général latin est sorti l'usage ancien du mot pour une société organisée (1549), un corps politique et, collectivement, un ensemble d'États ayant un caractère commun (XVIIe s.), un État, un gouvernement légitime où le pouvoir exécutif est le « ministre du souverain » (XVIIIe s.). En est également sorti l'emploi figuré à propos d'un groupe social formant une communauté fraternelle (1680), surtout dans l'expression république des lettres couvrant l'ensemble des œuvres littéraires (1648) et des gens de lettres (1664). Son emploi analogique appliqué à une colonie d'animaux vivant en communauté (1667), encore chez Zola, a disparu.
■
L'application de république à un régime français date de la Révolution et de l'instauration de la première République (acte constitutionnel du 24 juin 1793), qui, après l'Empire et la Restauration, fut suivie de la seconde République (acte constitutionnel du 4 novembre 1848), puis de la troisième (1871), de la quatrième (1944) et de la cinquième République (1958). République peut être qualifié pour spécifier le type de régime républicain : république représentative, libérale, etc. Par métonymie, le mot désigne l'État régi par une république, par exemple dans les expressions république populaire (1869), reprise au XXe s. pour désigner les régimes à partis communistes, et république socialiste (v. 1920) ou dans des désignations officielles d'États (République française, République tchèque, République centrafricaine...). En histoire, on parle de la République arabe unie (R. A. U.) formée en 1958 par l'union de l'Égypte et de la Syrie (ce pays s'étant retiré en 1961, l'Égypte conserva ce nom jusqu'en 1971).
■
Psychologiquement, le mot s'applique à l'état d'esprit prenant pour principe la souveraineté du peuple, par exemple dans la locution familière on est en république « on est libre » (1964) où le mot équivaut à démocratie. Se ficher de la république (1901, Bruant) équivalait à se ficher du monde.
■
Dans le domaine artistique, il s'emploie pour l'allégorie représentant (sous la troisième République française) la République sous les traits d'une femme (1875).
❏
RÉPUBLICAIN, AINE adj. et n. (1586) s'est appliqué à une personne vivant sous le régime de la république avant de prendre le sens de « partisan de ce type de régime » (av. 1630), notamment dans le cadre d'un régime différent, en général monarchique (1690) ou impérial. Au
XVIIe s., le mot a commencé à s'employer adjectivement pour qualifier une personne favorable à la république (1658), d'abord péjorativement dans le cadre d'une France monarchique (1694), et, dans un sens descriptif neutre, ce qui a rapport au régime politique appelé république (1690).
◆
Par métonymie, il qualifie ce qui est caractéristique de l'état d'esprit des partisans de la république (1875). Le nom figure dans la dénomination de groupes ou partis politiques (1869). Employée spécialement, la dénomination
parti républicain (1904 ; déjà
les républicains en ce sens, 1875) est un calque de l'anglais pour désigner l'un des deux grands partis politiques américains (opposé à
démocrate).
■
L'ancien sens de république « collectivité animale » s'est trouvé réactivé par républicain désignant en zoologie un passereau d'Afrique tropicale, qui bâtit un nid collectif divisé en nombreux logements (1828).
■
Républicain a donné deux dérivés : RÉPUBLICANISME n. m. (1750) « position des partisans de la république », aux époques où ce régime est combattu, éliminé et RÉPUBLICANISER v. tr. (1792) « donner le caractère républicain à » et « constituer en république » (1798).
RÉPUDIER v. tr. est emprunté (XIIIe s.) au latin repudiare « repousser qqn, rejeter qqch. », spécialisé en droit pour « refuser d'accepter (un héritage, un fidéicommis) » et « renvoyer (sa fiancée, sa femme) ». Ce mot est issu de repudium, « fait de repousser du pied » d'où « rejet de la femme, divorce, séparation », rapproché par étymologie populaire du verbe impersonnel pudet « avoir honte » (→ pudeur), mais probablement issu de pes, pedis (→ pied), avec re- indiquant le mouvement en arrière. L'ancien français a eu le type populaire repuier (1174-1176).
❏
Le mot a été repris avec sa spécialisation juridique, « repousser (sa femme) en vertu d'une disposition légale ou coutumière » et a développé le sens figuré de « rejeter (ce que l'on avait admis jusque-là) », qui reprend (v. 1360) le sens de l'ancien verbe répuier. Avec un complément d'objet désignant un inanimé, répudier a pris en droit le sens de « renoncer volontairement à (un bien) » (XVIe s., répudier la succession, Coutumier général).
❏
RÉPUDIATION n. f. est emprunté (v. 1330) au dérivé latin
repudiatio, -onis « action de rejeter, refus ».
◆
Le mot fournit un nom d'action au verbe dans son acception juridique la plus courante : « renvoi de la femme par son mari ». Il a été étendu au
XIXe s. à l'action de renoncer à un droit sur un bien (1804) et, au figuré, à l'acte par lequel on rejette ce que l'on admettait jusque-là (1839, Balzac).
■
Le radical latin a donné RÉPUDIATOIRE adj. « relatif à la répudiation » (1925), tardif et d'usage littéraire.
RÉPUGNANT, ANTE adj., attesté avant le verbe correspondant (1213), est emprunté au latin repugnans, -antis, participe présent de repugnare « résister », « lutter contre », « être incompatible avec », de re- (→ re-) marquant le mouvement en arrière d'où l'opposition, et de pugnare « lutter à coups de poing, se battre », lui-même issu de pugnus (→ poing). À basse époque, repugnans a été adjectivé au sens de « contradictoire », son pluriel neutre repugnantia étant substantivé dès l'époque classique en rhétorique pour désigner des choses contradictoires (Cicéron).
❏
L'adjectif, emprunté en scolastique au sens de « contraire, opposé, résistant à », encore relevé au
XVIIe s., s'est spécialisé pour « en opposition avec (la foi, la raison, la loi) » (v. 1600), lui-même répertorié jusqu'en 1878.
■
Après le XIVe s., l'attraction de répugner lui a fait prendre le sens actif de « qui ressent une grande aversion envers qqch. » (1540). Par changement de point de vue, il a pris au XVIIIe s. sa valeur actuelle, « qui inspire un dégoût physique » (1753), d'où « qui dégoûte moralement » (seulement attesté au XXe s. ; 1932, Céline), laquelle semble provenir des emplois plus anciens de répugnance.
❏
RÉPUGNANCE n. f. est emprunté (v. 1250) au latin
repugnantia, issu du participe présent et désignant un moyen de défense, un désaccord, une antipathie, une opposition, une incompatibilité.
■
Le mot, d'abord didactique comme répugnant, désigne alors l'opposition, la contradiction, l'incompatibilité.
◆
À partir du XIVe s., il subit l'influence de répugner et de répugnant et s'applique à l'aversion physique que l'on éprouve à l'égard d'une chose que l'on ne peut supporter (v. 1650), et, par affaiblissement, au sentiment de gêne, de réticence avec lequel on subit ou on fait qqch. (1651), aussi au dégoût physique ou moral qui fait éviter une personne (1680). Il est alors voisin de répulsion, de rejet et de dégoût.
❏
RÉPUGNER v. tr. ind. est emprunté (v. 1370) au latin
repugnare (ci-dessus), l'adjectif
répugnant étant déjà en usage.
■
Le verbe, repris pour « être contraire, s'opposer, résister à » et aussi « s'opposer à, contredire », à propos de contradictions et d'opposition d'opinions, est sorti d'usage après l'époque classique. Sporadiquement, on le rencontre en construction directe au sens de « repousser » (1519). Aux XVIe et XVIIe s., il s'emploie absolument avec la valeur plus générale de « lutter, exercer une résistance » (v. 1519) ; l'idée d'« hostilité » cédant le pas à celle d'« aversion », il s'emploie pour « éprouver de l'aversion à faire une chose » (XVIIe s.), puis, suivi d'une préposition, pour « éprouver de l'aversion envers » (1643).
◆
Par changement de point de vue, il s'emploie également avec un sujet désignant la chose ou la personne qui inspire la répulsion (1718), notamment dans la construction impersonnelle il me répugne de (1798).
■
Le participe passé adjectivé RÉPUGNÉ, ÉE a aussi les deux valeurs : « qui exprime la répugnance » (1880) et « qui éprouve de la répugnance » (1885). Les autres dérivés, tous relatifs au sens ancien d'« être contraire à, s'opposer », sont sortis d'usage.
RÉPULSION n. f. est emprunté (v. 1450) au bas latin repulsio, -onis « action de repousser » et au figuré, « rejet », du latin classique repulsum, supin de repellere « repousser, écarter » de sens propre et figuré. Ce mot est formé de re- (→ re-) indiquant la mise à l'écart et de pellere « remuer, pousser » (→ pousser).
❏
En moyen français, le mot a servi de nom d'action à
repousser, désignant l'action concrète de repousser l'ennemi, de chasser qqn. Il a été repris au
XVIIIe s. probablement, d'après
répulsif (ci-dessous), comme terme de physique pour désigner l'effet résultant des forces qui tendent à éloigner deux corps l'un de l'autre (1746, Nollet).
■
Ensuite, il a développé le sens figuré d'« éloignement par désaffection ou antipathie » (v. 1772), surtout littéraire, prenant dans l'usage courant le sens renforcé de « vif sentiment de dégoût » (1775), alors proche de répugnance et de dégoût.
■
Au XXe s., il a été repris en sport pour désigner un mouvement de gymnastique par lequel on repousse le corps après avoir fléchi les bras (1911), réactivant le sens concret du mot.
❏
RÉPULSIF, IVE adj. et n. m. est le dérivé savant (1478) du latin
repulsum avec le suffixe
-if.
◆
Employé par les médecins au sens de « qui repousse », sorti d'usage, il a été réintroduit au début du
XVIIIe s. comme terme de physique, qualifiant une force contraire à la force de cohésion, qui s'oppose au contact des molécules du corps (1705).
■
Il a développé le sens figuré de « qui provoque l'aversion » (v. 1772, J.-J. Rousseau), d'usage littéraire.
■
Au XXe s., il a été substantivé, un répulsif désignant en technique une substance utilisée en agriculture pour protéger les cultures en tenant les insectes à distance (v. 1960) et un appareil repoussant les insectes sans les détruire.
■
Son dérivé RÉPULSIVEMENT adv. n'est attesté qu'au XXe s., mais pourrait être antérieur.
RÉPUTER v. est emprunté (1261) au latin reputare « calculer, compter », « examiner, méditer, réfléchir », de re- (→ re-) à valeur intensive et putare « supputer, estimer » (→ putatif).
❏
Le verbe, repris avec le sens de « considérer comme, tenir pour », toujours en usage, était aussi employé jusqu'au XVIIe s. avec la préposition pour suivie d'un substantif (1261) ou d'un attribut du complément d'objet (1291) [réputer qqn pour mauvais] et, plus rarement, avec la préposition à (v. 1360). Seule la construction à la voix passive suivie d'un attribut ou d'un infinitif (fin XIIIe s.) s'est maintenue, dans un style soutenu (être réputé...). L'usage de la forme pronominale se réputer « se croire tel ou tel » (v. 1355) a disparu, de même que la construction réputer que « croire que » (v. 1370).
◆
Les sens transitifs de « dénombrer, compter » (1294), et complémentaires, « blâmer » et « faire honneur à » (1368, Tournai, également réputer qqch. à qqn) « faire honneur de qqch. à qqn », sont également sortis d'usage.
❏
Le participe passé
RÉPUTÉ, ÉE, adjectivé une première fois au sens de « compté », disparu, a été repris au
XVIIe s. avec la valeur de « considéré comme » (1694) qui correspond au verbe, et s'est conservée. Il s'emploie aussi absolument pour « jouissant d'une grande notoriété » (1859), d'une personne et d'une chose
(un vin réputé) et suivi de la préposition
pour (1812) en parlant d'une personne, d'une chose connue en raison d'une qualité ou d'un défaut. Il est plus usuel que le verbe.
◈
RÉPUTATION n. f. est emprunté (1370) au dérivé latin
reputatio, -onis « réflexion, examen », « considération », « compte ». Le mot, à la différence du verbe, est resté courant, désignant l'honorabilité morale, la célébrité d'une personne ou d'une chose en raison de sa valeur (1370).
◆
Puis, il a désigné l'opinion bonne ou mauvaise que les gens ont de qqn, de qqch. (1530), par exemple dans les locutions
être en réputation de (1650) et
avoir qqn en réputation de (1694), sorties d'usage, et
ne connaître (qqn) que de réputation (1671),
connaître de réputation (av. 1784),
avoir une, la réputation de (1786).
L
REQUÉRIR v. tr. est la réfection (1200) d'après guérir* de la forme ancienne requerre (v. 980) largement usitée jusqu'au milieu du XVIe s. et conservée dialectalement. Ce verbe remonte à un latin populaire °requaerere, altération d'après quaerere, du latin classique requirere « rechercher, être à la recherche de », « être en quête de », et, par l'intermédiaire d'« être en quête d'une réponse », « demander » et « réclamer, exiger ». Ce verbe est formé de re- (→ re-) à valeur intensive et de quaerere « chercher » (→ quérir).
❏
Tout comme
quérir a pâti de la concurrence de
chercher, requérir a perdu une partie de ses emplois au profit de
rechercher. Requerre s'employait en ancien français pour « prier (qqn), demander (qqch.) » [v. 980], « réclamer (qqch.) » [v. 1050] et, spécialement dans un contexte guerrier « choisir (son adversaire) pour l'attaquer » et « attaquer » (1080), emplois disparus.
■
De nos jours, le verbe s'emploie encore pour « rechercher (qqn) » [1080] et « prier instamment (qqn) de », spécialement avec la valeur contraignante de « sommer (qqn) de faire qqch. » (1538), suivi de la préposition de introduisant un infinitif complément. Le sens de « réclamer » est également réalisé dans un style soutenu avec un complément désignant un abstrait (1538), notamment dans requérir de l'aide (1875). Avec un sujet désignant une chose, requérir (comme réclamer) signifie « exiger, avoir besoin de » (v. 1467, Les Cent Nouvelles nouvelles) notamment en tournure impersonnelle.
■
De la spécialisation juridique ancienne de « demander par voie judiciaire » (1231), est tiré « accuser (qqn) de » (1538), « porter plainte contre » (1549), qui ne s'est maintenu qu'en parlant du procureur qui présente son réquisitoire* contre l'accusé (1690).
■
Ultérieurement, requérir a développé un sens très proche du verbe apparenté réquisitionner* (1789) « réclamer pour utiliser en vertu d'un droit légal », spécialement « faire la réquisition de personnes » (1847).
❏
Les dérivés remontent tous à l'ancien français.
■
REQUÊTE n. f. (1291), d'abord requeste (v. 1155), est tiré de l'ancien infinitif requerre d'après quête*.
◆
Il désigne la demande instante adressée à une personne ayant officiellement un pouvoir de décision et, par extension, une prière adressée dans une forme polie (v. 1278). Son usage, plus que celui du verbe, est surtout juridique : il désigne la demande par écrit présentée suivant certaines formes établies à un magistrat pour ordonner une mesure de procédure, solliciter une autorisation, notamment dans la locution à la requête de (1283), reprise à l'usage courant où elle signifiait « à la demande de » (1256). Toujours en droit, le mot s'est spécialisé à propos du mode d'introduction en justice de certaines procédures (1611) dans requête civile (1611), requête verbale (1690), requête incidente (1875), désignant aussi par métonymie le mémoire présenté par un avocat ou une partie civile pour introduire une procédure devant la Cour de cassation ou le Conseil d'État (22 juillet 1806, Bulletin des lois), d'où maître des requêtes (1809 au sens actuel ; 1424 dans le cadre du Conseil du roi) et section des requêtes (1870). Ces emplois institutionnels sont propres au français de France.
■
L'ancien emploi de requérir à valeur itérative, « chercher de nouveau », spécialisé en vénerie, survit dans l'emploi de requête en vénerie (v. 1270) qui a produit à son tour le verbe REQUÊTER v. tr. (1394).
◆
Le participe passé, de ce verbe, REQUÊTÉ, est substantivé (1794) à propos du ton de chasse employé afin de rappeler les chiens à soi.
◈
REQUIS, ISE, participe passé de
requérir, a été adjectivé (v. 1160) pour qualifier d'après l'ancien français
requerre (ci-dessus) un combat acharné, une personne distinguée (v. 1240), puis une chose demandée, recherchée (
XVIe s.). Cette disparité de sens fut résolue, certains sens étant transférés à
exquis*, et
requis, sous l'influence du verbe, ne signifiant plus que « demandé, réclamé, convenable » (1534).
◆
Ultérieurement, suivant le développement de
requérir, le mot a pris le sens d'« engagé par voie d'autorité »
(Cf. réquisition), substantivé en parlant d'un civil réquisitionné en temps de guerre (1932), puis d'un citoyen contraint d'exercer certains travaux pour une puissance occupante (1943) et en parlant d'un civil faisant l'objet de réquisition pour un emploi déterminé en temps de paix (milieu
XXe s.).
◈
PRÉREQUIS, ISE adj. et n. m. est calqué (années 1980) sur l'anglais
prerequisite, à propos de ce qui constitue des conditions à remplir pour suivre un enseignement, remplir une fonction.
◈
REQUÉRANT, ANTE, le participe présent, a été adjectivé (v. 1278) au sens de « solliciteur, soupirant », sorti d'usage. Il s'emploie en droit pour désigner la personne qui requiert en justice (1342 comme nom, 1690 comme adjectif), et se dit en vénerie d'un chien qui quête pour retrouver la trace d'un animal (1573)
Cf. ci-dessus requête.
■
REQUÉRABLE adj. (1275) s'emploie en droit pour ce que l'on doit requérir en personne.
❏ voir
RÉQUISITION, RÉQUISITOIRE.
REQUIEM n. m. est l'emploi comme nom commun (1277) du latin requiem, accusatif de requies, de re- (→ re-) à valeur intensive et quies « calme » (→ coi, quiet) qui désignait spécialement, chez les auteurs chrétiens, l'endroit où reposait un saint, l'autel sous lequel se trouvaient ses reliques. L'accusatif requiem fournissait le premier mot d'une prière catholique de l'office des morts : requiem aeternam dona eis, domine (« donne leur le repos éternel, Seigneur »). Les représentants de requies en ancien français, requei n. m. (v. 1155) et recoi (XIe s.) : « cachette, abri » et « repos » (XVe s.), sont sortis de l'usage au XVIIe siècle.
❏
Le mot désigne une prière pour le repos de l'âme d'un mort, spécialement dans l'expression messe de requiem (fin XIVe s.). L'expression figurée face de requiem s'est dite d'une figure pâle et défaite.
◆
L'emploi pour désigner l'introït de la messe des morts commençant par ce mot est enregistré en 1690 par Furetière. Il désigne aussi la partie de la messe des morts mise en musique (1810, Mme de Staël à propos du Requiem de Mozart).
❏ voir
REQUIN.
REQUIMPETTE n. f., mot populaire pour « jaquette, veste », attesté en 1884, est parfois donné pour une altération de redingote, ce qui n'est pas convaincant ; une composition sur le verbe populaire quimper (de camper) avec l'idée des pans qui « tombent », paraît plus plausible. Le mot a vieilli après 1950.
?
REQUIN n. m., attesté depuis 1529, est d'origine controversée. La graphie requien (1578), puis requiem (XVIIe s.) disparue, est une altération due à l'étymologie alors donnée du mot : « Quand il a saisi un homme... il ne reste plus qu'à faire chanter le Requiem pour le repos de l'âme de cet homme-là » lit-on chez Huet ; il s'agit probablement là d'une étymologie populaire, perpétuellement reprise. Bloch et Wartburg évoquent à meilleur escient un dérivé du normand quin « chien » (→ chien), forme courante en picard, avec un préfixe re-* ayant valeur de renforcement et rappellent la dénomination populaire chien de mer désignant un squale depuis le XIIIe siècle. P. Guiraud préfère partir d'une forme normande de rechigner* « montrer les dents en grimaçant », d'où est sorti l'adjectif rechin « grincheux » (attesté plus tard : XVIIe-XVIIIe s.), avec allusion à la denture impressionnante de l'animal ; l'existence d'une forme non palatalisée est attestée par l'ancien picard rekigner « faire triste figure » ; certaines valeurs de requinqué* pourraient aussi être évoquées. Une autre hypothèse, moins convaincante, part d'une fausse coupe d'un mot supposé °orquin emprunté à l'italien °orchino, forme diminutive supposée de orca (→ orque).
❏
Le mot s'emploie pour désigner un squale de grande taille, seul ou dans quelques syntagmes déterminés, du type requin baleine (1529) puis requin pèlerin, requin-marteau (ci-dessous), etc. Dans les régions francophones où ce squale est abondant (océan Indien, Pacifique) le mot donne lieu à d'autres syntagmes, comme requin blanc et requin tigre, dangereux pour l'homme, et requin gris, en Nouvelle-Calédonie.
◆
Par allusion à la voracité et à la puissance du squale, il s'emploie au figuré à propos d'un homme d'affaires impitoyable et avide (1790).
❏
Le composé
REQUIN-MARTEAU n. m. (1904), désigne un grand requin dont la tête porte une protubérance (comparée à un marteau).
■
REQUINISME n. m. « cupidité » (XXe s.) est un dérivé rare du sens figuré.
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REQUINQUER v. tr. (1578) est d'origine incertaine : selon Bloch et Wartburg, c'est un mot picard issu d'un verbe °reclinquer « redonner du clinquant, de l'éclat », lui-même formé de re-* et de l'ancien verbe clinquer (→ clinquant) avec chute du l comme dans quincaille*. Cependant, ce verbe était aussi connu en Provence et Languedoc : Odde de Triors définit le languedocien requinqua, « s'égayer, se reverdir » (de personnes habituellement tristes, de vieillards). On a aussi évoqué reclinquer « réparer une barque » (1382) du néerlandais klink. P. Guiraud part de déglinguer*, lui-même variante de déclinquer, interprété comme « disloquer (un bateau) en arrachant les clins », et qu'il fait remonter à clincher, clinquer « faire pencher, incliner » et, dans les dialectes normanno-picards « perdre son aplomb, céder, plier ». Clinquer est issu d'un latin °clinicare, de clinare (→ incliner). Requinquer signifierait alors proprement « remettre d'aplomb ». Le mot a été popularisé par une chanson déjà connue au temps de François Ier, où on se moquait d'une vieille femme coquette cherchant à se parer comme une jeune ; le refrain en était : « Requinquez-vous, vieille, requinquez-vous donc ».
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D'abord attesté par le participe passé
requinqué, adjectivé dans l'expression
camus requinqué « nez retroussé » (1578), le verbe s'est employé à la forme pronominale
se requinquer (1611) « se parer, se vêtir de neuf », sens aujourd'hui sorti d'usage.
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Requinquer a pris au XVIIIe s. (1732, Voltaire) le sens figuré de « redonner le moral » mais ce n'est qu'au XXe s. que la forme pronominale a le sens usuel de « reprendre des forces » (1932) et que le verbe transitif signifie « redonner une belle apparence à (qqn) » (1904), puis « redonner de la vigueur » (milieu XXe s.).
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Les dérivés REQUINQUAGE n. m. (1904), REQUINQUANT, ANTE adj. (1950) et REQUINQUÉ, ÉE adj. usuel, datent du XXe s. et sont, comme le verbe, d'usage familier.
RÉQUISITION n. f. est emprunté (v. 1160) au latin impérial requisitio, -onis, nom d'action dérivé du supin requisitum de requirere (→ requérir). Le mot latin signifie « recherche » ; il s'est spécialisé à l'époque médiévale aux sens juridiques de « réclamation » (v. 779), « demande » (XIIIe s.) et « droit de mutation » (v. 1081).
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Le mot a désigné l'action de demander, de sommer, avant d'être définitivement évincé par le terme apparenté
requête*. Il a été repris au
XVIIe s. en droit pénal pour désigner l'acte par lequel le procureur demande l'application de la loi contre un accusé déclaré coupable (1636, le plus souvent au pluriel
réquisitions), en concurrence avec
réquisitoire*. L'expression
réquisition d'audience (1690) désigne la demande incidente faite à l'audience pour requérir la présentation d'une pièce ou d'une personne.
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C'est avec la Révolution que le mot a commencé à s'appliquer à l'acte par lequel l'autorité militaire, en temps de guerre, procède à des prélèvements de biens ou exige des prestations de services (26 avril 1792, Moniteur universel), entrant dans l'expression réquisition armée à propos de la levée en masse décrétée en 1793 par le Comité de salut public (23 août 1793, Moniteur universel). En droit administratif, le mot désigne (20 février 1790) l'action d'une autorité civile qui exige d'une personne ou d'une collectivité une prestation d'activité ou la remise d'un bien ; il a servi à former des syntagmes déterminés précisant la nature de la réquisition, tels réquisition de paiement (1936), réquisition de logement (1945).
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Ses deux dérivés sont apparus sous la Révolution.
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RÉQUISITIONNAIRE adj. et n. m. (1793) qualifie et désigne un jeune soldat réquisitionné lors de la levée en masse décrétée en 1793, puis lors de certaines mobilisations.
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RÉQUISITIONNER v. tr. (1796), « se procurer une chose par voie de réquisition », signifie aussi et plus récemment « assigner une tâche à qqn en vertu d'un acte de réquisition » (1888, Zola). Il est passé dans la langue familière au sens d'« utiliser (qqn) d'office, de manière autoritaire » (1883 ; entré tardivement dans les dictionnaires : 1964, Le Robert).
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Son emploi intransitif au sens de « prononcer un réquisitoire » en droit pénal (1842) est quasiment abandonné.
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Du verbe dérivent RÉQUISITIONNABLE adj. (1922, P. Hamp) et RÉQUISITIONNÉ, ÉE adj. (1935).
❏ voir
RÉQUISITOIRE.
RÉQUISITOIRE n. m. est un dérivé savant (1379) du latin requisitum, supin de requirere (→ requérir), sur le modèle de nombreux adjectifs juridiques en -oire.
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L'emploi adjectif qualifiant ce qui exprime une requête (
lettres réquisitoires ; 1403,
commission réquisitoire) a été abandonné au profit de son dérivé (ci-dessous).
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Le mot, substantivé au sens juridique large de « requête, demande » (1577), avec lequel il a été synonyme de requête, s'est spécialisé en relation avec requérir*, pour le développement du procureur de la République énumérant les charges qui pèsent sur l'accusé et demandant contre lui l'application de la loi (1637). Malgré le décalage chronologique des attestations, ce sens explique l'emploi du mot pour tout discours ou écrit rassemblant des reproches véhéments (1594).
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RÉQUISITORIAL, ALE, AUX adj. (1743) a suivi l'évolution du nom : il a perdu le sens de « qui exprime une requête » pour ceux de « qui concerne la réquisition » (1793) et « qui se fait par réquisitoire » (1823), manifestant ainsi le chevauchement sémantique entre réquisitoire et réquisition. Dans son emploi étendu pour « critique motivée et condamnation explicite », réquisitoire constitue un élément de composition (livre-réquisitoire, film-réquisitoire).
R. E. R. n. m. est, dans la région parisienne, le sigle de réseau (→ rets) express régional.
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RESARCELÉ, ÉE adj., terme de blason (1581) n'a pu être rapporté qu'à l'ancien français sarcel (XIIe-XIVe s.), « instrument pour sarcler », issu d'un latin populaire non attesté °sarcellum, variante présumée de sarculum (→ sarcler). Il qualifie une pièce honorable de l'écu dont le bord est redoublé par un filet d'un émail particulier.
RESCAPÉ → ÉCHAPPER (RÉCHAPPER)