RISBERME n. m. est un emprunt du XVIIIe siècle (1752) au néerlandais rijsberme, de rijs « branchages » et berme « talus » (→ berme). Ce terme technique de fortifications (XVIIIe s.), puis de travaux publics, désigne un talus de protection, à l'origine recouvert de fascines, à la base des piles d'un pont, d'une jetée.
RISIBLE adj. est emprunté (1370) au bas latin risibilis « capable de rire (caractère opposant l'homme aux animaux) ou de faire rire », du latin classique risum, supin de ridere (→ rire).
❏  Le sens de « propre à faire rire », qui s'entendait spécialement en moyen français avec la nuance de « qui porte à la gaieté, à la joie », a développé la nuance dépréciative de « digne de moquerie » (1611). Son évolution est analogue à celle de ridicule*, qui insiste davantage sur l'aspect objectif déclenchant la moquerie, tandis que risible insiste sur le comique involontaire. En outre, risible est senti comme très proche du verbe rire (un quasi-dérivé). Le sens actif de « qui a la faculté de rire » (1550), repris du mot latin et vivant jusqu'au XVIIIe s., est sorti d'usage au XIXe siècle.
❏  Risible a produit RISIBILITÉ n. f. (XVIe s.), lequel, après avoir désigné la faculté de rire, a pris son sens actuel de « caractère de ce qui prête à rire » (1845), et RISIBLEMENT adv. (1655, Molière).
RISORIUS n. m. est un emprunt (1765 dans l'Encyclopédie) au latin des anatomistes risorius, créé par Santorini (1724), pris au latin risorius « riant », dérivé de ridere (→ rire). C'est le nom d'un muscle des commissures des lèvres, et qui contribue à l'expression du rire.
RISORGIMENTO n. m., mot italien signifiant « résurrection », s'emploie en histoire à propos du mouvement idéologique et politique, en Italie, qui aboutit à la formation de l'unité nationale, de 1859 à 1870.
RISOTTO → RIZ
RISQUE n. m. est emprunté (1557) à l'ancien italien risco (aujourd'hui plus souvent rischio), qui représente le latin médiéval risicus ou riscus dans un texte de 1359 cité par Du Cange. Certains rapprochent ce mot du latin resecare « enlever en coupant » (→ réséquer), par l'intermédiaire d'un latin populaire °resecum « ce qui coupe » et, de là, « écueil », puis « risque que court une marchandise en mer ». Bien que ce développement sémantique soit partiellement corroboré par l'espagnol riesgo « rocher découpé », d'où « écueil », et que le mot latin médiéval corresponde bien à l'idée d'un danger encouru en mer par une marchandise, P. Guiraud estime qu'« il n'y a pas le moindre commencement de preuves à ce roman nautique » ; selon lui, le mot viendrait du roman °rixicare, élargissement du latin classique rixare « se quereller », de rixa (→ rixe) par un développement menant des valeurs de « combat » et de « résistance » à celle de « danger ». Le mot est d'abord féminin, le genre masculin (1657) l'emportant au XVIIe siècle.
❏  Le mot désigne un danger, un inconvénient plus ou moins prévisible. Il a donné les locutions courir un risque (1690, antérieurement courir risque 1596), à tout risque (v. 1770 ; 1656 au féminin), au risque de (1694), aux risques et périls de (1769), et, au XXe s., prendre un risque, des risques.
■  Il a été repris en droit pour désigner l'éventualité d'un événement futur, soit incertain, soit d'un terme indéterminé qui causera un dommage (1690), seul et dans risque de guerre (1875), risque professionnel (1912), risque social, risque de mer (tous deux dans les dictionnaires en 1936). Il s'emploie spécialement en termes d'assurances (1842) et, en droit civil, se réfère au fondement de certains cas de responsabilité qui permettent à l'individu de se retourner contre l'auteur d'un dommage subi sans avoir à prouver la faute de celui-ci (1966).
❏  Le dénominatif RISQUER v. tr., attesté une première fois (1577) au pronominal se risquer « s'exposer à une chance douteuse », signifie « exposer (qqch.) à un danger, à un inconvénient possible, à l'éventualité d'une perte », absolument (1596) ou avec un complément indiquant l'objet concerné (1604). De ce sens procède la locution proverbiale qui ne risque rien n'a rien (1798).
■  Par extension, le verbe exprime l'idée de « tenter une chose douteuse » (1798), réalisée dès l'époque classique dans risquer le tout pour le tout (1694) et dans la locution d'usage familier risquer le paquet (1694). Il induit l'idée de « s'exposer à une chose fâcheuse » (av. 1673), également dans la construction indirecte risquer de (1694) que certains grammairiens limitent à l'expression d'un sens défavorable, bien qu'on rencontre dans l'usage spontané des phrases comme il risque de réussir, d'y arriver. Dans un contexte pénal il peut avoir la valeur d'« être passible d'un châtiment » (1887, Zola).
■  Par affaiblissement, il exprime l'idée de « s'enhardir à exprimer qqch. à tout hasard », avec un complément désignant une parole (1771), et de « s'enhardir à regarder en s'exposant à être découvert » avec un complément désignant un regard (1862, risquer son regard). La forme pronominale se risquer signifie d'abord (fin XVIe s.) « s'aventurer dans une situation à l'issue aléatoire » puis aussi « se rendre physiquement dans un lieu où l'on s'expose à un danger » (1885). Elle se construit indirectement avec à et infinitif pour « se résoudre à faire qqch. malgré d'éventuelles conséquences fâcheuses » (XXe s.).
■  Le participe passé RISQUÉ, ÉE est adjectivé (1690), aussi pour caractériser ce qui est inconvenant (1743) et, plus généralement, ce qui comporte des risques (1875).
■  RISQUABLE adj., dérivé de risquer au sens de « où il y a des risques à courir » (1722), se rencontre encore quelquefois pour « qui peut être risqué » (1788).
■  RISQUE-TOUT n. m. inv. (1863) caractérise une personne audacieuse jusqu'à l'imprudence.
■  RISQUEUR, EUSE n. et adj. (1916) est quelquefois concurrencé par RISQUEUX, EUSE n. et adj. (1771), lequel a perdu le sens de « périlleux » pour « qui prend des risques » (1947, Morand).
L 1 RISSOLE n. f. (v. 1240), d'abord rousole (v. 1185), sous l'influence de roux*, puis rusole (v. 1200) et roissole (v. 1223), est issu d'un latin populaire °russeola, féminin substantivé de russeolus « rougeâtre », lui-même du latin impérial russeus « rouge foncé » (→ roux). Le mot latin qui signifie « préparation rougeâtre », est devenu le nom d'une préparation culinaire cuite à grande friture en raison de la couleur de celle-ci (Cf. l'expression de cuisine moderne faire un roux).
❏  Le mot a désigné, selon les époques et les régions (aujourd'hui, surtout dans l'est de la France, à partir du Jura vers le sud, et dans la zone occitane), diverses préparations de pâte frite, contenant souvent de la viande. Ses anciens emplois figurés, dans les locutions dormir sur des roissoles « mener une vie oisive » et querre le moule as roissoles (chercher le moule aux rissoles) « baguenauder », du fait que les rissoles ne sont pas des pâtisseries moulées, ont disparu en français classique. Le sens actuel est « préparation de viande hachée cuite dans un chausson de pâte (brisée ou feuilletée) ». Le mot peut s'appliquer à une préparation analogue, sucrée.
❏  RISSOLER v. (1549), dérivé de rissole, signifie « exposer une préparation culinaire quelconque à feu vif de manière à en dorer et griller la surface ». Il s'emploie absolument avec un nom d'aliment pour sujet, d'abord au participe passé (1690) puis à l'infinitif (1870) avec le sens de « cuire de cette façon ».
■  RISSOLETTE n. f., diminutif (1803) de rissole désignant une rôtie de pain couverte de viande hachée et passée dans le four, n'est plus en usage.
2 RISSOLE n. f. est un emprunt du français méridional à l'occitan risola, issu (avec féminisation) du latin retiolum, diminutif de rete « filet » (→ rets). Le mot désigne, dans l'usage des pêcheurs de la Méditerranée, un filet à petites mailles utilisé notamment pour la prise des anchois.
RISTOURNE n. f., d'abord restorne (1705), puis ristourne (1783), est formé de ri-, variante italianisante de re-* et de l'ancien substantif extorne « action de reporter d'un compte à l'autre pour réparer une erreur » (attesté en 1723). Ce dernier est la francisation savante par le préfixe ex- de l'italien storno « annulation d'un contrat », de s (du latin ex-) et de tornare, représentant le latin tornare (→ tourner). L'adjonction du préfixe ri- vient du besoin de souligner l'idée de répétition. Un emprunt direct à l'italien ristorno n'est pas vraisemblable, ce mot signifiant seulement « rebondissement ».
❏  Le mot s'est éloigné du sens initial de « report », sorti d'usage, et s'est spécialisé en droit maritime, où il désigne l'annulation d'un contrat d'assurance maritime au profit de l'assureur (1755), puis la diminution sur la somme pour laquelle un navire a été assuré quand cette somme excède la valeur du chargement (1835). En droit commercial, il désigne l'attribution en fin d'année, à l'adhérent d'une société d'assurance mutuelle, d'une partie de sa cotisation lorsque le montant des cotisations a dépassé les engagements de la société (1904).
■  Il s'est répandu dans l'usage courant à propos de bonifications compensant en principe un trop-perçu compris dans une facture, devenant par extension et par le sens de « commission versée à un intermédiaire » (1918), un quasi-synonyme de « réduction » (1923) ; ce sens implique un rapport avec retour. Il est senti comme familier quand il n'est pas technique.
❏  RISTOURNER v. tr., modification analogique (1829) de restorner (1704), a suivi le même développement, perdant le sens initial de comptabilité pour devenir un terme de droit maritime (1755), puis un terme de droit commercial (1938). Dans l'usage courant, il équivaut à « donner, rendre (une somme) par une réduction » (1953).
RISTRETTE n. m. est la francisation de l'italien ristretto, dans caffe ristretto « café serré », d'un verbe italien de la famille du latin strictus (→ strict). Le mot est courant en français de Suisse, aussi RISTRETTO pour un café à l'italienne, très serré. Il est attesté à partir des années 1970, et a dû se répandre dans les cantons francophones par le Tessin, italophone.
RITAL → ITALIEN
RITE n. m., d'abord rit (v. 1395), puis rite (1676), est emprunté au latin ritus, terme religieux désignant la cérémonie, le culte, également employé avec le sens plus général d'« usage, coutume », souvent joint ou substitué à mos, moris (→ mœurs). Ce mot ancien, appartenant surtout à la langue écrite, est la forme à élargissement en i de la racine de armus « haut du bras, épaule » réservé en principe à un animal (→ ars, articuler) ; ce i est conservé dans le grec ari-thmos « nombre » (→ arithmétique), dans nê-ri-tos « sans nombre », dans le vieil irlandais rím « compte » et le gallois rhif « nombre ». Pour le sens, on est passé de la valeur concrète, « articulation de l'épaule », à celle de « découpage, articulation, subdivision » par une évolution analogue à celle qui mène de la valeur anatomique de membre aux emplois figurés. Quant à rite, la valeur religieuse existe dès le sanskrit r̥tám, avestique as̆əm où l'idée d'articulation correspond à celle d'organisation, d'où « ordre conforme à ce qu'exige la religion ». Le suffixe -tu du nom d'action ritus, -us correspond au sanskrit ṛtuh « moment déterminé » ; il se retrouve dans le nom pluriel artus, artuum « articulations » (→ article). L'idée de base est celle de « justesse, exactitude ». Sous une forme aberrante, ritus est un exemple des concordances du vocabulaire religieux observées entre l'Est (indo-iranien) et l'Ouest (italo-celtique) du domaine indoeuropéen.
❏  Le mot, pris en moyen français au sens général, surtout dans la langue juridique, de « coutume, mœurs », sorti d'usage, a été réintroduit avec son sens religieux de « cérémonial, culte » (1535), quelquefois sous la graphie rit (1669) qui s'est maintenue assez longtemps dans l'usage religieux quand on parle de l'ensemble de la liturgie d'une confession (rit catholique, grec, etc.).
■  Par métonymie, rite désigne une cérémonie réglée ou un geste prescrit par la liturgie d'une religion (fin XVIIe s., Bossuet). Le sens s'est étendu à l'ensemble des prescriptions réglant les pratiques et cérémonies d'une association organisée de manière analogue à une Église (1875) et, au figuré, à toute pratique réglée, invariable (1875), renouant avec le sens général de « coutume ». Il a servi, par métonymie, à désigner le degré de la solennité d'une fête religieuse (rite double, rite simple). ◆  Repris en ethnologie, rite désigne les pratiques réglées de caractère sacré ou symbolique, spécialement, dans rites de passage (1909, Van Gennep) « ensemble des pratiques destinées à préparer ou accompagner le passage d'une personne d'un état défini à un autre, dans un groupe social » ; ou encore rites d'initiation.
❏  Les dérivés sont tous formés savamment sur le latin ritualis.
■  RITUEL, ELLE adj. et n. m., d'abord ritual (av. 1553, Rabelais) puis rituel (1636), est emprunté au dérivé latin ritualis « propre au rite, relatif au rite », spécialement au pluriel dans le syntagme rituales libri « livres traitant des rites ».
■  Le mot qualifie ce qui concerne les rites religieux. Il est bientôt substantivé au masculin, d'abord sous la forme ritual (1605), à propos d'un livre liturgique contenant l'ordre et la forme des cérémonies religieuses. L'emploi de l'adjectif pour « qui est fait selon l'usage » (1669) est sorti d'usage après l'époque classique. ◆  Le rituel s'applique aussi par métonymie à l'ensemble des prescriptions à observer au cours des cérémonies du culte (1864) et se répand dans l'usage général avec le sens figuré de « principes, règles que l'on suit » (1778, Voltaire). Ce sens a réagi sur celui de l'adjectif, qui qualifie ce qui est réglé comme par un rite (XXe s.) et, par extension, signifie « précis, exact », concurremment aux valeurs religieuses de « prescrit par les rites religieux » (1935) et « réglé par les coutumes religieuses » (v. 1950, Malraux). ◆  L'adverbe RITUELLEMENT (1910, Péguy), absent des dictionnaires du XIXe s., est probablement plus ancien que cette attestation.
■  RITUALISTE n. et adj., dérivé savant (1704) du latin ritualis a désigné l'auteur traitant des différents rites, puis a été repris (1870) sous l'influence de ritualisme à propos d'un fidèle de l'Église anglicane accordant une grande importance aux rites et cérémonies, se disant par extension d'autres religions. L'adjectif sert à qualifier ce qui est relatif au ritualisme et aux pratiques rituelles (v. 1950).
■  RITUALISME n. m., autre dérivé savant (1829) du latin ritualis, a désigné le système, l'ensemble des rites d'une Église, puis le strict respect des rites (1829). Le mot s'est appliqué spécialement aux anglicans puseyistes et à tous ceux qui cherchent à augmenter l'importance dans le culte des rites et des liturgies (1875).
■  RITUALISER v. tr. (1909, ritualisé) est dérivé savamment du latin ritualis, avec le sens didactique de « codifier par des rites ». ◆  Il a servi à former RITUALISATION n. f. (1912) ; son participe passé RITUALISÉ, ÉE est adjectivé en éthologie lorsqu'un comportement animal emprunte une séquence de formes à un autre contexte (1975). Cette valeur fonctionne aussi pour le verbe, le nom et pour l'adjectif rituel.
RITOURNELLE n. f. (1671), avec la variante disparue ritornelle (1670), est emprunté à l'italien ritornella, terme de musique dérivé de ritorno « retour », déverbal de ritornare « retourner ». Ce verbe est formé de ri-, marquant le mouvement en arrière (du latin re-, → re-), et de tornare (→ tourner). La graphie moderne est une francisation d'après tourner.
❏  Le mot désigne le court motif instrumental qui précède ou suit chaque couplet d'une chanson, chaque reprise d'une danse et, très tôt, s'emploie au figuré, comme refrain, dont le sémantisme est analogue, à propos de ce que l'on répète sans cesse (1671, Mme de Sévigné). ◆  Par métonymie, il sert à désigner un air, une chanson comportant des strophes identiques (1852, Gautier). C'est aujourd'hui la valeur dominante du mot, qui évoque une chanson simple et naïve de genre traditionnel.
RIVAL, ALE, AUX n. et adj. est emprunté (XVe s.) au latin rivalis « de ruisseau, relatif à la rivière », de rivus « ruisseau » (→ ru) ; le mot, surtout employé comme substantif au pluriel rivales « les riverains », parce qu'« ils tirent leur eau du même cours d'eau », en est venu, par une métaphore du latin rustique à désigner deux personnes concurrentes en amour. Le français a aussi employé corrival (1546, Rabelais aux XVIe et XVIIe s.), emprunt au bas latin corrivalis « concurrent avec d'autres », de cum « avec » (→ co-) et rivalis. Cette forme a été éliminée par rival.
■  L'origine du latin rivus remonte à la racine indoeuropéenne °rei- (peut-être liée à celle de oriri « sourdre, s'élancer hors de » → origine), laquelle est attestée par le sanskrit, le vieux slave, avec l'idée de base de « faire courir, couler », « mettre en mouvement ». Rivus est sans rapport avec ripa (→ rive).
❏  Le mot désigne d'abord, comme en latin, la personne qui dispute à une autre l'amour de qqn. Par extension, il se dit en général d'une personne qui prétend en même temps que d'autres aux avantages, aux biens qu'une seule personne peut obtenir et qui s'oppose à autrui pour les disputer (1604) et aussi, sans idée de compétition, de celui qui dispute le premier rang, sans rival correspondant à « inégalable » (1866).
■  Le nom est adjectivé pour qualifier celui qui est opposé à un autre pour lui disputer un avantage (1690) et, par métonymie, ce qui est inspiré par le désir du même objet (1830).
❏  Le dérivé RIVALISER v. intr. s'est d'abord employé transitivement (1750) avec un complément désignant la personne rivale, puis intransitivement (1777). Sans idée d'opposition active, le verbe signifie « faire preuve d'émulation » (1807).
RIVALITÉ n. f. est emprunté (1656, Molière) au dérivé latin rivalitas, -atis désignant la concurrence entre deux femmes, puis entre deux personnes antagonistes en amour, la jalousie.
■  D'abord employé spécialement dans un contexte amoureux, aussi bien en parlant d'hommes que de femmes, le mot désigne en général toute situation de compétition pour le premier rang (1694). Il s'emploie aussi avec une valeur particularisante (une / des rivalités) [déb. XIXe s.].
❏ voir DÉRIVER, RU, RUISSEAU.
L + RIVE n. f. est issu (1080) du latin ripa, désignant une bande de terre bordant un cours d'eau, plus rarement la côte de la mer, également employé au figuré. Ce mot est peut-être à rapprocher du grec ereipein (aoriste eripein) « tomber, s'abattre », eripnê « pente, côte, versant » et du vieil islandais rifa « déchirer ». Il semble n'y avoir aucun rapport entre cette famille et celle de rivus « rivière » (→ rival, ru).
❏  Rive désigne une bande de terre qui borde un cours d'eau, un lac, un étang. En ancien et moyen français, il se disait aussi du bord de la mer (déb. XIIe s.) avant de céder ce sens à rivage après le XVIIe siècle. ◆  Rive s'appliquait aussi à la margelle d'un puits (fin XIIe s.), d'une fontaine (1549). ◆  Le sens moderne a donné, en poésie classique, l'expression la rive infernale (1674, Racine) désignant les enfers de la mythologie antique, parcourus par le fleuve Styx, avec les variantes rive sombre (av. 1741), rive fatale (1875).
■  Par métonymie, rive désigne le territoire de part et d'autre d'un fleuve (1797), le quartier d'une ville qui borde un fleuve (1834), rive droite, rive gauche (1870) s'appliquant spécialement aux quartiers situés à Paris de part et d'autre de la Seine, rive gauche devenant le symbole de la vie intellectuelle et artistique (1864), employé à ce titre aussi comme adjectif. ◆  Au Québec, rive nord, rive sud, celles du Saint-Laurent.
■  Une extension plus large du pluriel rives au sens de « contrée, pays » relève d'un usage poétique vieilli (1678).
■  Le sens général de « limite » (XIIe s.), « limite d'un objet » (v. 1314), est sorti d'usage en dehors du langage technique ; rive désigne ainsi le bord d'un four, d'où pain de rive (1549) pour « pain bien cuit et doré de tous côtés, étant placé au bord (la rive) d'un four » ; cet emploi est archaïque. Rive se dit du bord longitudinal d'un produit plat (1723), la locution poutre de rive (1904) désignant chacune des poutres longitudinales d'un pont soutenant le tablier. Rive sert aussi à désigner la bordure en terre cuite couronnant le faîte d'un toit ou d'un mur (1930) et, en général, ce qui limite un pan de couverture sur ses côtés (milieu XXe s.). Ces emplois, détachés de leur origine, sont en général pris pour des métaphores du sens usuel.
❏  RIVAGE n. m. (fin XIe s.), dérivé de rive avec le suffixe -age à valeur collective, désigne la partie de la terre qui borde une mer ou, plus rarement, un lac. Avant la fin du XVIIe s., il est mal distingué de rive et s'applique à la berge d'un cours d'eau (1409), spécialement dans la poésie classique où les locutions rivages des morts, du Cocyte (1677, Racine), noir rivage (1694) et rivage du Styx (1893) désignent, comme rive, les Enfers de la mythologie antique.
■  Le sens métonymique de « contrée, pays » (1184-1187) d'usage littéraire, est sorti d'usage, en français classique, tout comme le sens juridique de « droit payé sur les marchandises chargées ou déchargées sur la rive » (1246 à Compiègne). Les définitions juridique (1681) et géographique du mot renvoient spécialement à la zone de terre soumise à l'action des vagues et, le cas échéant, des marées (l'estran).
■  Enfin, comme rive, rivage a eu en moyen français (v. 1354) la valeur étymologique de « bord, lisière (par exemple, d'un bois) » qui a disparu en français classique.
2 DÉRIVER v. tr., d'abord desriver (v. 1223) « écarter du bois flottant d'une rive », est archaïque.
❏ voir ARRIVER, RIVER, RIVIÈRE.
RIVER v. tr. est, selon Wartburg, qui écarte l'emprunt à des verbes comme le moyen néerlandais wrîven et le provençal ribar, un dérivé (v. 1160) de rive* au sens de « bord », dans des emplois techniques.
❏  Le verbe signifie « attacher solidement (qqn) avec des pièces de métal (fers) » et « assembler (deux ou plusieurs éléments, anneaux de chaîne par exemple) » par écrasement d'une partie de l'un dans une partie de l'autre et, notamment (XIIIe s.), « rabattre et aplatir à coups de marteau (la pointe, d'un clou, d'une goupille) » sur la surface d'où elle émerge. Le rapport avec la notion étymologique de « bord » vient de ce que le clou est rabattu au marteau sur les bords de l'élément qu'il traverse. Le verbe est par ailleurs employé en Normandie et dans le Centre pour « replier sous le matelas les couvertures d'un lit », d'après un sens de rive « bord (du lit) ».
■  Avec changement de complément, il s'est employé dans la locution métaphorique river les fers, les chaînes de qqn « rendre son esclavage plus assuré » (fin XVIIIe s.). Du sens technique concret vient (fin XVe s.) la locution river son clou à qqn qui correspond à peu près à clouer le bec, d'usage familier. River le bec à qqn s'est dit en moyen français. ◆  Ultérieurement, le verbe se répand au figuré dans l'usage commun pour « assujettir, attacher, immobiliser » (1721), réactivant le sens ancien, « maintenir fermement, maîtriser » (v. 1270), surtout au passif être rivé. ◆  D'autres emplois techniques apparaissent par la suite, river se disant pour « assembler au moyen de clous, chevilles, goupilles que l'on rive » (1433) et « fixer, assujettir à demeure deux éléments » (1904). ◆  Par une métaphore transparente, river s'est employé en argot ancien (1493 chez les Coquillards) pour « posséder sexuellement » ; d'où le verbe argotique RIVANCHER, attesté de 1628 à la seconde moitié du XIXe siècle.
❏  Le dérivé en -et RIVET n. m. (1260) existe dès l'ancien français, désignant une broche métallique servant à assembler deux pièces, constituée par une tige cylindrique munie d'une tête et dont l'autre extrémité est aplatie après sa mise en place. Terme technique usuel, il entre dans des syntagmes comme rivet explosif, tubulaire, fendu, foré (XXe s.). Le mot désigne la pointe du clou broché dans le sabot du cheval, qui est rivée sur la paroi (1680). D'autres acceptions manifestant l'idée de « bord, bordure » entre le XIIIe et le XVIIIe s. sont sorties d'usage.
■  À son tour, rivet a produit RIVETIER n. m. (1762), ancien nom d'un outil servant à river des clous, conservé comme nom de l'ouvrier fabriquant des corps de rivets à la machine (XXe s.), et RIVETER v. tr. « fixer au moyen de rivets » (1877, Journal officiel).
■  Ce verbe a produit les dérivés RIVETAGE n. m. (1877) et RIVETEUSE n. f. (1900) « machine pour poser des rivets », puis aussi au masculin RIVETEUR « ouvrier qui rivette » (1927), plus fréquent que le nom dérivé du verbe river, RIVEUSE n. f. (1904), antérieurement « ouvrière qui pose des rivets » (1877).
RIVURE n. f., réfection (1694) de riveure (1480), est le nom de la broche métallique entrant dans la charnière des fiches. ◆  Le mot désigne en général le résultat de l'opération consistant à river deux éléments (1611) et, concrètement, la partie de la tige métallique écrasée afin d'assurer sa liaison avec une autre pièce (1870).
■  RIVOIR n. m. est enregistré par l'Encyclopédie (1769) comme désignation du marteau dont on se sert pour river, dans le cas où l'on n'a pas à former de tête. On a dit aussi rivois (1870). Rivoir sert aussi à désigner la machine à river (1904), en concurrence avec le féminin RIVOIRE (1964).
RIVERAIN → RIVIÈRE
L RIVIÈRE n. f., d'abord écrit riviere (fin XIe s., Gloses de Raschi) puis surtout rivaire (v. 1100), river et rivere (v. 1112) en ancien français, est issu d'un latin populaire riparia, qui devait désigner une région proche d'un cours d'eau ou de la mer. Ce mot, attesté par de nombreux toponymes dès le VIIIe s. et employé au sens de « littoral » (951), « bord d'un fleuve », est le féminin substantivé de l'adjectif latin classique riparius « qui se trouve, se tient sur les rives », de ripa (→ rive). L'espagnol ribera signifie « rive, rivage », l'ancien provençal ribiera désigne à la fois la rive et la rivière ainsi que l'italien du Nord riviera, emprunté au français (Cf. ci-dessous riviera).
❏  L'emploi pour « ruisseau » semble le plus ancien ; il annonce le sens de « cours d'eau de faible ou moyenne importance » (v. 1138) dont l'usage imprécis semble exclure les plus petits cours d'eau (nommés ruisseaux) mais peut ou non en inclure de plus importants, l'opposition avec fleuve, en géographie étant d'une autre nature, et plus tardive. Le mot est employé dans oiseau (v. 1354), poisson de rivière (1875), alors opposé à de mer ou de lac.
■  Le sens étymologique de « bords d'un cours d'eau ou de la mer » (v. 1112), où rivière est synonyme de rive* et de rivage dans un emploi ancien, n'existe plus que dialectalement, spécialement avec le sens de « vallée » (1870) dans le Sud-Ouest et dans quelques expressions ; veau de rivière (1670, Molière) ne se dit plus, mais vins de rivière (1694), pour des vins faits avec le raisin récolté en Champagne sur les bords de la Marne, est toujours en usage.
■  Au sens de « cours d'eau », rivière s'emploie en héraldique pour désigner un meuble (figure du blason) ayant l'aspect d'une face ondée (1671).
■  Par métaphore il peut désigner avec un complément une nappe allongée (1705) et s'emploie au figuré dans rivière de diamants (1747) ou rivière (1830) « collier de diamants montés en chatons ».
■  Par extension, il désigne un cours d'eau souterrain et, dans fausse rivière (1904), la partie d'un cours d'eau isolée du cours principal et résultant de la rupture d'un méandre. ◆  Par analogie, il est employé pour désigner le fossé rempli d'eau que doit sauter le cheval, dans un parcours à obstacles (1855).
❏  Le dérivé RIVIÉRETTE n. f., dont la forme actuelle (v. 1250) a remplacé riverete (déb. XIIIe s.) « petite rivière », est à peu près inusité.
■  RIVIÉREUX, EUSE adj., d'abord rivereux (v. 1354), est un terme technique de fauconnerie qualifiant un oiseau dressé à voler sur les rivières ; on dit aussi rivereux (XXe s.).
RIVERAIN, AINE n. et adj., d'abord riveran (1532) par emprunt à l'ancien lyonnais reveyran « batelier », dérivé de rivière, a été reformé sur rivière sous sa forme actuelle avec les sens propre et analogique qui retrouvent ceux du latin rivalis, lequel a donné rival*, à savoir « personne qui vit au bord d'un cours d'eau » (1690). Il s'emploie adjectivement pour qualifier ce qui se trouve sur la rive et, par analogie (1732), sur le bord (d'une route, d'un bois, d'une autre propriété).
■  En terme administratif, il s'applique aux habitants des maisons qui bordent une voie urbaine. Il a pour dérivé RIVERAINETÉ n. f. (1898), d'usage juridique pour la qualité de riverain telle que la reconnaît la loi.
RIVIERA n. f., emprunt (XXe s.) à l'italien riviera « cours d'eau » (déb. XIVe s.) et « rive » (av. 1350), dans un emploi spécialisé comme nom propre, « côte allant de La Spezia à Nice », désigne aussi en français cette côte, et notamment la partie française, formant une partie de ce qui est nommé Côte d'Azur. Le sens correspond à l'ancienne valeur de rivière « rive, rivage » (voir ci-dessus).
RIVULAIRE adj. et n. f. est la francisation du latin rivularis, dérivé savant de rivulus « ruisseau », pour qualifier les plantes qui croissent dans le lit ou sur les rives des petits cours d'eau. Comme nom (1812), le mot désigne une algue d'eau douce (Cyanophycées), type d'une famille.
❏ voir RIVAL, RU, RUISSEAU.
RIXDALE n. f. est l'adaptation, sous les formes successives richetale (1619), richedale (1626), rixdalle (1677), du néerlandais rijksdaalder, rijksdaler, nom de monnaie composé de rijk « empire, royaume » (→ reichstag, riche) et daalder « thaler » (→ thaler). On relève riches talers en 1607 en Suisse dans le canton de Neuchâtel, richstaller en 1637 dans le canton de Berne, emprunts à une forme alémanique de l'allemand Reichstaler.
❏  Le mot désigne une monnaie d'argent qui, avec différentes valeurs, avait cours dans les pays du Nord et en Europe centrale.
RIXE n. f. est emprunté (1477) au latin rixa « dispute, différend, contestation », mot d'origine inconnue. À titre d'hypothèse, si l'on postule que la formation comporte un s « désidératif », on évoque un rapprochement avec le grec ereikein « briser, déchirer » et le sanskrit ric̩ati « il arrache », rikháti « il déchire », ainsi qu'avec les formes nominales du latin rima « fente » (→ rime, selon P. Guiraud) et du vieil haut allemand riga « rangée, ligne » (→ rime, selon l'hypothèse de Wartburg).
❏  Le mot signifie « dispute violente », « bagarre ». Il est soit littéraire ou journalistique, soit administratif.
❏ voir RISQUE (selon P. Guiraud).