SINGLET n. m. est emprunté au mot anglais singlet, dérivé diminutif de l'adjectif single, au sens de « simple, non doublé ». Le mot s'emploie en français de Belgique pour un maillot de corps masculin, sans manches.
SINGLETON n. m. est un emprunt (1767) à l'anglais singleton, mais ce dernier n'est attesté qu'en 1876 comme terme de cartes. La forme single, relevée avec la même valeur (1850), a probablement été employée dès le XVIIIe s., époque où le jeu de whist, d'origine anglaise, est introduit en France. L'anglais singleton, formé sur le modèle de simpleton (v. 1650) « nigaud, niais », à côté de simple, est un dérivé de single « seul » (→ single) ; l'élément -ton est issu du vieil anglais tun (anglais moderne town) « ville », rattaché à l'ancien haut allemand zun « haie », et au-delà, au celtique °dun- que l'on retrouve en toponymie (Augustodunum « Autun »).
❏
Cet anglicisme désigne, dans certains jeux de cartes, le whist (1767), le boston (1842), puis le bridge, une carte qui est seule de sa couleur, dans la main d'un joueur.
■
Par réemprunt à l'anglais, le mot désigne aussi en mathématiques (av. 1967) un ensemble constitué d'un seul élément.
SINGULIER, IÈRE adj., représente (fin XIIIe s.) la réfection par changement de suffixe de singuleir, singuler (v. 1190), qui correspond à l'ancien provençal singular (v. 1140), emprunts au latin classique singularis « unique, isolé, solitaire », « qui se rapporte à un seul », d'où en grammaire « nombre singulier » (singularis numerus) et « unique en son genre, extraordinaire, rare ». L'adjectif latin dérive de singuli « un par un », employé comme distributif (« chacun un ») et pour « chacun en particulier », lui-même pluriel de singulus « isolé ». Le premier élément de singulus se rattache à une racine indoeuropéenne °sem- désignant l'unité et marquant l'identité (→ ensemble, similaire, simple, sincère) ; le second élément n'a pas d'origine claire.
❏
L'adjectif apparaît en grammaire (v. 1190, singuler) « qui concerne un seul individu », opposé à pluriel. Il s'applique aussi à ce qui n'appartient qu'à un seul (Cf. individuel), acception qui ne devient usuelle qu'au XVIIe s. et dont relève la locution courante combat singulier « entre une personne et un seul adversaire » (1578 ; bataille singulière en 1512).
◆
Il s'est employé à l'époque classique au sens de « rare, excellent » (1538) et qualifie ce qui est différent des autres (1549), d'où par extension (1660) ce qui excite l'étonnement, est extraordinaire. Il s'emploie de façon positive ou négative, en parlant d'une personne ou d'une chose.
◆
En français classique (mil. XVIIe s.), singulier qualifie une personne qui affecte d'être différente des autres ; avec une valeur affaiblie, il signifie « bizarre, excentrique » et, en parlant d'une chose, « inexplicable ».
◆
C'est l'idée d'« unicité » qui est reprise en sciences dans point singulier « point qui présente des caractères propres à lui seul » (1754).
❏
Le dérivé
SINGULIÈREMENT adv. s'est employé, encore à l'époque classique, aux sens de « séparément, uniquement » (v. 1190,
singuleirment) et de « personnellement » (1317). Il signifie « en se distinguant (des autres), principalement » (
XIVe s.) et avec une valeur affaiblie « beaucoup » (1580).
◆
Il a aussi la valeur plus forte « d'une manière étonnante, remarquable ou bizarre » (1680), mais est littéraire et un peu archaïque dans cet emploi.
◈
Plusieurs mots de la famille sont formés à partir du latin ou empruntés.
■
SINGULARITÉ n. f. (v. 1190, singulariteit ; fin XIVe s., forme moderne) est emprunté au bas latin singularitas « le fait d'être unique » d'où « nombre singulier », « unité », dérivé de singularis.
◆
Le nom, qui désigne ce qui rend une chose ou une personne rare, exceptionnelle, s'emploie spécialement (fin XIIe s.) surtout dans la langue classique pour « excellence » ; ce sens est sorti d'usage.
◆
Par opposition à pluralité, il signifie (v. 1200) « caractère d'une personne, d'une chose qui est unique », surtout dans des emplois didactiques, par exemple en linguistique pour « trait distinctif du singulier » (1904) reprenant une valeur ancienne du mot (1411).
◆
Il désigne aussi (1544) le caractère de ce qui est insolite, bizarre, spécialement pour parler de manières de penser, de parler plus ou moins étranges (av. 1650).
■
SINGULAIRE adj., emprunt (1314) au latin singularius « isolé », « particulier », doublet populaire de singularis est introduit avec le sens de « particulier », sorti d'usage. Repris en logique (XXe s.), il s'applique à ce qui concerne une seule proposition, et s'oppose à binaire, ternaire.
■
SINGULARISER v. tr., dérivé savant (1511) du latin singularis, a signifié « traiter (un chapitre) dans le détail ». Il correspond à « distinguer des autres par qqch. de peu courant » (1555), aussi en emploi pronominal se singulariser (1670), aujourd'hui péjoratif (1718) et opposé à se distinguer.
◆
Le dérivé SINGULARISATION n. f. (XXe s.) est didactique.
■
SINGULATIF, IVE adj., dérivé savant (1921) de singulus, est un terme didactique de linguistique, appliqué à un élément de langage qui caractérise un individu en l'opposant à un ensemble, à propos des langues slaves.
◈
SINGULET n. m., autre dérivé savant de
singulus (1926) d'après des mots comme
octet, désigne en physique un électron unique responsable de certaines liaisons chimiques, puis (1956) une raie spectrale qui reste unique avec les spectrographes de grand pouvoir séparateur.
❏ voir
SANGLIER.
1 SINISTRE adj. est une réfection d'après le latin (XIIIe s., attestation isolée ; puis 1319) de l'ancien français senestre (1080) issu du latin sinister « gauche, du côté gauche », au figuré « maladroit », « malheureux, fâcheux » ; dans la langue augurale, l'adjectif signifie « qui vient du côté gauche », c'est-à-dire « favorable » chez les Romains, « de mauvais présage » suivant le rite grec, c'est-à-dire la face tournée vers le nord avec l'est à sa droite, ou suivant le rite étrusco-romain, la face tournée vers le sud avec l'est à sa gauche ; c'est ce dernier sens qui est le plus fréquent en latin. Sinister est sans doute un euphémisme, et aucun rapprochement avec d'autres langues n'est démontré.
❏
Sinistre a d'abord conservé le sens étymologique de « gauche » qu'avait senestre, encore employé au début du XVIIe s. (→ senestre). Depuis le XVe s., il s'applique (v. 1415) à ce qui fait craindre un malheur : en parlant des astres, aspect sinistre « présage de mauvais augure » (1718) est sorti d'usage avant le XIXe siècle ; ligne sinistre, employé à propos d'une ligne de la main néfaste (1740), se disait encore au XIXe siècle. Au sens plus général de « malheureux, funeste » à propos d'un événement, d'un état (1559) et de « désagréable », à propos d'une odeur (1600), l'adjectif est propre à l'usage classique.
◆
Il s'applique aujourd'hui, et depuis le XVIIe s., à ce qui, par son aspect, semble menaçant ou simplement accablant (1675, d'un visage), employé à propos d'une personne ou d'une chose ; chez Hugo, qui l'emploie fréquemment, l'adjectif équivaut à sombre, terrible.
◆
Sinistre qualifie aussi (1725) une personne inquiétante et une chose dangereuse, malfaisante (av. 1520) par elle-même et non en tant que signe.
◆
Avec un sens affaibli, il équivaut (XIXe s.) à « triste et ennuyeux » et, avant le nom, s'emploie couramment (1886, L. Bloy) comme intensif pour renforcer des mots comme individu, imbécile, voyou, etc.
❏
Le dérivé
SINISTREMENT adv. a signifié « mal, de travers » (1403), « sous de fâcheux auspices » (1466), « d'une manière malveillante » (fin
XVe s.) et « malheureusement » (1596), notamment au
XVIIe siècle. Il est rare pour « d'une manière sinistre » (
XIXe s.).
■
SINISTROSE n. f. désigne en psychologie (1908) l'état mental de certains accidentés qui s'exagèrent leur infirmité.
◆
Par extension, dans le discours journalistique (XXe s.), il se dit d'une disposition à croire que les événements prendront une tournure néfaste, souvent en relation avec morosité à propos d'un pessimisme collectif.
◈
2 SINISTRE n. m. est emprunté (1485, puis 1557) à l'italien
sinistro « malheur, calamité, désastre » (1400), de même origine que
1 sinistre. Le nom désigne un événément catastrophique naturel et, par métonymie, les dommages et pertes qui arrivent aux personnes et aux biens faisant l'objet d'un contrat d'assurance (1783), par extension, un drame, une catastrophe.
■
SINISTRÉ, ÉE adj. s'applique (1870) à ce qui a subi un sinistre, et est substantivé (1875) en parlant des personnes (les sinistrés).
SINO-, tiré du latin médiéval Sinae, d'origine grecque (Ptolémée), nom correspondant en grec au sanskrit Cinas, nom ethnique (« Chinois »), à l'origine des noms de la Chine dans les langues indoeuropéennes (d'abord en portugais, China), est un élément qui entre dans la formation de quelques dérivés et composés didactiques relatifs à la Chine.
❏
SINOLOGIE n. f. (1814), de
-logie, se dit de l'ensemble des études relatives à la Chine, d'où
SINOLOGIQUE adj. (
XIXe s.).
■
SINOLOGUE n. (1814), de -logue, désigne une personne spécialiste de la Chine (langue, civilisation, histoire) et, spécialement, de l'histoire contemporaine et de la politique chinoise.
■
SINISER v. tr. (attesté en 1942) signifie « répandre la civilisation chinoise dans (un pays) » et a fourni SINISATION n. f. (1942).
■
SINITÉ n. f. (1957), avec le suffixe -ité, se dit de l'ensemble des caractères, des manières de penser propres à la civilisation chinoise. Siniser et sinité sont plus didactiques que les composés.
◈
SINOPHILE adj. et n. (mil.
XXe s.), de
-phile, s'applique à qqn qui aime, apprécie la Chine et a pour contraire
SINOPHOBE adj. et n. (1973), de
-phobe ; de là viennent
SINOPHILIE n. f. (1971) et
SINOPHOBIE n. f. (1975).
◈
Le premier élément
sino- sert à former quelques composés, notamment
SINO-JAPONAIS, AISE adj. qui s'emploie en histoire à propos des guerres de 1894-1895, en Corée, de 1937-1939 et de l'occupation d'une partie de la Chine par les Japonais ;
SINO-TIBÉTAIN, AINE adj. se dit en particulier de la famille de langues regroupant les formes de chinois et l'ensemble formé par le tibétain et le birman (plus quelques langues non classées).
◆
SINO-MAURICIEN, IENNE adj. se dit, en français de l'île Maurice, des Mauriciens d'origine chinoise.
SINOPLE n. m. est emprunté (v. 1175 ; v. 1138, sinopre) au latin sinopis, -idis qui reprend le grec sinôpis « terre de Sinope » (terre rouge), dérivé de Sinôpê « Sinope », ville et port de Paphlagonie.
❏
Le mot apparaît au sens de « couleur rouge », en héraldique ; à la suite d'une évolution mal expliquée,
sinople en vient à désigner, toujours en termes de blason (
XIVe s.,
synoble [v. 1260 selon
G. L. L. F.] ;
XVe s.,
sinople) la couleur verte représentée en gravure par des lignes diagonales descendant de gauche à droite. Ce changement pourrait être dû à une substitution des deux couleurs dans un blason ; par ailleurs, les textes des
XIIe-
XIIIe s. ne permettent pas de savoir quelle couleur désigne le mot. Le sens de « rouge » est repris au
XVIIe s. dans
sinope n. m. (1636), sorti d'usage, qui a désigné une craie rouge d'Asie Mineure employée dans la peinture antique.
Le mot, sous les formes sinopre (v. 1340) et sinople (1342), a désigné un pigment rouge. Sinople s'est employé (1667) comme nom d'une anémone rouge.
◆
Il s'est dit (1791) d'un minerai d'or dont la gangue était un type de quartz rouge et (1803) d'une variété de quartz, acceptions relevées jusqu'en 1875.
◆
Le mot n'est plus vivant qu'en blason, pour « couleur verte » (voir ci-dessus).
?
SINOQUE ou SINOC adj. et n. (1926 ; 1929, sinoc) est d'origine incertaine. Il est peut-être emprunté, selon Esnault, à un dialectal (Savoie) sinoc n. m. (1902) désignant une bille à jouer ; ce mot, d'origine obscure (peut-être en rapport avec noc, pour con, et avec schnoc), aurait été employé dans l'argot militaire comme synonyme de bille qui signifie métaphoriquement « tête » (1835) et « niais » (1947). La forme CINOQUE (1930) a pu être influencée par ciboulot, cigare, citron « tête ».
❏
Ce terme familier, employé pour « fou, folle » ou « imbécile », est aujourd'hui vieilli.
SINUEUX, EUSE adj. est emprunté (1539) au latin classique sinuosus « courbé, recourbé », par figure « contourné, compliqué », dérivé de sinus « courbure, pli », « creux », « pli de la toge (et d'autres vêtements) » (→ sein), mot sans origine connue.
❏
Le mot est d'abord employé dans le vocabulaire médical pour « étroit, profond et tortueux » en parlant d'un ulcère ; ce sens a disparu. Il qualifie ensuite (1552) ce qui présente une suite de courbes irrégulières dans des sens différents. Sinueux s'emploie aussi au figuré pour « tortueux » (attesté en 1898, A. France).
❏
Le dérivé
SINUEUSEMENT adv. (av. 1892, Taine) est littéraire.
◈
SINUOSITÉ n. f., dérivé savant de l'adjectif latin, désigne chacun des tours et détours que fait une chose sinueuse (1552), l'état de ce qui est sinueux (1611).
◆
Par figure (1832), le mot se dit littérairement d'un moyen indirect de faire ou d'éluder qqch.
◈
1 SINUS n. m. inv. est emprunté (
XVIe s.) au latin
sinus pour désigner en anatomie une cavité osseuse irrégulière (1539 ;
sinus du maxillaire), couramment employé dans
inflammations des sinus (de la face). Au
XVIIIe s.,
sinus s'emploie en anatomie pour parler du renflement d'un segment de certains vaisseaux (1762) ; de là viennent
sinus du cœur (1876),
sinus veineux (1904),
sinus carotidien (mil.
XXe s.).
■
Sinus a fourni deux dérivés. SINUSITE n. f. (1904), « inflammation des sinus de la face », est passé de l'usage médical à l'usage courant. SINUSAL, ALE, AUX adj. (1922) est un terme de médecine.
■
Le composé SINUSECTOMIE n. f. (mil. XXe s.), de -ectomie, désigne en chirurgie la suppression du sinus frontal.
◈
SINUER v. intr., dérivé (1891) de
sinu[eux], signifie « décrire, suivre une ligne sinueuse ». Son usage est littéraire.
■
Un adjectif SINUÉ, ÉE (1776) s'appliquait en botanique à une plante ou une feuille découpée de manière sinueuse ; il dérivait de sinus n. m. emprunt au latin, utilisé (1771) en botanique, pour désigner une échancrure profonde, séparant deux lobes dans les organes minces, également sorti d'usage.
❏ voir
INSINUER, 2 SINUS.
2 SINUS n. m., attesté en 1544 (T.L.F.), est emprunté au latin médiéval sinus, terme de géométrie, choisi d'après le sens de « pli de la toge » qu'avait le latin classique sinus (→ sein, sinueux), pour traduire l'arabe ǧayb (djayb). Ce dernier, qui signifiait à l'origine « ouverture (pectorale) d'un vêtement », était employé en géométrie au sens de « demi-corde (de l'arc double) », sens probablement emprunté au sanskrit djîva « corde », un certain nombre de notions mathématiques arabes provenant des savants indiens. L'équivalent latin du mot arabe résulterait donc d'une confusion. Le nom latin de la demi-corde, semi inscripta, était abrégé en s. ins, ce qui a pu surdéterminer sinus.
❏
Sinus, en géométrie, a d'abord signifié « ligne droite tirée d'une extrémité d'un arc perpendiculairement sur le rayon qui passe par l'autre extrémité » ; ont également disparu les syntagmes sinus verse « partie du rayon comprise entre le sinus et l'arc » et sinus total « sinus de un quart de cercle » (1685). Le mot est repris, dans l'usage moderne, avec sinus d'un angle (1765, Encyclopédie) qui désigne la mesure de la projection, sur un axe directement perpendiculaire à l'un de ses côtés, d'un vecteur unitaire porté par son autre côté, et dans fonction sinus, « qui fait correspondre les sinus à la mesure de l'arc correspondant ».
❏
Le dérivé
SINUSOÏDE n. f. (1729), de
-oïde, désigne une courbe représentative de la fonction sinus (ou cosinus) ; dans l'argot scolaire,
faire des sinusoïdes se dit pour « faire des zigzags, des S » et le mot est passé dans l'usage familier.
◆
Ce nom a fourni
SINUSOÏDAL, ALE, AUX adj. (1823) « du sinus ».
◈
Sinus a donné le composé
COSINUS n. m. (1771), d'abord
co-sinus (1754), de
co*-, « sinus du complément d'un angle ».
?
SINVE adj. et n., que l'on trouve encore dans les textes en argot du XIXe s., apparaît, écrit Esnault, dans une chanson du XVIIIe s. D'origine obscure, ce pourrait être une altération de simple, pour qualifier et désigner une personne niaise, facile à duper. Vidocq, qui écrit sinvre (1828), lui donne le sens de « lâche ». Dans son sens habituel de « dupe », le mot a été remplacé par cave.
SIONISME n. m. (attesté en 1886) est un mot international créé en allemand (Zionismus, 1886) par N. Birnbaum, à partir de Sion, nom d'une des montagnes de Jérusalem et, par extension, de la ville elle-même.
❏
Le mot désigne un mouvement religieux et politique visant à l'établissement puis à la consolidation d'un État juif, appelé la Nouvelle Sion, en Palestine. Depuis la création de l'État d'Israël, le mot a changé de valeur et s'applique à la défense des intérêts d'Israël, notamment dans l'affrontement qui l'oppose aux États musulmans de la région et dans l'attitude vis-à-vis du problème palestinien.
◆
SIONISTE adj. et n. (1886) a suivi la même évolution.
❏
En procèdent les composés ANTISIONISME n. m. (déb. XXe s.), et ANTISIONISTE adj. et n. (1902), qui concernent les adversaires du sionisme, aujourd'hui ceux de l'État d'Israël et de sa politique, les deux mots en anti- devant rester distincts d'antisémitisme et d'antisémite, ce qui n'est pas toujours le cas.
SIOUX n. et adj. inv., représente une altération (1724) de nadoweisiv « petit serpent », appellation donnée par les Indiens Chippewa à leurs adversaires, qui se nommaient eux-mêmes Dakotas. On rencontre le féminin siouse, chez Charlevoix (1721), et dans Chateaubriand (langue siouse) ; une variante siou, adjectif invariable, a disparu.
❏
Sioux désigne un membre d'une ethnie indienne de l'Amérique du Nord, aujourd'hui confinée dans les réserves du Dakota, de l'Iowa et du Montana. Le sioux n. m. désigne la langue de cette ethnie, appartenant à la famille dite Hoka-Siou.
◆
Le mot s'est introduit dans l'usage général en français, dans la locution ruses de Sioux, allusion aux ruses de guerre particulièrement habiles de ces Indiens ; en procède un emploi adjectif familier pour « astucieux » (v. 1975 ; c'est sioux !, prononcé plaisamment siouks).
SIPHON n. m. est un emprunt (1546, d'abord sifon au sens de « trombe », v. 1370) au latin sipho, siphonis « pompe à incendie », « petit tube », « jet (d'un liquide) », lui-même emprunt au grec siphôn « tube creux (pour pomper un liquide) », « conduite d'eau » et « trombe d'eau », terme technique d'origine obscure. On relève antérieurement la forme sifon au sens de « trombe » (v. 1320), mot employé par les marins du Levant, emprunt à l'italien sifone, du latin sipho.
❏
Siphon apparaît au sens de « tuyau pour tirer du vin » ; le mot désigne à partir du XVIIe s. (1639) un tube coudé employé pour transférer un liquide d'un niveau donné à un niveau inférieur, sens resté usuel. Par extension, il se dit couramment (1871) d'un tube recourbé en forme de S, placé à la sortie des appareils sanitaires, pour empêcher la remontée des mauvaises odeurs.
◆
Siphon se spécialise à la même époque (1862), désignant une bouteille remplie d'un gaz sous pression et munie d'un dispositif aspirateur, acception qui fut usuelle. En zoologie, il se dit des prolongements en longs tubes qui s'avancent hors de la coquille de certains lamellibranches. En médecine, il désigne (1876) un appareil utilisé pour le lavage de certaines cavités naturelles. Par analogie, siphon désigne aussi (mil. XXe s.) la partie d'un conduit naturel souterrain envahie par l'eau.
❏
Le nom a fourni quelques dérivés.
■
SIPHOÏDE adj. (1845), de -oïde, terme technique, s'applique à ce qui a la forme d'un siphon.
■
SIPHONNER v. tr. (1862), « transvaser à l'aide d'un siphon », a donné SIPHONNEMENT n. m. (1871) et SIPHONNAGE n. m. (1875, siphonage).
■
Le participe passé de siphonner, employé adjectivement, a produit par métaphore le mot familier SIPHONNÉ, ÉE adj. (1937) « fou », proprement « dont le cerveau est vidé comme par un siphon ». Le mot entre dans le paradigme à initiale si- de sinoque, cinglé, et la syllabe -phon- peut évoquer fou.
■
SIPHONNAL, ALE, AUX adj., didactique, qualifie (1904) ce qui appartient à un siphon.
■
SIPHONALES n. f. pl. (v. 1950) désigne en botanique un ordre d'algues vertes dont le thalle est constitué par une cavité renfermant le cytoplasme et de nombreux noyaux sans cloison, structure dite siphonnée.
■
SIPHONOPHORES n. m. pl., formé (1841) de siphon, -o- de liaison et -phore, désigne en zoologie une classe de petites méduses vivant en colonies.
◈
SIPHOMYCÈTES n. m. pl. est le nom, formé de
siphon et de l'élément
-mycètes, donné par les botanistes (attesté en 1934) à un ordre de champignons à mycélium en tube allongé non cloisonné.
SIPO n. m. est un emprunt à une langue de la Côte d'Ivoire (attesté en 1933) pour désigner un arbre tropical d'Afrique, à bois rougeâtre utilisé en menuiserie industrielle, et ce bois.
SIRDAR n. m., emprunt à l'hindi sar-dar, titre en Inde, se dit en français de l'île Maurice d'un contremaître dans une « propriété » sucrière.
L
SIRE n. m. est issu (v. 980) d'un latin populaire °seior, altération du latin classique senior, proprement « plus vieux », comparatif de senex « vieux » (→ seigneur, sieur).
❏
Sire, comme
seigneur, s'est employé très tôt (v. 980) dans le vocabulaire religieux au sens de « maître » en parlant de Dieu, d'où
notre sire « Jésus-Christ » (1080) et
sire Dieu (
XIIe s.) encore employé au
XVe siècle. Le mot s'utilise dès le
XIe s. (v. 1050) comme titre donné à un souverain quand on s'adresse à lui
(Cf. majesté) et a eu le sens de « roi » (v. 1165,
sere ; v. 1184,
sire) ; la formule
le sire notre roi (
XIVe s.) était encore en usage au
XVIIe siècle.
◆
Dans la société féodale,
sire était également le titre donné à un seigneur (v. 1050), au suzerain (1080), et par analogie attribué à un saint (
XIIIe s.), à des clercs (v. 1200), à un prêtre (1460) et même, joint au nom propre (v. 1165), à des bourgeois pourvus de certains offices. Cet usage a été renforcé, puis concurrencé par celui de
monsieur. Sire des lois a signifié « jurisconsulte » (fin
XIIe s. ; 1324,
sire de lois) et jusqu'à la fin du
XVIIIe s.,
sire est le titre pris par les juges et les consuls des marchands. En même temps,
sire s'employait dans la littérature satirique comme terme de dérision (
XIIe s.) et comme titre donné à des animaux représentants de types humains (fin
XIIe s.), ensuite par plaisanterie (encore chez La Fontaine) ; ces usages correspondent d'assez près à ceux de
seigneur, puis de
monsieur. Beau sire, à l'origine titre donné à Dieu ou à des personnes que l'on veut honorer (v. 1050), équivaut plus tard, comme
sire, à « dupe » (1455), et familièrement à « individu » (1644), jusqu'au
XIXe siècle. Dans ces emplois péjoratifs, on relève aussi
étrange sire « homme méprisable » chez Scarron (1644),
pauvre sire « pauvre homme » (v. 1650) et la locution
faire le sire « faire le monsieur » chez Furetière (1690). Tous ces emplois ont disparu. Seul
triste sire, d'ailleurs attesté tardivement (déb.
XXe s.) par archaïsme, est d'usage courant aujourd'hui.
Avec la valeur de « seigneur, maître », sire s'est employé dans la sphère privée, désignant l'époux (v. 1050), le maître de la maison (1283), le grand-père (XIIIe s.) appelé aussi grand sirre (1548), le beau-père (1396), lui aussi grand sire (1387), et le père (1468). Le mot s'est utilisé pour « maître (de navires) » (1080) et « patron » (1180).
◆
C'est l'idée de « maîtrise » que l'on retrouve dans la locution ancienne être sire « être privilégié » (1170) et dans les emplois sortis d'usage du vocabulaire amoureux, avec sire de s'amour « maître de son amour » (1180-1220), sire du cor (« cœur »), « maître de ses sentiments » (v. 1240) et « amant » (v. 1300), retourné par référence aux emplois péjoratifs dans sire homs (homme) « cocu » (XIVe s.). Furetière relève (1690) sire pour « homme capable, intelligent », acception retenue jusqu'en 1771 dans Trévoux.
❏
Le dérivé
SIRERIE n. f. désignait en droit ancien (attesté 1694) le titre attaché à une terre dont le seigneur était dénommé
Sire.
◈
Le composé
MESSIRE n. m. (v. 1170), d'abord
mi sir (v. 1150), est formé avec
mes, ancien cas sujet de
mon*.
◆
Le mot était une dénomination honorifique réservée aux seigneurs de la noblesse (v. 1150), puis comme
sire, accompagnant le nom d'un saint (v. 1200), d'un ecclésiastique (1215), et un titre que prenaient les médecins, les avocats, etc. (
XIVe s.). Dès le
XIIe s., il était aussi donné comme titre plaisant à des animaux (apr. 1150).
◆
L'emploi péjoratif apparaît dans la locution
messire Jean « homme ignorant » (1558), noté « vulgaire » dans Oudin (1640). Le mot s'est employé (av. 1650) dans le style burlesque pour
monsieur et s'est dit (1660) de personnes que rien ne distinguait ou des hommes vieux.
◈
MESSER n. m. est un emprunt du moyen français (1404) à l'italien
messere, qui correspond à
messire. Ce mot sorti d'usage était utilisé comme titre devant le nom d'un Italien ou désignait un membre de la noblesse italienne (1510,
missere).
◆
Dans le style burlesque, il s'est employé (1546) pour des animaux ou des choses, par exemple dans
messer Gaster « l'estomac » (1552, Rabelais).
Faire le messer « faire le monsieur » (v. 1570) était péjoratif.
◈
SIR n. m. est un emprunt (1779) à un mot anglais (
XIIIe s., variante
ser, sur et
sire), lui-même pris au français
sire à l'époque de la conquête normande et officialisé sous le règne des Plantagenêts. C'est alors un titre et un terme de respect (
XIVe s.).
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En français,
sir désigne un titre d'honneur chez les Anglais ; il peut précéder le prénom employé seul ou le prénom et le nom du personnage, mais ne s'emploie pas devant le nom de famille seul.
Sir s'emploie aussi comme appellatif (1876), analogue à « monsieur », mais avec une nuance de respect hiérarchique plus marquée que
monsieur en français. Il sert de terme d'adresse aux subordonnés dans une hiérarchie (armée, police...).
❏ voir
SEIGNEUR (et MONSEIGNEUR), SÉNAT, SÉNEÇON, SÉNILE, SENIOR, SIEUR (et MONSIEUR).
SIRÈNE n. f., réfection (1377) de sereine (fin XIe s.), est emprunté au bas latin sirena, du latin classique siren, lui-même emprunté au grec seirên. Seirên était, d'après la tradition homérique (L'Odyssée), le nom de divinités de la mer qui, à l'entrée du détroit de Sicile, attiraient par leurs chants les navigateurs et les entraînaient vers la mort ; elles étaient alors représentées avec un corps d'oiseau et une tête de femme, et jamais avec un corps de poisson comme dans les mythes nordiques. Au figuré, le mot grec se disait d'une femme, de la Muse, de l'éloquence, etc. ; il désignait aussi une guêpe solitaire. Seirên est d'origine obscure.
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Le mot, écrit
sereine, seraine (
XIIIe s.), encore
serayne à la fin du
XVIe s. peut-être par croisement avec l'adjectif
serein, puis
serene (v. 1550) et
syrene (fin
XVIe s.), ne s'est stabilisé qu'au
XVIIIe siècle. Il désigne comme en latin la femme-oiseau fabuleuse de la mythologie grecque, mais aussi, d'après les mythes germaniques, un être mythique à tête et torse de femme et queue de poisson.
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Par figure, le mot se dit (1604) d'une femme douée d'un dangereux pouvoir de séduction et s'emploie dans la locution
voix de sirène « voix, paroles auxquelles il est difficile de résister » (1727) ; de même,
écouter le chant des sirènes signifie « se laisser séduire » (
XXe s.). Dans la conscience linguistique, l'image mythique des Grecs a été plus ou moins effacée par la représentation marine, d'ailleurs soutenue par l'emploi en zoologie (
sereine, chez d'Aubigné, v. 1600 ;
sirène, 1671), en concurrence avec
femme marine. L'emploi du mot en sciences naturelles pour désigner un amphibien (une salamandre des marais 1805, Cuvier) a entraîné la création de
sirénidés (ci-dessous).
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Depuis le début du XIXe s., sirène désigne en physique un appareil destiné à produire un son de hauteur variable et permettant de mesurer la fréquence des sons (1819) ; Cagniard de la Tour nomma ainsi son appareil parce qu'il émettait des sons dans l'eau.
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Sirène s'emploie couramment pour un puissant appareil sonore destiné à produire un signal, utilisé d'abord sur les navires dans les ports (attesté en 1888) et, par la suite, pour divers signaux (sirène d'alarme, d'usine).
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De cette valeur dérive
SIRÉNER v. tr. (mil.
XXe s.).
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De
sirène au sens du
XVIIe s., « animal marin pisciforme », vient
SIRÉNIENS n. m. pl. (1811) « ordre de mammifères placentaires aquatiques au corps pisciforme » (lamantin, dugong).
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Ce nom est sans rapport autre que morphologique avec
SIRÉNIEN, IENNE adj. « des sirènes » (1598,
chant sirénien).
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Un autre animal a été nommé
siren en latin moderne par Linné, à qui Garden l'avait signalé pour ses émissions vocales agréables. De là, par l'anglais
siren, sirène n. f. (1802) « salamandre des marais des États-Unis ».
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C'est ce mot, par le latin moderne
sirenes (1843) et
sirenidae (1845), qui a fourni
SIRÉNIDÉS n. m. pl. (1842), nom d'un ordre d'Amphibiens.
❏ voir
SERIN.