ROCADE → ROQUER
? ROCAMBOLESQUE adj. est dérivé (fin XIXe s.) de Rocambole, nom du héros d'une trentaine d'œuvres du romancier français Pierre Alexis Ponson du Terrail (1829-1871) publiées en feuilleton de 1859 à 1870, relatant des aventures aussi incroyables qu'animées. Le nom du personnage est peut-être repris du nom commun ROCAMBOLE n. f. (1680), nom d'une espèce d'ail, autrefois employé au figuré pour « attrait piquant » (1705), qui serait alors une allusion au caractère de la narration. Mais cette hypothèse est douteuse. Quoi qu'il en soit, rocambole, qui avait pris au XIXe s. le sens péjoratif de « chose sans valeur » (XIXe s.), est d'origine obscure : on y a vu l'emprunt de l'allemand Rockenbolle, formé de Rocken « quenouille » (→ 2 rochet) ou forme ancienne de Roggen « seigle » et de Bolle « oignon ». D'autres étymologistes, notamment les auteurs de l'Oxford Dictionary, font du mot allemand dialectal et de l'anglais rocambole (1698) des emprunts au français.
❏  Le mot qualifie une aventure pleine de rebondissements extravagants, par allusion certaine aux œuvres de Ponson du Terrail.
ROCELLE n. f. est emprunté (1816) au latin botanique de Linné (1798) lichen rocella, qui a donné le catalan orcella, d'où en français orseille. Le terme désigne le lichen qui fournit la teinture appelée orseille.
L + ROCHE n. f. est issu (v. 980) du latin médiéval rocca « roche, rocher » (VIIIe s.) d'un type prélatin °rocca d'origine inconnue ; l'italien rocca et l'espagnol roca remontent au même mot.
❏  Roche désigne couramment un gros bloc de matière minérale dure, spécialement envisagée comme élément constituant de l'écorce terrestre, et, par métonymie (la roche), un sol formé de matière minérale très dure (v. 1120) ; il se dit aussi d'une pierre utilisée comme matériau de construction (v. 1178), emploi disparu, et d'un écueil à fleur d'eau (XIIIe s.). Les sens métonymiques de « caverne, grotte » (v. 1210), « château fort bâti sur une roche » (v. 1245) et « carrière de pierres » (1269) ne se sont pas maintenus après le moyen français.
■  La locution de roche qualifie une chose qui sort de la roche, comme dans la locution eau de roche (1690), au figuré clair comme de l'eau de roche (1690), « clair, évident », et une espèce vivant près des roches, des rochers, dans coq de roche, poisson de roche. De roche se dit aussi au figuré d'une chose ferme, inébranlable moralement (Malherbe) et s'emploie comme symbole de la dureté, de l'implacabilité (1633, Corneille).
■  Par spécialisation, le mot désigne le minerai contenant des pierres fines (1690), en particulier dans de (la) vieille roche avec le sens figuré d'« ancien et éprouvé » (1658), emploi archaïque, « de vieille souche » à propos d'un noble (1718).
■  Le mot a désigné concrètement le borax impur (1690) et roche à feu (1691, roche de feu) une composition incendiaire en pyrotechnie, emplois sortis d'usage.
■  Au XVIIIe s., il reçoit une définition scientifique, « assemblage de minéraux définis par leur composition chimique » (1749, Buffon), servant à former de nombreux syntagmes didactiques. D'autres sens et expressions, pierre de roche (1835), moellon de roche, sont techniques. Par allusion à la masse pierreuse, on a baptisé fromage de roche un fromage rond d'un kilo fabriqué à Roanne (1723).
■  Le sens de « petit morceau de pierre », usuel en français du Canada (lancer, tirer des roches), ne correspond plus en français de France, où l'on parle de caillou, de pierre, qu'à un emploi technique, pour « morceau de charbon de plus de quatre-vingts millimètres » (milieu XXe s.). ◆  En français de l'île Maurice, on appelle roche à laver la pierre sur laquelle on fait la lessive, et roche à cari (à curry, roche cari) par calque du créole roskari, la pierre plate sur laquelle on écrase les épices. Le baba-roche cari est le rouleau de pierre dont on se sert alors.
❏  1 ROCHER n. m. (v. 1138) désignant une grande masse de matière minérale dure, est un quasi-synonyme de roche mais indique davantage une forme déterminée, souvent abrupte, pointue et souvent considérée selon sa matière ou sa paroi (1764). Il est plus courant que roche dans la langue parlée. ◆  Il partage avec roche le sens d'« écueil, récif » (1580) et s'emploie aussi avec des valeurs symboliques ; le style religieux biblique lui donnait le sens d'« abri, refuge » (1560), la langue courante le prend comme symbole de l'insensibilité (déb. XVIIe s., Malherbe) puis de la fermeté et de la constance (av. 1558).
■  Le mot est employé en décoration pour désigner (1599) un ouvrage d'orfèvrerie en vogue au XVIIe s., dont la forme et la décoration rappelaient l'apparence d'un rocher, aussi dans la locution rocher d'argent (1599) sortie d'usage.
■  En architecture, rocher sert à désigner un massif de pierre imitant un rocher naturel d'où rocher factice (1690), rocher artificiel (1870), et une fontaine en forme de rocher (1694, rocher d'eau).
■  Par analogie, on a nommé rocher de confiture (1690) expression sortie d'usage, ou rocher (1904) une petite pâtisserie légère en forme de rocher.
■  Parmi les sens spéciaux répertoriés au XVIIIe s., plusieurs, « fourneau d'alchimiste » (1721), « mousse s'étendant sur la bière lorsqu'elle commence à fermenter » (1765), ont disparu. Cependant, rocher désigne encore une coquille du genre murex (1736) et, en anatomie, la partie massive de l'os temporal, en forme de pyramide quadrangulaire (1765).
❏  ROCHIER n. m. est la substantivation d'après roche (1560) de l'ancien adjectif roquier (1300) dérivé de roc dans colomb (pigeon) roquier. ◆  Ce mot régional désigne un poisson de rocher, spécialement un squale des côtes de France, et pour l'émerillon, surtout le vieux mâle (1776).
ROC n. m., attesté vers 1470 mais probablement antérieur si l'on en juge par les dérivés rocaille (ci-dessous) et roquier (ci-dessus), est la forme masculine tirée de roche, désignant un bloc ou une masse de pierre dure formant une éminence, ainsi que la matière rocheuse. Le mot, qui selon Condillac « marque plus la dureté et la stabilité de la pierre » (Dictionnaire de synonymes), est plus littéraire que rocher et indique souvent un soubassement. Comme ces deux derniers, il symbolise la dureté insensible ou l'extrême fermeté (1626).
■  Il a pour dérivé ROCAILLE n. f., d'abord roquailles au pluriel (v. 1360) puis, sous l'influence de roche, roichaille (1373), rochaille (1611) formes abandonnées au profit de rocalle (1636) et rocaille (1648). ◆  Ce mot désigne un amas de petites pierres sur le sol, un terrain rempli de petits cailloux et de débris minéraux ; il s'est appliqué en Normandie aux coquillages et crustacés pêchés dans les rochers (1373). ◆  Au XVIIe s., dans le vocabulaire des arts décoratifs, il désigne un morceau de minéral, un caillou de forme tourmentée, comme la perle baroque*, utilisé avec des coquillages pour construire des grottes artificielles, des décorations de jardins (1636). ◆  Par métonymie, le mot désigne l'ouvrage construit avec ces matériaux (1669), servant à caractériser le genre décoratif baroque qui s'est épanoui sous la Régence et le règne de Louis XV, caractérisé par des lignes contournées évoquant la forme des rochers et coquilles (1845) ; Cf. rococo, ci-dessous. Une rocaille désigne une pièce fabriquée dans ce style (1842). Le mot est aussi adjectivé (style rocaille, 1842 ; meuble rocaille, 1846).
■  Rocaille a produit plusieurs dérivés. ROCAILLEUR n. m. (1665) est le nom technique du cimentier spécialisé dans la confection de rocailles, puis (XXe s.) de l'artisan ou artiste fabriquant des objets de style rocaille.
■  ROCAILLEUX, EUSE adj. (1692) qualifie un lieu couvert de petites pierres, plein d'aspérités, au figuré (1788) une œuvre, un style manquant de grâce et d'harmonie, puis (XXe s.) des sons rudes qui heurtent l'oreille.
■  ROCAILLER v. tr. est d'abord attesté sous la forme du participe passé rocaillé (1765) en parlant d'une fontaine faite avec de la rocaille, puis à l'actif (1875), pour « faire (une ornementation) en rocaille ». ◆  Ce verbe a produit ROCAILLAGE n. m. (1875).
ROCOCO n. m. et adj. est une formation plaisante née dans les ateliers pour se moquer du style décoratif rocaille, lequel, comme de nombreux éléments artistiques de l'Ancien Régime (Cf. trumeau, perruque), sert à qualifier ce qui est vieillot, désuet, ridicule (1825, Stendhal). Le mot, à l'origine péjoratif, a cessé comme baroque* de l'être en histoire de l'art (1828), où il est réemprunté à l'allemand qui distingue plus nettement barok, terme qui s'applique à un style pratiqué du XVIe au XVIIIe s., et rokoko, pour le style du XVIIIe siècle.
■  Rococo est resté péjoratif en français dans l'usage courant, appliqué par extension à une recherche artistique ou littéraire qui tombe dans la mièvrerie (1846, Baudelaire), à un genre ou à un objet passé de mode (1834). ◆  On rencontre au XIXe s. les dérivés plaisants ROCOCOTERIE n. f. (1839), ROCOCOTE adj. f. (1845), ROCOCOTIER, IÈRE adj. et n. (1858), ROCOCOTER v. intr. (1864), témoins disparus de l'engouement pour le style rococo.
ROCHEUX, EUSE adj. (1549), d'abord employé pour qualifier ce qui est situé sur un rocher puis avec le sens actuel de « couvert de roches apparentes » (1598), est resté rare jusqu'au XIXe s. où il se diffuse dans ce second sens ; il est admis tardivement par l'Académie (1878). Il qualifie, en géologie et couramment, ce qui est formé de roche (déb. XXe s.).
■  2 ROCHER v. est un verbe technique qui procède (1622) du sens spécial de roche « borax », et signifie « saupoudrer (un métal à souder) de borax ». Il s'emploie intransitivement en parlant de l'argent fondu qui se refroidit en se couvrant d'excroissances (1872).
■  ROCHASSIER, IÈRE n. (1904), terme d'alpinisme dérivé de roche mais lié par le sens à rocher, signifie « personne qui fait du rocher », par opposition à glaciériste.
Par préfixation en dé- indiquant l'éloignement, un verbe desrochier (XIIe s.) puis DÉROCHER a été tiré de roche. Il s'emploie intransitivement pour « lâcher prise et tomber d'une paroi rocheuse », sens avec lequel il a été repris au début du XXe s. comme terme d'alpinisme plus tard en concurrence avec dévisser. ◆  Le verbe s'emploie aussi transitivement pour « dégager (un lieu : terrain, chenal) » des rochers qui l'encombrent (1671). En français de Belgique, le verbe s'emploie pour « décaper ». ◆  Le verbe correspond aussi à 1 dérochage, d'abord dans se dérocher (1879).
■  Les dérivés se répartissent entre les deux sens : DÉROCHEMENT n. m., en moyen français desrochement « démolition » (1472), a été repris en technique pour « acte de dégager un terrain des rochers qui l'encombrent ».
■  DÉROCHEUSE n. f. (1889) est le nom donné à la machine destinée à dégager un chenal.
■  1 DÉROCHAGE n. m. fournit le substantif d'action, en alpinisme, pour le fait de lâcher prise (1838).
1 ROCHET n. m. est le diminutif (v. 1170) d'une forme non attestée °roc « habit », transcription du latin médiéval roccus ou rochus, roquus, hroccus, lequel désignait un vêtement masculin, une tunique (v. 799), un froc de moine (v. 817), un vêtement féminin, robe ou jupe. Ce mot est emprunté au francique °rokk- de même sens, variante de °hrokk qui a donné froc*.
❏  Rochet désigne le surplis à manches étroites, orné de dentelles ou de broderies que portent les évêques et certains dignitaires ecclésiastiques ; de là un emploi métonymique pour désigner familièrement un évêque (1765, Voltaire), sorti d'usage.
■  Le mot a aussi désigné (1265) un vêtement médiéval, casaque, capote ou tunique courte portée par les hommes et les femmes, surtout dans le peuple, et que les paysans ont continué à revêtir jusqu'au XVIIIe s. et, dans certaines provinces, jusqu'au XIXe s. ; ce sens n'existe plus qu'en histoire. Rochet a aussi désigné le mantelet de cérémonie des pairs d'Angleterre (1698).
? 2 ROCHET n. m., attesté au début du XIIIe s., également sous la forme rocquet (v. 1560, encore au XVIIIe s.), est d'origine incertaine. L'hypothèse la plus communément admise (Wartburg) en fait le diminutif d'une forme non attestée °roc « quenouille », emprunt hypothétique au francique °rokko, variante masculine du féminin gotique °rukka de même sens (→ roquette) ; l'allemand Rocken « quenouille » appartient à cette famille de mots. L'italien rocca et l'espagnol ruecca « quenouille » se rattachent à la forme gotique du même mot germanique. Le mot français n'ayant jamais eu le sens de « quenouille », P. Guiraud, pour qui le rochet est une rondelle et non pas une tige, préfère supposer un gallo-roman °rotica dérivé de rota (→ roue).
❏  En ancien français, le mot désignait le tampon au bout de la lance courtoise puis (XVIe s.) le fer de lance de joute dont on avait rabattu la pointe pour l'empêcher de porter des coups mortels. ◆  Par comparaison avec ce fer, rochet a désigné la roue dentée d'un ressort courbé (v. 1560) avant de se dire, seul (1752) ou dans roue à rochet (1875), d'une roue dentée qu'un cliquet oblige à tourner dans un seul sens. Le sens de « bobine de filature sur laquelle on enroule la soie » (1669) viendrait d'une comparaison de forme mais évoque aussi le sens hypothétique ancien de « quenouille ».
❏  ROCHETTE n. f. (1964 dans les dictionnaires) désigne l'outil du fileur d'or sur lequel passe le fil enroulé sur la bobine.
ROCK AND ROLL n. m. inv. est un emprunt (v. 1955) non modifié à l'anglais des États-Unis rock-and-roll, (1934, dans un titre de chanson), souvent écrit rock'n'roll, dont le sens propre est « balancez et roulez ! » et qui désigne une musique populaire américaine issue directement du rhythm and blues. Le mot est formé des verbes anglais to rock (v. 1100), du vieil anglais roccan, appartenant à la racine germanique rukk-, et de to roll « rouler, tourner », emprunté (1375) à l'ancien français roler, roller, devenu rouler*.
❏  Le terme est apparu en français dès les débuts de ce genre de musique en Amérique du Nord. La forme abrégée américaine ROCK a aussi été empruntée, comme adjectif (1957) et comme nom (1956). Elle s'emploie dans de nombreuses expressions empruntées ou formées en français comme comédie rock, jazz-rock (1973), opéra-rock ou avec la syntaxe anglaise rock opera, rock culture, rock music.
❏  ROCKER n. est emprunté (1963, Salut les copains) à l'anglais rocker, dérivé de rock avec le suffixe d'agent -er.
■  Le mot, qui s'emploie comme en anglais à propos du chanteur ou musicien de rock et aussi de l'amateur de rock (1973), a eu plus de succès que la forme rock'n'roller (1972) et a été suivi par son abréviation familière rocky (pluriel rockys) et la graphie francisée ROCKEUR (1981) à laquelle correspond un féminin ROCKEUSE (1981). Il désigne aussi un type vestimentaire et de comportement.
HARD ROCK n. m. est emprunté (1971) à l'expression anglaise formée de l'adjectif hard « dur », au sens de « violent, très énergique » et de rock, pour désigner un style simple et énergique de cette musique. Le mot est souvent abrégé en hard.
ROCKING-CHAIR n. m. est un emprunt (1851) à l'anglais d'Amérique du Nord rocking-chair (1766) composé de l'anglais chair « chaise » lui-même emprunté à l'ancien français chaire (français moderne chaise*) et de rocking, gérondif de to rock « balancer, bercer » (→ rock and roll).
❏  Le mot, depuis sa première attestation dans les Lettres d'Amérique de Xavier Marmier, n'est guère employé que dans un contexte américain, car il désigne un article d'ameublement rare en Europe ; ce siège avait été un objet de curiosité parmi les relations de Benjamin Franklin lorsque ce dernier, chargé en septembre 1766 de solliciter l'aide financière et économique de Louis XVI en faveur de l'indépendance des États-Unis, s'était fait envoyer un rocking-chair pour son séjour en Europe. En français, on a désigné ce meuble sous le nom de chaise berceuse ou berceuse, chaise à bascule, fauteuil à bascule. Les Québécois, chez lesquels ce meuble est répandu depuis longtemps, ont chaise berçante ou berçante, calque du mot américain attesté dès 1824.
❏  L'abréviation ROCKING n. m. (1895, P. Bourget) est peu répandue ; on note aussi chez Bourget un emploi isolé de rocking, substantif verbal pour « action de se balancer dans un rocking-chair ».
ROCOCO → ROCHE
ROCOU n. m., à la fois roucou et ouroucou (1614 dans le Récit de voyage dans les Antilles de Claude d'Abbeville), quelquefois rocou (1615), est l'adaptation de urucú, rucú, rocú, d'une langue indienne du Brésil (tupi ou guarani) désignant un pigment rouge orangé extrait de la matière cireuse rouge qui entoure les graines d'un arbre.
❏  Le mot, repris avec le même sens, a immédiatement produit des dérivés. ROCOUYER n. m., nom de l'arbrisseau qui produit les graines produisant le rocou, s'est d'abord écrit rocchouier (1645) avant roucouier (1727) puis roucouyer (1798) et rocouyer (1798).
■  ROCOUER (1640) ou ROUCOUER (1658) v. tr. « colorer ou teindre avec du rocou » est sorti d'usage.
RODÉO ou RODEO n. m. est emprunté (1923) à l'anglo-américain rodeo (1914), nom d'un jeu équestre consistant à maîtriser un cheval sauvage ou un bœuf non domestiqué, et lui-même emprunté (1834) à l'hispano-américain rodeo « encerclement du bétail, emplacement circulaire où l'on marque le bétail » (XVIIIe s.). Ce dernier est dérivé de l'espagnol rodear « tourner, encercler », élargissement de rodar « tourner » qui représente le latin rotare de même sens, de rota (→ roue).
❏  Le mot, essentiellement employé pour désigner le jeu équestre pratiqué dans l'ouest des États-Unis et, par extension, le lieu où se déroule cette fête, se dit aussi, au figuré (XXe s.), comme corrida, d'une course agitée, d'une vive agitation collective et spécialement d'une poursuite, d'une course rapide et désordonnée en voiture(s), souvent pour défier la police (années 1980).
RODER v. tr. est emprunté (1520) au latin rodere « ronger, miner, user » au physique et au moral, mot d'origine incertaine ; les rapprochements avec les formes germaniques du vieil allemand raz̄i « âpre, sauvage » et du vieux saxon ratte « rat » et d'autre part avec le sanskrit rádati, « il gratte, il bêche », sont vagues. L'ancien français a eu un type populaire rore (v. 1200), reure « ronger », vivant sous diverses formes dans les dialectes méridionaux et centraux.
❏  Le sens étymologique de « ronger » a disparu. Roder a été repris comme terme d'armurerie (1723) avec un sens technique également sorti d'usage. De nos jours et depuis le début du XIXe s. (1836), il exprime l'action de polir, d'user une pièce par le frottement, pour qu'elle s'adapte exactement à une autre.
■  Par extension, il équivaut à « user par frottement » et s'applique notamment (1933 dans les dictionnaires) au fait de soumettre un moteur, et, par métonymie, une voiture neuve, à l'opération faisant subir une très légère usure aux pièces frottantes de sorte que celles-ci s'ajustent parfaitement. Ce sens, devenu le plus courant, a produit familièrement la valeur figurée de « mettre au point (une chose nouvelle) par la pratique, des essais » (1933) et « faire acquérir à (une personne, un groupe) l'expérience permettant d'accomplir correctement une tâche nouvelle » (1932, en sports).
❏  Le dérivé RODOIR n. m. est d'abord un terme d'arquebusier désignant l'outil servant à roder (tailler les crans) de la platine d'une arme (1812). En français moderne, il s'emploie en tannerie pour désigner la cuve dans laquelle les peaux sont assouplies (1812) et désigne un outil servant à roder les pièces métalliques (1836).
■  RODAGE n. m. (1836) désigne l'opération technique consistant à roder une pièce, spécialement le moteur d'un véhicule neuf (av. 1933) et, par métonymie, la période pendant laquelle les pièces mobiles du moteur se mettent en place et ne doivent pas être soumises à un effort excessif (1933) d'où en rodage. Le mot s'emploie familièrement au figuré (1941), comme le verbe, emploi usuel.
■  RODÉ, ÉE, le participe passé de roder, est adjectivé au propre (1933) et au figuré (1968).
❏ voir CORRODER, ÉRODER, ROGNE, ROSTRE.
RÔDER v., d'abord rodder (1418) et rauder (1530) avant l'orthographe rôder (1539), est emprunté à l'ancien provençal rodar « tourner, aller en rond, faire tournoyer », encore usité dans les parlers occitans. Ce verbe remonte au latin rotare « tourner, faire tourner (comme une roue) », « tournoyer », de rota (→ roue). Cependant, P. Guiraud, pour lequel la forme dominante est rauder, a risqué l'idée d'un composé de re-* et de l'ancien français hoder, variante hauder « fatiguer, remuer, agiter » (v. 1360), d'origine inconnue.
❏  Du XVe s. jusqu'à l'époque classique, le verbe s'est employé transitivement au sens de « parcourir (une région) en errant » d'où, au figuré « tourner, diriger çà et là (les yeux) » [1580, Montaigne]. L'usage intransitif s'est substitué à ce transitif, pour « aller çà et là sans but précis, souvent par désœuvrement, par ennui » (1530), quelquefois en parlant d'une chose personnifiée (v. 1570). On a dit, par analogie, un navire qui rôde sur son ancre (1831) à propos d'un bâtiment mouillé dans un courant violent qui se meut de part et d'autre. Rôder a pris la valeur péjorative d'« errer avec une intention suspecte et hostile » (1559), s'employant spécialement dans un contexte galant pour « chercher à séduire par des moyens détournés » (1668). Il se dit aussi d'une chose abstraite qui manifeste sa présence de façon furtive mais obsédante (XXe s.).
❏  RÔDEUR, EUSE n. et adj. (1539) a d'abord désigné une personne qui erre sans but précis (1538), sens archaïque, puis, péjorativement, une personne d'allure suspecte qui erre à la recherche d'un mauvais coup à faire (1538 ; 1690 rôdeur de nuit).
■  L'adjectif qualifie d'abord (1764) un animal qui se déplace sans suivre d'itinéraire fixe ; il se répand au XIXe s. pour qualifier une personne qui vagabonde à la recherche d'aventures plus ou moins louches (1823) et, au figuré, ce qui appartient à un être qui erre avec des intentions malveillantes (av. 1857). Il qualifie spécialement un esprit, un fantôme errant (av. 1890, Maupassant), une chose personnifiée qui va et vient dans l'attente du moment où elle pourra se manifester (fin XIXe s.).
■  RÔDAILLER v. intr. (1838) fournit un dérivé familier à valeur diminutive ; le dérivé RÔDAILLEUR, EUSE n. et adj. (1951, Céline) est rare.
■  RÔDERIE n. f. (1864), substantif d'action tiré de rôder, est littéraire et rare.
RODOMONT n. m. et adj. m., réfection (1573) de rodomone (1527), est l'emploi comme nom commun de l'italien Rodomonte, nom d'un roi d'Alger plein de bravoure, mais fier et insolent, qui apparaît dans le Roland amoureux (Orlando innamorato), poème chevaleresque écrit de 1476 à 1492 par Matteo Maria Boiardo, puis dans le Roland furieux (Orlando furioso) continuation de l'œuvre du précédent (1506-1532) par l'Arioste.
❏  Ce mot littéraire, par le même développement de sens que matamore, désigne un fanfaron qui se vante de prétendus actes de bravoure et affecte une hauteur méprisante.
❏  Le dérivé RODOMONTADE n. f. (1587), plus courant, désigne l'attitude d'un fanfaron, une prétention ridicule et injustifiée, et par métonymie (une, des rodomontades), les paroles d'un fanfaron.
ROENTGEN → RÖNTGEN
ROESTI → RÖSTI
RODRIGUAIS, AISE adj. et n., qualifie et désigne ce qui a rapport à l'île Rodrigue, dans les Mascareignes, et à ses habitants. Le mot est usuel en français de l'océan Indien.
ROGATION n. f., d'abord écrit rogacion (v. 1355), puis rogation (1530), est emprunté au latin rogatio, -onis « question, demande », sens classique mais rare, et techniquement « sollicitation, requête » ; à basse époque, le pluriel rogationes (Ve s.) se dit des prières publiques faites pendant une procession. Le mot est dérivé de rogatum, supin du verbe rogare « s'adresser à », puis « poser une question, interroger », également employé dans le sens de petere (→ pétition) « demander », spécialisé en droit public pour « demander à qqn l'avis motivant son vote » et, de là, « consulter (le peuple) », « proposer une loi (legem) » et « proposer (un magistrat) à l'assemblée du peuple ». Le mot s'apparente sans doute à regere (→ régir), du radical de rex « roi ».
❏  Le mot, repris comme terme d'antiquité romaine, désigne le projet de loi présenté au peuple réuni en comice pour lui demander de l'approuver, d'abord par oui ou non puis, à partir du IIe s. av. J.-C., au scrutin secret ; il n'est pas réattesté avant 1701. Le pluriel rogations, dans sa spécialisation religieuse (fin XIVe s.), désigne les cérémonies des trois jours précédant l'Ascension, qui ont pour but d'attirer la bénédiction divine sur les récoltes. Il a remplacé l'ancien type populaire rovaisons (v. 1119).
❏ voir INTERROGER ; ROGATOIRE, ROGATON.
ROGATOIRE adj. est emprunté (1599) au bas latin ecclésiastique rogatorius « de demande », notamment dans l'expression epistola rogatoria « lettre portant la requête adressée au métropolitain d'ordonner un évêque élu » (715). Ce mot est formé sur rogatum, supin de rogare « demander » (→ rogation).
❏  Le mot, d'abord dans le syntagme juridique commission rogatoire, emploi le plus usuel, qualifie plus largement ce qui est relatif à une demande (1875). Il s'emploie aussi en termes d'antiquité romaine, qualifiant ce qui est relatif à un projet de loi soumis au peuple romain (1842).
❏  ROGATOIREMENT adv. (1875, Journal officiel) signifie « par voie rogatoire, au titre d'une commission rogatoire ».
❏ voir INTERROGER, ROGATION, ROGATON.
ROGATON n. m. est un emprunt (1367), orthographié d'après la prononciation ancienne du latin (Cf. dicton), au latin médiéval rogatum « demande », participe passé passif substantivé, au neutre, du latin classique rogare « demander, solliciter, interroger » (→ rogation).
❏  Le mot a d'abord servi à désigner une assignation, une convocation, l'expression porteur de rogatons (1367) désignant l'officier chargé de porter cette convocation. Désignant un religieux mendiant qui porte les reliques et les indulgences (1534, Rabelais), elle est ironique, de même qu'à propos de ceux qui présentaient de courts poèmes louangeurs ou des placets aux grands seigneurs dans l'espoir d'obtenir de l'argent (1640). À l'époque classique, le mot signifie en général « requête » (av. 1660), spécialement « placet pour demander une aumône » (1690) ; il s'emploie familièrement au sujet d'une petite pièce littéraire sans importance (fin XVIIe s.) et d'une nouvelle du jour, de peu d'intérêt (1676, Mme de Sévigné).
■  De nos jours, le mot n'est plus employé qu'avec le sens général dépréciatif de « chose de rien » (1662), au propre et au figuré (1860, Baudelaire), comme bricole, brimborion, etc. et, surtout avec le sens spécial de « menus débris de nourriture (de viande en particulier), restes d'un repas » (1694) et spécialement pour un plat composé des restes d'autres plats (1740). De nos jours, avec le sens général de « résidus, restes », il est toujours péjoratif et dérisoire.
❏ voir INTERROGER, ROGATOIRE, ROGATION, ROGOMME (selon P. Guiraud).