1 RÉTRACTER v. tr. et pron. est emprunté (v. 1370) au latin retractare, lequel recouvre deux verbes. L'un est formé de re- (→ re-) indiquant le mouvement en arrière et de tractare (→ traiter) et signifie « remanier, reprendre en main » d'où, au figuré, « traiter de nouveau, revenir sur un sujet, pratiquer de nouveau », « renouveler », « repasser dans son esprit ». L'autre est le fréquentatif de retrahere (→ retrait) et signifie « chercher à tirer en arrière », absolument « ne pas vouloir avancer, être récalcitrant, résister », et, au figuré, « reprendre sa parole » (dicta retractare). L'ancien français a eu la forme plus francisée retraitier (1267) « revendiquer » et « révoquer », en usage jusqu'au XVe siècle.
❏
Le verbe issu de tractare a été repris en français par les clercs au sens juridique de « revenir sur un acte, sur une affaire ; annuler » et s'est répandu dans l'usage général au sens de « déclarer qu'on n'a plus l'opinion qu'on avait avancée, se dédire » (1549), beaucoup plus fréquent à la forme pronominale se rétracter qui apparaît en même temps (1545).
❏
La dérivation se borne à
RÉTRACTABLE adj. (1372 puis 1611), d'usage juridique, et à
RÉTRACTÉ, ÉE adjectivation de son participe passé, spécialement employé dans l'expression
prêtre rétracté (1795), en histoire de la Révolution française.
◈
RÉTRACTATION n. f. est emprunté (1247) au dérivé latin
retractatio, -onis, substantif d'action désignant le remaniement, spécialement la correction de ce que l'on a déjà dit, ainsi que la résistance, le fait d'être récalcitrant.
■
Attesté par Bloch et Wartburg en 1247, le mot a été repris au pluriel rétractations (1376) au bas latin Retractationes, titre d'un ouvrage de saint Augustin dans lequel l'auteur traite des sujets déjà traités en y apportant des corrections. Le mot s'emploie d'abord en droit (1549), puis couramment pour l'action de se rétracter, de désavouer ce qu'on a déjà dit.
◈
2 RÉTRACTER v. tr. et pron. est dérivé savamment (1600) du latin
retractum, supin de
retrahere « faire revenir en arrière »
(→ retrait, retraite).
■
Le verbe est d'abord employé à la forme pronominale se rétracter en parlant d'un fossé qui devient plus étroit dans sa partie inférieure. Se rétracter a été repris en médecine (1803), le verbe actif rétracter s'employant pour « tirer en arrière par contraction » (1875), par exemple à propos d'un escargot qui rentre ses cornes.
◈
Le participe passé
RÉTRACTÉ, ÉE a été adjectivé (1817), d'abord en botanique pour qualifier une radicule cachée par les cotylédons.
◆
Le sens général de « raccourci par la rétraction » apparaît plus tard en anatomie (1870), se spécialisant en phonétique à propos de la position dans laquelle les lèvres sont en retrait par rapport à leur position neutre (milieu
XXe s.), et en psychologie (1946).
■
Le verbe a pour dérivé RÉTRACTIBLE adj., doublet de rétractile (ci-dessous).
◈
RÉTRACTION n. f. est emprunté (v. 1210) au dérivé latin
retractio, -onis « raccourcissement, retrait ».
■
L'ancien français employait le nom au sens figuré de « blâme » et au sens général d'« action de se retirer » (XIIIe s.) ; ce dernier sens a des spécialisations médicales au XVIe s., par exemple « serrement de cœur » (1552) et « raccourcissement de certains organes et tissus » (1539).
■
Le mot est repris au XIXe s. pour désigner la réaction par laquelle un animal, un organe se contracte et se déforme pour occuper le moins de place possible.
◆
Au XXe s., il prend un sens figuré et d'emploi littéraire : « réaction de défiance » (1918, Bourget). Conservant ses emplois en physiologie, il sert à désigner une maladie, la rétraction de l'aponévrose palmaire (1904), également appelée maladie de Dupuytren.
■
RÉTRACTIF, IVE adj., dérivé savant (1500) du latin retractum, qualifie d'abord au figuré ce qui détruit, puis (1537) ce qui cause une rétraction, concurrencé en ce sens par rétractile.
◈
RÉTRACTILE adj., dérivé savamment (1770) du latin
retractum, supin de
retrahere, qualifie d'abord ce qui produit une rétraction, sens abandonné, puis qualifie un organe qui a la propriété de se tirer en arrière ou en dedans, par exemple dans
ongles rétractiles des chats (1798). Dans ce sens, il a éliminé
rétractible, dérivé de
2 rétracter*. Il a développé le sens figuré de « qui se retire, fait se retirer par défiance » (fin
XIXe s.).
■
Son dérivé RÉTRACTILITÉ n. f. (1835) se dit surtout, dans une description didactique, de la propriété d'un organe, d'un tissu.
L +
RETRAIT n. m. est le participe passé substantivé (v. 1150) de l'ancien verbe RETRAIRE (1080) qui signifiait d'une part « raconter, relater », et d'autre part « contracter » (fin XIe s.), puis en jurisprudence « retirer (qqch.) » (v. 1155 se retraire ; déb. XIIIe s. retraire) et également « abandonner (un lieu) » (déb. XIIe s.). Ce verbe est issu par voie orale du latin retrahere « tirer en arrière, ramener, réduire », de re- (→ re-) marquant le mouvement en arrière et trahere « tirer, traîner » (→ traire). De même que le verbe simple traire, issu de trahere, a été évincé de l'usage courant par tirer, retraire a pâti de la concurrence de retirer* et ne se rencontre plus qu'à titre d'archaïsme littéraire et juridique. Les deux formes du participe passé retrait et retraite, se sont en revanche imposées, différenciant progressivement leurs sémantismes.
❏
Le mot, d'abord attesté dans les locutions
sans nul retrait (v. 1180) « (perdu) sans retour » et
avoir retrait vers qqn « s'en approcher pour s'adresser à lui », est également employé pour désigner l'action de se retirer, d'abandonner un lieu (v. 1180), et spécialement le reflux de la mer, du flot (v. 1160).
■
Le sens métonymique de « lieu où l'on se retire », emploi qui a disparu aux XVIIIe-XIXe s., avait donné lieu à des spécialisations comme « refuge » (v. 1175), « lieux d'aisances » (1387 ; on trouve encore en 1853 le terme chaise de retrait), et aussi « logis » (v. 1380), « lieu où l'on veut être seul » (1580) auquel correspond chambre de retrait (v. 1360) où retrait a le sens actif d'« action de se retirer ».
■
Le mot désigne aussi en droit l'action de retirer qqch., de se substituer à l'acquéreur d'un bien en lui remboursant le prix, les intérêts et les frais (1549).
■
La locution en retrait (1611) a d'abord le sens de « seul » et a été reprise pour « en arrière de l'alignement » (1893), d'où, au figuré, « moins avancé, pour un homme, un parti » (av. 1906), conformément à l'évolution générale du mot.
◆
Au XIXe s., en effet, retrait a étendu ses emplois, et signifie « action de se contracter, pour un corps » (1824, déjà assumé par le féminin retraite chez Buffon), voisin de rétraction et, au figuré, « fait de se replier sur soi-même comme pour se défendre » (1913).
◆
La locution retrait d'emploi (1870) désigne une sanction professionnelle. Dès lors, retrait tend à fonctionner comme substantif verbal de retirer, notamment dans un contexte administratif (retrait d'autorisation, de permis de conduire, etc.).
❏
RETRAITE n. f., substantivation du participe passé féminin de l'ancien verbe
retraire (v. 1185), est plus vivant en français moderne que
retrait.
■
Le mot désigne d'abord l'action de se retirer d'un lieu, le départ. Ce sens, sous la concurrence de retrait et de mots d'autres séries, notamment départ, a vieilli dans sa généralité, faire retraite « se retirer » (v. 1330) étant sorti de l'usage après le XVIIe siècle.
■
Cependant, en contexte militaire, retraite désigne encore l'action de se retirer du champ de bataille lorsqu'on ne peut s'y maintenir (v. 1213, sonner la retraite) [alors que se retirer est archaïque dans ce contexte], quelques locutions techniques comme battre en retraite (1671) passant dans l'usage courant au propre (av. 1861) et au figuré (1702). Par métonymie, le mot désigne la sonnerie du clairon qui annonçait le couvre-feu (XIVe s.), puis l'obligation pour les soldats de regagner leur casernement (v. 1580) et, de nos jours, la fin d'une manœuvre. Dans la marine, le coup de canon de retraite désigne un coup de canon à blanc que le navire tirait pour faire prendre le service de nuit (1686).
■
En vénerie, le mot s'emploie à la fois pour le rappel des chiens, et, par métonymie, la sonnerie de trompe qui l'annonce (1387-1389).
■
L'expression retraite aux flambeaux (1875) réalise à l'origine la même idée de « fait de se retirer » dans un contexte de parade militaire, puis celle de déplacement collectif de défilé.
■
À partir de 1580 (Montaigne), retraite exprime, sans idée de mouvement physique, l'action de se retirer de la vie professionnelle ou mondaine. Il est surtout employé avec divers sens métonymiques, désignant l'état d'une personne qui s'est retirée des affaires (1636), et, avec l'évolution des conditions de travail et les droits du salarié, la situation d'une personne qui ne travaille plus et touche une pension (1870), notamment dans en retraite et à la retraite (mettre, être mis à la retraite, partir en retraite). Par une autre extension métonymique, il désigne la pension versée à un salarié admis à cesser son activité, d'abord dans l'armée en parlant d'un officier (1752), puis d'un fonctionnaire (1768), enfin au XIXe et surtout au XXe s. de tous les salariés dans le système d'assurances sociales, puis de la Sécurité sociale (en France) ou d'assurances privées. Quelques locutions concernent l'organisation de ce service : caisse de retraite (1845), régime de retraite, etc. Le mot désigne par métonymie le temps de la retraite.
◆
En dehors de la vie professionnelle, le mot (une retraite) désigne une période pendant laquelle on s'éloigne de la vie mondaine pour la récollection spirituelle (v. 1673).
■
Retraite a eu un usage plus fréquent que retrait avec le sens de « lieu où l'on se retire », « lieu de refuge, abri » (v. 1460) et « lieu de repos » (v. 1580) ; il se disait également autrefois du repaire de certains animaux ; ces valeurs sont littéraires ou archaïques.
■
Une autre valeur « fait pour un corps de se retirer, de se rétracter, résultat de ce fait » (1314, en anatomie), supplantée par retrait, rétraction, a disparu, sauf en architecture à propos de la diminution d'épaisseur d'un mur (1481, pierre de retraite ; 1549).
◈
Les dérivés se rapportent au fait de se retirer d'une activité professionnelle ou de la vie mondaine.
■
1 RETRAITER v. tr. (1723), d'abord employé dans faire retraiter « mettre qqn à la retraite » avant de s'employer indépendamment (1819), a vieilli.
■
En revanche, le participe passé RETRAITÉ, ÉE, adjectivé et substantivé (1819), reste usuel pour désigner une personne mise à la retraite.
■
Le préfixé PRÉRETRAITE n. f. (1966), d'abord écrit pré-retraite, signifie « retraite anticipée » et par métonymie « allocation versée à cette occasion », SEMI-RETRAITE n. f. recouvrant la cessation partielle des activités.
■
On rencontre RETRAITANT, ANTE n. (1886) « personne qui fait une retraite pieuse ».
◈
2 RETRAITER v. intr. s'emploie au Québec pour « battre en retraite ».
❏ voir
1 et 2 RÉTRACTER.
RETRANCHER v. tr., d'abord retrenchier (v. 1131) et retrencher (v. 1175), est dérivé de trancher* avec le préfixe re-*, mais s'est détaché du verbe simple dans la plupart de ses valeurs.
❏
Le verbe signifie « ôter, supprimer », faisant passer au second plan ou en éliminant la valeur concrète de « trancher » qui le lie au verbe simple. Ce sens couvrait autrefois une aire d'emploi plus importante que de nos jours ; les emplois concrets ont décliné sous la concurrence de
couper ou de verbes plus précis (relatifs à la taille d'un arbre, à la résection d'un organe). L'emploi pour « faire des économies sur qqch., réduire une dépense », à la fois transitif (v. 1155) et pronominal (1656, Pascal), est sorti de l'usage tout comme son extension pour « réduire, borner à » (1658,
retrancher à).
◆
Il s'est maintenu dans la spécialisation mathématique de « soustraire (une valeur quantifiable, une valeur numérique) » (1907).
■
Le sens d'« exclure, éliminer » (1607), avec un nom de personne pour complément, équivalait spécialement à « excommunier » (1587, retrancher de l'Église) et dans retrancher qqn du nombre des vivants, à « faire mourir », emplois littéraires et archaïques.
◆
Le sens de « supprimer un énoncé » (1669) est en revanche usuel.
■
Dans un second axe de sens, retrancher est lié à l'emploi de tranchée en fortification ; il correspond à « munir une place de fossés, de fortifications pour arrêter l'ennemi et s'y abriter » (1611). Ce sens a disparu en emploi transitif, mais il correspond ensuite au pronominal se retrancher, « s'abriter derrière des fortifications » (1652) et, au figuré, « se retirer pour se protéger » (1674, Corneille) ; se retrancher dans, avec un nom abstrait pour complément, correspondant à « borner son attitude à » (1662).
■
Le sens réitératif de « trancher de nouveau », relevé une fois au XVe s., a été gêné par les sens concurrents, mais il demeure disponible.
❏
RETRANCHEMENT n. m. (v. 1190,
retrenchemant) a suivi la même évolution ; son sens de « suppression d'une partie d'un tout » a reculé en parlant d'une mesure financière (1523
retranchement de gages), d'une économie (v. 1614), et aussi de l'action d'exclure qqn de l'Église (1587) et de le mettre à mort. Il demeure vivant à propos de la suppression d'un énoncé (1579, de certaines syllabes dans un mot) et celle d'une chose quantifiable. Le sens local d'« espace retranché d'un plus grand » fait de retranchement un terme d'architecture strictement équivalant à
réduit (1664).
■
Le second sens, « ouvrage de défense » (1587), surtout au pluriel retranchements, a produit la valeur figurée de « moyen dont on use pour se protéger » (1610), en particulier dans une polémique (pousser qqn dans ses derniers retranchements ; dès 1688 au singulier).
■
Le participe passé RETRANCHÉ, ÉE est employé adjectivement dans le domaine militaire (positions retranchées), et avec la valeur figurée de « replié dans une attitude défensive ».
RETRANSMETTRE, RETRANSMISSION → TRANSMETTRE
RETRAVAILLER → TRAVAILLER
RÉTRÉCIR v., réfection (1549) de restroicir (XIVe s.), est formé de re-* à valeur intensive et de l'ancien verbe ÉTRÉCIR, (estrécir, déb. XIVe s.) qui, sous cette forme, est la variante de l'ancien français etritser, estrecier, en usage du XIe au XVIe s., signifiant « rendre étroit, devenir étroit, resserrer » et au figuré « presser, s'appliquer avec intensité contre ». Ce mot est issu d'un latin populaire °strictiare « rendre plus étroit », dérivé du latin classique strictus « serré, étroit » (→ strict), participe passé de stringere (→ étreindre). La forme renforcée rétrécir a éliminé progressivement étrécir, encore vivant au XVIIIe s. au sens propre de « rendre plus étroit » et au figuré « amoindrir, restreindre la part de » (av. 1704, Bossuet), également employé à la forme pronominale s'étrécir au propre (XIIIe s.) et au figuré (1721).
❏
Rétrécir signifie proprement « rendre plus étroit » d'où, au figuré « réduire l'activité de (qqn), la portée de (qqch.) » (1689). La forme pronominale se rétrécir correspond à « devenir plus étroit » (1596) et à « restreindre son activité, sa portée » (1689). Rétrécir s'emploie aussi comme intransitif, notamment à propos d'un vêtement qui devient plus étroit après le lavage (1718).
❏
RÉTRÉCISSEMENT n. m. (fin
XVIe s.), d'abord
restrécissement (1546), correspond par le sens au verbe. Il s'emploie techniquement en pathologie pour « diminution permanente du calibre d'un conduit, d'un orifice » (1832).
■
Le participe passé RÉTRÉCI, IE est adjectivé, au propre (fin XVIIe s.) et au figuré (1778) avec une valeur morale péjorative de « borné, étriqué ».
■
Tandis que l'adjectif simple RÉTRÉCISSABLE est resté rare.
■
Son antonyme préfixé IRRÉTRÉCISSABLE adj. (1845) se rencontre plus fréquemment au XXe s. (av. 1922) pour qualifier un tissu.
◆
Il a pour dérivé IRRÉTRÉCISSABILITÉ n. f. (v. 1950), terme technique.
RÉTRIBUER v. tr. est emprunté (1370) au latin retribuere « donner en échange, en retour, rendre, restituer, récompenser », de re- marquant le mouvement en retour (→ re-) et tribuere « répartir (entre les tribus), distribuer, accorder », mot dont un dérivé a donné tribut, de tribus (→ tribu).
❏
Le verbe s'est éloigné à partir du XVIe s. du sens originel d'emprunt, « donner en retour, indemniser, rendre », et ceci lorsqu'il a pris dans le style biblique le sens de « donner à (qqn) le salaire, la rémunération qu'il mérite », sous l'influence de rétribution, d'abord (1541, Calvin) dans rétribuer qqch. à qqn. Cette valeur ne s'est répandue dans l'usage courant qu'au XIXe s., le mot étant alors construit avec un complément désignant soit la personne, l'employé (1831), soit le travail, le service (1834). D'usage assez large, le mot peut aussi recouvrir le concept de « récompenser ».
❏
RÉTRIBUTION n. f. est emprunté (v. 1120) au dérivé bas latin
retributio, -onis « récompense, renvoi » et « action de rendre la pareille », « rétorsion ». Il remplace le dérivé français
rétribuement (v. 1350).
■
Le mot désigne concrètement la somme d'argent, l'avantage en nature donné pour un travail, un service rendu. Il renvoie également à une récompense en rapport avec une action (v. 1220), spécialement comme terme de dévotion (1694), par exemple dans rétribution céleste. Au XVIIe s., Capelain l'emploie au sens de « réciprocité » par latinisme ; Vaugelas, Alemand le censurèrent (« il peut être très utile et très significatif parmi les ecclésiastiques sans qu'on puisse inférer qu'il doive être mis par tout »).
◆
Sa spécialisation en commerce maritime pour le partage des frais et des avaries entre les assureurs et les assurés (1690) est sortie d'usage. Seul le sens premier est resté en usage.
RETRIEVER n. m. est un anglicisme du XIXe siècle (1854). En anglais, le mot correspond au verbe to retrieve « rapporter », lui-même pris à l'ancien français retrover (→ retrouver). Retriever équivaut au français retrouveur ; il désigne un chien d'arrêt qui rapporte le gibier.
1 RÉTRO → RÉTRO- (RÉTROVISEUR)
2 et 3 RÉTRO → RÉTROGRADE
RÉTRO-, premier élément de composés, est emprunté au latin retro, adverbe signifiant « en arrière », « derrière », « en retour » et « en sens contraire », employé depuis Apulée comme préposition, également au premier terme de composés et juxtaposés (voir ci-dessous). Retro est dérivé de re-, red- (→ re-) avec le même suffixe comparatif que intro « à l'intérieur » (→ introduire).
❏
Rétro-, productif aux XIXe et XXe s., exprime un mouvement spatial ou temporel d'avant en arrière. L'élément est productif en physiologie, avec rétrodéviation (d'un organe), rétroflexion, rétroposition, etc.
❏
Il entre notamment dans RÉTROVISEUR n. m. (1920), devenu usuel pour désigner le miroir permettant de regarder vers l'arrière, dans une voiture automobile. Il est quelquefois abrégé en 1 RÉTRO (1953), par exemple dans regarder dans le rétro. Il est homonyme de 2 et 3 rétro (→ rétrograde).
❏ voir
RÉTROACTIF, RÉTROCÉDER, RÉTROGRADE, RÉTROSPECTIF ; FUSÉE, POSITION ; RÉTROPROJECTEUR (art. PROJECTION).
RÉTROACTIF, IVE adj. est dérivé savamment, d'après actif* (1510), du latin retroactum, supin de retroagere « faire reculer, rétrograder », de retro- (→ rétro-) et de agere « mener, conduire » (→ agir).
❏
Cet adjectif didactique qualifie une chose, essentiellement une mesure légale (1510, clause rétroactive) qui exerce une action sur ce qui est antérieur.
❏
RÉTROACTIVEMENT adv., après une première attestation en 1603, a été repris au
XIXe s. (1842, Académie).
■
RÉTROACTIVITÉ n. f. (1801 dans non rétroactivité) a été formé sur le modèle d'activité*. NON-RÉTROACTIVITÉ n. f., attesté avant le mot simple, exprime le principe juridique selon lequel une loi, un texte légal, ne peut s'appliquer à des situations antérieures à sa promulgation.
◈
RÉTROACTION n. f. est dérivé savamment d'après
action* (v. 1550) du latin
retroactum.
◆
Le mot a désigné le fait d'accuser, en réaction à une accusation,
rétro- indiquant un mouvement en retour, sens sorti d'usage. Sous l'influence de
rétroactif, le nom désigne une action ayant un effet sur le passé (1750). Il s'emploie en sciences pour « action en retour », servant à rendre l'anglais
feed back dans les théories de l'information, son quasi-synonyme
réaction ayant une valeur affaiblie.
◈
RÉTROAGIR v. intr. est la francisation (1790, C. Desmoulins), d'après
agir*, du latin
retroagere, usage suscité par l'emploi politique de
rétroactif et
rétroaction avant et pendant la Révolution.
◆
Le verbe, qui signifie « avoir une force sur le passé », est plus didactique que
rétroaction et, surtout, que
rétroactif. Il correspond à « agir en retour ».
◈
RÉTROACTES n. m. pl. est employé en français de Belgique (attesté 1966) pour « événements antécédents ».
RÉTROCÉDER v. est emprunté (1534) au latin retrocedere « reculer, rétrograder », spécialisé en latin médiéval au sens juridique de « remettre (qqch.) à qqn par un nouveau don ». Le verbe est formé de retro- (→ rétro-) et cedere « aller, marcher » (→ céder).
❏
Le sens physique de « reculer » a été abandonné au profit de rétrograder, comme le sens correspondant de céder. Le verbe s'est spécialisé en droit pour « remettre à qqn par un nouvel acte (ce qu'il avait cédé auparavant) » (1611).
◆
Au XIXe s., il a pris le sens secondaire de « céder à un tiers (un bien acheté pour son usage personnel) » (1836) et a été repris en médecine d'après rétrocession (ci-dessous), s'employant intransitivement pour « régresser », en parlant d'un processus pathologique (1951).
❏
Le participe présent
RÉTROCÉDANT, ANTE a été adjectivé (
XIXe s.) en droit pour qualifier une personne qui rétrocède une chose à qqn, puis substantivé.
◈
RÉTROCESSION n. f. est emprunté (1530) au dérivé bas latin
retrocessio, -onis « situation en retrait », spécialisé en droit en latin médiéval.
■
Le sens physique de « marche en retrait, recul », correspondant à l'ancien sens du verbe, est sorti d'usage.
■
Comme rétrocéder, le mot s'est spécialisé en droit au sens du latin médiéval, « acte remettant à qqn ce qu'il avait cédé » (1640), signifiant par extension « transfert d'un bien acquis à la personne qui l'avait antérieurement cédé » (1904).
■
Depuis le XIXe s., il désigne en médecine le recul, la diminution de manifestations pathologiques (1845), se rapprochant sémantiquement de régression et de rétrogradation, et influençant le développement du verbe.
■
Les dérivés RÉTROCESSIONNAIRE adj. et n. (1829) et RÉTROCESSIF, IVE adj. (1842) sont deux termes didactiques employés en droit.
RÉTROGRADE adj. est un emprunt (v. 1350) au latin retrogradus « qui va en arrière, en sens inverse », de retrogradi « aller en arrière », lui-même de retro- « en arrière » (→ rétro-) et de gradi « marcher, s'avancer » (→ grade).
❏
Le mot est emprunté comme terme de poétique par Guillaume de Machaut dans l'expression
rime rétrograde, à propos d'une rime telle que le second vers doit commencer par le mot qui finit le premier et ainsi de suite.
◆
Parallèlement, il est repris en mathématiques avec le sens propre de « qui va en arrière, reprend en sens contraire le chemin parcouru » (v. 1370), qualifiant en astronomie le mouvement d'un astre se faisant en sens contraire du sens direct (
XIVe s.).
■
L'adjectif s'est répandu dans l'usage courant au concret (XVe s.), d'où mouvement rétrograde au billard (1875), et au figuré (1636), développant une nouvelle spécialisation en versification gréco-latine en parlant de vers pouvant se lire à rebours en inversant l'ordre des mots (1685, Furetière).
■
Le sens psychologique péjoratif, « opposé au progrès », est attesté pour la première fois pendant la Révolution (v. 1790) chez Mirabeau ; l'emploi substantivé (1842, Académie) est rare. De ce sens vient l'abréviation, 3 rétro (ci-dessous). Au XXe s., le mot est passé dans la terminologie médicale pour qualifier un type d'amnésie relative aux faits antérieurs à un moment donné (1932).
■
Sa substantivation pour le fait de revenir en arrière par un mouvement contraire (v. 1600) s'est spécialisée en mécanique (1765) et a disparu au bénéfice de rétrogradation (ci-dessous).
❏
Rétrograde n'a pas produit de dérivés, mais il a été abrégé à deux reprises.
2 RÉTRO est substantivé au billard (1861
in D. D. L.) par ellipse pour
mouvement rétrograde en parlant du coup consistant à frapper une bille pour qu'elle revienne en arrière. Au figuré,
un coup de rétro (1889 dans Huysmans) signifiait « choc en retour ».
■
3 RÉTRO s'emploie adjectivement (1973) en parlant d'une mode, d'un style qui imite le passé ou s'y réfère, d'une personne qui suit cette mode, adopte ce style. Le mot s'est répandu à partir de l'automne 1973 à propos de la mode vestimentaire ; en 1974, il a gagné tous les domaines de la vie culturelle (un film rétro, etc.) politique et sociale (y compris en emploi adverbial et substantivé) de sorte qu'il a bientôt été galvaudé et a repris chez certains la valeur péjorative qu'il avait éliminée par rapport à rétrograde.
◈
RÉTROGRADER v. est emprunté (fin
XIVe s.) au bas latin
retrogradare, variante du latin classique
retrogradi.
■
Le verbe a suivi la même évolution que rétrograde. Il est d'abord relevé au participe passé rétrogradé en poétique médiévale (fin XIVe s.), puis à l'actif en astronomie pour un astre qui traverse les constellations zodiacales dans le sens contraire à celui où les traverse le soleil (1488).
◆
Au XVIe s., il a élargi son aire d'emploi, au propre (1564) et au figuré, pour « revenir en arrière dans le temps, remonter à une période antérieure » (1589). Il s'emploie quelquefois avec la valeur dépréciative de « revenir à une situation plus ancienne jugée inférieure » (1690), spécialement « passer dans une situation hiérarchiquement inférieure » (1907) d'où, en construction transitive, « soumettre (qqn) à une telle punition » (1906).
◆
Il s'est spécialisé comme intransitif en parlant d'un véhicule qui passe à une vitesse inférieure (1964, Larousse), et, par métonymie, de son conducteur.
■
Sous l'influence de progression* et régression*, rétrograder a produit RÉTROGRESSION n. f. (1836) « mouvement en arrière, recul », qui fonctionne en concurrence avec rétrogradation.
■
RÉTROGRADATION n. f., emprunt (av. 1300) au dérivé bas latin retrogradatio, -onis « mouvement en arrière », s'emploie d'abord en astronomie. Le sens général, « action de revenir en arrière » (1550), semble avoir eu du mal à s'imposer, ce qui explique la création ultérieure de rétrogression.
◆
Le sens figuré (v. 1794) demeure plus rare que pour le verbe et l'adjectif.
◆
Au XXe s., le mot s'applique aussi à une sanction disciplinaire dans l'armée, dans l'administration (v. 1904) et, par extension, en sport.
RÉTROPROJECTEUR → PROJECTION