RICKETTSIE n. f., rickettsia en latin moderne (1916), est tiré du nom du biologiste Rickett (découverte datée de 1909) pour désigner une bactérie transmise à l'homme par les poux et les tiques.
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RICKETTSIOSE n. f. (1938) désigne la maladie infectieuse grave (typhus, fièvre pourprée) transmise par les rickettsies.
RICKSHAW n. m. est un emprunt (1898) à l'anglais (d'abord ricksho, rickshaw en 1889 chez Kipling), pris à un mot hindi, et désignant un véhicule léger à deux roues, tiré à bras, puis par bicyclette, destiné au transport des personnes, en Inde. Le rickshaw correspond au pousse-pousse, au cyclopousse d'Extrême-Orient.
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RICOCHET n. m. est tiré (1604) de l'expression la fable du ricochet (XIIIe s.) désignant une ritournelle de questions et de réponses, une chose inlassablement répétée, la variante reprise au XVIe s., chanson du ricochet (Rabelais III, 10) désignant un raisonnement sans fin. L'origine du mot ricochet est obscure : l'usage l'a rattaché à la famille de coq* par le diminutif cochet, d'où la fable du rouge cokelet (dialectal), appuyé par l'existence en italien de favola dell'uccellino : « fable de l'oiselet ». Le préfixe re- se retrouve dans ripoton « petit canard » et recoquet (en normand) « oiseau dernier né ».
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Selon P. Guiraud, le rapport de ricochet à coq n'est que de nature homonymique et favorisé par la présence fréquente du coq dans le type de chanson qui rebondit à chaque strophe sur un événement générateur d'un nouvel épisode (Cf. coq à l'âne). Selon lui, le ricochet, qui désigne un rebond, serait formé d'une racine rik- avec un suffixe -oche ou le verbe hocher* « vaciller » : cette base onomatopéique rikk- a donné des mots exprimant un petit mouvement, coup, bruit comme riquet « hoquet » (Saintonge), rikoter « roter » (Vendée), riqua « heurter de la tête en parlant des vaches » (Forez, Auvergne), roquer de même sens. Il s'agirait d'un composé verbal de riqu(er) « donner un petit coup » et hocher « vaciller, osciller ».
❏
Le mot désigne le rebond d'une pierre plate lancée obliquement sur la surface de l'eau, un corps en mouvement qui frappe un obstacle, notamment dans la locution
faire ricochet (1752) « rebondir sur un obstacle ».
Tir à ricochet (1870) se dit d'un tir inventé par Vauban dans lequel le projectile rencontre le sol sous un angle de chute assez faible pour rebondir.
■
L'emploi figuré du mot pour « effet indirect, conséquence d'un autre », se rencontre depuis le XVIIIe s., d'abord dans un ricochet de qqch. (1709) et par ricochets (1718).
❏
RICOCHER v. intr. est attesté dans les Mémoires de l'Académie des sciences (1807, second semestre) au sens de « faire ricochet, être envoyé dans une autre direction après avoir frappé un obstacle ». De ce sens procède un emploi figuré pour « être répercuté, venir par voie indirecte » (1841) puis « être réfléchi » (reflet, lumière) [XXe s.]. Le langage militaire emploie le mot avec le sens transitif de « faire un tir à ricochet contre » (1904).
RICOTTA n. f., emprunt à l'italien (1911), avait déjà été francisé en ricotte au XVIe siècle. Le mot italien correspond à recuit en français ; il désigne un fromage frais fabriqué à partir du petit-lait d'autres fromages, de vache ou de brebis, et très utilisé dans la cuisine italienne.
❏ voir
RIGOTTE.
RIC-RAC ou RIC-À-RAC, RIC-ET-RAC loc. adv., d'abord ric-à-rac (v.1450) puis riqueraque (1611) avant ric et rac (1807), est formé du radical onomatopéique rik- évoquant la petitesse (→ riquiqui) et de sa variante rak-.
❏
La locution, d'usage familier, a d'abord signifié « complètement ». La valeur actuelle (1807) est « avec une exactitude rigoureuse ou parcimonieuse » et « de façon juste et suffisante, sans plus ».
RICTUS n. m. est un emprunt (1821, J. de Maistre) au latin rictus, -us signifiant « ouverture de la bouche » ; « fait de montrer les dents », nom d'action qui correspond au verbe déponent ringi « grogner en montrant les dents », mot familier conservé dans quelques langues romanes sous la forme ringere. Ce verbe pourrait venir d'une racine indoeuropéenne °reng- que l'on retrouve dans le vieux slave ręgnąti « s'entrouvrir, s'ouvrir, se fendre », « ouvrir la bouche pour parler », le serbe régnuti « gronder », rezǎti « montrer les dents », le vieux slave rǫgŭ « moquerie ». Cette hypothèse est douteuse. Il s'agit en tout cas d'un mot expressif.
❏
Le mot désigne la contraction spasmodique des muscles peauciers de la face qui découvre les dents en donnant au visage l'air d'un rire crispé.
◆
Par métonymie, passant de l'usage médical à l'usage général, il désigne un rire forcé et grimaçant (1862, Hugo).
RIDELLE n. f., d'abord reidelle (XIIIe s.) puis ridelle (v. 1268), est emprunté au moyen haut allemand reidel « rondin » (allemand Reitel), de l'ancien haut allemand rîdan « tordre, tourner » (→ rider) qui appartient à une racine indoeuropéenne °ver- ou °wer- « tourner » (→ vers).
❏
Le mot désigne une balustrade légère, pleine ou à claire-voie, placée de chaque côté d'un véhicule découvert ou bâché pour maintenir la charge. Il s'applique aux branches de chêne employées par les charrons pour la fabrication des diverses parties d'un chariot (1771), comme la variante rivelle (1812).
? +
RIDER v. tr. est considéré comme emprunté (XIIe s.) à l'ancien haut allemand rîdan, anciennement wrîdan « tourner, tordre » reposant sur la racine que l'on a dans vers, vertige, l'adjectif ancien haut allemand reid « crépu, frisé » permettant assez difficilement de rendre compte du développement sémantique. P. Guiraud préfère y voir le représentant d'un gallo-roman °rigitare « faire des lignes », dérivé de riga « ligne » et « sillon », à côté de °rica « sillon » représenté par le français raie*. Cet étymologiste identifie les deux mots et propose de les faire venir de rigare (→ irriguer), d'où « creuser des rigoles ». On a aussi proposé °rugidare (de ruga « ride ») pour expliquer le sens de « plisser » et rigidare (de rigidus → rigide) pour « tendre une voile » ; mais les difficultés phonétiques sont sérieuses dans les deux cas.
❏
Le verbe a signifié : « froncer, plisser (un tissu, une chemise...) », d'abord en emploi actif, puis intransitif (1688) et pronominal,
se rider (1690) « se plisser, se froisser ». Le sens de « sillonner (la peau, surtout celle du visage) de plis » (
XIIIe s.) est devenu plus courant, également à la forme pronominale
se rider (1747) et au participe passé (ci-dessous).
■
Par extension, le verbe a pris le sens de « froncer en signe de mécontentement » (1549), de nos jours sorti d'usage. Par métaphore, rider signifie « marquer de stries ou d'ondulations (la surface de l'eau, d'une chose) » (1553, et au pronominal v. 1560 avec ellipse du pronom personnel réfléchi).
■
La spécialisation technique, en marine, pour « tendre (une manœuvre dormante) » (1572) s'explique traditionnellement par le fait que l'on tordait le cordage pour le raidir, ou, selon P. Guiraud, comme une résurgence du sens étymologique du mot (« ligne »). À ce sens correspond un emploi de ride et le dérivé ridoir (ci-dessous).
❏
RIDÉ, ÉE, le participe passé de
rider, est adjectivé (v. 1175) au sens de « plissé », sorti d'usage. L'adjectif signifie « marqué de sillons » (v. 1278), quelquefois avec la valeur caractérisante de « vieux, usé ». Par extension, le mot qualifie une surface, la peau d'un fruit marquée de stries (1538).
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Le déverbal
RIDE n. f. (
XIIIe s.) a eu la valeur active de « ce qui sert à plisser », en l'espèce, « fer à plisser ». Ce sens a disparu et le mot désigne, d'après
rider, un sillon plus ou moins marqué sur la peau (1488), évinçant les anciens doublets
ridure (1442) et
ridée n. f. (1530). La valeur sémantique est alors « ce qui est ridé, plissé ».
Ride a pris la valeur figurée de « signe d'usure, de vieillissement » (1524).
■
Il désigne aussi une strie, un sillon marquant une surface (av. 1525), spécialement, un pli à la surface d'une feuille, les anneaux laissés sur la tige par les écailles protectrices du bourgeon après leur chute (attesté XXe s.) ; le pluriel rides désigne en vénerie des marques sur les traces des sangliers âgés (1561). Au XVIIe s., le mot a développé le sens métaphorique de « petite ondulation à la surface de l'eau » (1690).
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À la suite du verbe rider, ride s'est spécialisé en marine pour désigner le petit cordage servant à faire effort pour tendre les haubans (1634). Par extension, il s'applique aussi à une ondulation de terrain (1865) et à un pli très petit sur une feuille de papier (1875).
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On a dérivé de ride le diminutif RIDULE n. f. (XXe s.), d'usage littéraire, indirectement attesté au XIXe s. par son dérivé riduler (1881, chez Huysmans).
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L'ancienne valeur de
rider « froncer » se réalise dans le dérivé
RIDEAU n. m. (1347) qui désigne une étoffe froncée ou pouvant former des plis, puis la pièce de tissu placée sur une ouverture, une fenêtre, parfois une porte. Le mot, complètement détaché de son origine, s'emploie seul et dans des syntagmes (
doubles rideaux, 1934 ;
tringle à rideaux...), ainsi que dans quelques locutions comme
tirer le rideau, les rideaux sur qqch. au figuré « laisser volontairement dans l'ombre » (av. 1616). La locution familière
grimper aux rideaux « s'exciter, jouir », en général avec des connotations sexuelles, n'a pas la même valeur que
grimper dans les rideaux, au Québec, « s'énerver, s'emballer ».
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Par extension, le mot sert à désigner, dans un théâtre, la toile qui descend pour cacher et découvrir la scène (1538), les parties de décor qui descendent pour former le fond de la scène (1761). Cet emploi, qui a modifié le sens de la locution tirer le rideau sur..., est l'occasion de locutions souvent figurées, comme lever le rideau, le rideau tombe (1690), se tenir derrière le rideau (1798) et au rideau ! (1875) puis rideau ! (milieu XXe s.) employé familièrement pour « c'est assez ! ». Plusieurs syntagmes différencient les types de rideaux de scène tels rideau à l'italienne, à la française, à l'allemande, à la grecque, à la guillotine, à la romaine.
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Rideau de fer, d'abord employé au théâtre (1893), désigne aussi la fermeture métallique de la devanture d'un magasin (1900) et est devenu, par métaphore, le nom de la ligne séparant en Europe les pays communistes des pays non communistes (Le Monde, 20 octobre 1945), traduisant alors l'expression anglaise iron curtain (1920) employée par Churchill dans un discours célèbre en 1946.
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Rideau ou rideau de cheminée désigne le tablier d'une cheminée (1870-1871).
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Rideau de... se dit aussi de tout ce qui forme écran et masque la vue ou est susceptible de s'opposer à une action : rideau de troupes désigne une ligne de défense mobile (fin XVIe s.). Par extension, rideau s'applique, au concret (1770) et au figuré (av. 1784), à des objets relativement plats qui forment écran, notamment dans rideau d'arbres (1755), rideau de flammes, rideau de fumée (1964).
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Au XIXe s., le mot s'emploie en langage technique à propos d'un talus établi au-dessus d'une route ou d'un canal (1870), de celui qui sépare les deux champs cultivés étagés sur le versant d'une vallée afin de retenir l'érosion (XXe s.) ; il se dit en sport de la ligne de défense que forment les avants ou les trois-quarts au rugby (1908).
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Rideau et mur-rideau, en architecture, désignent une construction rectangulaire longue et peu profonde.
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La locution familière tomber en rideau « en panne » (1926), employée dans l'argot des coureurs automobiles (milieu XXe s.), vient peut-être de l'image du rideau de fer, qui empêche l'entrée, ou du rideau de théâtre, qui tombe.
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D'autres dérivés de
rider ont gardé un rapport plus étroit avec le verbe.
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RIDEMENT n. m. (1520) est peu usité.
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RIDAIN n. m., d'abord ridein (1679) puis ridain (1829), est un mot technique désignant certains plis de terrain au fond de la mer.
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RIDAGE n. m. (1831) sert de substantif d'action à rider dans sa spécialisation en marine. Il a été repris avec une autre valeur technique, désignant le défaut apparu dans une peinture appliquée en couche trop épaisse et dû à un séchage non uniforme (1947).
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RIDOIR n. m. (1859) est le nom technique d'un appareil à poulie, à crémaillère ou à vis qui, sur un navire, permet de tendre (de rider) un cordage ou une chaîne.
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DÉRIDER v. tr. (1538) « enlever les rides » a bientôt pris sa valeur figurée de « rendre le sourire » (1553) d'où, positivement « égayer » (1829), seule courante en français moderne. La forme pronominale
se dérider (
XVIIe s.) « se rasséréner » est plus fréquente encore.
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Le verbe a produit DÉRIDEMENT n. m. (1538) et DÉRIDEUR, EUSE n. (1860). Toute la série, vivante au figuré, s'est détachée de son origine.
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ANTIRIDE ou
ANTIRIDES adj. s'emploie depuis 1917 à propos d'une substance qui prévient l'apparition de rides, notamment sur le visage, ou en atténue la marque.
RIDER adj., emprunt à l'anglais (1866), allusion à l'élégance des cavaliers (riders) mondains, a signifié dans un usage à la fois populaire et de mode « élégant », jusqu'aux années 1930. Un rider s'est dit (1928) d'un costume d'homme élégant. Ces mots étaient prononcés à la française, comme beaucoup d'emprunts faits au XIXe s. et dans la première moitié du XXe s.
1 RIDICULE adj. et n. m. est emprunté (v. 1500) au latin ridiculus, dérivé de ridere (→ rire) et signifiant en bonne part et activement (« qui cherche à provoquer le rire ») « drôle, plaisant » (substantivé pour « bouffon »), et en mauvaise part et passivement (« qui suscite involontairement le rire ») « absurde, extravagant », Cf. la double valeur de risible en français.
❏
Par rapport à
risible, le mot n'a gardé que la valeur dépréciative de « qui excite le rire, la dérision », perdant celle d'« amusant, suscitant volontairement le rire » (av. 1696, La Bruyère). Par extension,
ridicule qualifie une personne déraisonnable, absurde (1580,
se rendre ridicule) et au
XIXe s. (1865), surtout en parlant d'une somme d'argent, une chose insignifiante, dérisoire.
■
Le ridicule désigne le caractère risible d'une personne, d'une chose, le côté par lequel elle suscite la moquerie (av. 1654) et un ridicule, un travers, une manière d'agir prêtant à rire (v. 1500), surtout précédé d'un déterminant défini ; on parle aussi des ridicules de qqn pour ce qui, dans un comportement, est susceptible d'être moqué (av. 1678, La Rochefoucauld). Dans les deux cas, la valeur neutre du mot, sensible dans tel ou tel emploi au XVIIe s., a quasiment disparu.
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Les locutions tourner en ridicule (1657, Pascal) puis se donner le ridicule de (1747) sont restées usuelles.
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L'emploi substantivé pour désigner une personne digne de moquerie (1662, Molière) est sorti d'usage, de même que celui qui exprime l'action, la manière de tourner qqn en dérision (1683).
❏
RIDICULEMENT adv. (1552), « d'une manière ridicule, qui prête à rire », a pris au
XXe s. la valeur de « à un degré infime » (ridicule tellement il est infime) [1908].
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RIDICULISER v. tr. (av. 1648), également à la forme pronominale se ridiculiser, avec une valeur réfléchie (1668), a eu du mal à s'imposer au XVIIe s. ; si Ménage le trouve bon, Richelet ne le tolère que dans le style bas et certains le réservent à l'usage familier. Il est devenu courant au XVIIIe s. (1772) et a définitivement supplanté les formations antérieures, ridiculer (1565), ridiculariser (1666).
■
RIDICULITÉ n. f. (1664) s'est dit en particulier d'une chose ridicule, d'une parole par laquelle on se rend ridicule et, en général, du défaut, du caractère de ce qui est ridicule (1675). Le mot a été critiqué dès le XVIIe s. ; on lui a préféré l'emploi substantivé de ridicule. Il est devenu archaïque.
◈
2 RIDICULE n. m., « petit sac », est l'altération populaire (1798) de
réticule* par attraction et jeu de mots avec
1 ridicule. Ce mot s'est employé au
XIXe et au début du
XXe siècle.
■
Enfin un mot-valise a été formé par Edmond Rostand sur ridicule et cocu : RIDICOCULISER v. tr. « rendre ridicule en faisant cocu ».
RIEL n. m. est un emprunt (1964) à un mot khmer, désignant l'unité monétaire du Cambodge.
RIEMANNIEN, IENNE adj. est dérivé (1903) du nom du mathématicien allemand Bernhardt Riemann, l'un des fondateurs des géométries non-euclidiennes, autour des années 1920, pour qualifier ses théories mathématiques.
L
RIEN pron. indéf., n. m. et adv., d'abord
ren (v. 980), puis
rien (
XIe-
XIIe s.), est issu par évolution orale du latin
rem, accusatif de
res, rei n. f. Ce mot désigne originellement le bien, la possession, la propriété, sens qu'il conserve dans des expressions juridiques ou fixées par l'usage comme
res publica (→ république), habere rem « avoir du bien ». Par suite, il se dit d'un intérêt à débattre, d'une affaire à traiter ou à discuter, spécialement en justice, jusqu'à signifier « affaire » dans le sens moderne du mot français.
Res, désignant des biens concrets, a pu servir à désigner ce qui existe, la chose, la réalité, ainsi que les actions accomplies, puis les choses, par opposition aux personnes ; par affaiblissement de sens, il a pris le sens vague et général dévolu aujourd'hui en français à
chose. Il a ainsi pu devenir un substitut poli pour des mots tabous. Joint à un adjectif, il équivaut souvent à un neutre, mais subit la concurrence de
causa (→ cause, chose), qui était arrivé à une signification identique.
■
Étymologiquement, le nominatif res a été fait sur l'accusatif rem, comme dies « jour » sur diem (→ jour), l'importance particulière de ce cas ressortant de sa conservation dans le français rien. Cette forme rem répond au védique rā̆m (attesté une seule fois) qui a entraîné l'accusatif pluriel rā́ḥ et le composé çatá-rā « qui ont cent richesses » (au duel). Le mot indo-iranien signifie « richesse » ; le sanskrit revā́n, l'avestique raevā́ signifient « riche ». Dans le domaine indoeuropéen occidental, en celtique, le moyen gallois a rai (dissyllabique) « biens, richesses ». Ce sens est le seul qui se retrouve en indo-iranien mais la valeur plus générale, « affaire », existe déjà en italique (ombrien ri esune « affaires religieuses »). Il s'agit de termes archaïques propres à l'italo-celtique et à l'indo-iranien.
❏
Dans quelques cas,
rien est employé sans
ne (v. 1131) dans quelques phrases interrogatives ou dubitatives, après
sans, sans que, avant de, avant que, trop... pour, avec le sens latin de « quelque chose ». Cet emploi est en relation avec
une rien n. f. « une chose » (v. 1050), encore en usage au
XVIe siècle.
■
Mais l'usage majoritaire, dès les premiers textes, utilise rien comme auxiliaire négatif de ne dans rien... ne et ne... rien (v. 980). Aux XVIe et XVIIe s., ne... rien sert à former quelques locutions usuelles : ne... rien que « ne... que » (1532) s'est éteint après l'époque classique, mais ne... rien moins que (1534) s'est maintenu, le sens initial de « ne... pas du tout » s'inversant pour le sens actuel d'« exactement, bel et bien » (1683). Cette idée est exprimée de manière plus explicite dans ne... rien de moins que (1683). D'anciennes locutions, pour riens (1422) et ne... rien du monde (1541) se sont modifiées en pour rien au monde (1690) et ne... rien au monde (1669), tandis que le langage familier emploie ne... rien du tout (1559) et ne... rien de rien (1690) pour la même idée : « absolument rien ». Ces renforcements s'emploient aussi comme pronom. Depuis l'ancien français, ne... rien s'emploie dans de nombreuses locutions avec quelques verbes : il n'en est rien « ce n'est pas vrai » (v. 1360) ; ce n'est rien (1538) « c'est sans importance », n'être rien, en parlant d'une personne, « n'avoir aucune valeur propre » (1541), puis aussi « n'avoir aucune fonction particulière » (déb. XVIIIe s.) et, en parlant d'une chose, « être insignifiant » (av. 1549). Au XVIIe s., on employait n'être de rien à qqn au sens de « ne pas l'intéresser » (1675) ; n'être rien à qqn (1680) se dit encore avec le même sens et la nuance secondaire de « n'être nullement lié à qqn » (par la parenté ou autrement). Comme si de rien n'était est attesté depuis le XVIIe s. (1658). Depuis le XIIIe s., ne... rien se combine avec avoir dans ne rien avoir « être sans fortune », puis selon le contexte, également « n'avoir aucune maladie » et « n'avoir subi aucun dommage ». N'avoir rien de s'emploie suivi d'un adjectif (1674), et longtemps après, suivi d'un nom (1923) avec le sens de « ne pas être particulièrement, pas du tout ». N'avoir rien contre (qqn, qqch.) apparaît au XXe siècle.
■
Plusieurs locutions sont formées avec le verbe faire (Cf. aussi fainéant) : ne faire semblant de rien (v. 1460) « prétendre ne pas remarquer qqch. » ; ne rien faire « être paresseux » (1559) et, avec un sujet désignant une chose, « n'avoir aucun effet sur qqn » (1875). L'usage oral emploie ça ne fait rien (1870) ; au XXe s. il n'y a rien à faire se dit tantôt pour « c'est impossible », tantôt pour « c'est inévitable » et n'en avoir rien à faire, à foutre, etc. est l'équivalent désinvolte de « n'être pas intéressé par qqch., qqn » ; cet emploi surtout oral fait disparaître le ne : j'en ai rien à faire, (foutre, branler, cirer...).
■
Ne... rien s'emploie aussi dans des locutions verbales, comme ne servir à rien (1553) qui a évincé ne servir de rien (déb. XVe s.), ne rien dire qui vaille (à qqn) [1668], ne compter à rien (1642) ou ne compter rien (1665) « négliger, ne faire aucun cas de », sortis d'usage. Le mot s'emploie aussi dans ne tenir à rien (1690), parler pour ne rien dire (1719), ne ressembler à rien (1758) et ne rien dire à qqn « ne pas faire envie à qqn » (1870), puis également « ne lui rappeler aucun souvenir » (XXe s.). La locution impersonnelle il n'y a rien à dire « c'est correct » semble récente (milieu XXe s.).
Le pronom indéfini
rien est employé dès le
XIIe s. avec ellipse de
ne et avec une valeur négative pour « aucune chose », d'abord dans la locution
pour rien (
por rien, v. 1131) « sans aucun résultat », seule locution ancienne encore en usage, et qui a développé d'autres sens : « gratuitement » (fin
XVIe s.) et « pour une somme modique » (1690).
■
À partir du XVIe s., rien s'emploie absolument dans des phrases comportant l'ellipse de plusieurs mots et sert à former de nombreuses locutions : rien que (v. 1550, Ronsard) « seulement », de rien « sans importance » (1559). L'emploi de rien de suivi d'un adjectif ou d'un adverbe (1580) est concurrencé par un emploi sans de : rien mieux, etc. (av. 1549) sorti d'usage vers la fin du XVIIe siècle. Quelques locutions vivantes au XVIIe s., comme homme de rien « homme de basse condition » (1648), et devenir à rien « perdre toute réalité » (1674, Mme de Sévigné) ou « n'avoir plus qu'une valeur insignifiante » (1687), sont archaïques. Dans un système comparatif, la locution comme rien a signifié « en aucune façon » (1541) ; elle a été reprise au XXe s. au sens de « facilement ». On dit aussi mieux que rien (1456-1457) et moins que rien, en moins de rien (1583). Compter pour rien « négliger » (1656), et, familièrement, rien que ça ! soulignant ironiquement l'importance de qqch. (fin XVIIe s.) s'emploient encore de nos jours. Parmi les expressions plus récentes, on peut noter (c'est) tout ou rien, (1833), de rien, employé par politesse en réponse à un remerciement (1784), sortir de rien (1935) « être d'une origine humble », reprise de venir de rien (1694), et aussi ce n'est pas rien (1928).
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Rien, dans l'usage populaire et oral, s'est employé depuis les années 1860 et jusqu'aux années 1930 environ, comme adverbe, devant un adjectif positif, bath, chouette, etc. au sens de « très ; bien » (elle est rien gironde). Cet emploi demeure courant dans plusieurs régions, notamment en Normandie (t'es rien bête !).
L'emploi substantivé de rien n. m. (v. 1360), influencé par les nombreux emplois négatifs du pronom, a éliminé au XVIe s. l'ancien nom féminin une rien « chose ». Cet emploi procède de la valeur négative bien établie du pronom et renvoie à une chose sans importance, minime, à la fois au singulier (un rien) et au pluriel (des riens, 1667) ; d'abord seul (v. 1537 un rien), puis dans un, une rien du tout (av. 1695), et les variantes un rien qui vaille (1655), un rien de propre (sorties d'usage), il se dit d'une personne méprisable, de basse condition. Un petit rien désigne une chose insignifiante et un, une rien du tout une personne qu'on méprise. La locution comme un rien vient probablement de comme rien ; en un rien de temps (1831) prolonge l'ancienne variante elliptique en un rien (fin XVIe s.) de même sens. Le mot offre un raccourci de l'évolution du sens étymologique de « chose » renversé en « néant » (v. 1530), dans le style littéraire ou didactique.
Rien est employé adverbialement dans la locution en rien (v. 1360) « aucunement », seul de manière antiphrastique dans le langage populaire avec la valeur intensive de « très » (1875) et dans la locution un rien « un peu » (1544).
❏ voir
RÉBUS, RÉEL, RÉIFIER, RÉPUBLIQUE, REVENDICATION.
RIESLING n. m. est emprunté (1832) à l'allemand Riesling, d'abord attesté sous la forme Russlinge (1490), Rissling (1565), d'origine obscure.
❏
Le mot désigne un cépage blanc cultivé en Alsace, Moselle, dans la région du Rhin et en Autriche. Par métonymie, il désigne le vin blanc très estimé issu de ce cépage (1926, peut-être déjà en 1852).
RIF n. m., d'abord riffe (1598) et rifle (1612), repris en riff (1821) et rif (1867), est la variante de l'argot ruffe « érésipèle » (1455 chez les Coquillards), « feu » (1545). Ce dernier est emprunté au fourbesque (argot italien ancien) rufo « rouge » qui représente le latin rufus « rouge, roux, rougeâtre », mot rare, populaire ou technique, évité par la prose classique, et probablement dialectal. Rufus, comme une autre forme dialectale, robus, est apparenté à ruber « rouge » et au dérivé rubeus (→ rouge).
❏
Le mot est un nom argotique du feu ; une chanson du XVIIIe s. emploie l'expression au coin du riffle ; avec la même idée d'immédiateté que dans avoir le feu aux trousses (et, négativement il n'y a pas le feu), de rif correspond à « rapidement » (1821). En 1914, le mot s'est appliqué au feu de la zone des combats désignant aussi la zone des combats elle-même (monter au rif) et le combat, puis la bagarre (surtout écrit rif, 1914). Il est devenu, par métonymie, le nom de l'arme à feu (emplois vieillis).
❏
Le dérivé
RIFFAUDER v. tr. (1598) a perdu le sens de « se chauffer » pour « incendier, brûler » (1628) d'où « tuer avec une arme à feu » (1844) ; il est sorti d'usage.
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Le type rifle a donné RIFLETTE n. f. (1915), diminutif désignant la zone des combats puis la guerre.
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Rif a produit RIFIFI n. m. (1942 à Nantes, selon le Breton, en 1960), mot argotique rare pour « bagarre », popularisé par le titre du roman de A. le Breton Du rififi chez les hommes (1953), cet auteur en faisant même une marque déposée. Comme grisbi « argent », rififi est plus un mot d'argot littéraire qu'un usage spontané.
RIFF n. m. est un emprunt (attesté en 1946) à l'anglais des États-Unis (où le mot est relevé en 1938) pour désigner en jazz une courte phrase musicale mélodiquement et rythmiquement simple, répétée par l'orchestre. Le mot, en jazz, plus tard dans le rock, est né dans le contexte des grands orchestres de style « swing ».
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1 RIFLARD n. m., d'abord riflart (1450), puis riflard (1622), est dérivé du verbe rifler (v. 1170) « écorcher légèrement », puis « frôler, effleurer » (v. 1213), lui-même d'origine incertaine. Wartburg en fait un emprunt à l'ancien haut allemand riffilôn « frotter, déchirer en frottant ». Cependant, pour le verbe anglais apparenté to rifle, le dictionnaire d'Oxford, sans élucider le français rifler, évoque un rapprochement avec rafler*, érafler* et l'anglais rafle « cohue, foule » (1486), qui serait lui-même repris de l'ancien français raffle, rafle dans des expressions comme rifle ou rafle « n'importe quoi », ne rifle ne rafle « rien du tout », dont la structure d'alternance vocalique est expressive.
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Riflard, mot technique, désigne d'abord la laine la plus grosse et la plus longue d'une toison, sens qui pourrait correspondre à une métonymie de l'action d'arracher à ce qui doit être arraché, tondu.
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En revanche, les autres acceptions se rattachent clairement au verbe : « grand rabot de menuisier pour dégrossir le bois » (1622), « ciseau des maçons servant à ébarber des ouvrages de plâtre » (1835), et « grosse lime pour dégrossir les métaux » (1845).
RIFFAIN, AINE adj. est dérivé en français de Rif, nom arabe, emprunté à l'espagnol riba (→ rive), d'une chaîne de montagnes, au nord du Maroc, zone difficilement pénétrable, peuplée de semi-nomades. Les tribus riffaines, conduites par Abd-el-Krim, opposèrent une résistance extrême aux troupes franco-espagnoles, lors de la guerre du Rif (1921-1926).
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RIFLER v. tr. « limer, égaliser avec un riflard » (1765) est plutôt un dérivé de riflard que la continuation de l'ancien verbe, qui avait donné (XVIe s.) RIFLOIR n. m., autre nom technique de diverses sortes de limes.
❏ voir
RIFLE.
2 RIFLARD n. m. est l'emploi comme nom commun (1825) de Riflard, nom d'un personnage de La Petite Ville, comédie de L. B. Picard (1801) qui portait un énorme parapluie (Cf. le développement analogue de pépin).
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Ce nom populaire du parapluie s'applique surtout à un parapluie de grande taille, avec des connotations ironiques (parapluie de paysan, etc.). Puis il désigne tout parapluie. Le mot a vieilli.