SENSORIEL, ELLE adj. est formé savamment (1839) à partir du bas latin sensorium « organe d'un sens », du latin classique sensus « action de percevoir » (→ 1 sens) ; on a d'abord dit sensorial (1830). Le moyen français sensoire (1541), issu du latin, s'est employé avec le même sens.
❏
L'adjectif s'applique à ce qui concerne les modalités différentes de la sensation (« organes des sens »), puis qualifie ce qui est relatif à la sensation sur le plan psychophysiologique (1904, localisations sensorielles). Dans l'usage général, sensoriel et sensible peuvent être synonymes.
❏
Le mot a fourni des dérivés et des composés didactiques comme
SENSORIALITÉ n. f. (mil.
XXe s.) et
SENSORIMOTEUR, TRICE adj. (1879), « qui concerne à la fois les fonctions sensorielles et la motricité ».
◈
SENSORIUM n. m., emprunt au latin (1718), désignait la partie du cerveau qu'on pensait être le centre de toutes les sensations. Ce terme didactique se disait aussi (1762) de l'organe où l'on croyait que s'opérait la synthèse des impressions permettant la perception d'un objet unique ; on a dit également
sensorium commune (1801 ; du neutre du latin classique
communis « commun* »). Ces valeurs correspondaient à des hypothèses psychophysiologiques mécanistes, prolongement de celles de Descartes.
◆
Le mot est aussi sorti d'usage au sens de « système nerveux central », « cerveau » (1852) en tant que centre des sensations.
◈
SENSORIMÉTRIE n. f. (mil.
XXe s.) désigne l'ensemble des méthodes étudiant les variations de la sensation par rapport à celles du stimulus.
SENSUEL, ELLE adj. est emprunté (v. 1370) au latin ecclésiastique sensualis « relatif aux sens », « doué de sensation », dérivé du latin classique sensus « action de percevoir, de sentir, de comprendre » (→ 1 sens), lui-même de sensum, supin de sentire (→ sentir). La forme sensual est attestée isolément au XIVe siècle.
❏
L'adjectif s'applique à ce qui est propre à procurer le plaisir des sens, valeur demeurée usuelle.
◆
Il se dit aussi de ce qui émane des sens, des qualités sensibles (1541).
◆
Il qualifie ensuite (1636) une personne portée à rechercher tout ce qui flatte les sens (substantivé fin XVIIe s.) et notamment ce qui évoque un caractère voluptueux (1690).
❏
L'adverbe
SENSUELLEMENT a signifié (
XVe s., avec un seul
l) « par le moyen des sens ».
◆
Il s'emploie aujourd'hui (depuis 1548) avec la valeur moderne de
sensuel.
◈
SENSUALITÉ n. f., réfection graphique (v. 1265) de
sensualiteit (v. 1190), est emprunté au latin ecclésiastique
sensualitas « sensibilité », dérivé de
sensualis.
◆
Le mot s'est dit de l'activité des sens (v. 1265), correspondant alors à
sensibilité.
◆
La valeur moderne, attestée avant celle de
sensuel (1486), concerne le tempérament d'une personne qui recherche les plaisirs des sens et, plus couramment, la recherche de ce qui est propre à satisfaire les sens, la sexualité (
XVIIe s.).
◆
Dans le vocabulaire religieux, il s'est employé au singulier (1636) et au pluriel (1671) au sens de « plaisir(s) sensuel(s) »
(une, des sensualités) ; cet emploi a disparu.
◈
SENSUALISME n. m., terme répandu par V. Cousin, a été dérivé savamment (attesté en 1803, Boiste) du latin
sensualis. C'est le nom donné à la doctrine philosophique élaborée par Condillac, d'après laquelle l'ensemble des connaissances vient des sensations ; on a dit aussi
sensationnisme (→ sensation) pour éviter la confusion avec l'acception moderne de
sensuel, notamment quand le mot a été repris comme terme de morale (1841) désignant la recherche des plaisirs des sens.
◆
Le dérivé
SENSUALISTE n. (1801, Villers, traducteur de Kant) et
adj. (1842) est aussi un terme d'histoire de la philosophie.
L
SENTE n. f. représente l'aboutissement (v. 1155) du latin classique semita « petit chemin de traverse, sentier, trottoir, ruelle », dont l'origine n'est pas éclaircie.
❏
Sente conserve le sens latin de « petit chemin, sentier », aujourd'hui dans un usage régional ou très littéraire.
❏
SENTIER n. m., d'usage plus général et demeuré courant, est issu (v. 1150, sous cette forme) du latin populaire
°semitarius, en latin médiéval
semtero (908), devenu au
XIIe s.
senterium (1184). La forme représente la substantivation de l'adjectif du latin classique
semitarius « de ruelle, qui se tient dans les ruelles », dérivé de
semita. Le latin a abouti en ancien français aux variantes
senter (1080),
sentir (v. 1190),
semter (1400),
sendier (v. 1430), etc., et par ailleurs à l'ancien provençal
sendier (v. 1135), à l'italien
sentiero, au portugais
sendeiro.
◈
Le mot apparaît (1080) avec le sens de « chemin étroit, utilisé par les piétons, dans la campagne, les bois », valeur qui s'est conservée au cours des siècles.
◆
On relève dès le
XIIe s. (v. 1190) l'emploi par figure pour « voie morale » avec l'idée d'étroitesse, et donc de difficulté ; de là les locutions figurées
les sentiers des justes « la bonne voie » (1672),
les sentiers peu battus (1678) et, toujours en usage,
les sentiers battus (1796) « les voies les plus banales », avec l'idée de lieu commun.
◆
Être sur le sentier de la guerre « prêt à partir en guerre » (1872), calque de l'anglais, est employé à propos des Indiens d'Amérique du Nord.
◆
L'expression
le Sentier lumineux, calque de l'espagnol
Sendero luminoso, est le nom d'un mouvement de guérilla péruvien, créé en 1970, militarisé en 1980 et responsable de violences et d'enlèvements, dans sa lutte contre le gouvernement du Pérou.
SENTENCE n. f. est un emprunt (v. 1175 en droit religieux, puis 1283 en droit laïc) au latin sententia « façon de sentir, de penser », spécialisé dans la langue du droit pour « avis (donné au sénat), vote ». Il s'emploie aussi en rhétorique au sens de « phrase, période » et en particulier de « trait qui termine la phrase », d'où « maxime » ; dans la langue philosophique, il traduit le grec doxa « opinion » (→ doxa). Sententia dérive, par l'intermédiaire d'un substantif °sentens (non attesté), du verbe sentire « éprouver (un sentiment, une sensation) », « avoir un avis et l'exprimer » et, spécialement, « voter » (→ sentir).
❏
Sentence emprunte d'abord au latin le sens de « pensée, opinion exprimée d'une manière dogmatique », valeur devenue archaïque (Cf. maxime), puis celui de « jugement », en particulier (v. 1190) « jugement de Dieu », acception disparue. De là vient le sens de « jugement rendu par les différents degrés de la juridiction ecclésiastique » (XIIIe s.) toujours vivant en droit canon, par exemple dans sentence d'excommunication. Le mot désigne aussi en droit (1283) un jugement rendu par des juges et spécialement un jugement qui prononce la peine capitale (1553 ; 1778, sentence capitale). Par extension, il se dit d'une décision, d'un jugement quelconque, favorable ou pas (v. 1470).
◆
Avec la valeur de « maxime », le mot s'emploie dans la locution ne parler que par sentences (1680) « affecter de parler gravement et par lieux communs ».
❏
Le dérivé
SENTENCIER v. est sorti d'usage aux sens d'« ordonner (qqch.) par jugement » (1310, comme transitif) et de « condamner (qqn) par une sentence » (1530). Il est didactique et rare en emploi intransitif pour « prononcer une sentence » (1318).
◈
SENTENCIEUX, EUSE adj., attesté isolément au
XIIIe et repris au début du
XVIe s., est emprunté au latin
sententiosus « riche d'idées, de pensées », dérivé de
sententia.
◆
Sorti d'usage pour qualifier une personne qui s'exprime par maximes (
XIIIe s.) ou un discours (1549,
sententieux), l'adjectif se dit encore (v. 1670), avec une connotation péjorative ou ironique, pour qualifier un ton, un comportement, etc. d'une gravité affectée.
◆
En dérive
SENTENCIEUSEMENT adv. (1599 ; 1546,
sententieusement), d'emploi littéraire.
SENTEUR, SENTIMENT, SENTIMENTAL → SENTIR
SENTINE n. f., réfection (XIIIe s.) de sauntine (1165-1170), est emprunté au latin sentina « endroit de la cale où s'amassent les eaux » et au figuré « rebut, lie » ; aucun rapprochement n'a pu éclairer l'origine de ce mot.
❏
Sentine a désigné (1165-1170) une sorte de bateau plat.
◆
Au figuré il s'est employé (v. 1185), comme en latin, pour un milieu où règne le vice, emploi littéraire.
◆
Il est sorti d'usage pour « état d'abaissement » (v. 1190).
◆
Le mot a également repris (v. 1200, santine) le sens propre du latin. Avec la valeur initiale, il a désigné (1438) un bateau plat utilisé pour le transport du sel sur la Loire, acception encore relevée en 1771.
◆
Au sens de « lieu sale et humide » (1834), le mot est très littéraire.
SENTINELLE n. f., apparu au XVe s. chez Basselin, selon Littré, puis au XVIe s. : centinelle, 1540 ; 1546 (Rabelais), est emprunté à l'italien (far la) sentinella « faire le guet », dérivé de sentire « entendre », du latin classique sentire (→ sentir). Le mot est parfois masculin chez certains auteurs (1798, Académie).
❏
Sentinelle désigne une personne armée, généralement un homme, qui fait le guet (Cf. guetteur), aujourd'hui qui a charge de protéger un lieu public, de surveiller un lieu occupé par l'armée (1690). Du premier emploi vient le sens de « guet, surveillance » (1553), qui ne survit que dans quelques expressions comme faire la sentinelle (1636), calque de l'italien, faire sentinelle (1668), sentinelle perdue « placée dans un poste avancé et dangereux » (1580), plus ou moins sorties d'usage.
◆
La locution en sentinelle (1580) signifie « en observation », d'où mettre qqn en sentinelle (1694).
◆
Par comparaison, le mot s'emploie trivialement pour « excrément humain (dressé ou isolé comme une sentinelle) », d'abord dans poser une sentinelle (1640), puis employé seul (1848), emploi vieilli.
◆
Avec l'idée de « surveillance », le mot s'est employé au figuré (1659) pour parler d'une personne qui veille à la conservation de certaines valeurs. Outre le sens initial, militaire, le mot ne s'emploie plus guère que dans en sentinelle et, par analogie (mil. XVIIIe s.), à propos d'une personne ou d'un animal qui veille.
L +
SENTIR v. est issu (fin XIe s.) du latin classique sentire « percevoir par les sens ou par l'intelligence », puis « être d'un certain avis » et, spécialement dans la langue juridique et politique, « décider, voter », généralement « se rendre compte », « avoir dans l'esprit, penser » et par ailleurs « être affecté par qqch. ». Ce verbe, dont l'origine est obscure, est cependant rapproché de l'irlandais sét « chemin », du gotique (ga)-sinþa « compagnon de voyage » (ancien haut allemand sindōn « voyager » ; allemand sinnen « méditer » ; → 2 sens).
❏
Sentir, verbe transitif, signifie « être informé par les sens ou la sensibilité (quant à un fait, une qualité, etc.) » (fin
XIe s.) et « connaître ou reconnaître par l'intuition » (1080),
se sentir (et adjectif) équivalant à « avoir conscience de son propre état ». Le verbe s'emploie aussi absolument (v. 1175). Il a les valeurs spéciales (v. 1119) de « percevoir par l'odorat » (v. 1120), valeur demeurée très courante, mais aussi de « percevoir par le toucher » et même (v. 1180) « percevoir par le son », valeur disparue.
◆
Par extension, on a dit en ancien français (
XIIe s.)
sentir une femme pour « la posséder ». Toujours au
XIIe s.,
sentir, dans le domaine affectif, se dit pour « être affecté agréablement par (qqch.) » et « recevoir une impression morale » (v. 1190). Au début du
XIIIe s.,
faire sentir (qqch.) à (qqn) signifie « faire qu'il en prenne conscience » (1221). La plupart de ces emplois d'ancien français ont disparu, à l'exception de la connaissance intuitive et de la spécialisation pour l'odorat. Cette dernière correspond d'ailleurs à l'emploi du verbe avec un complément exprimant une qualité du sujet, avec le sens de « dégager l'odeur de » (1320). Cette valeur, en emploi transitif et absolu, se développera à partir du
XVIe s. (voir ci-dessous).
Avec l'idée de « connaissance » correspondant à la première valeur de 1 sens, sentir équivaut à « savoir (pour l'avoir appris) » (XIVe s.), sens disparu comme la locution sentir qqch. à (ou de) qqn « s'informer auprès de qqn », mais faire sentir « faire comprendre » (1440-1475) est restée vivante (il lui a fait sentir sa force, qu'il était fort).
◆
Cet emploi, probablement par l'intermédiaire des dialectes et d'usages régionaux, aboutit en français du Canada à un emploi pour « chercher à connaître un secret, espionner », d'où le dérivé senteux (ci-dessous).
◆
Se sentir de pour « se considérer comme capable de » (fin XIVe s.) est aujourd'hui remplacé par le composé se ressentir, sauf en emploi négatif (il ne se sent pas de...) tandis que sentir qqn « tâter le terrain avant de commencer des pourparlers » (1440-1475) est sorti d'usage.
◆
Avec un nom de chose pour sujet, le verbe signifie au figuré « évoquer à l'esprit l'idée que, donner une impression de », avec des locutions comme sentir le paysan (1527), cet ouvrage sent l'huile « a coûté beaucoup de veilles » (1534), sentir la chair, en parlant de propos grivois (v. 1550), emplois disparus ou archaïques. Sentir son bien « être bien né, bien élevé » (1566) se maintient encore à la fin du XVIIIe s. ; les locutions métaphoriques du même type sont très nombreuses : on a encore par exemple au XVIIe s. cela sent la vieille guerre « cela n'est pas à la mode » (1611), disparue, cela sent le gibet, la corde (1667), cela sent le corps de garde (1686) ; la locution métaphorique sentir le terroir se dit d'un goût ou d'une personne, puis (1718) d'un ouvrage. Familièrement, ça sent le sapin (le cercueil) s'emploie pour « la mort semble proche ».
Au sens déjà ancien (fin XIIe s., ci-dessus) de « percevoir par l'odorat », sentir ajoute celui de « chercher à percevoir une odeur, humer » (1530). À la même époque, la valeur complémentaire de « dégager une odeur » (attestée mil. XIIIe s.) devient usuelle, notamment avec les expressions sentir bon, mauvais (1530 ;1640, intr.) ; sentir mal « mauvais » (1538) est considéré comme un gasconisme. Sentir s'emploie aussi absolument pour « sentir mauvais » (1640). Plusieurs expressions correspondent à l'idée de « mauvaise odeur » : cela sent son épaule de mouton (fin XVIe s.), sentir le lapin (1867). Par métaphore, sentir mauvais et ne pas sentir bon correspondent (1835) à « les choses vont mal tourner ».
■
Dans l'ordre abstrait, en relation avec 1 sens et avec sentiment, le verbe signifie depuis le XVIe s. « prendre, ou avoir conscience de (qqch.) d'une façon plus ou moins nette » (v. 1550), d'où sentir que (fin XVIe s.) et se sentir, réfléchi indirect (1580), « sentir comme étant en soi ou à soi » (se sentir le courage de).
◆
La valeur abstraite du verbe est parfois recouverte, en français moderne, par la métaphore de l'odorat, cet emploi de sentir étant plus courant. Le verbe est vieilli pour « avoir le goût de » en parlant d'un plat, d'une boisson (1636).
◆
À l'époque classique, la valeur intellectuelle, appréciative du verbe est renforcée par l'emploi pronominal et par le factitif ; se sentir signifiait (v. 1650) « savoir de quoi on est capable », « être maître de soi » ; il ne s'emploie aujourd'hui que sous la forme négative, par exemple dans ne pas se sentir de joie (1668) ou encore ne pas se sentir (1665), ne plus se sentir. Faire sentir (1669) signifie « faire ressentir (qqch.) », par exemple dans un texte, mais aussi avec une valeur générale (v. 1750), et se faire sentir, d'une chose, « devenir sensible » (1690). Sentir qqch. pour qqn « l'aimer » (1672) a été remplacé par ressentir.
◆
Sentir qqn de loin « deviner ses intentions » est relevé en 1670 (une expression équivalente est voir venir) et sentir qqch. de loin en 1690.
◆
Le verbe s'emploie dans l'ordre esthétique pour « apprécier » (1694, sentir la musique). La locution ne pas pouvoir sentir qqn « avoir de l'aversion pour lui » (1788) donne au verbe la valeur de « supporter », par spécialisation de « percevoir vivement », et est souvent interprétée comme « percevoir l'odeur de » au figuré, d'où je ne peux pas le piffer (de pif « nez »).
❏
SENTIMENT n. m. représente une réfection (1314) de l'ancien français
sentement (v. 1190), dérivé de
sentir ; la plupart des emplois de
sentement sont repris par
sentiment, qui s'impose à partir du
XVIe siècle.
■
Sentement, puis sentiment désigne le fait de percevoir, de sentir ; cette acception est archaïque, y compris dans la locution perdre le sentiment « s'évanouir » (1667), où sentiment correspond à conscience.
◆
En vénerie (1538, sentement), le mot désigne l'odorat des chiens de chasse et l'odeur qu'ils perçoivent. À la même époque, le mot se dit de l'état ou de la modification suscitée par une stimulation, sens repris par sensation.
■
Sentement (XIIIe s.), sentiment (1559) avait pris le sens de « capacité d'apprécier un ordre de choses, une valeur morale, esthétique » (Cf. les emplois correspondants de 1 sens). Le mot a eu (v. 1210) le sens de « connaissance ».
◆
Dès l'ancien français, le mot désigne (1279) un état qui relève de l'affectivité et, spécialement, une tendance affective stable et durable, d'où l'emploi également courant (XIIIe s.) à propos de l'inclination d'une personne pour une autre, qu'il s'agisse d'amour ou d'amitié. Dans ces emplois, sentiment remplace sentement à partir des XVe-XVIe siècles. Le mot a désigné l'action et la faculté de penser (v. 1390), d'où bon sentement pour bon sens (v. 1390 ; → 1 sens), valeur qui ne s'est pas maintenue.
◆
Sentement (fin XIVe s.), puis sentiment (1580) se dit d'une opinion fondée sur une appréciation subjective et non sur un raisonnement logique ; cet emploi fournit au XVIIe s. les locutions au sentiment de « selon l'avis de » (1659), juger par le sentiment (av. 1662) et à sentiments ouverts « sans rien dissimuler » (1667), toutes sorties d'usage, l'acception du mot étant encore en usage dans un registre soutenu et littéraire.
◆
Il désigne (fin XVe s.) la conscience plus ou moins claire que l'on a de qqch. puis (1580) la faculté de connaître plus ou moins immédiatement un objet abstrait, alors opposé à raisonnement et, seulement à partir de la Renaissance (av. 1549, sentiment), la conscience de soi, la connaissance de son existence ; de là vient l'emploi classique en philosophie pour « intuition » (1674, Malebranche).
◆
C'est en moyen français que sentiment développe des acceptions liées à l'ordre affectif, « tendance affective » puis « rancune » (1376), remplacé plus tard par ressentiment et, à l'inverse, « dévouement, zèle » (1642), sorti d'usage.
◆
Les sentiments, en emploi absolu (av. 1678) s'oppose à l'égoïsme, l'intérêt, aujourd'hui dans l'usage familier et parfois ironiquement en locution, par exemple dans ça n'empêche pas les sentiments, compris au sens d'« affection ». Sentiment a désigné aussi (fin XVIIe s.) la disposition à réagir de façon affective à qqch., acception sortie d'usage.
◆
Le mot s'emploie également (av. 1714) pour parler de l'expression des phénomènes affectifs, en particulier dans les arts ; le sentiment, notion essentielle au XVIIIe s., comme sensible* et sensibilité, équivaut (1735) à la vie affective, opposé à l'action, à la raison ; les grands sentiments « les sentiments nobles, généreux » (1766) s'emploie parfois ironiquement pour « sentiments outrés ». C'est l'époque où apparaît sentimental (ci-dessous). Sentiment, dans l'usage familier, correspond à « démonstrations sentimentales », notamment dans les locutions faire du sentiment (1845) et ne pas faire de sentiment (XXe s.) « être pratique et dur ».
◆
Le mot a désigné concrètement (1843) un bijou formé d'un assemblage de tresses de cheveux (marques des sentiments). Cet emploi a disparu.
◆
Sentiments au pluriel (XXe s.) s'emploie avec une valeur affaiblie dans des formules épistolaires de politesse (sentiments distingués, cordiaux, meilleurs sentiments, etc.).
◈
SENTIMENTAL, ALE, AUX adj. et n. apparaît en 1769 dans la traduction de
The Sentimental Journey de Sterne ; le traducteur, J.-P. Fresnais, note : « Le mot anglais
sentimental n'a pu se rendre en français par aucune expression qui pût y répondre, et on l'a laissé subsister. Peut-être trouvera-t-on en lisant qu'il méritoit de passer dans notre langue. » En anglais, le mot était récent (1749), dérivé de
sentiment, lui-même emprunt (
XIVe s.) au français.
■
L'adjectif, rapidement senti comme un dérivé français de sentiment, s'applique à ce qui concerne la vie affective, spécialement aux sentiments tendres, à l'amour ; comme en anglais, il dénote d'abord une certaine élévation de sentiments, mais il prend rapidement une connotation péjorative, qualifiant (1781) ce qui exprime une affectivité un peu mièvre ou artificielle, qui ne manifeste pas une pensée solide (Cf. romanesque). L'adjectif se dit ensuite (1797) de ce qui provient de causes subjectives et affectives, opposé à réaliste, et d'une personne qui donne de l'importance aux sentiments tendres et les manifeste volontiers (1798) ; en ce sens il s'oppose souvent à sensuel.
◆
Le mot est repris en caractérologie (1945, n.), opposé à actif.
■
Le dérivé SENTIMENTALISER v. intr. (1801) et tr. (1845) est peu usité en français, alors que l'anglais to sentimentalize est courant comme verbe intransitif.
■
SENTIMENTALISME n. m. (1801), péjoratif dans l'usage courant, s'emploie en philosophie (1842) comme nom de la morale du sentiment chez Rousseau, Schopenhauer, etc.
■
SENTIMENTALITÉ n. f. désigne (1804) un caractère très ou trop sentimental. Le mot (une, des sentimentalités) désigne une attitude, un geste sentimental (1842) ; cet emploi est vieilli.
◆
Il désigne spécialement le caractère mièvre d'une œuvre (1876).
■
L'adverbe SENTIMENTALEMENT (1827) est assez courant.
◈
D'autres dérivés et composés du verbe
sentir sont usuels ou l'ont été.
■
Le participe présent SENTANT, ANTE, adjectivé, s'applique à un être qui a la faculté d'éprouver des sensations (XIVe s., isolément ; repris en 1611).
◆
L'adjectif a signifié « plein de sentiments » (v. 1360) et « qui répand une odeur » (1538), encore en 1660. Il a vieilli dans tous ses emplois.
■
SENTEUR n. f. apparaît (v. 1354, F. e. w. ; seulement XVIe s. selon T.L.F.) comme terme de vénerie ; il désigne généralement une odeur forte, désagréable (v. 1380) ou plus souvent agréable (1471, au pluriel) ; avec cette dernière valeur, il s'est employé dans la locution de senteur « très odorant » (1514, pomme de senteur). Pois de senteur désigne couramment (1791) la gesse odorante.
■
SENT-BON n. m. est un équivalent familier de « parfum » (1530), employé en français moderne dans le langage enfantin.
■
Le participe passé SENTI, IE adj. et n. m. s'est appliqué (1758) à un sentiment sincère, sérieux puis, dans le domaine des arts, à ce qui est exprimé avec vérité (1770, aussi le senti n. m.).
◆
Bien senti « exprimé avec vigueur » (1876) s'emploie par extension et familièrement en parlant d'un coup (XXe s.).
◆
Le nom, repris au XXe s. en philosophie, désigne ce qui est senti ou ressenti.
◈
SENTEUX, EUSE n. et adj., en français québécois, utilise une valeur ancienne du verbe, « connaître », « chercher à savoir », spécialisée au Canada pour « espionner ». Le mot désigne et qualifie une personne indiscrète, qui cherche à tout savoir d'autrui.
◈
Le préfixé
RESSENTIR v. tr. semble peu employé jusqu'au
XVIe siècle. Comme pronominal (v. 1190,
soi resentir) il signifiait « se sentir de nouveau » et comme transitif (
XIIIe s.) « exhaler l'odeur de », isolément au
XIVe s. « reprendre ses sens ». Ces valeurs ont disparu.
■
Ressentir signifie aujourd'hui « éprouver les conséquences d'un événement » (1557) qu'elles soient avantageuses (1564) ou pénibles (1669). Se ressentir de a signifié « se venger de (une injure, etc.) » ; ressentir qqch., qqn s'est employé (1561) comme ressentir à (déb. XVIIe s.) pour « porter le caractère de (qqch., qqn) », jusqu'à la fin du XIXe siècle.
◆
Le verbe s'emploie aussi pour « sentir vivement (l'effet moral d'une cause extérieure) » (1580), d'où ressentir un outrage, une injure (1617).
◆
Le verbe a été utilisé à l'époque classique aux sens de « reconnaître, discerner (un sentiment, etc.) » (fin XVIe s.), sens assumé aujourd'hui par sentir, et de « se souvenir avec reconnaissance ou avec rancune » (Cf. ressentiment) [1617, aussi pronominal].
◆
Il signifie aussi (1636) « éprouver (une douleur physique) », puis (1644) « être sensible à (ce qui arrive à autrui) » et (1680) « être pleinement conscient de (un état subjectif) » ; se ressentir de s'emploie (1690) au sens de « continuer à éprouver les effets d'une douleur morale ou physique ». Au négatif et suivi d'un infinitif, ne pas se ressentir de..., qui remplace souvent ne pas se sentir*, signifie « ne pas se sentir capable de, disposé à... » Au début du XXe s., s'en ressentir pour équivaut familièrement à « se sentir en bonnes dispositions pour » (1919).
■
Le dérivé RESSENTIMENT n. m. (1558), réfection de recentement (v. 1300) puis resentement (1544), signifie d'abord « fait de se souvenir avec rancune, animosité », seul sens demeuré vivant. De la fin du XVIe au XVIIe s., il s'est dit, en relation avec le verbe, du fait d'éprouver une douleur (1574), une impression morale (1580).
◆
Puis il a eu le sens (1612) de « sentiment éprouvé en retour », encore à la fin du XVIIIe siècle ; on a dit à l'époque classique ressentiment pour « souffrance morale ».
◆
Aujourd'hui, ce substantif spécialisé pour « rancune » n'a plus de rapport sémantique avec le verbe dont il dérive.
❏ voir
ASSENTIMENT, CONSENSUS, CONSENTIR, DISSENSION, PRESSENTIR, 1 SENS, SENSATION, SENSIBLE, SENSITIF, SENSORIEL, SENSUEL, SENTENCE, SENTINELLE.
L +
SEOIR v. intr. est l'aboutissement (v. 1175), par seir (v. 1155), des formes seder (v. 980) puis sedeir (v. 1050), issues du latin sedere, au supin sessum ; ce verbe indique la station assise par opposition à stare « être debout » (→ ester) et à cubare « être couché » (→ concubin, incuber). Sedere a pris de nombreux sens spéciaux dans la langue du droit et du rituel, se disant du magistrat qui siège et de l'augure qui prend les oracles.
◆
Il signifie aussi « demeurer, séjourner » et familièrement « rester inactif » ; en parlant de choses, il a le sens de « rester stable, demeurer fixé ». Sedere se rattache à une base indoeuropéenne conservée sous diverses formes, par exemple hedra « siège » en grec (dont le composé kathedra a donné cathédrale*), saditi « établir » en vieux slave (d'où le russe sadit'sja), satjan « poser » en gotique (Cf. l'anglais to sit « s'asseoir » [→ sit-in] et to set « poser » [→ offset, set], l'allemand setzen, etc.).
❏
Seoir apparaît avec le sens étymologique d'« être assis » (v. 980 ; aussi pronominal), déjà considéré comme vieux à l'époque classique, sauf à l'infinitif, à l'indicatif et à l'impératif présent, mais en général remplacé par s'asseoir*.
◆
Ce verbe reprend ensuite au latin plusieurs acceptions : « être situé (quelque part) » (1160), « séjourner » (1175), sorties d'usage ; « être convenable, bien aller » (v. 1175), littéraire aujourd'hui et rarissime, sauf à l'impersonnel (il sied...).
◆
L'idée de « demeurer » s'est réalisée dans seoir devant « faire le siège de » (v. 1210), celle de « convenir » dans l'emploi pour « avoir lieu à telle date » (XIIIe s.), sens propres à l'ancien et au moyen français.
◆
Seoir s'est employé pour « être assis dans une assemblée » (XIVe s.), encore à l'époque classique, remplacé ensuite par siéger.
❏
Si le verbe n'a plus beaucoup d'usages, certains de ses dérivés et composés sont restés usuels.
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SÉANT, ANTE adj. et n. m., participe présent de seoir, d'abord sedant (v. 1050), est écrit seant depuis La Chanson de Roland (1080) et signifie « assis », aussi dans la locution en seant, puis en son seant (v. 1130), devenue sur son séant (v. 1265), toujours en usage. L'adjectif s'est employé pour « décent, convenable » (v. 1180), sens aujourd'hui littéraire, de même que l'acception « qui convient à (qqch., qqn) » dans séant à (v. 1360) et l'impersonnel il est séant de (1538).
◆
L'adjectif a signifié en ancien et en moyen français « avenant » (XIIIe s.), « bien placé » (1220), « situé » (1278) ; ce sens a disparu. Mais le mot était encore vivant à l'époque classique appliqué à une personne qui siège dans une assemblée (depuis 1440-1475).
■
Au sens de « qui va bien », séant a été remplacé par SEYANT, ANTE (1769 séyant, Restif), variante d'après les formes de l'imparfait du verbe.
■
Substantivé, séant n. m. (1694) se dit familièrement pour « derrière ». Sur son séant « assis » est d'emploi normal et moderne, parfois plaisant.
■
L'adjectif SIS, SISE, du participe passé de seoir, signifie « situé » (1290) et ne s'emploie plus qu'en droit (depuis 1671) ; l'ancien provençal siza se disait (1350) de la position d'un vers.
◈
De
séant dérive
SÉANCE n. f. (
XIIIe s.) qui a d'abord signifié « aptitude, convenance » (1266,
en se seance) et « situation (topographique) ». De là,
à la séance de qqn « selon sa convenance » (v. 1310), encore au
XVIIe s. sous la forme
selon la séance (de qqn) [v. 1650], disparu ensuite.
■
Au XIVe s., séance prend le sens (1356) de « réunion des membres d'une assemblée, d'une compagnie », demeuré usuel en français contemporain.
◆
Le mot s'est employé à l'époque classique pour « fait d'être assis » (v. 1550), sorti d'usage au XVIIe s., et au sens de « droit de siéger dans une assemblée » (1580), d'où avoir séance « siéger, se réunir » (1594). Il s'est dit aussi de la place réservée à un magistrat (1602) et en général du siège où qqn s'asseoit (1606).
■
Au sens moderne, séance désigne par extension (1636) la durée d'une réunion et aussi le temps que l'on passe à table ou dans une visite (1694), cet emploi étant sorti d'usage. Le mot s'emploie ensuite pour la durée déterminée consacrée à un travail, etc. (v. 1784), notamment de la pose chez un peintre (1800).
◆
Séance tenante « au cours de la séance » (1802) se dit au figuré comme locution adverbiale pour « sur-le-champ » (1835).
◆
Séance désigne aussi (av. 1880) le temps consacré à certains divertissements, spectacles. Cette valeur s'est diffusée avec le cinéma (première, deuxième, dernière séance), au sens métonymique désignant le spectacle lui-même, puis au figuré et en emploi familier (mil. XXe s.) le spectacle donné par qqn qui se comporte d'une façon bizarre ou insupportable.
■
PRÉSÉANCE n. f. a été formé (1580) d'après le latin praesidere « être assis en avant » et au figuré « veiller sur », « avoir la préséance » (→ présider). Ce nom désigne le droit de précéder qqn dans une cérémonie protocolaire et, par extension (1686), une prérogative due à l'âge, au rang, etc. Le verbe preseoir, de pré- et seoir, était attesté en ancien français.
◈
Séant a fourni le composé
BIENSÉANT, ANTE adj., d'emploi littéraire, d'abord écrit en deux mots et appliqué (1080) à qqn d'avenant, de bien fait, acception disparue.
Bienséant à (qqn) « qui convient » (
XIIIe s.) est archaïque et littéraire. L'adjectif prend un sens moral et social à partir de l'époque classique.
◆
Il a servi à former
BIENSÉANCE n. f., qui désignait ce qui convient à qqn (1534) et s'employait dans la locution
être à la bienséance de qqn (
XVIe s.) « convenir ».
◆
Le nom se dit (1559) aujourd'hui à propos de ce qu'il convient de dire ou faire selon les usages, dans une société donnée. Le sens de « qualité d'une œuvre qui répond aux critères du goût dominant » (1622) ne s'emploie plus qu'en parlant du
XVIIe siècle.
■
À bienséant s'oppose MALSÉANT, ANTE adj. (1665), « qui ne convient pas » puis « qui n'est pas bienséant », dont dérive MALSÉANCE n. f. (1573), à peu près sorti d'usage.
◈
Des verbes composés à partir de
seoir, restent
messeoir et
surseoir.
■
MESSEOIR v. intr. (v. 1220), de mes- négatif, est employé en ancien français au sens concret d'« être mal placé, mal conformé » et au sens moral de « mal convenir ». Il est inusité aujourd'hui sauf à la 3e personne du présent : il messied « il ne convient pas », très littéraire.
◆
Le dérivé MESSÉANT, ANTE adj., attesté peu avant le verbe (v. 1200) « qui ne convient pas », est archaïque. Il a été substantivé (1250).
◆
MESSÉANCE n. f. (v. 1270) s'est employé jusqu'au milieu du XVIIIe siècle.
◈
SURSEOIR v. tr., réfection (
XIVe s.) d'après
seoir de formes comme
surseair (v. 1090), est composé de
sur- d'après le latin
supersedere « être posé sur » et au figuré « se dispenser de », « s'abstenir de », lui-même de
sedere. La forme
supercéder (1611), précédée par
supercedir en ancien provençal (1456), est empruntée au latin.
◆
Surseoir a signifié « s'abstenir de faire qqch. » (1571,
pron.) puis « remettre à plus tard » (1255,
sourseoir). On ne l'emploie plus que dans la construction
surseoir à (1636 ; fin
XVIe s.,
surséer à).
■
Du participe passé vient SURSIS n. m., d'abord sorsis (XIIIe s., « échappé » ; v. 1175 « envolé », en chasse), repris au sens de « délai, remise » (déb. XVIIe s., sursoy ; forme moderne, XVIIe s., in Furetière) et par métonymie « période où une obligation est remise ». Ce sens est conservé dans l'emploi moderne en droit pénal, concernant la suspension d'exécution d'une peine (peine de prison avec sursis, opposé à ferme).
◆
Le mot a pris une valeur administrative, notamment à propos de l'autorisation de surseoir à l'incorporation dans l'armée, le sursis étant remplacé en 1973 par le report d'incorporation (ci-dessous sursitaire). On trouve en ancien français (1098) sursise n. f. « manquement de qqn qui néglige ce qu'il devrait faire ».
◆
Sursis a pour dérivé SURSITAIRE adj. et n. qui s'est appliqué (1915) à un homme affecté au service civil en temps de guerre, puis (1923) à la personne qui bénéficie d'un sursis, spécialement d'un sursis d'incorporation.
◆
Le participe présent de surseoir a donné SURSÉANCE n. f. (1372), « délai », employé dans la langue classique puis éliminé par sursis.
❏ voir
ASSEOIR, SÉDATIF, SÉDENTAIRE, SÉDIMENT, SELLE, SESSION, SIÈGE ; aussi DISSIDENT, INSIDIEUX, OBSÉDER, POSSÉDER, PRÉSIDER, RÉSIDER, SUBSIDE ainsi que NID et son groupe.
SÉPALE n. m. est la forme francisée du latin scientifique sepalum (1790), mot créé par le botaniste allemand Necker à partir du grec skepê « ce qui recouvre, couverture, protection », sans étymologie établie, croisé avec le latin botanique petalum « pétale ». La forme normale eût été skepalum.
❏
Sépale désigne chaque foliole du calice d'une fleur.
❏
Le mot a fourni en botanique des dérivés et composés : SÉPALOÏDE adj. (1871), de -oïde*, SÉPALAIRE adj. (1877) et des préfixés : MONOSÉPALE adj. (1790), de mono-*, GAMOSÉPALE adj. (1840), de gamo-, du grec gamos « mariage, union » (→ gamète).
SÉPARER v. tr. est emprunté (1314) au latin separare « mettre à part », au propre et au figuré, composé de se- marquant la séparation (→ séduire) et de parare « préparer », « arranger » (→ 1 et 2 parer), lui-même intensif de parere. Parere signifie « procurer » et, par spécialisation, « faire naître » (Cf. parent, primipare, etc.), « produire » ; il se rattache à une racine indoeuropéenne °per- « procurer ». Separare a abouti en français, par évolution phonétique, à sevrer*.
❏
Séparer a d'abord le sens général de « faire cesser d'être ensemble (des personnes, des animaux) ». Au pronominal, le verbe signifie (v. 1398) « se diviser en plusieurs éléments ».
◆
Le transitif s'emploie par extension (1461) pour « désunir (ce qui formait un tout) » et (fin
XVe s.) « constituer une séparation, éloigner (d'une destination) » en parlant d'une distance.
◆
Le verbe prend au
XVIe s. le sens de « diviser, partager » (1538), surtout dans
se séparer (1690), et abstraitement celui de « distinguer, classer par une opération de l'esprit » (1549).
◆
Séparer un combat « le faire cesser en séparant les combattants » a disparu, remplacé par
séparer des combattants (1559).
◆
Dans l'ordre abstrait,
séparer se dit de notions, de qualités pour « distinguer de manière à ne pas confondre » (1629).
◆
Séparer des personnes peut correspondre à « rompre les liens entre elles » (1552), d'où
se séparer (1636) « cesser de vivre l'un avec l'autre » et, en droit,
séparer de corps, de biens (1680) surtout au passif et au
p. p. (
séparé quant aux biens, 1606, puis
séparé de biens).
◆
Se séparer de qqn (
XXe s.), euphémisme pour « congédier qqn », s'est surtout dit à propos d'employés travaillant auprès de leur employeur, dans sa vie privée (domestiques, secrétaires).
■
Avec un sujet désignant la cause, chose ou personne, le verbe signifie (1667) « former un obstacle entre deux personnes » ; avec cette valeur abstraite, séparer signifie aussi (1690) « constituer une différence (entre des personnes, des choses) ».
■
Dans le domaine concret, séparer a aussi le sens (1690) de « diviser (dans l'espace) par une séparation » et se séparer de « se disperser » (1690).
■
Dans le vocabulaire religieux (1697), le verbe s'est spécialisé au sens de « prononcer une sentence d'interdiction », c'est-à-dire « séparer de l'Église ».
❏
Le dérivé du participe passé,
SÉPARÉMENT adv., d'abord écrit
separeement (1370) et sous la forme moderne au
XVIe s. (1538), s'emploie pour « en séparant » et « en étant séparé » au propre et surtout au figuré, abstraitement
(étudier deux cas séparément).
◈
Plusieurs mots de la même famille sont empruntés à des dérivés du verbe latin ou de son supin.
■
SÉPARATION n. f., emprunté (1314) au latin separatio, désigne comme en latin le fait de séparer (des choses, des personnes), le fait de se séparer et son résultat. Le mot a signifié aussi (déb. XIVe s.) « brouille, fait d'être en lutte avec qqn » et (1552) « fait de cesser d'être ensemble ».
◆
Il se spécialise dans le vocabulaire juridique (1636) dans séparation de corps, de biens, plus tard (1845) de dettes.
◆
Il désigne aussi concrètement ce qui sépare (Cf. cloison, mur) et abstraitement l'action de séparer (v. 1700, mur de séparation). Au XVIIIe s., on relève une nouvelle valeur concrète en sciences, séparation des métaux (1718).
◆
Avec l'idée de « disjonction », le mot s'utilise en politique dans séparation des pouvoirs (1791), notion essentielle du parlementarisme, en droit privé séparation des patrimoines (1804), et séparation des Églises et de l'État (1830, Lamennais).
■
SÉPARABLE adj., emprunt au dérivé latin separabilis (1390), a dû rapidement passer pour un dérivé français du verbe. Employé aussi au figuré, l'adjectif qualifie aussi ce qui peut être divisé en parties (1626).
◆
Le dérivé SÉPARABILITÉ n. f. (1700) est didactique.
■
INSÉPARABLE adj. et n., du latin inseparabilis (→ 1 in-), d'après séparer (séparable n'était pas encore attesté), équivalait (v. 1282) à « indissoluble » en parlant d'un mariage.
◆
Il s'applique aujourd'hui à ce que l'on ne peut séparer, dans l'ordre concret ou abstrait, spécialement à des éléments du langage (1607), à des personnes (1656), d'où l'emploi substantif (1680), surtout au pluriel des inséparables (1690). Spécialement, inséparables n. m. pl. ou f. pl. (av. 1867) se dit de perruches qui ne peuvent être élevées que par couples.
◆
Le dérivé INSÉPARABLEMENT adv. (XIVe s.) est assez rare.
◆
INSÉPARABILITÉ n. f. (fin XIVe s.), rare lui aussi, est un dérivé de l'adjectif ou est emprunté au bas latin inseparabilitas.
◈
SÉPARATEUR, TRICE adj. et n. m., emprunt adapté au bas latin
separator, s'applique à ce qui a la propriété de séparer (v. 1560,
faculté séparatrice). Comme substantif,
séparateur n. m. désigne (1859) un appareil destiné à séparer les composants d'un mélange, acception reprise dans divers domaines techniques au
XXe s., en parlant d'une cloison isolante entre les plaques d'un accumulateur (1904), en physique dans
séparateur d'isotopes, en informatique pour nommer le symbole d'un langage de programmation qui sert à délimiter des unités syntaxiques.
■
SÉPARATIF, IVE adj., emprunt des grammairiens au bas latin separativus « disjonctif », dérivé de separatio, est introduit au début du XVIIe s., appliqué à ce qui opère une séparation chimique, en parlant du feu (1608). Il s'emploie aujourd'hui (1800) pour qualifier ce qui constitue une séparation.
■
SÉPARATISTE n. et adj., employé (1650) en parlant d'une secte opposée à l'Église anglicane, reprenait l'anglais separatist, dérivé de to separate, de même origine que le verbe français. Le mot aussi a désigné (1666, n. m.) une personne qui se détache des choses mondaines. Repris en politique (1796 à propos des provinces allemandes), puis en religion, il s'est dit (1845) de qqn appartenant à une communauté dissidente.
◆
Il s'applique couramment (1845) à une personne favorable à une séparation, religieuse ou politique et désigne, d'abord à propos des États-Unis (1871), une personne qui demande ou fait une séparation politique par rapport à un État (Cf. autonomiste).
◆
Le dérivé SÉPARATISME n. m. s'est employé à propos de l'Église anglicane (1721) et reste usuel avec une valeur politique (1793).
SÉPIA n. f. reprend le latin sepia comme nom scientifique de la seiche (1832 ; → 2 seiche), d'abord adapté en ceppia (1665), seppie (1791). Sépia est par ailleurs emprunté (1804) à l'italien seppia.
❏
Le mot, comme son étymon italien, désigne le liquide brun ou noirâtre que répand la seiche, qu'on emploie pour le lavis puis, par métonymie (1838), un dessin fait à la sépia (alors d'un brun rougeâtre) ; on trouve parfois en ce sens au XIXe s. l'orthographe italienne.
❏
SÉPIOLE n. f., emprunt savant (1812) au latin sepiola, diminutif de sepia, désigne un mollusque aussi nommé souchot (→ 2 seiche).
SÉPIOLITE n. f. est un emprunt (1892) à l'allemand Sepiolith (1847), formé du grec sepion « os de seiche » (→ sépia), et -lithe.
◆
Ce terme de minéralogie désigne un silicate hydraté de magnésium (une magnésite, appelée couramment écume de mer).
SEPPUKU n. m. est la transcription du mot japonais qui désigne le suicide rituel, appelé souvent hara-kiri, par une lecture chinoise du caractère, archaïque en japonais.
SEPS n. m. est l'emprunt (1562) d'un hellénisme latin seps, sepis, du grec sêps, pour dénommer un lézard à pattes courtes des régions méditerranéennes.
SEPSIS n. m. est un emprunt au grec sêpsis « putréfaction », pour désigner l'ensemble des inflammations générales qui répondent à une infection bactérienne.
❏
L'élément grec a fourni un élément -SEPSIE, -SEPTIQUE, présent dans plusieurs mots didactiques (asepsie, antisepsie...).
❏ voir
SEPTIQUE.
SEPT adj. numér. est la réfection graphique d'après l'étymologie (v. 1190) de sep (v. 980), set (v. 1050), formes issues par voie orale du latin septem « sept », qui a des correspondants exacts dans le grec hepta (→ hebdomadaire, hept-), le sanskrit saptá, l'avestique hapta, l'irlandais secht.
❏
Sept apparaît comme adjectif numéral cardinal, introduit dans des locutions avec une valeur symbolique, par exemple les
Sept Sages de Rome (
XIIe s.),
les sept sacrements, les Sept Merveilles du monde, etc., puis employé en combinaison (1273) avec un autre numéral.
En histoire, on parle de la guerre de Sept Ans à propos du conflit qui opposa, de 1756 à 1763, la France et l'Autriche, d'une part, à l'Angleterre et à la Prusse. Dans l'Antiquité, les Sept Chefs et absolument, les Sept désigne le fils d'Œdipe, Polynice, et six autres chefs, opposés au frère de Polynice, Étéocle, roi de Thèbes (on parle aussi des Sept contre Thèbes). Un autre emploi de sept substantivé est le groupe des Sept, désignant sept peintres canadiens réunis en 1920, à Toronto, pour réagir contre l'influence européenne et promouvoir un style propre au Canada.
◆
En géographie, l'expression Sept-Îles sert à nommer un port du Québec, sur la rive gauche de l'estuaire du Saint-Laurent.
Le mot est substantivé au
XVIe s., d'abord pour désigner une carte de jeu marquée de sept points (1664), puis le nombre sept. À l'époque classique,
être dans son sept signifiait « en être au 7
e mois d'une grossesse » (1718) ou « au 7
e jour d'une maladie » (1718). Le nom s'emploie au sens de « 7
e jour du mois » (1871).
■
L'emploi ordinal au sens de « septième » n'est attesté que tard dans le XVIIIe siècle.
◆
La locution numéro sept (1867, sept n. m.) pour « crochet de chiffonnier » est sortie d'usage.
❏
Deux mots ont été formés directement sur
sept.
■
SEPTIÈME adj. et n. (1538), d'abord écrit septiesme (1487), est la réfection de setime (v. 1138), septisme (XIIIe s.), setiesme (v. 1207). Ces formes, dérivées de set, puis sept (ci-dessus), se sont substituées à l'ancien français sedme (v. 1050), setme (v. 1119), issu du latin septimus « septième », dérivé de septem. Cette forme ancienne, setme, était encore en usage au XVIIIe s. dans la langue administrative et est signalée par Ménage pour désigner régionalement (Anjou, Poitou) le service religieux célébré sept jours après un enterrement.
◆
Le mot moderne, suffixé en -ième, s'emploie d'abord (v. 1138) comme adjectif numéral ordinal de sept. Il sert à former les ordinaux correspondant aux ordinaux en sept.
◆
Le premier emploi substantivé (1472, septiesme) désigne un impôt (d'un septième) sur le sel ; on trouve ensuite la valeur générale de « 7e partie d'un tout », comme adjectif numéral (1672), puis comme nom (1694, septiesme).
◆
Le nom féminin, une septième, désigne en musique (1643) un intervalle de sept degrés. Il s'est employé en parlant d'une suite de sept cartes de la même couleur (1680). À la fin du XVIIe s., avec la valeur initiale d'ordinal, on relève la locution être dans son septième, sous-entendu « mois de grossesse », en concurrence avec dans son sept (ci-dessus). Le nom s'emploie aussi à propos d'une personne occupant la septième place (attesté au XVIe s. [v. 1529]).
◆
Septième n. f. est ensuite (1812) le nom dans l'enseignement primaire de la septième classe, remplacé récemment par cours moyen 2e année.
◆
Quelques locutions formées avec l'adjectif ordinal au XIXe et au XXe s. sont usuelles, telle être au septième ciel* (v. 1840). Le septième art « le cinéma » (1921) fait référence à un classement des arts en six.
◆
Le dérivé SEPTIÈMEMENT adv. (septiesmement, 1479 ; sous la forme actuelle, 1564) est usuel.
■
SEPTAIN n. m. est le nom donné (v. 1500-1548) à un poème ou une strophe de sept vers. Le mot s'était employé au XVIe s. comme adjectif dans fièvre septaine « qui revient tous les sept jours ».
◆
La forme septen (1309), réfection de setain (v. 1160), avait désigné une redevance sur le sel. Septain (1380), d'abord septein (1317) au sens ancien de « nombre de sept unités », sorti d'usage, avait désigné (1421) un paquet de sept serviettes destinées à la semaine (Cf. semainier).
◈
À partir de
sept ont été formés plusieurs composés.
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SEPT-ŒIL n. m. inv. (1768), d'abord écrit setueille n. f. (v. 1220) [→ œil], désigne régionalement un poisson serpentiforme qui porte sur la tête sept marques semblables à des yeux.
■
SEPT-HUITIÈME n. m. (XXe s.), de huitième, terme de mode, désigne un manteau un peu court (Cf. trois-quart).
■
SEPT-MÂTS n. m. (→ mât).
◈
Plusieurs mots ont été formés en français à partir du latin
septem.
■
SEPTILLION n. m. (1520, septilion), d'après quadrillon, désigne un million de sextillions.
■
SEPTICOLORE n. m. (1791, septicolor ; 1875, -ore), d'après tricolor(e), dénomme en zoologie un petit passereau à teintes très variées.
■
SEPTIDI n. m. (1793, Fabre d'Églantine) a désigné le septième jour de la décade dans le calendrier révolutionnaire.
■
SEPTUOR n. m. (1805), d'après quatuor, est un terme de musique désignant une composition musicale à sept parties, puis (1874) une formation de sept instrumentistes.
◈
D'autres mots sont empruntés à des dérivés latins de
septem.
■
SEPTANTE adj. numér. card. est la réfection (v. 1240) d'après le latin de l'ancienne forme setante (v. 1120), issue d'un latin populaire °septanta, altération du latin classique septuaginta « soixante-dix ». Septante est longtemps resté en usage dans la partie est de la France allant de la Belgique à la Provence, mais il a reculé et cédé devant l'usage français dominant, soixante-dix ; en revanche, il est normal et courant en Belgique et en Suisse romande, soixante-dix n'y étant pas employé.
◆
Les Septante n. m. pl. désigne les 70 (ou 72) traducteurs du texte hébreu de l'Ancien Testament en grec ; de là, par ellipse, la Septante n. f. « la version des Septante ».
◆
Le dérivé SEPTANTIÈME adj. numér. ordinal (1538 ; 1530, septantiesme) « soixante-dixième » est en usage en Belgique et en Suisse romande. SEPTANTAINE n. f. (1845) s'est dit dans l'est de la France et s'emploie en Belgique, en Suisse, pour « nombre de septante », et « âge de septante ans ».
■
SEPTUAGÉSIME n. f., réfection (XIIIe s.) de settuagisme (v. 1190), est un emprunt au latin ecclésiastique septuagesima (dies) « soixante-dixième (jour) », féminin substantivé de l'adjectif latin classique septuagesimus « soixante-dixième », dérivé de septuaginta. Le mot désigne, dans la liturgie catholique, le dimanche qui précède de deux semaines le carême.
■
SEPTUAGÉNAIRE adj. (v. 1380), didactique ou littéraire, emprunte au bas latin septuagenarius le sens d'« âgé de 70 ans ou plus », spécialisation du latin impérial « qui contient 70 », mot dérivé de septuageni qui désigne la répartition (« 70 chacun »), lui-même de septem ou de septuaginta.
■
SEPTENNAL, ALE, AUX adj., relevé une fois vers 1330 (texte de 1469 selon T.L.F.) et repris en 1722, est dérivé savamment avec le suffixe -al du bas latin septennis (ou septuennis) « âgé de 7 ans », composé de septem et de -ennis, issu de annus (→ an). Cet adjectif didactique signifie « qui dure sept ans, se renouvelle tous les sept ans ».
◆
Il a fourni SEPTENNALITÉ n. f. (1823), rare, et SEPTENNAT n. m. (1873 ; 1823, d'après Bloch et Wartburg), formé sur le modèle de décennat pour désigner une durée de sept ans (en parlant d'une fonction, d'une magistrature) et spécialement (1873, pour Mac-Mahon) de la période pendant laquelle un président de la République, en France, est en fonction.
■
SEPTUPLE adj. et n. m., « qui est répété sept fois, qui vaut sept fois », est emprunté au bas latin septuplus « septuple », substantivé en septuplum, d'abord comme adjectif (1458) puis comme nom (1484).
◆
Le dérivé SEPTUPLER v., didactique, est attesté une première fois en 1493 (v. tr.) et repris en 1771. Son participe passé substantivé (des septuplés, n. m. pl.) désigne sept enfants nés d'une seule grossesse.
◆
Le composé SOUS-SEPTUPLE adj. et n. m. (1876), de sous*, est un terme de mathématiques.
■
SEPTÉNAIRE adj. et n. m. est emprunté, à la fin du XVe s. (1495), au latin septenarius « composé de sept », spécialement employé au pluriel comme terme de métrique, dans septenarius versus et septenarius numerus « le nombre sept ».
◆
L'adjectif s'est d'abord dit (XVe s.) de ce qui dure sept jours, puis sept ans (XVIIIe s., parlement septénaire) et d'un mandat de sept ans (septennal ci-dessus). Le nom a désigné (1694) chacune des périodes de sept ans selon laquelle on divisait la vie de l'homme ; il s'est employé en médecine (1855) au sens de « période de sept jours, dans la durée d'une maladie ». Lorsqu'il n'est pas archaïque, le mot est très didactique.
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SEPTEMVIR n. m. est un emprunt (1636) au latin composé de septem et de vir « homme » (→ viril). Terme d'Antiquité romaine, il conserve les acceptions du latin, désignant chacun des sept magistrats, membres d'une commission chargée du partage des terres et chacun des sept prêtres qui présidaient aux festins sacrés.
■
SEPTIME n. f. est un emprunt savant (1859) au latin septimus pour désigner en escrime l'une des lignes d'engagement.
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SEPTIMO adv., équivalent rare de septièmement, reprend (1842, Académie) le latin impérial septimo « pour la 7e fois », ablatif neutre adverbialisé de septimus.
❏ voir
SEMAINE, SEPTEMBRE, SEPTENTRION.
SEPTEMBRE n. m. représente une réfection (1226), d'après le latin, et à côté de l'emprunt september (v. 1119, Ph. de Thaon), de l'ancienne forme setembre (v. 1155), usitée jusqu'au XIVe s. et issue du latin september, dérivé de septem (→ sept). September désignait le 7e mois de l'ancienne année romaine, commençant en mars.
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En français, le mot désigne le neuvième mois de l'année actuelle.
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L'expression massacres de Septembre désigne la vague de crimes révolutionnaires commis entre le 2 et le 5 septembre 1792. Ce syntagme attesté chez Chateaubriand (Mémoires d'outre-tombe) a dû être employé très tôt. On parle de révolution du 4 septembre pour la proclamation de la République, à Paris, le 4 septembre 1870, après la capitulation de Sedan. Septembre noir désigne la résistance palestinienne après le massacre de milliers de militants palestiniens par l'armée jordanienne en septembre 1970.
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De là viennent
SEPTEMBRISER v. tr. (1793) « exécuter sommairement et en masse », qui a fourni
SEPTEMBRISEUR n. m. (1792) ou
SEPTEMBRISTE n. m. (1792), sorti d'usage, et
SEPTEMBRISADES n. f. pl. (1798) « massacres de septembre », avec le même suffixe que
noyade (apparu à la même époque).
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Tous ces mots ne s'emploient que par allusion à 1792 ou à des événements analogues.
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Le dérivé
SEPTEMBRAL, ALE, AUX adj., d'abord dans
purée septembrale (1534, Rabelais) « vin », est peu usité pour qualifier (1871) ce qui est propre au mois de septembre.
SEPTENTRION n. m., écrit septentriun (v. 1155) puis -trion (v. 1380), est emprunté au latin impérial septentrio (ou septemtrio), nom singulier formé sur le pluriel septentriones « les sept bœufs de labour », nom de la constellation appelée plus tard l'Ourse (Grande ou Petite Ourse) et par extension « vent du nord » et « contrées septentrionales, pôle Nord ». Ce mot est composé de septem (→ sept) et de trio, -onis « bœuf de labour », terme rare et archaïque, peut-être apparenté à terere « frotter », « user » et « battre (le grain) » (→ détritus, trier, triturer). Le sens de septentriones n'étant plus compris, le singulier s'est substitué au pluriel pour désigner le nord.
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Septentrion a repris les valeurs du latin pour désigner le nord (v. 1155) et poétiquement la constellation (1380, pour la Petite Ourse ; 1636, pour la Grande Ourse), en concurrence avec le Chariot. Il s'est dit pour « vent du nord » (1530). Seul le premier sens est encore en usage, dans un registre archaïsant.
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SEPTENTRIONAL, ALE, AUX adj. est emprunté (déb. XIVe s.) au dérivé latin septentrionalis. Le mot, qui signifie « du nord, situé au nord », est rare jusqu'au XVIe s., puis didactique (mais non pas vieilli) comme adjectif correspondant à nord, en concurrence avec nordique.
SEPTIQUE adj. est un emprunt savant (1538 medecine septique) au latin impérial septicus « qui putréfie », lui-même emprunté au grec sêptikos, dérivé de sêpein « faire tomber en pourriture », d'où en général « décomposer les chairs » et au figuré « corrompre, gâter ». L'origine de ce verbe est obscure ; on l'a rapproché du sanskrit kyāku « champignon » et du lituanien šiúpti « pourrir », sans pouvoir reconstituer un groupe de mots indoeuropéens.
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Septique, terme de médecine, s'est d'abord employé au XVIe s. avec la valeur du mot latin, au sens de « qui fait pourrir les chairs (en parlant d'un topique) ».
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Repris au XIXe s., l'adjectif qualifie les effets de germes (1812) et ce qui produit la putréfaction (1845), emplois disparus.
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Depuis Pasteur (apr. 1870), le mot se dit de ce qui produit l'infection (microbe septique) puis de ce qui présente une infection d'origine microbienne (XXe s., plaie septique). Il est surtout courant dans fosse septique (1910), adaptation probable de l'anglais septic tank (1896), où l'adjectif septic vient du même mot latin.
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Le dérivé
SEPTICITÉ n. f. (1824), didactique, se dit du caractère de ce qui est infectieux.
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Sur la base
septique ont été composés deux termes courants en médecine.
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ANTISEPTIQUE adj. (1763), de 1 anti-, comme l'anglais antiseptic (1753) de même origine, rapidement substantivé (un antiseptique ; 1765), est passé dans l'usage courant.
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En dérivent ANTISEPSIE n. f. (1880), d'abord (1865) masculin, formé d'après le grec sêpsis « putréfaction, fermentation », et ANTISEPTISER v. tr. (1892), vieilli.
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ASEPTIQUE adj. (1871 ; de a- privatif) s'emploie aussi au figuré pour « exempt de toute corruption ».
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De là ASEPSIE n. f. (v. 1880) et ASEPTISER v. tr. (1897 ; v. 1900, p. p.) dont procède ASEPTISATION n. f. (1907), tous usuels en médecine.
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ASEPTIQUEMENT adv. (1910) est plus rare.
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SEPTICÉMIE n. f. est un composé savant (1847) du latin
septicus et du grec
haima « sang »
(→ -émie), sur le modèle de
anémie*. Il désigne en médecine, puis couramment une maladie provoquée par le développement de germes pathogènes dans le sang ; en dérive
SEPTICÉMIQUE adj. (1857) et
n., « malade atteint de septicémie ».
❏ voir
SEPSIS.