SELVE n. f. est un emprunt (1938), d'abord selva (1877), au portugais du Brésil selva, lui-même pris au latin silva « forêt, bois », sans origine connue. Le mot latin avait abouti à l'ancien français selve « forêt » (1080) et à l'ancien provençal silva (v. 1180), qui demeure aujourd'hui dans des noms de lieux.
❏
Ce terme de géographie désigne la forêt vierge des pays équatoriaux de l'Amazonie.
❏
Il a fourni SELVATIQUE adj. (1972), terme de géographie.
❏ voir
SAUVAGE, SILVANER, SYLVESTRE, SYLVICOLE.
L
SEMAINE n. f., réfection (v. 1119) de sameine (v. 1050), est issu du latin ecclésiastique septimana « espace de sept jours » (fin IVe s.), féminin substantivé du latin classique septimanus « relatif au nombre sept », dérivé de septem « sept* ». Septimana représente un calque du grec ecclésiastique hebdomas « le nombre sept » et « semaine », dérivé de hebdomos « septième », mot apparenté par sa racine au latin (→ hebdomadaire). Au XVIe s., par latinisme, on a écrit sepmaine.
❏
Le mot désigne d'abord la période de sept jours, allant du lundi au dimanche, qui règle le déroulement de la vie religieuse, ensuite professionnelle, sociale. Par extension (fin
XIIe s.), le mot s'applique à une période de sept jours, quel que soit le jour initial. De nombreuses locutions apparaissent rapidement :
sor samaine a signifié (1210) « un jour ouvrable, pendant la semaine (à l'exclusion du dimanche) », d'où
en sursemaine (1279) et
sur la semaine (1636).
Semaine peneuse « de peine » s'est dit de la semaine qui précède le dimanche de Pâques, appelée
grande semaine (1608) puis
semaine sainte (1680).
◆
Dans le calendrier chrétien, on a dit
feste des semaines pour « Pentecôte » (1564) ; on relève à la même date une extension,
semaine d'an, devenue (1681)
semaine d'années, expression biblique pour l'intervalle de sept ans qui sépare deux années sabbatiques.
Male semaine s'est dit par euphémisme pour « menstrues » (1611 ; 1640,
les males semaines).
◆
L'expression familière
semaine des trois jeudis (1640) « jamais » a été modifiée en
semaine des quatre jeudis (1867), toujours en usage alors même que
jeudi n'est plus jour férié à l'école.
Une première métonymie (1552,
sepmaine) concerne le salaire touché pour le travail d'une semaine.
◆
Dans la seconde partie du
XVIIe s., le mot prend le sens de « fonction (exercée pendant une semaine) », d'abord dans des locutions comme
faire sa semaine (1669),
être en semaine (1691, dans les chapitres religieux), sorties d'usage, et
(être) de semaine (1694). De là vient
semaine « travail qu'un ouvrier a fait pendant une semaine » (1694).
◆
Prêter (et
prêt)
à la petite semaine « à très court terme et à taux très élevé » est attesté en 1740 ; de cette expression sortie d'usage vient la locution familière
à la petite semaine (1855 au théâtre).
◆
À la fin du
XVIIIe s.,
semaine s'est dit d'une petite somme donnée à un enfant comme argent de poche pour la semaine (1798).
■
Avec l'idée d'« ensemble des jours ouvrables », par opposition au dimanche et aux jours fériés, en semaine signifie « pendant la semaine » (1871). Dans quelques régions de France, on dit dans ce sens sur la semaine.
◆
À la même époque, le mot désigne un bracelet, une bague composé de sept anneaux (aussi semainier, 1876).
■
L'évolution du monde du travail et des règles qui le régissent amène à préciser l'emploi du mot dans son sens le plus courant, qui s'applique à cette période du point de vue des heures de travail ; ainsi semaine anglaise (1911) a désigné une organisation, d'abord en usage en Angleterre, qui accorde aux travailleurs le repos du dimanche et celui du samedi (→ week-end).
◆
Par extension, semaine se dit (XXe s.) d'une période consacrée à des manifestations culturelles, sociales, commerciales, etc.
❏
Le dérivé
SEMAINIER, IÈRE n. s'est dit d'abord (v. 1200,
n. m.) d'une personne qui assure un service pendant une semaine, par exemple dans une communauté religieuse.
◆
Le mot s'est employé comme adjectif (1380,
semenier ; 1487, forme moderne) pour « hebdomadaire », encore en 1875.
◆
Avec la première valeur, le nom désigne (1726) chacun des deux comédiens chargés, pendant une semaine, des détails relatifs au répertoire à la Comédie-Française.
■
Au XIXe s. apparaissent des emplois analogiques, semainier désignant (1828) un agenda de bureau divisé selon les jours de la semaine, puis une boîte à rasoir contenant sept lames (1872) et un petit meuble comprenant sept tiroirs (XXe s.).
■
En termes de comptabilité, le mot s'emploie (1904) pour parler de l'état des salaires dus aux ouvriers pour une semaine de travail.
SÉMANTIQUE adj. et n. f. est attesté isolément en 1561, écrit symentique, et a été repris en 1875. C'est un emprunt au grec sêmantikos « qui signifie, indique, fait connaître », formé sur le verbe sêmainen « marquer d'un signe », « faire savoir, expliquer », lui-même dérivé de sêma, sêmatos « caractère distinctif », souvent rapproché, mais sans certitude, du sanskrit dhȳa-man « la pensée ».
❏
L'adjectif s'appliquait déjà, dans son attestation isolée au XVIe s., à ce qui concerne le sens des mots. On trouve ensuite en anglais semantick philosophy (1665), expression désignant chez J. Spencer la science des présages météorologiques. Le nom réapparaît en français au XIXe s. (1875, Grand Dictionnaire universel de P. Larousse) comme nom de l'ensemble des signaux, télégraphie, etc. employés par l'armée pour transmettre des informations (→ sémaphore).
◆
C'est Michel Bréal qui propose le terme dans « Les Lois intellectuelles du langage : fragment de sémantique » (1883, in Annuaire pour l'enseignement des études grecques en France) et le diffuse par son Essai de sémantique (1897) où il définit la sémantique comme « la science des significations », l'étude des « lois qui président à la transformation des sens, aux choix d'expressions nouvelles, à la naissance et à la mort des locutions » ; le terme, qui reste d'abord propre à Bréal, désigne ensuite plus largement l'étude méthodique du langage considéré du point de vue du sens. Sémantique a été parfois restreint (1923, Vendryès) à la valeur de « lexicologie historique ». Le mot est devenu aussi le nom de diverses disciplines à caractère plus philosophique que linguistique (sémantique philosophique, sémantique générale), d'après l'anglais semantics (de même origine que le français), dans des traductions des travaux de Carnap ou Korzybski (general semantics). C'est par ailleurs un terme de logique par emprunt à l'anglais (Ch. Morris) pour l'étude générale des relations entre les signes et leurs référents (opposé à syntaxe* [syntax] et à pragmatique*).
◆
Comme adjectif (1897), sémantique correspond de manière plus vague à « de la signification, du sens » et s'oppose parfois à formel, syntaxique.
❏
Le mot a fourni plusieurs termes didactiques :
SÉMANTIQUEMENT adv. (1919) et
SÉMANTISME n. m. (1913) sont devenus usuels.
■
En revanche, SÉMANTÈME n. m. (1921), qui désignait un élément du mot support de la signification (par opposition à morphème*), a vieilli dans ce sens et désigne aujourd'hui (1964) l'ensemble des sèmes spécifiques d'une unité linguistique.
■
SÉMANTICIEN, IENNE n. (1913) remplace SÉMANTISTE n. (1897).
◈
D'autres termes didactiques sont formés à partir de dérivés du grec
sêma.
■
SÉMIOTIQUE n. f. est emprunté (v. 1560) au grec sêmeiôtikê « observation des symptômes » en médecine, substantivation au féminin de l'adjectif sêmeiôtikos « qui concerne l'observation » et « apte à noter », dérivé du verbe sêmeioun « marquer d'un signe » et (au moyen) « remarquer, noter », c'est-à-dire « envisager comme un signe », lui-même de sêmeion « signal », dérivé de sêma.
■
Terme ancien de médecine, le mot s'écrit aussi séméiotique (v. 1555) et s'est employé comme adjectif (1839, sémio- ; 1876, séméio-) ; dans cet emploi médical, il a été supplanté par sémiologie (ci-dessous). Locke (1690), dans son classement des connaissances rationnelles, oppose Sêmeiôtikê (la Logique) à la physique (connaissance de la nature) et à la pratique (la morale). L'emprunt grec désigne chez le philosophe anglais la science des signes, notamment des mots comme signe des idées. Ce concept sera nommé en français à la fin du XVIIIe s. idéologie*, et l'opposition faite par Locke sera reprise en anglais (1831, Smart) sous le nom de sematology.
■
Sémiotique est repris en 1954 dans un article en français du linguiste danois Louis Hjelmslev où il signifie « système structuré de signes » et est employé également comme adjectif.
◆
Le mot prend ensuite (1966) le sens de « théorie générale des signes, des systèmes de signes et des processus signifiants » ; c'est alors une adaptation de l'anglais semiotics (1964, Margaret Mead, T. A. Sebeok), qui reprend semiotic (1914, Ch. S. Peirce). Sauf chez les théoriciens proches de Hjelmslev, qui opèrent une distinction entre sémiotique et sémiologie (ci-dessous), sémiotique possède alors une valeur épistémologique qui le relie aux concepts grec (les stoïciens) et lockien. L'emploi des deux mots relève souvent des théories : la tradition de Saussure préfère sémiologie et la tradition anglo-saxonne sémiotique.
■
Le dérivé SÉMÉIOTICIEN n. m. a disparu en médecine (1765, art. Signe, Encyclopédie) ; SÉMIOTICIEN, IENNE n. a été introduit vers 1965.
◈
SÉMIOLOGIE n. f. apparaît en 1752
(→ -logie) pour désigner la partie de la médecine qui étudie les symptômes des maladies, aussi écrit
SÉMÉIOLOGIE.
◆
Le mot, employé en 1901 par Naville, a été repris en linguistique par F. de Saussure dans son célèbre
Cours (1910) pour nommer la science étudiant les systèmes de signes (langues, codes, signalisations) et la science générale des signes (
sémiotique ci-dessus). Il s'emploie spécialement en parlant des signes et des systèmes de signes intentionnels, d'où
sémiologie théâtrale, littéraire, ou encore
sémiologie graphique (1967, J. Bertin).
■
Le dérivé SÉMIOLOGIQUE adj. s'emploie en médecine (1846 ; plus rarement séméiotique, 1836) et en linguistique (1916), d'où, dans ce cadre, SÉMIOLOGUE n. (v. 1950 ; attesté 1964, Barthes), distinct ou non de sémioticien.
◈
SÉMIOGRAPHIE n. f. est une adaptation (1836) du grec
sêmeiographos « qui écrit en signes autres que ceux de la graphie normale ».
◆
Le mot s'est employé au sens de « méthode d'écriture abrégée », avec la variante
séméiographie (1842) ; il a été remplacé par
sténographie. Il désigne aujourd'hui (mil.
XXe s.) la notation des informations cartographiques selon un système de signes convenus.
◆
En dérive
SÉMIOGRAPHIQUE adj. (1875, au sens ancien).
◈
SÉMASIOLOGIE n. f. a d'abord eu en français (1884) le sens disparu de « sémantique », repris à l'allemand
Semasiologie. Introduit en 1825 par Karl Kristian Reisig, le mot désignait la science qui devait établir « les principes gouvernant le développement du sens », partie de la grammaire qui comportait par ailleurs l'étymologie et la syntaxe, c'est-à-dire la sémantique (ci-dessus). Le mot s'emploie aujourd'hui en parlant de l'étude des significations qui, partant du mot, du signe, s'oppose à l'
onomasiologie.
◈
SÈME n. m., tiré (1926, puis 1943, E. Buyssens) du grec
sêmeion (dérivé de
sêma) sur le modèle de
phonème, morphème, désigne l'unité minimale de signification, selon les critères d'un type d'analyse (la nature d'unité minimale des éléments dégagés est périodiquement remise en question). Champollion avait employé le mot pour « unité de sens » (
in T.L.F.).
◈
SÉMÈME n. m. (1949) est emprunté en linguistique à l'anglais
sememe (1926, Bloomfield), construit aussi sur
sêmeion.
■
SÉMIQUE adj. (1943, Buyssens, acte sémique, puis 1960) qualifie ce qui est relatif aux sèmes.
◈
L'élément final
-SÉMIE, du grec
-sêmia, sert à former plusieurs composés.
■
POLYSÉMIE n. f. a été créé par Bréal (1897), de poly- d'après le grec polusêmos « qui a de nombreuses significations », pour « caractère d'un signe unique (de même étymologie) qui a plusieurs significations, plusieurs signifiés », concept distinct de l'homonymie (qui concerne deux signes différents de même forme). La variante polysémantisme (Gilliéron, 1922) ne s'est pas imposée.
◆
Polysémie, de même que POLYSÉMIQUE adj. (1932), s'est diffusé dans l'usage didactique, avec les discussions lexicographiques sur la polysémie et l'homonymie, vers 1960.
■
MONOSÉMIE n. f. (mil. XXe s.) et MONOSÉMIQUE adj., qui concernent le fait de n'avoir qu'une seule signification, ont probablement été formés sur mono- d'après polysémie et polysémique.
■
Indépendamment des composés déjà formés, l'élément SÉMIO- est productif, par exemple dans SÉMIOMÉTRIE n. f. (1922), « mesure et traitement statistique des réactions d'un échantillon de personnes à des mots qui lui sont proposés ».
❏ voir
SÉMAPHORE.
SÉMAPHORE n. m. a été composé savamment (1812) du grec sêma « signe » (→ sémantique) et de -phore (→ phosphore), du grec phoros « qui porte », lui-même du verbe pherein « porter ».
❏
Le mot désigne un dispositif (mât muni de bras mobiles) établi sur le littoral, qui permet d'envoyer des télégrammes optiques, ou un dispositif analogue qui indique si une voie de chemin de fer est libre ou non (1888). Repris en informatique, sémaphore se dit par analogie (v. 1975) d'un type particulier de variable qu'on utilise pour synchroniser des travaux parallèles exécutés par un ordinateur.
❏
SÉMAPHORIQUE adj., rare (1829), qualifie ce qui est relatif au sémaphore (signal sémaphorique).
L +
SEMBLER v. intr. est issu par évolution phonétique (1080, mais antérieur ; Cf. semblant) du bas latin similare, °similiare « être semblable », dérivé du latin classique similis « semblable, ressemblant, pareil » (→ similaire). Le mot, dont la forme originelle doit être °semilis, vient d'une base semi- qui se rattache à une racine indoeuropéenne °sem- « un », exprimant aussi l'identité. Cette racine est conservée en sanskrit (sámah), en gotique (sama), en vieux slave (samŭ ; → samizdat, samovar) et peut-être en grec (hêmi- ; → hémi-) pour désigner l'unité ; elle a été remplacée en ce sens par unus en latin. Le latin tardif °similiare a abouti à l'ancien provençal semelhar « ressembler » (v. 1240).
❏
Le verbe a la valeur générale de « présenter telle apparence pour qqn » (1080) dans la construction
sembler à qqn et celle de « paraître », suivi d'un attribut (1155) ; dès la fin du
XIe s. (v. 1090),
sembler raison signifiait « sembler juste ». Suivi d'un infinitif,
sembler correspond à « donner l'impression de » (1196).
◆
Il s'emploie impersonnellement dans diverses constructions :
me (
te, etc.)
semble, suivi de l'infinitif (1080), « je (tu)... crois, je pense... » est devenu
il me semble (1580), etc.
Il me semble que est suivi de l'indicatif (v. 1260, d'abord sous la forme
il me sanle ; 1440-1475, forme moderne) ou du subjonctif (fin
XVe s.). Les constructions
il me semble à (1538),
de (1614) sont sorties d'usage ; la construction elliptique
ce me semble (v. 1250) est littéraire, remplacée par
à ce qu'il me semble (1669) et
à ce qui semble (1665).
Ce semble (1665) est archaïque.
◆
Une deuxième construction est
sembler à qqn « être apparemment pour qqn » (1080), d'où
sembler bon (à qqn) [apr. 1370] et
si bon me semble (1549). Enfin, l'impersonnel
il semble que « les apparences donnent à penser » est attesté à partir de 1250 (avec le subjonctif).
La valeur du latin similare « être ou paraître semblable » s'est conservée en ancien français, mais a disparu au cours du XVIIe s. du « bon usage ». Ce sens est resté vivant dans plusieurs régions du centre-sud de la France pour « ressembler à », « avoir l'air de » (il semble son frère ; ce pain semble du gâteau). Cet emploi, courant en français de Provence (où il correspond au provençal sembla) a reculé et a disparu du français central, après avoir été condamné au XVIIe s., aux XVIIIe et XIXe s., se maintenant en Suisse, en Belgique, dans le français régional de Normandie, puis au Québec. Il a cependant vieilli partout, remplacé par ressembler à.
❏
Le dérivé
SEMBLANCE n. f. n'est plus employé que par archaïsme pour « apparence, forme extérieure » (1150) et « ressemblance » (v. 1119). Le mot a signifié aussi « manière d'être, conduite » (v. 1155), « image » (v. 1175), encore à l'époque classique, et par métonymie « signification (d'un rêve) » (
XIIIe s.), et « mine, visage » (
XIIIe s.). Il a vieilli dans tous ses emplois, éliminé par le mot de la même famille
ressemblance, et on ne rencontre plus guère qu'
à la semblance de dans un usage littéraire.
◈
SEMBLABLE adj. et n. s'applique (v. 1165,
senlable) à des éléments qui se ressemblent entre eux, d'où l'emploi substantif pour « chose semblable », d'abord dans la locution
faire le semblable « la même chose » (v. 1370). L'adjectif se spécialise au
XVIe s. en mathématiques (1484, Chuquet, de nombres ; 1639 en géométrie).
◆
Il signifie « qui ressemble », avec la préposition
à ou employé seul (1538). Il se dit (fin
XVe s. Commynes) de ce qui est de même nature qu'une autre chose, spécialement dans
ne pas avoir son semblable (1538) ;
autres semblables équivalait à « d'autres hommes (sans distinction) » (1538 ; 1694,
nos semblables). L'adjectif s'emploie aussi (1669) avec une valeur affective pour « de cette nature, tel ».
◆
Il a produit
SEMBLABLEMENT adv. (1267
semblanblement).
◈
La forme du participe présent est substantivée dès le
Xe s. et
SEMBLANT n. m. apparaît vers 980 pour « apparence, aspect » et comme adjectif (1080) pour « qui ressemble ».
Son semblant a signifié « son semblable » (v. 1155) jusqu'au
XVe siècle. Avec l'idée d'« apparence », le mot s'emploie en ancien français de manière neutre ou positive avec un adjectif. Les emplois avec des connotations négatives sont restés vivants dans des locutions.
◆
Le nom équivaut (v. 1155, Wace) à « signe, indice », d'où
faire semblant de « laisser paraître » (v. 1155,
id.),
faire semblant de et infinitif « avoir l'air de », encore chez Littré,
faire bel semblant « faire bon accueil »,
faire semblant d'amitié « témoigner de l'amitié » et la construction
faire semblant que, suivie de l'infinitif, « montrer que » (v. 1145). Toujours avec cette valeur, on trouve
semblant « accueil favorable » (v. 1175), d'où
beau semblant « signe de gentillesse » (
XIIe s.).
◆
Parallèlement,
ne faire semblant de rien signifie « prendre un air indifférent pour tromper », toujours en usage (
sans faire semblan de riens, v. 1450), comme
faire semblant de qqch. « feindre », « faire comme si ».
◆
Semblant signifie aussi « manière d'être » (1244-1248) et « opinion » dans
à mon semblant « à mon avis » (
XIIIe s.), sorti d'usage.
◆
À partir du
XVIe s., la valeur négative, liée à l'idée d'apparence, l'emporte :
beau semblant signifiait « belle apparence trompeuse » (1538) et
faux-semblant « ruse, hypocrisie, apparence trompeuse » (1538), toujours en usage et qui procède de l'expression
par faus semblant (1176). À la fin du
XVIe s.,
semblant prend sans qualificatif la valeur d'apparence visible et
sans faire semblant a signifié « en cachette » (1599).
Un semblant de se dit en parlant de qqch. qui n'a que l'apparence de... (1636) ; ce sens est resté vivant, mais le mot fonctionne surtout dans
faux-semblant et
faire semblant, toujours avec l'idée de « fausse apparence ».
◈
Le préfixé
RESSEMBLER v. s'est employé transitivement du
XIe (1080) au
XVIIe s. ; cet emploi archaïque survit encore dans les dialectes. Il avait le même sens que l'emploi moderne
ressembler à (
XVe s.) « avoir des traits communs avec », d'où
se ressembler (
XVIe s.).
◆
Le verbe a eu jusqu'au
XVe s. la même valeur que
sembler (fin
XIe s.,
resempler), par exemple dans
se faire ressembler « se donner un certain air » (v. 1175,
resanbler) ou
il ressemble que « il semble que » (v. 1175,
resemble). Ces valeurs ont disparu en moyen français. Au sens dominant, le verbe signifie par extension « être digne de son auteur » en parlant d'un comportement, d'une œuvre (
XVIIe s.), d'où les locutions
cela lui ressemble « on le reconnaît à cela » (1678) et
cela ne lui ressemble pas (1798) « cette action n'est pas conforme à ce que l'on pensait de cette personne ».
◆
Un emploi spécial, d'après
ressemblance (ci-dessous), concerne le rapport entre une représentation figurée (peinture, etc.) et son modèle (1690).
◆
Se ressembler, c'est spécialement « agir comme on l'a toujours fait » (1669) et « ne pas mettre assez de variété dans ses œuvres » (
XVIIIe s.), emploi vieilli.
◆
Le verbe entre dans de nombreuses locutions dont certaines sont devenues proverbiales, telles
qui se ressemble s'assemble (Furetière, 1690),
les jours se suivent, mais ne se ressemblent pas. Ne ressembler à rien est employé en bonne part (1798) pour « avoir de l'originalité », mais plus souvent avec une valeur négative (1798), à propos de ce qui est de mauvais goût, informe. On a dit aussi
cela ressemble à tout (1798).
■
Le dérivé RESSEMBLANCE n. f. a le sens général de « conformité approximative entre les personnes ou les choses » (v. 1265 ; puis v. 1380) mais ne s'emploie couramment qu'à partir du XVIe s., en particulier pour les personnes, avec le sens de « portrait » (1580), d'abord dans ressemblance faite sur le vif (1538), faite au vif (1636), d'où « image de qqn dans un rêve » (fin XVIe s.) et « apparence » (1638) ; ces emplois métonymiques ont disparu.
◆
Dans les arts et les techniques de représentation, puis de reproduction, le nom se dit (1676) de la conformité entre l'objet représenté et son modèle. Il s'est employé en géométrie (1690) pour « similitude ».
■
RESSEMBLANT, ANTE adj., rare au sens (1503) de « semblable (à) », s'applique couramment (av. 1650) à ce qui a de la ressemblance avec son modèle.
◈
DISSEMBLER v. tr., formé avec le préfixe
dis-, d'emploi littéraire et rare, signifie « être différent de ». C'est une réfection (1594) des formes anciennes
dessanler (1209,
intr.),
dessembler (
XIIIe s., hapax ; puis v. 1390), qui correspondent à l'ancien provençal
dessemblar (
XIIIe s.), d'après
sembler et
ressembler.
■
DISSEMBLANCE n. f., littéraire (1520), s'est substitué à dessemblance (1165-1170), traduisant le latin dissimilitudo. Il désigne ce qui diffère, un trait qui distingue.
■
DISSEMBLABLE adj., réfection savante (v. 1330) d'après le latin dissimilis, de dessemblable (v. 1150), encore au XVe s., se construit au singulier avec de, aussi avec à à l'époque classique. Le mot s'emploie plus couramment au pluriel.
◆
L'adverbe DISSEMBLABLEMENT (1570), réfection de dessembleblement (XIVe s.), est rare.
❏ voir
ASSEMBLER, ENSEMBLE, VRAISEMBLABLE.
?
SEMELLE n. f., attesté à la fin du
XIIe s.
(semele), est d'origine incertaine. Bloch et Wartburg proposent d'y voir une altération de
lemelle, employé dans ce sens vers 1200, et de considérer cette forme comme la variante picarde de
lamelle*, du latin
lamella, diminutif de
lamina « lame* » ; la première syllabe
le- aurait été prise pour l'article défini
le, féminin en picard, et remplacée par
°se, du latin
ipsa, féminin de
ipse « en personne », « même* ».
Ipse a en effet concurrencé
ille (→ le) dans la longue période où s'est élaboré l'article défini en français et s'est employé en particulier chez les auteurs du nord de la Gaule. On trouve un phénomène analogue dans le gascon
lighe « saule » pour
salighe (du latin
salix « saule* »), par aphérèse de
sa- pris pour l'article défini. Pour P. Guiraud, les formes anciennes et dialectales
sumelle, soumelle supposent en gallo-roman un dérivé
°sub-lamella, sur le modèle du latin
sublamina « lame de dessous »,
lamella et
lamina étant synonymes.
■
Semelle s'est substitué à l'ancien français sole (fin XIe s.), qui est resté dans le vocabulaire technique (→ 1 sole), du latin populaire °solo, altération du classique solea (→ seuil).
❏
Semelle se dit d'abord de la pièce constituant le dessous d'une chaussure. Par métonymie, le mot signifie (1611) « longueur d'un pied », d'abord en escrime, d'où reculer (rompre) d'une semelle « reculer de la longueur d'un pied » (1835) ; cette acception est encore en usage dans des locutions figurées comme ne pas reculer d'une semelle « montrer de la fermeté » (fin XVIe s.), ne pas bouger (avancer) d'une semelle (1840), ne pas quitter qqn d'une semelle (fin XIXe s.). La locution figurée courir d'une semelle (1630) « aller à pied d'un lieu à un autre » a disparu, comme battre la semelle (1627) dans le même sens ; en revanche, cette dernière expression reste usuelle avec un nouveau sens, « frapper le sol de ses pieds pour les réchauffer » (1834).
◆
Semelle désigne aussi la partie d'une chaussette correspondant à la plante du pied (1636) et une pièce découpée (de feutre, etc.) qu'on met à l'intérieur d'une chaussure.
◆
Par analogie, le mot s'emploie en technique pour désigner une pièce plate qui sert d'appui ou de renfort (1690), puis dans divers domaines, dont l'électricité (1904, semelle d'un électro-aimant).
◆
Au XXe s. (1901, Bruant), surtout dans c'est de la semelle, le mot se dit d'une viande très dure ou trop cuite.
◆
Par extension du premier sens, semelle désigne (1967) la partie médiane du dessous d'un ski.
❏
Le mot a servi à former les composés :
RESSEMELER v. tr. (1617), réfection de
rasameler (1423) « remettre des semelles neuves à (des souliers) », dont dérivent
RESSEMELAGE n. m. (1782) et
RESSEMELEUR, EUSE n. (1797,
n. m.) ; ce dernier est rare, du fait de l'emploi normal de
cordonnier*.
■
DESSEMELER v. tr. (1839) est un terme technique, surtout employé au participe passé.
L +
SEMER v. tr. est issu (v. 1118) du latin classique seminare « semer », employé aussi aux sens de « produire », « procréer » et au figuré en bas latin « répandre, propager ». Ce verbe, rare à l'époque classique, dérive de semen, -inis « semence » et spécialement « semence de blé », d'où « blé ». Semen vient de serere « semer » et « planter » ; ce double sens correspond à une époque ancienne où l'on semait en enfonçant chaque graine dans la terre. Dans les langues romanes, les verbes procèdent de seminare. Le verbe originel, serere, se rattache à une racine indoeuropéenne °sē-, °sə- « semer », également représentée en vieux slave (sĕjǫ), en gotique (saia) et en celtique (sans forme verbale attestée) ; elle n'apparaît pas en indo-iranien.
❏
Le verbe signifie d'abord, comme en latin, « répandre en surface ou mettre en terre (des semences) », d'où par extension « ensemencer ». Dans de nombreux usages régionaux (surtout dans l'Ouest, le Centre et le Centre-Sud de la France)
semer se dit pour « mettre en terre (des pommes de terre pour la reproduction) ».
◆
Il s'emploie au figuré (
XIIIe s.) au sens de « répandre (des difficultés, des embûches) ». Par métaphore,
semer son venin (
XIIIe s.,
sammer) s'est dit pour « agir méchamment », sorti d'usage, et
semer l'argent pour « être prodigue » (v. 1330).
◆
Par analogie du sens premier,
semer s'emploie concrètement (
XIIIe s. ; par métaphore dès le
XIIe s.) pour « répandre (de petits objets) en dispersant », puis au figuré (
XVe s.) pour « faire courir (des bruits, des nouvelles) ».
◆
Le verbe s'est employé dans de nombreuses locutions comme
semer en l'eau « donner des conseils à qqn qui n'en profitera pas » (1572),
semer un grain d'orge pour attraper un pigeon « donner peu en espérant avoir beaucoup » (1611),
semer en terre ingrate « faire du bien à qqn qui n'en est pas reconnaissant » (1690).
◆
Avec la valeur figurée de « répandre », il se dit (1668) en parlant de réflexions, d'anecdotes, etc., dispersées dans un ouvrage, une conversation ;
semer (qqch.)
de (qqch.) « parsemer » (1671) est aujourd'hui littéraire.
■
Semer a eu en argot (1867) le sens de « jeter à terre », puis (1867) de « fausser compagnie à (qqn) » ; il est employé aujourd'hui familièrement au sens de « se débarrasser de (qqn) en devançant », spécialement en sports (1904).
❏
Plusieurs dérivés sont usuels.
SEMÉ, ÉE adj. s'emploie spécialement en vénerie, autrefois dans
tête semée, à propos d'un cerf qui a tous ses andouillers (1552), puis dans
andouillers mal semés « dont le nombre n'est pas égal de chaque côté », d'où
cerf mal semé (1762),
tête mal semée.
◆
Par ailleurs, l'adjectif s'applique en blason (1529) à un écu dont les pièces, en nombre indéterminé, sont répandues de telle sorte qu'elles se perdent sur les bords.
■
SEMEUR, EUSE n. « personne qui sème du grain », d'abord semeour (v. 1180), semere (v. 1220), écrit semeur au XIVe s. (1377), est demeuré usuel jusqu'à la mécanisation de l'agriculture (Cf. le geste auguste du semeur, chez Hugo).
◆
Le mot s'emploie aussi au figuré (déb. XIVe s.), par exemple dans semeur de discorde (XVe s.), semeur de faux bruits (1694).
◆
Ce mot est rare au féminin, sauf à propos du motif symbolique de la Semeuse (sur les timbres français du début du XXe s.).
◆
SEMEUSE n. f. (1875) désigne aussi une machine qui sert à semer.
◈
SEMAISON n. f., d'abord
semoison avec des variantes, signifiait « action de semer » (
XIIe s.) et « temps des semailles » (1351,
senison) ; il est sorti d'usage.
◆
Il s'est aussi employé pour désigner (1842) l'ensemencement naturel par dispersion des graines à maturité.
■
SEMAILLE n. f., d'abord au pluriel (fin XIIe s., semmailhes) puis au singulier (1260) et au pluriel, est dérivé de semer ou issu du bas latin seminalia, pluriel neutre du latin classique seminalis (→ séminal).
◆
Le mot s'emploie rarement au singulier. Il désigne d'abord les grains semés, puis l'action de semer (v. 1270, semenailles en Poitou ; 1549, semailles) et la saison où l'on ensemence les terres (1326). Ces valeurs sont restées courantes.
◈
SEMOIR n. m. désigne d'abord (1328) un sac où le semeur place le grain. Le mot s'est dit d'un terrain où l'on sème des graines d'arbres (1486), parfois en apposition :
champ semoir (1543). Il s'est employé au
XVIe s. pour « race (d'animaux) » (1516), du sens de
seminare « procréer ».
◆
C'est depuis le
XVIIIe s. le nom d'une machine qui sert à semer (1762), et par analogie à répandre l'engrais (1875).
◈
SEMIS n. m. se dit (1742, Buffon) de l'action ou de la manière de semer, de l'opération qui consiste à ensemencer une terre, puis (1753) d'une plante provenant de graines et d'un terrain ensemencé.
◆
Au
XIXe s., le mot désigne par analogie (1841, comme terme de mode) un ornement formé d'un motif de petite taille fréquemment répété.
◆
Il est rare au sens figuré (av. 1880) de « choses dispersées ».
◈
Le verbe a fourni plusieurs composés verbaux préfixés.
■
SURSEMER v. tr. signifie d'abord (v. 1174, sorseimer v. intr.) « se couvrir de taches » en parlant de la peau, d'où sous la forme altérée seursamer « faire devenir lépreux » (1244-1248).
◆
Le verbe signifie ensuite (XIIIe s., sorsemer) « semer une terre déjà ensemencée » et s'est dit pour « jeter çà et là » (1530).
■
RESSEMER v. tr. « semer une seconde fois » (1334) s'emploie aussi pour « ensemencer de nouveau » (attesté 1893).
◆
D'après semis, ce verbe a produit RESSEMIS n. m. (XXe s.).
■
PARSEMER v. tr., d'abord (v. 1480) « répandre », se dit ensuite pour « répandre çà et là (des choses) sur qqch. » (XVIIIe s.). Le verbe a pris la valeur figurée (1777) d'« introduire çà et là (dans un discours, un texte) ». Il est beaucoup plus courant que les deux précédents.
◆
Pour clairsemer, voir ce mot.
◈
SEMENCE n. f. est emprunté (v. 1130) au bas latin
sementia, pluriel neutre du latin classique
sementis, pris pour un féminin singulier.
Sementis « semailles, ensemencement », « époque des semailles », « semence, semis » et « blé en herbe » est dérivé de
semen. Sementis a par ailleurs abouti à l'ancien provençal
semens (1218).
■
Semence se dit en français du sperme, le liquide séminal du mâle et par figure (v. 1120), dans la langue biblique, pour « postérité (d'un mâle) ».
◆
Le mot désigne également tout ce qui se sème de la main de l'homme, spécialement les graines (v. 1160-1170). Il s'est dit (XIIIe s., isolément ; puis 1380) de l'action de semer (→ ci-dessus semaille), encore au XVIIe s. d'où, comme en latin, « temps des semailles » (1611). Ce sens est encore vivant en français d'Afrique. En milieu rural, dans plusieurs régions, semence signifie aussi « plant de pommes de terre ». Voir ci-dessus semer.
■
Par analogie et métonymie (« chose semée »), semence de perles désigne (1418) des perles de très petite dimension, puis (1803) de très petits diamants et par ailleurs des motifs ornementaux parsemés sur une étoffe (1421).
◈
Aux
XVIe et
XVIIe s.,
semence désignait par métaphore (1538) une cause dont les effets se manifestent à longue échéance
(Cf. germe).
◆
Avec l'idée de « petitesse », le mot est entré dans la locution
ce n'est que semence « c'est une chose de peu d'importance » (1573), d'où
semence « chose négligeable » (1611) ; ces emplois ont disparu.
◈
Par analogie (1803),
semences désigne concrètement de petits clous à tête large employés en grand nombre par les tapissiers.
■
Le dérivé SEMENCEAU n. m. (1842) est un terme technique.
■
ENSEMENCER v. tr. (1519), réfection de ensemencier (1355), signifie « pourvoir de semences (un terrain) » et s'est employé pour « féconder » (v. 1550). Le verbe s'emploie aussi figurément (av. 1615) en parlant d'idées, de sentiments.
◆
Par analogie, ensemencer une rivière se dit pour « y mettre des alevins » (1864) et, en sciences (1873), ensemencer un bouillon de culture pour « y mettre des micro-organismes capables de se reproduire ».
◆
Dérivé du verbe, ENSEMENCEMENT n. m. (1552 ; 1600, pour un étang) s'emploie aussi au figuré.
◆
Le composé RÉENSEMENCER v. tr. (1845), terme d'agriculture qui a fourni RÉENSEMENCEMENT n. m. (1845), s'est substitué à rensemencer v. tr. (1549), rensemencement (1836).
❏ voir
CLAIRSEMER, DISSÉMINER, INSÉMINATION, INSÉRER, SAISON, SÉMILLANT, SÉMINAIRE, SÉMINAL.
SEMESTRE n. m., d'abord attesté comme adjectif (mil. XVIe s., Ronsard) puis comme nom (v. 1596), est un emprunt savant à l'adjectif du latin semestris « de six mois », « d'une durée de six mois », composé de sex (→ six) et de mensis (→ mois).
❏
L'adjectif, appliqué à ce qui reparaît tous les six mois (v. 1550), à ce qui a six mois d'exercice (1564) et à ce qui dure six mois (1584), s'est employé aux
XVIe et
XVIIe s. (encore au
XVIIIe s., à propos d'un parlement).
■
Semestre comme nom désigne une période de six mois consécutifs, spécialement la première ou la deuxième moitié d'une année (1680, semestre d'hiver, d'été, termes administratifs).
◆
Comme terme d'histoire, il s'est dit de la moitié d'une compagnie (Chambre des comptes, etc.) qui, sous l'Ancien Régime, siégeait six mois et, par ailleurs (1596), d'un emploi qui dure la moitié de l'année.
◆
Par métonymie, le mot a désigné un congé de six mois accordé à un militaire (1694, servir son semestre) et par métonymie (1771) le militaire en congé, emploi sorti d'usage. Il se dit aujourd'hui (depuis 1829) d'une rente, d'une pension, etc. qui se paie tous les six mois.
❏
Le dérivé
SEMESTRIEL, ELLE adj. a repris (1829) les valeurs de l'ancien adjectif
semestre ; on relève auparavant
semestral (1821).
■
En dérivent (1873) SEMESTRIALITÉ n. f., didactique et rare, et SEMESTRIELLEMENT adv.
❏ voir
TRIMESTRE.
SEMI-, premier élément, est employé dans la composition de mots techniques, scientifiques ou d'usage général ; il reprend le latin semi- « demi, moitié », utilisé comme premier terme de composés. En latin, les mots ainsi formés appartiennent souvent à la langue littéraire, sur le modèle du grec hêmi- (→ hémi-). À semi- correspondent l'ancien haut allemand sāmi-, le sanskrit sāmi ; ces éléments se rattachent à une base indoeuropéenne °sēmi- indiquant ce qui n'a qu'un côté ; la racine °sem- de °sēmi-, qui exprime l'unité, se retrouve par exemple dans le latin simplex (→ simple), simul, similis (→ similaire ; ensemble).
◆
Semi- est en concurrence avec demi-.
◆
Une semi se dit pour semi-remorque (→ remorque), un semi pour camion semi-remorque.
❏ voir
aussi FINIR (SEMI-FINI), PERMÉABLE, PUBLIC, SEIME.
SÉMILLON n. m., attesté en 1736 (Pierre Rézeau), est un emprunt à l'occitan semilhoun dérivé de seme, ancien occitan sem, du latin semen « semence », comme nom d'un cépage blanc à gros grains sphériques, donnant des raisins très sucrés.
SÉMILLANT, ANTE adj. est issu (1546) par changement de suffixe de l'ancien adjectif
semilleus « rusé, astucieux » (v. 1270), « inquiet, capricieux, remuant » (
XVe-
XVIe s.,
semilleux), dérivé de l'ancien français
semille n. f. « action valeureuse » (fin
XIIe s.) ou « mauvaise » (1226).
Semille a pour sens premier « progéniture, descendance de bonne ou mauvaise origine » (1170), considérée comme la production d'un certain personnage. Ce mot est un diminutif de l'ancien français
saimme « origine », appliqué à une qualité morale, spirituelle (v. 1220).
Saimme était issu du latin
semen « semence »
(→ semer).
■
L'ancien français a aussi le verbe semiller « se donner beaucoup de peine (dans un but malicieux) », dérivé de sémille. Sémiller a été repris au XVIe s. au sens de « s'agiter, se donner du mouvement », d'après le sens de sémillant « vif et gai, qui déploie une grande vivacité d'esprit, de manières (en parlant d'une personne, de l'esprit, du style, etc.) », puis le verbe est sorti d'usage.
❏
L'adjectif, demeuré le seul témoin de cette famille de mots, a souvent une connotation plaisante ou ironique, notamment en parlant d'un comportement galant.
SÉMINAIRE n. m. est emprunté (1551) au latin classique seminarium « pépinière » et au figuré « source, origine, principe, cause », substantivation de l'adjectif seminarius « relatif aux semences », dérivé de semen (→ semer). Le mot en latin ecclésiastique (1545) désigne un établissement où l'on prépare des jeunes gens à l'état ecclésiastique.
❏
Séminaire reprend d'abord un sens du latin classique, « principe vital d'un phénomène », disparu. Il est repris dans le vocabulaire de l'éducation religieuse (2
e moitié
XVIe s.) ; de là, il s'est employé en parlant d'un milieu dans lequel on se forme à une profession (1570) puis, de façon plus restreinte, d'un lieu (1636).
■
La valeur étymologique s'est conservée dans deux emplois. Le premier est adjectif, séminaire qualifiant (1534) ce qui contient la semence, par emprunt au latin. L'adjectif réapparaît au XVIIIe s., d'après un sens de semen « grain », dans pierre séminaire « qui paraît composée d'un amas de graines » (1765), mais cet emploi est sorti d'usage.
◆
Le nom a aussi le sens propre de « pépinière » (1599), encore relevé en 1700. Par analogie, il a été employé pour « endroit où l'on élève de jeunes animaux » (1600). Dans la langue classique, il désigne aussi abstraitement une cause (av. 1615), par reprise du latin. Tous ces emplois sont sortis d'usage.
■
Seul l'emploi pour « établissement de formation » a survécu après le XVIIIe s., cette acception donnant lieu à des syntagmes comme petit séminaire (1681) puis grand séminaire (attesté 1876). Par métonymie, le mot désigne les élèves et les maîtres du séminaire (1718), le temps d'études (v. 1770) et les bâtiments d'un séminaire (XIXe s.).
■
Au XIXe s., séminaire désigne (1845) divers établissements d'instruction publique en Allemagne, par emprunt à l'allemand Seminar, de même origine. Par un autre emprunt à l'allemand, séminaire se dit (1893) d'un groupe de travail dirigé par un professeur et consacré à un domaine particulier de connaissances. Par extension, il s'emploie pour une réunion de spécialistes, en concurrence avec colloque, table ronde etc., acception répandue vers 1950 ; cette valeur s'est répandue avec la pratique dans la vie professionnelle (séminaire de vendeurs, etc.).
❏
Le dérivé SÉMINARISTE n. m. et adj. est resté dans le vocabulaire ecclésiastique (1609) avec des connotations figurées assez péjoratives (naïveté, bigoterie). Il est rare comme adjectif (1829) et n'est guère employé en français d'Europe, à la différence du français d'Afrique, avec les valeurs modernes, non ecclésiastiques, de séminaire.
SÉMINAL, ALE, AUX adj. est un emprunt (1372) au latin seminalis « destiné à être semé », spécialement employé au pluriel (seminalia) comme nom au sens de « terres ensemencées », « moissons », et signifiant aussi « prolifique » ; le mot dérive de semen (→ semer).
❏
D'abord employé dans l'expression didactique disparue vertu séminale « qui se rapporte à la semence », l'adjectif s'applique (1555) à ce qui est relatif au sperme.
◆
Il a qualifié (1611) ce qui concerne les graines des plantes dans lobes séminaux « cotylédons » (1765), feuilles séminales (1835), valeurs archaïques. Il a aussi vieilli comme terme de philosophie, reprenant le premier emploi du mot, dans raison séminale du monde « union de l'intelligence et de l'âme » (1842), à propos du néo-platonisme, mais existe encore didactiquement.
❏
SÉMINIFÈRE adj., tiré du latin semen, inis « semence » et -fère (1803), signifie « qui porte des graines » et (1812) « qui conduit le liquide spermatique » (d'un conduit anatomique).
SÉMIOLOGIE, SÉMIOTIQUE → SÉMANTIQUE
SÉMITE n. et adj. a été dérivé (1845), après sémitique (ci-dessous), de Sem, du latin Sem, nom d'un fils de Noé qui, selon la Bible (Genèse, X, 2, 11), vécut six cents ans et dont la postérité, avec celle de ses frères Japhet et Cham, forma tous les peuples de la Terre.
❏
Le mot désigne une personne qui appartient à un groupe ethnique originaire d'Asie occidentale, dont les peuples parlent ou parlèrent des langues apparentées, dites sémitiques (ci-dessous).
◆
Abusivement, le nom s'applique (1884) aux Juifs seuls (1893, adj.), alors que le concept englobait les Arabes.
❏
SÉMITIQUE adj., dérivé savant de
Sem (
XVIe s. ; aussi en allemand
semitisch, fin
XVIIIe s.), est vieilli dans son emploi général pour qualifier ce qui est relatif aux Sémites. Il est utilisé en linguistique pour qualifier (1813) et désigner comme nom masculin (1882) le groupe de langues comprenant l'arabe, l'hébreu, caractérisé par des structures communes.
■
SÉMITISME n. m., terme didactique pour « caractère de ce qui est sémite » (1857, sémiticisme 1848), a été repris à la fin du XIXe s. par les théoriciens racistes. Le mot est archaïque.
■
SÉMITISANT, ANTE adj. et n., « qui étudie les langues et les civilisations sémitiques » (1862, Sainte-Beuve), a remplacé sémitiste n. (1875).
◈
De l'emploi péjoratif et raciste de
sémite pour « juif » vient le composé
ANTISÉMITE n. (attesté 1889) et
adj. (1896), d'où
ANTISÉMITISME n. m. (1886, Drumont), d'après l'allemand
Antisemitismus (v. 1880), et
ANTISÉMITIQUE adj. (1882
adj. ; 1883,
L'Antisémitique, nom d'un journal ; puis 1887, Goncourt), qui a disparu.
◆
Tous ces mots ont été formés à la fin du
XIXe s., quand se développa en France un mouvement raciste et xénophobe d'hostilité contre les juifs. Chez les propagandistes de l'époque, l'antisémitisme prétend combattre le « sémitisme » attribué aux juifs et supposé être nuisible à la civilisation dite « aryenne » ; cette interprétation pseudo-historique n'est plus retenue, et les mots
antisémite, antisémitisme ne concernent plus aujourd'hui que le racisme antijuif.
SEMNOPITHÈQUE n. m., mot de Cuvier (1816), est composé du grec semnos « majestueux, vénérable » et de pithekos « singe » pour dénommer un grand singe à longue queue, qui vit en groupes dans les forêts d'Asie méridionale.
SEMONCE n. f., réfection (
XIIIe s.) de
summunse (v. 1050),
cemonse (v. 1190), est le participe passé substantivé de
somondre (v. 1050), puis
semondre (v. 1175), verbe issu par évolution phonétique du latin populaire
°submonĕre (premier
e bref) « avertir secrètement », en latin classique
submonēre (premier
e long). Ce verbe latin est composé de
sub-, marquant une action faite à la dérobée
(→ sous), et de
monere « faire songer à qqch. », « avertir, engager », « instruire » et « annoncer »
(→ moniteur, montrer, prémonition), qui se rattache à une racine indoeuropéenne
°men- « avoir une activité mentale »
(→ mental). Monere avait abouti à l'ancien provençal
moinner v. tr. « avertir de », « rappeler qqch. » (
XIIIe s.) et à l'espagnol
muñir « inviter ».
Semondre v. tr. « exhorter (à faire qqch.) » et « prier avec insistance, inviter » (v. 1050) s'est maintenu jusqu'à l'époque classique ; en 1694, l'Académie constate qu'il ne s'emploie qu'en parlant des noces, puis le donne pour vieilli en 1718. Il était encore d'usage régional au XIXe s. (chez G. Sand au sens d'« inviter à une noce »). Il a eu d'autres sens en ancien français : « inviter (qqn) à faire qqch. », « convoquer des vassaux » (1080), « sommer (qqn) de s'expliquer sur un fait » (v. 1155), « convoquer en justice » (v. 1200) puis « avertir en adressant une réprimande » (fin XVe s.), d'où à l'époque classique « réprimander » (1658). À partir du XVe s., il est concurrencé par semoncer (ci-dessous).
❏
Semonce apparaît avec le sens d'« invitation (à faire qqch.) », qui se maintient à l'époque classique, et a signifié spécialement (v. 1155) « appel du roi, ou du seigneur, à ses vassaux ».
◆
Pour « invitation à une noce » (v. 1534), qui correspond à une valeur importante du verbe semondre, il est déjà noté « vieux » en 1680. Semonce s'applique ensuite à une chose dont on fait part, à une convocation en justice (v. 1190), puis au bannissement (1467).
◆
Il équivaut à partir du XVIe s. à « avertissement » et, de façon plus restreinte (mil. XVIIe s.), désigne un avertissement sous forme de reproches, sens resté vivant dans un registre soutenu. Par extension, il s'emploie spécialement en marine pour l'ordre donné à un navire de montrer ses couleurs (v. 1720), en particulier dans coup de semonce (1803), locution entrée dans l'usage courant au figuré pour « avertissement avec menace ».
❏
En dérive SEMONCER v. tr., attesté isolément au XIIe s. (semonser), repris vers 1400, alors en concurrence partielle avec semondre, pour « convoquer (des vassaux) », puis « convoquer en justice » (1244, cemonser), « à une cérémonie » (1542) encore à l'époque classique.
◆
Le verbe est vieilli au sens de « réprimander » (1798) et ne s'emploie plus qu'en marine (1842).
SEMOULE n. f. est l'altération (1650, Ménage) de semole (1583 ; encore chez Oudin, 1660), emprunt à l'italien semola, lui-même pris au bas latin simola, altération du latin impérial simila « fleur de farine », mot d'origine méditerranéenne.
◆
Ce mot de civilisation, également repris par l'ancien haut allemand simila, semala, d'où l'allemand Semmel, a donné l'espagnol sémola, le portugais semea ; l'anglais semolina est emprunté à l'italien semolina (diminutif). Par ailleurs, plusieurs formes d'ancien français viennent de simila : simle n. m. (v. 1180, en Picardie), simbre (v. 1210), semble en Wallonie, etc., puis symel en Flandres au XVe s. et enfin, par croisement avec l'italien, symole (1505) pour simole. La prononciation avec l mouillé se maintient au XIXe s., c'est « la plus usuelle mais elle n'est pas fondée » selon Littré ; elle explique la graphie semouille, par exemple chez Huysmans.
❏
Le mot désigne (1505, symole) des grains de céréales concassés et débarrassés de leur enveloppe, puis une fine farine importée d'Italie (1583, semole) et en général la farine de froment (1694).
◆
Semoule blanche « semoule de riz » (1845) a disparu ; sucre semoule (mil. XXe s.) se dit par analogie d'un sucre en poudre. L'utilisation culinaire est concernée, par exemple dans gâteau de semoule et à propos du couscous* maghrébin.
◆
L'expression imagée pédaler dans la semoule (années 1980) « être perdu, inefficace » utilise une métaphore réalisée par plusieurs noms d'aliments pâteux ou en poudre (choucroute, yaourt...).
❏
Semoule a fourni les dérivés techniques SEMOULERIE n. f. (1930) et SEMOULIER, IÈRE n. (mil. XXe s.).