2 SOCQUETTE n. f. est un nom déposé (v. 1930), formé en français d'après chaussette sur l'anglais sock « chaussure » et « chaussette », lui-même emprunté au latin soccus (→ socque).
❏  Le mot, devenu courant, désigne une chaussette courte qui ne couvre qu'une partie du mollet ; bien que nom de marque, il s'écrit couramment sans S majuscule.
SOCRATIQUE adj. et n. m. est un emprunt (1540) au latin socraticus « de Socrate », désignant comme nom un disciple de Socrate, et lui-même emprunté au grec sôkratikos adj. et n. m., tiré de Sôkratês « Socrate » (v. 470-399 av. J.-C.).
❏  Terme didactique, le mot s'applique (1540) à ce qui est propre à Socrate ; par référence à ses mœurs homosexuelles, on a dit amour socratique pour « pédérastie » (1764, Voltaire). ◆  Socratique n. m. est tardif (attesté 1861) pour désigner un disciple de Socrate et on dit petits socratiques (1876) pour ses disciples posthumes.
❏  L'adjectif a servi à former SOCRATIQUEMENT adv. (av. 1672, La Mothe le Vayer) et socratiser v. tr., sorti d'usage comme euphémisme savant pour sodomiser (1750), encore attesté en argot au XIXe siècle. SOCRATISER v. intr., dérivé de Socrate (1734, Trévoux), signifie aussi « philosopher à la manière de Socrate ». ◆  PRÉSOCRATIQUE adj. pour désigner les philosophes grecs antérieurs à Socrate, est devenu usuel au XXe s., et a été concurrencé par anté-socratique. L'intérêt pour ces philosophes remonte à Hegel, puis Nietzsche (on trouve le mot dans Camus, 1951).
1 SODA n. m. représente (1837) une abréviation de soda-water (1814, n. f. ; 1820, n. m.), emprunté à l'anglais ; on relève une forme francisée d'après la prononciation, sodavatre (1846), qui ne s'est pas maintenue. Le mot anglais soda-water (1802), abrégé en soda (1842), signifiant proprement « eau de soude », est composé de water « eau » et de soda « soude » (1558), lui-même emprunt au latin médiéval soda (→ soude).
❏  Le mot désigne une eau gazéifiée ; le français utilise plutôt eau de Seltz (1775, répandu vers 1830), sauf dans quelques contextes où soda désigne l'eau gazeuse accompagnant une boisson alcoolisée (whisky soda). L'équivalent en français du Québec est liqueur douce.
2 SODA → SOUDE
SODIUM n. m. est un emprunt (1808, Gay-Lussac et Thénard) à l'anglais ; sodium, créé (1807) par le chimiste anglais H. Davy, est dérivé de l'anglais soda « soude » (1558), emprunt au latin médiéval soda (→ soude).
❏  Le mot désigne en chimie un corps simple, le plus abondant des métaux alcalins. Parmi les sels de sodium, le plus courant est le chlorure de sodium, communément nommé sel marin et sel gemme (→ sel). ◆  Nuage de sodium désigne (v. 1958) une masse de sodium lâchée en altitude, qui devient fluorescente et permet l'étude des vents en haute atmosphère par l'observation de ses transformations.
❏  Le dérivé SODIQUE adj. (1826, Berzelius) qualifie en chimie ce qui est relatif au sodium ou à la soude.
■  SODÉ, ÉE adj. (1855) s'applique à ce qui contient de la soude ou du sodium.
SODOKU n. m. (u prononcé ou), attesté en 1916, est la transcription d'un mot japonais pour dénommer une maladie infectieuse due à un spirochète, transmise par la morsure de rongeurs, surtout les rats.
SODOMIE n. f. est un emprunt (v. 1150, in F. e. w.) au latin religieux sodomia (VIe s.), dérivé de Sodoma « Sodome », ville de Palestine qui, selon la Genèse (XIII, XVIII, XIX), fut détruite, avec Gomorrhe, en raison de la luxure et de la corruption qui y régnait.
❏  Le nom désigne la pratique du coït anal, notamment dans l'homosexualité masculine ; on trouve en ancien français sodomerie n. f. (v. 1380) et en moyen français sodome (XVe s.).
❏  Le dérivé SODOMISER v. est d'abord intransitif (1587) et rarement attesté entre 1612 et 1871 ; on le trouve cependant en emploi transitif chez Sade.
■  SODOMITE n. m. et adj. est emprunté (v. 1160) au bas latin ecclésiastique Sodomita « habitant de Sodome » (IVe s.), dérivé de Sodoma. Le mot désigne celui qui se livre à la sodomie, spécialement un homosexuel passif ou actif ; on a dit SODOMISTE n. m. (XIIIe s., isolément), dérivé de sodomie, relevé à nouveau en 1740 (Académie) et employé par Proust (n. m. et adj.) qui en faisait un dérivé régulier de Sodome. Verlaine, lors de son procès, aurait rectifié le terme en -iste employé par le juge (« On dit sodomite, Monsieur », cité par Gide dans son Journal). Peu usité, l'adjectif s'applique (1520) à ce qui concerne la sodomie ; les variantes SODOMITIQUE (1492) et SODOMIQUE (1557 ; repris v. 1860, Proudhon) sont sorties d'usage.
L SŒUR n. f. est la graphie moderne (1549) du cas sujet soer (1080), puis suer (v. 1130) et seur (fin XIIIe s.), prononcé en deux syllabes, le cas régime étant seror (v. 1050), sorur (1080). Ces deux formes sont issues du latin classique soror, sororis, à l'accusatif sororem, mot qui désigne la sœur, la cousine, et est employé aussi pour marquer la ressemblance ou l'identité entre deux choses, par exemple les mains. En latin ecclésiastique, soror est le nom donné à une chrétienne par les chrétiens. Le mot appartient à une famille indoeuropéenne (°swesor-) dont la racine °swe-, °se- marque l'appartenance d'un individu à un groupe social (→ se ; costume, coutume) ; on la retrouve dans le gotique swistar (Cf. anglais sister ; allemand Schwester), dans les langues slaves. Les formes du cas régime (seror, etc.) qui subsistent jusqu'au XIVe s. sont l'aboutissement de l'accusatif latin.
❏  Le mot désigne dès l'origine (v. 1050, seror) et comme en latin une personne du sexe féminin née de la même mère et du même père, ou seulement de l'un des deux. D'une façon plus précise, on dit en droit sœur germaine (1200) quand les parents sont les mêmes, sœur utérine (1455) pour les filles d'une même mère et sœur consanguine (XVIe s.) d'un même père ; aucune de ces expressions n'est devenue usuelle ; pour désigner la sœur consanguine et utérine, on emploie couramment demi-sœur n. f. (1424, demie-seur). Sœur naturelle (XVe s.) se dit de celle qui est née hors du mariage. Sœurs jumelles « nées d'un même accouchement » s'emploie dès la fin du XIIe s. sous la forme serur gemeles (cas régime). Parmi les syntagmes les plus usuels, au sens propre, figurent ceux qui précisent un rapport d'âge : sœur aînée, sœur cadette, et familièrement grande sœur, petite sœur (aussi appellatif affectueux). Au sens premier, on distingue les sœurs germaines (des mêmes parents), les sœurs consanguines et utérines, appelées en français d'Afrique, sœurs même père, sœurs même mère. Par extension, toujours en français d'Afrique, le mot peut s'appliquer à des cousines, à des parentes d'âge voisin. ◆  Sœur de lait (1538) se dit de celle qui a eu la même nourrice qu'un autre enfant. ◆  Dans le contexte de la mythologie antique et poétiquement, on a dit les sœurs fatales (1546), les sœurs filandières (1624) pour « les Parques » et les neuf sœurs (1550), les doctes sœurs pour « les Muses » (en latin novem sorores, doctae sorores).
■  Parallèlement, le mot reprend l'emploi latin extensif (1080, soer) : en appellatif, c'était le nom qu'on donnait à une femme pour laquelle on avait de l'affection ; avec la même valeur, il est dit en ancien français en parlant d'une chose (1220, suer, d'une épée).
Exprimant l'idée de parenté, de ressemblance, sœur désigne aussi, par figure (XIIIe s.), une chose désignée par un mot du genre féminin, liée à une autre qui lui ressemble. On a dit au XVIe s., par exemple, les sœurs pour « les fesses » (1596), d'où la locution (1661) bouillon des deux sœurs « lavement ». Au XVIIe s., les sœurs désignent aussi les deux mains (1690).
■  Dans cette acception, sœur s'emploie à propos de choses abstraites ou dans des composés du type cellules-sœurs (XXe s.), « provenant de la division d'une cellule dite cellule-mère », ou sociétés-sœurs « filiales d'une même maison mère ». ◆  Cette idée de ressemblance se réalise aussi dans un emploi ancien comme appellatif adressé à une femme qui avait les mêmes défauts qu'une autre (1397), emploi qui traduit l'antiféminisme fréquent à cette époque. Avec cette valeur, le mot s'emploie encore pour parler de femmes qui ont la même situation (1671, sœurs d'infortune) ; c'est aussi le nom que se donnent entre elles des femmes qui appartiennent à certaines associations, par exemple la franc-maçonnerie (1867) ou à des mouvements de revendication féministes (apr. 1968), ainsi que les membres féminins de certaines communautés ethniques (Africaines, Maghrébines), parallèlement à frère et notamment comme appellatif (ma sœur). On trouve aussi ma sœur en appellatif. Ces emplois continuent un usage du XVIe s. calquant le latin des anciens chrétiens. ◆  C'est aussi du latin ecclésiastique que vient l'emploi (XIIIe s.) de sœur pour « religieuse », c'est-à-dire sœur en Jésus-Christ (1690), et l'usage ancien comme nom donné à une chrétienne (1533). L'emploi du mot peut être précisé : sœur converse « religieuse vouée aux travaux domestiques » (1669), autrefois sœur laie (1680) ou sœur domestique (1680) ; on relève ainsi dans le dictionnaire de Richelet (1680) sœur de la Croix « qui se consacre à l'enseignement », sœur-écoute « qui accompagne au parloir », sœur tourière « sœur portière d'un couvent », etc. Parmi les désignations d'appartenance à un ordre, sœur de la Charité, « religieuse appartenant à un ordre charitable » (1680), s'est employé en argot (1837), désignant une voleuse qui quête à domicile sous prétexte de bonnes œuvres. C'est à propos des sœurs de la Charité, dites aussi sœurs de charité, et des Petites Sœurs des pauvres, que l'expression populaire bonne sœur s'est répandue (XIXe s.) à propos de toute religieuse en habit. L'appellatif courant est alors ma sœur. ◆  C'est la même idée de filiation divine commune qui fait que sœur a été le titre (1694) donné par les rois de la chrétienté aux reines en leur écrivant. ◆  Dans la critique sacrée de l'Évangile, il a signifié (1765) « proche parente », par latinisme.
■  Dans un tout autre contexte, celui de l'argot, sœur est repris (1861) pour « femme » et spécialement « maîtresse » (Cf. frangine). De là le sens argotique d'« homosexuel » (1896). Le mot entre dans plusieurs scies, comme et ta sœur ?, pour se débarrasser de qqn (1861), qui vient d'une phrase de refrain au café-concert avec des réponses de fantaisie, comme — Elle bat le beurre. ◆  Mêmes connotations dans l'expression la main de ma sœur dans la culotte d'un zouave, scie à la mode vers la fin du XIXe siècle. Il s'appliquait aussi aux prostituées (dès 1610) [nos sœurs du peuple, 1867].
❏  SŒURETTE n. f. s'est employé (1458) pour « religieuse » et dans l'expression burlesque les sœurettes du Parnasse « les Muses » (1602). C'est aujourd'hui un terme d'affection envers une sœur, souvent plus jeune (1611).
BELLE-SŒUR n. f. est d'abord employé comme terme d'affection au sens de « chère sœur » (1160-1170, belle sœur ; → beau). ◆  Depuis le XVe s. (1423), parallèlement à beau-frère, belle-mère, etc., le mot signifie « sœur du mari ». On employait antérieurement sororge (1220), serorge (XIIIe s.), emprunté au latin médiéval sororgia (1098), altération de sororia, féminin du latin ecclésiastique sororius n. m. « beau-frère », substantivation de l'adjectif sororius.
Les dérivés savants de soror ont été repris après 1968 avec les progrès des idées féministes.
■  SORORITÉ n. f., qui a désigné (mil. XVIe s.) la qualité, la relation de sœur, était devenu très rare. ◆  Le mot a été repris (v. 1970) à propos du lien existant entre les femmes, considéré comme spécifique par rapport à la fraternité qui unit les hommes, en relation avec les emplois analogues de sœur (ci-dessus) et par influence de l'anglais sisterhood (1968 dans les milieux féministes). ◆  Sororité s'emploie spécialement, d'après l'anglais sorority, pour nommer un groupement de femmes, équivalent d'une fraternité.
■  SORORAL, ALE, AUX adj. reste un terme de droit (1752) pour « relatif à une sœur » ; on employait antérieurement sororel (1533), sororiel (1611) et sororial, ale (fin XVIIIe s., Bernardin de Saint-Pierre). L'adjectif s'est employé en parlant de l'harmonie qui règne entre deux femmes (fin XVIIIe s.) ; il se dit (v. 1970) de ce qui est relatif à la solidarité des femmes entre elles, à la sororité. ◆  Le dérivé SORORALEMENT adv. (1851), rare, a suivi la même évolution.
■  SORORAT n. m., dérivé didactique de soror (mil. XXe s.), désigne en ethnologie la pratique du remariage obligé d'un veuf avec la sœur de son épouse.
Le composé CONSŒUR n. f. (1770), d'abord consuer (1342), conseur (1396), est emprunté au latin médiéval consoror (1210) ; il a signifié « femme membre d'une confrérie » et (fin XVe s.) « religieuse, considérée en tant qu'appartenant au même ordre que d'autres ». Le mot s'emploie comme féminin de confrère (1764). ◆  Il s'est utilisé par plaisanterie péjorativement en argot (1829, en parlant d'une autre prostituée). Consœur est devenu un terme de style soutenu, désignant une femme appartenant à une profession libérale, considérée par rapport aux autres membres de cette profession.
❏ voir COUSIN.
SOFA n. m. est emprunté (1519, soffa ; 1560, sopha ; 1690, sofa) à l'arabe ṣŭffǎh « banquette », par l'intermédiaire du turc.
❏  Le mot a désigné (1560) une estrade élevée, couverte de tapis et de coussins, où le grand vizir recevait ses hôtes. Puis il s'est dit couramment (1657, sopha ; 1727, sofa) d'un lit de repos à trois appuis servant aussi de siège. ◆  En français du Québec, sofa s'emploie là où on dirait en France canapé, concuremment à divan. Sofa-lit, « canapé-lit ».
SOFTBALL n. m., emprunt à l'anglais attesté au Québec en 1967, est pris au composé anglais tiré de soft « doux » et du -ball de base-ball.
❏  Le mot désigne en sport, en français de France depuis 1980, l'usage québécois de balle molle ne s'étant pas implanté, une variété de base-ball joué sur un terrain plus petit avec une balle plus grosse et moins dure.
SOFTWARE n. m. est emprunté (1966) à l'argot des ingénieurs américains, formé plaisamment sur le modèle de hardware « quincaillerie » (→ hardware), par opposition de soft « mou » à hard « dur ». Soft est d'origine germanique (néerlandais zacht).
❏  Cet anglicisme, abrégé en soft n. m. (1971) et entré dans le vocabulaire international de l'informatique, désigne l'ensemble des moyens d'utilisation, des programmes, etc., d'un système informatique, par opposition aux éléments matériels. L'équivalent français logiciel* (1972), largement répandu, a pratiquement éliminé software, mais soft et hard n. m. sont toujours en usage.
L SOI, SE pron. pers. sont issus du latin classique se « se », accusatif du pronom réfléchi de la première personne de la forme atone, et de se comme forme tonique « soi ». Se apparaît à la fin du IXe, sei au XIe (1050), puis soi au XIIe s. (v. 1160). Le pronom latin se rattache à une racine °swe-, se-, marquant l'appartenance d'un individu à un groupe social ou l'isolement (→ sœur ; cousin, coutume, désuet, mâtin). Cette même racine se retrouve en grec dans ethos (→ éthique) et ethnos (→ ethnique). Se est parallèle à me, te et soi à moi, toi.
❏  Se est le pronom personnel de la troisième personne du singulier et du pluriel pour les deux genres ; il renvoie à un nom ou à un pronom personnel de la troisième personne, à un pronom indéfini ou relatif. Dès les premiers emplois, il s'utilise dans un verbe pronominal passif, forme des verbes essentiellement pronominaux et est complément d'objet direct, puis correspond à un nom précédé de à (1541). Il s'utilise également (XVe s.) dans un tour pronominal impersonnel.
■  Soi, pronom personnel réfléchi de la troisième personne (1050, sei), est généralement en corrélation avec un sujet indéterminé ou général ; il peut être renforcé par même (1050, sei medisme). Il peut représenter (1080, sei ; XIIe s., soi) un sujet de personne déterminé, en particulier dans le cas où lui serait ambigu.
■  Soi s'utilise fréquemment en fonction de complément : de soi (1172-1174, de sei) est sorti d'usage aux sens de « tout seul, de sa propre autorité » et (1541) pour « indépendamment des circonstances ». Être à soi, d'abord « être en liberté, à l'état sauvage » (v. 1375), s'est aussi employé au figuré (milieu XVIe s.) pour « avec le plein usage de sa raison » et, à l'époque classique, pour « être libre » (1659). ◆  En soi, employé en philosophie pour désigner (1541) ce qui existe indépendamment du contenu de l'esprit (Cf. essence), prend ensuite divers sens selon les systèmes philosophiques (par exemple l'être en soi, à propos de Hegel, 1833). Il donne le substantif EN-SOI n. m., (1943, Sartre) opposé à pour-soi (→ pour) en phénoménologie. ◆  Soi est employé (1580) dans rentrer en soi et chez soi. Chez soi est employé aussi comme nom masculin (1690). La locution un autre soi-même désigne (1584) un ami intime. Sur soi « sur sa personne » est attesté en 1666. ◆  En attribut, être soi (1762) correspond à « garder son propre caractère ».
■  Le soi « l'individu » (1751) a été repris en psychanalyse pour désigner chez Freud l'ensemble des pulsions inconscientes, traduisant l'allemand Es, opposé à Ich « je » (le moi) ; dans ce sens, le ça s'est imposé.
❏  SOI-DISANT adj. inv. représente (v. 1435) un reste de la syntaxe du moyen français où soi pouvait être complément d'objet. Il s'applique à qqn qui prétend être telle ou telle chose ; le participe présent disant s'accordait au XVIIe et encore au XVIIIe s. (la soi-disante...). Par extension, le mot se dit (XVIIIe s. : v. 1735) d'une personne ou d'une chose qui n'est pas ce qu'elle semble être. Cet emploi est combattu par les puristes. ◆  Soi-disant s'utilise comme locution adverbiale (av. 1834) au sens de « prétendument » et (XXe s.) forme la locution conjonctive familière soi-disant que.
❏ voir POUR (POUR-SOI), QUANT-À-SOI (art. QUANT), SIEN, SON, SUICIDE, et aussi la particule se- de SÉDUIRE.
L SOIE n. f. est l'aboutissement (v. 1175), par les formes seide (fin XIe s.), seie (XIIe s. : v. 1140), du latin populaire °seta, altération du latin classique saeta. Ce mot signifiait « crins, poil rude (d'un animal) », d'où « crinière », et spécialement « poil du porc, du sanglier » et « objet fabriqué avec ces poils », aussi « ligne de pêcheur », « brosse », et par ailleurs « feuille pointue des conifères ». Le sens de « matière filée par le ver à soie » a dû apparaître en bas latin, concurrençant sericus qui désigne la matière textile (→ sérici- ; serge). Saeta n'a pas d'étymologie claire.
❏  Le mot français apparaît avec le sens de « poil long et rude » en particulier du porc, employé ensuite en parlant du crin d'autres animaux, d'un âne (XIIIe s.), d'un cheval (1495) et plus tard d'un chien au poil long et doux (1680), l'emploi du mot au sens moderne rendant difficile son application à un poil rude, sauf en ce qui concerne le porc, emploi traditionnellement établi. ◆  Il désigne par métonymie (1559, seie) le crin du cheval utilisé pour faire des lignes à pêche (sens du latin saeta) ensuite fabriquées avec de la « soie » naturelle ou non (Cf. ci-dessous). ◆  Soie, terme technique, désigne une brosse en soies de porc utilisée par les orfèvres (1680). ◆  En médecine vétérinaire, le mot s'applique à une maladie du porc qui affecte un des côtés du cou où se forme une houppe de soies ; on a dit dans ce sens les soyes (1564), la soie (1611) et, par dérivation et pour lever les ambiguïtés, le soyon n. m. (1836) après le sion (1609). ◆  Par analogie, soie désigne en botanique (1812) un poil isolé, raide, au sommet d'un organe foliacé ou d'une graine et, en zoologie (1904), les poils situés autour des narines des oiseaux.
■  Parallèlement à ces emplois, le sens aujourd'hui dominant, apparu au début du XIIe s., concerne la substance filiforme sécrétée par les larves de lépidoptères appelés vers à soie et l'étoffe faite avec cette substance ; divers syntagmes précisent l'état de cette substance : soie crue « teinte, mais non décreusée » (1534), soie plate (1655), soie écrue (1690), soie folle « non torse, sans solidité » (1871), soie torse (1876). La locution soie artificielle s'opposait (1899) à soie naturelle pour désigner la rayonne*, jusqu'à l'interdiction de cette appellation en 1934. ◆  Les objets textiles et vêtements en soie (bas de soie, chemise de soie) sont nommés collectivement la soie (Cf. ci-dessous les métaphores). ◆  Le mot s'emploie depuis le XVIIe s. par analogie : soie d'Orient (1690) puis soie végétale (1791) se dit des poils qui entourent les grains de certaines plantes et qu'on a essayé d'utiliser comme textile. Soie s'utilise aussi (1710) pour parler du filament sécrété par les glandes de l'araignée et de certains insectes ; soie de mer (1812) ou soie marine est le nom du byssus soyeux produit par une espèce de moule. ◆  Papier de soie (1828) s'emploie pour un papier translucide très fin. ◆  Dans le vocabulaire technique, souvent au pluriel (1871), soie désigne la fibre du coton.
■  Le mot, au sens de « matière textile produite par le ver à soie », entre dans quelques locutions figurées : appliquer soie sur soie a signifié « flatter » (1611, écrit soye) ; par métaphore littéraire, des jours tissés (1645) ou filés (1671) de soie équivalait à « des jours heureux ». Par jeu de mots, bas de soie s'est dit chez les marins (1643) des fers enchaînant un condamné, puis (1690) d'une manière d'accompagner les pieds de cochon ; on relève aussi par un autre jeu de mots habillé de soie pour « porc » (1690), sorti d'usage ; pour la même raison, on nommait aussi cet animal marquis, à une époque où seule la noblesse avait des vêtements de soie. ◆  L'association soie-richesse a produit la locution familière péter dans la soie, d'abord « porter du linge fin » (1878), puis « être riche » (1932). ◆  Par calembour sur soie « poil » et jeu sur l'homonyme soi, la locution tomber (sauter) sur la soie de qqn signifie (v. 1940) « tomber sur qqn », en général le locuteur lui-même ; se faire la soie « s'enfuir » (attesté en 1956) vient d'un jeu de mots sur filer (la soie).
❏  Deux dérivés sont usuels. SOIERIE n. f. (1424) « étoffe de soie », d'abord sayerie (1328) d'après une forme saie, saye de soie, puis soyerie (1379), est vieilli pour désigner (1694) un établissement industriel pour le tissage de la soie. ◆  La soierie, singulier collectif (1694), est le nom de l'industrie et du commerce de la soie ; dans le vocabulaire technique (1845), soierie s'emploie pour la manière d'apprêter la soie.
■  SOYEUX, EUSE adj. et n. m. (1380 dans porc soieux) succède à seiet (1080). L'adjectif s'est appliqué à un porc couvert de ses soies, puis a qualifié ce qui est de la nature de la soie (1488, sayeux ; 1549, soyeux). Il signifie par extension (1690) « qui est doux et brillant comme de la soie », « qui a l'apparence de la soie » et s'applique (1761) à ce qui évoque une étoffe de soie. ◆  Soyeux a désigné un vendeur au rayon des soieries d'un magasin (1834). C'est aussi le nom, d'abord régional (Lyon), répandu à la fin du XIXe s. (1898, Daudet), d'un fabricant de soieries, d'un négociant en soieries. On disait auparavant soytier n. m. (1611).
■  SOYER, ÈRE adj. « relatif à la soie » (1842, industrie soyère) est rare.
❏ voir SAS, SÉRICI-, SERGE.
L SOIF n. f. représente (v. 1175) une altération en -oi-, sur le modèle de mots du type nois (cas sujet), noif (cas régime) « neige », de l'ancien français seit (v. 1050, seiz n. f. pl.), seid (v. 1112), sei (v. 1150), aboutissement du latin classique sitim, accusatif de sitis « soif » au propre et au figuré, mot isolé propre au latin, sans corrélats indoeuropéens.
❏  En français, le mot conserve le sens du latin, désignant (v. 1050, seiz) le désir de boire et la sensation qui l'accompagne, d'où avoir soif « éprouver cette sensation » (XIVe s.). Avec cette valeur, soif fait partie de nombreuses locutions : on a beau mener le bœuf à l'eau s'il n'a soif (XVe s.) « on ne peut obliger une personne entêtée à faire ce qu'elle n'a pas envie de faire », est sorti d'usage comme les variantes où l'âne remplace le bœuf (1690). Par ma soif !, employé comme juron (XVIe s.), a lui aussi disparu, comme mourir de soif près d'une fontaine « ne pas pouvoir jouir de qqch. qui se présente », thème fréquent de la poésie, aux XIVe-XVe siècles. Boire à sa soif (1665) s'oppose à mourir de soif (1230) qui a pour variante populaire crever de soif (1877). C'est la faim et la soif s'est dit (fin XVIIe s.) de deux époux qui n'ont pas de bien, et quand l'un a soif, l'autre veut boire (1871) s'employait à propos de deux personnes qui s'entendent très bien. Jusqu'à plus soif « beaucoup, à satiété » (1867) est familier, comme il fait soif « on a soif » (1865), croisement de il fait chaud et on a soif. ◆  Soif s'emploie par figure (1263, soi ; XIVe s., soif) au sens de « désir passionné et impatient », d'où avoir soif de (1644) et le titre d'un roman d'A. France Les dieux ont soif (1912) pour « les dieux ont soif de sang, le monde est cruel ». Le mot se dit par extension (1550) du manque d'eau (de la terre, de la végétation). ◆  Au sens initial, soif est souvent mis en rapport avec la consommation d'alcool, avoir toujours soif correspondant à « chercher à boire » et boit-sans-soif n. inv. désignant l'ivrogne.
❏  Parmi les nombreux dérivés de soif, SOIFFER v. tr. « boire (du vin, de l'alcool) » (1802 dans Esnault), familier et sorti d'usage, a fourni SOIFFARD, ARDE adj. (1842) et n. (1859, au masculin ; une soiffarde, 1875) et, vieilli, SOIFFEUR, EUSE adj. et n. (1830 ; 1875, au féminin), compris tous deux comme « qui a toujours soif ».
Le composé ASSOIFFER v. tr. « donner soif » attesté au XIXe s., au figuré et au propre (1888, Verlaine), semble postérieur à la forme du participe passé ASSOIFFÉ, ÉE adj., (1607 selon Bloch et Wartburg) qui au figuré (1856 chez Baudelaire) qualifie une personne qui a un désir ardent (assoiffé de...).
L SOIGNER v. tr. est issu (v. 1165), d'abord sous la forme soignier, devenue au XIVe s. soigner, d'un latin médiéval soniare (VIIe s.) « prendre soin », « pourvoir aux besoins matériels de (qqn) », lui-même emprunté au verbe francique °sunnjôn « s'occuper de », dérivé de °sunnja qu'on restitue d'après l'ancien saxon sunnea « soin » (Cf. soin, ci-dessous). L'italien sogna est emprunté au français.
❏  Le verbe français, qui semble plus tardif que l'expression aveir [avoir] soign de... et qui a plusieurs variantes en songn- en ancien français, apparaît au sens de « procurer, fournir (qqch. à qqn) » d'où « fréquenter (des marchés) pour se procurer des marchandises » (v. 1175), également sorti d'usage. ◆  Soigner signifie aussi « être préoccupé, veiller à » (v. 1300, songnier), acception sans doute plus ancienne (voir les dérivés), encore en usage à l'époque classique, et à laquelle correspond un emploi pronominal soi sonnier (v. 1300), d'où se soigner (1600). Dans cet emploi, les formes anciennes de soigner ont interféré avec celles de songer*, influençant le sens de ce dernier. Le verbe, construit avec de, signifie ensuite « s'occuper avec attention de qqch., avoir soin de qqch. » dans soigner de qqch., de qqn (v. 1360), construction qui se maintient au XVIIe et au XVIIIe s., comme soigner à (1538), à côté de l'emploi transitif (1538) et pronominal (1559) qui se sont maintenus, se soigner que « veiller à ce que » (1600) étant sorti d'usage. ◆  Par extension, le verbe a eu le sens de « conseiller, avertir » (XVe s., sogner) et, au concret, « s'occuper de, tenir propre », en particulier dans soigner les bêtes, soigner un enfant (1718). En prolongement avec ces valeurs disparues du verbe, des usages régionaux confèrent à soigner le sens de « surveiller (qqn, qqch.) » et de « garder, veiller sur ».
■  Le sens se spécialise au XVIIe s., avec la valeur aujourd'hui courante de « s'occuper de rétablir la santé de (qqn) » [1636], avec un pronominal réfléchi usuel, se soigner (1829), d'où par extension « s'occuper de guérir (un mal) », attesté au XIXe s., et la locution familière il faut te faire soigner, équivalant à « tu es fou » (XXe s.). ◆  Soigner équivaut ensuite à « apporter du soin à (ce qu'on fait) » [1771], spécialement dans l'argot du théâtre avec soigner ses entrées « se faire applaudir par la claque en entrant en scène » (1867), et dans le vocabulaire des sports où soigner sa forme veut dire « entretenir ses qualités physiques » (XXe s.). ◆  Par antiphrase, soigner qqn signifie « le battre » (1867), « le traiter avec rigueur » (1871), « le voler ». On a signalé un emploi analogue en moyen français (v. 1307, in G. L. L. F.).
❏  SOIGNANT, ANTE adj. s'est employé en ancien français (v. 1150) comme nom féminin au sens de « concubine ». Cet emploi, attesté plus anciennement que le verbe, peut correspondre à la locution aveir soign de, qui relève plutôt de la valeur de « s'occuper de, prendre soin » qu'à la première valeur attestée du verbe, « se procurer des marchandises ». ◆  Le mot, abandonné en français classique et jusqu'au XXe siècle, est à nouveau dérivé (1927) et appliqué à une personne qui donne des soins à un malade, en particulier dans AIDE-SOIGNANT, ANTE « qui assiste les infirmiers ».
■  SOIGNABLE adj. se dit d'un mal, d'une maladie que l'on sait soigner. Le mot est plus courant au Québec qu'en français d'Europe. SOIGNEUX, EUSE adj., réfection du XIVe s. (soigneus, v. 1385) de songnous (v. 1190), a signifié « soucieux, attentif », encore à l'époque classique. L'adjectif s'applique aussi (v. 1200, sonious) à une personne qui prend soin de qqch. ; avec cette valeur, soigneux de, suivi de l'infinitif (XIIIe s.), est archaïque, et soigneux à (1538) est sorti d'usage. L'adjectif qualifie depuis le XVIe s. (1552, soingneux ; 1580, soigneux) ce qui est fait avec soin et se dit (1651) d'une personne qui soigne ce qu'elle fait, spécialement (1782) qui est propre et ordonnée. ◆  Le dérivé SOIGNEUSEMENT adv. (v. 1190, soniousement) « avec soin » a signifié dans la langue classique (1672) « exactement, fidèlement ».
■  SOIGNÉ, ÉE adj. et n. s'applique (1690) à ce qui est fait avec soin et se dit (1764) d'une personne qui prend soin d'elle-même. ◆  SOIGNÉ n. m., terme de beaux-arts au XIXe s., a signifié (1845) « exécution minutieuse » et a désigné par ailleurs (1867) une chose de qualité supérieure ; l'adjectif se dit par ironie (1830) pour « fort », en parlant d'une chose désagréable. ◆  SOIGNÉE n. f., antiphrase familière pour « bonne correction » (1867) d'après l'emploi correspondant du verbe, est vieilli.
■  SOIGNEUR, EUSE n. désigne une personne qui prend soin d'une opération technique (1875, n. f., en tissage). ◆  Le nom s'emploie couramment (1903) pour la personne chargée d'entretenir la forme d'un sportif, spécialement celle qui soigne un boxeur entre les reprises.
SOIN n. m. apparaît sous deux formes différentes en ancien français. Soign (1080), dans la locution aveir soign de « se soucier de, s'intéresser à », est issu d'un latin tardif sonium, lui-même emprunt au francique °sun(n)i « souci », « chagrin » ; le mot s'écrit ensuite soing (v. 1155) et soin (XIIIe s.) ; cette forme correspond à l'ancien provençal sonh (XIIe s., aver sonh de...). ◆  L'autre forme, songne, apparaît (v. 1200) avec le même sens de « pensée qui occupe l'esprit », comme l'ancien provençal sonha (fin XIIe s.) ; cette forme vient d'un latin médiéval sunnia, d'un francique °sunnja « nécessité, besoin » et, avec ses variantes, s'est maintenue jusqu'au XIVe s., surtout dans le nord de la France.
■  Soin s'est employé dans les locutions n'avoir soin de « ne pas avoir besoin de » (v. 1180), estre en soin de « être en peine de, se préoccuper de » (XVe s.). Il a à l'époque classique le sens de « souci, inquiétude » (XVe s.) d'où avoir soin de qqn au sens disparu de « s'inquiéter pour qqn » (1677). Cette valeur a survécu régionalement ; elle est connue en français du Québec (il n'y a pas de soin, « pas de souci »). De nombreux emplois sont relevés dans le dictionnaire de Robert Estienne (1538). Soin y désigne notamment l'occupation, la charge qu'a une personne de veiller à qqch., valeur toujours vivante ; R. Estienne enregistre aussi avoir soin de, suivi de l'infinitif, « s'occuper de » et avoir soin de (qqch., qqn), (v. 1480), prendre soin de (1536 ; aussi prendre le soin de qqn, 1564) « s'occuper du bien-être de qqn, du bon état de qqch. ». Ces expressions sont restées usuelles, de même que le sens, lui aussi relevé dans R. Estienne, de « manière appliquée, scrupuleuse (de faire qqch.) ». ◆  Le mot s'emploie spécialement dans avoir (le) soin des malades (1625), vieilli, puis dans donner des soins (1835), d'où les soins « les actes et pratiques par lesquels on conserve ou on rétablit la santé » (1538 ; un soin 1671). ◆  Soins était passé au XVIIe s. dans le vocabulaire de la galanterie, à propos d'actions censées être agréables à qqn, faites pour séduire, notamment dans des locutions comme rendre des soins à (une dame) « la voir avec assiduité, lui faire la cour » (1654), donner des soins à qqn, petits soins « attentions délicates, petits services de l'amour » (1657) ; ces emplois ont vieilli puis disparu au XIXe s. ; il en reste être aux petits soins pour qqn « le choyer » (1798, en être...). ◆  À l'époque classique, d'après la valeur archaïque de « application d'esprit, souci », soin s'est dit pour « effort pour éviter ou pour obtenir qqch. » (1668) et équivalait à « soupçon, inquiétude » (1678). Au pluriel, les soins désigne plus généralement (1672) les actes par lesquels on s'occupe avec attention de qqn ou de qqch. (1718, les soins du ménage) et, spécialement (1690), des actions par lesquelles on donne à son corps une apparence nette et avenante ; ces valeurs sont restées vivantes. ◆  Aux bons soins de, suivi d'un nom de personne, s'écrit sur une correspondance (XXe s.) confiée à qqn pour qu'il la fasse parvenir à son destinataire.
❏ voir BESOGNE, BESOIN.
L SOIR n. m. représente l'aboutissement (v. 1160) de ser (v. 980), seir (1080), formes issues du latin classique sero adv. « tard, trop tard », de l'adjectif serus « tardif », « qui a de la durée ». L'ancien provençal a deux formes, ser (v. 1135), issu de sero, et sera (v. 1160), emprunté au bas latin sera n. f. « le soir » (de serus), comme l'italien sera. Pour exprimer la même idée, l'espagnol et le portugais tarde « soir », le catalan tarda viennent du latin classique tarde adv. « lentement » et « tard », le latin classique vesper « le soir », vespera « le temps du soir » ayant abouti en français à vêpres*. ◆  Serus a été rapproché du sanskrit sāyám « soir » et a un correspondant exact pour la forme dans le vieil irlandais sir « long » (irlandais sia).
❏  Le mot désigne depuis le Xe s. les moments qui précèdent et qui suivent le coucher du soleil, employé dès l'ancien français après un nom de jour, hier, demain (1080). La locution a seyr et a matin « sans cesse » (fin XIe s.) est devenue a soir et a matin (v. 1250), puis le soir et le matin (1480) ; de même sens aujourd'hui, du soir au matin (1668) et du matin au soir (1670) ont signifié à l'époque classique « très promptement ». ◆  Par métonymie, soir s'est dit pour « l'occident » (1341, seir), le matin correspondant à l'orient. Par métaphore, le soir (1552) ou, plus courant, le soir de la vie (1635) signifie « la vieillesse ». ◆  C'est alors qu'apparaissent les emplois du mot pour désigner une partie de la journée, la deuxième partie de l'après-midi (1690), valeur qui demeure dans journal du soir « qui paraît dans l'après-midi », d'autre part pour « nuit » et « fin de la journée, incluant une partie de la nuit, jusqu'au coucher » (1680), valeur où soir sera remplacé par soirée. C'est dans ce sens qu'on dit à ce soir (au Québec, à soir), pour « je vous reverrai ce soir même ». À soir s'emploie aussi pour « ce soir ». ◆  En français d'Afrique, le mot, en concurrence avec soirée, peut désigner l'après-midi (ce soir à 14 h). ◆  Soir se dit spécialement des dernières heures du jour et des premières de la nuit (v. 1550). ◆  Un beau soir, comme un beau jour, équivaut à « un soir quelconque » (1784). ◆  Le Grand Soir (1892), employé à la fois au sens propre et par métaphore (« fin d'une époque »), se dit pour « le jour de la révolution sociale » ; cette locution a surtout été employée par les anarchistes et les socialistes utopistes ; elle n'est rappelée qu'en histoire ou ironiquement. ◆  Être du soir (XXe s.) se dit pour « être en bonne (meilleure) condition physique et intellectuelle le soir », opposé à être du matin.
❏  SOIRÉE n. f. représente la réfection (1564), d'après soir, de l'ancien français serée (v. 1180), de ser (voir ci-dessus). ◆  Le mot apparaît avec le sens de « temps compris entre le déclin du jour et le moment où l'on s'endort », concurrencé par soir au XVIIe siècle. Le mot insiste sur la durée occupée par des activités, divisée en début et fin de soirée, et s'applique notamment aux spectacles (voir ci-dessous, une soirée) et aux programmes, surtout de télévision. Il se dit d'une réunion mondaine après le repas du soir et, en moyen français et en français classique, d'une réunion passée en commun pour travailler et causer, remplacé par veillée (1380, seerie, sous l'influence de l'ancienne forme ; 1764, soirée), d'où le sens disparu de « travaux de la veillée » (1611, serée) et l'emploi moderne dans soirée dansante (1829), ou encore toilette (1844), costume, tenue de soirée (1885). ◆  Par extension, une soirée (1843) est une séance de spectacle qui se donne le soir, opposé à matinée. ◆  Le dérivé SOIRISTE n. a désigné (1888) un journaliste qui rendait compte des soirées mondaines.
■  AVANT-SOIRÉE n. f. a été créé (1986) pour exprimer en français la notion correspondant à l'anglicisme prime time (qui a résisté à cette tentative).
Le composé BONSOIR n. m. et interj. (XVe s.), figement de (je vous souhaite) le bon soir, est une formule de salut et s'emploie dans la locution figurée dire bonsoir à la compagnie « mourir » (v. 1755 ; 1681 au propre). Bonsoir ! marque qu'une affaire est finie (1842, tout est dit, bonsoir !). En français actuel, bonsoir s'emploie pour saluer qqn le soir (en concurrence avec bonjour) et en le quittant (en concurrence avec au revoir).
❏ voir 2 SEREIN.
SOIT conj. et adv. représente (v. 1170) la troisième personne du singulier du subjonctif du verbe être*.
❏  Soit... soit marque l'alternative (v. 1175), de même que soit que... soit que... (1580), soit... ou (v. 1175) et soit ou... ou (1559), employés à l'époque classique. Adverbe d'affirmation (XIIIe s.), soit a une valeur concessive. ◆  Subjonctif lexicalisé du verbe être, il est employé pour présenter une supposition, une hypothèse (1835), notamment dans l'exposé d'un problème scientifique, ou pour introduire une explication de ce qui a été dit, pour apporter des précisions supplémentaires (XXe s.), équivalant dans ce cas à c'est-à-dire, à savoir.
❏ voir COMMUNIQUER.
SOISSONNAIS n. m. est tiré de l'adjectif dérivé du nom de la ville de Soissons, pour désigner en particulier une variété de haricots blancs cultivés dans cette région, aussi appelés des SOISSONS n. m. pl. ◆  Ces emplois ont suscité une métaphore argotique (soisson, 1901, soissonnet, 1928, refait en soissonais) pour « clitoris ».
SOIXANTE adj. numéral et n. m. inv. représente la réfection (v. 1380) d'après le latin de l'ancien français seisante (1080), puis seissante (v. 1130), soissante (v. 1228), issu du bas latin sexanta, contraction du latin classique sexaginta, dérivé de sex « six* ». On relève une première réfection dès le XIIe s. (v. 1160, seixante).
❏  L'adjectif, comme en latin, signifie « six fois dix ». Il est employé aussi comme nom (XIIe s.) et avec la valeur de « soixantième » (1871).
❏  Le dérivé SOIXANTIÈME adj. et n. (v. 1307) a été précédé par sessantisme (v. 1138) et sexantisme (v. 1200). Numéral ordinal de soixante, il s'emploie pour désigner la fraction d'un tout divisé en soixante (1694, n. m.) ou ce qui occupe la soixantième place (XXe s., n.). ◆  En procède l'adverbe SOIXANTIÈMEMENT (1636).
■  SOIXANTAINE n. f. s'est substitué (1399) à seisanteine (v. 1138). Il désigne une collection de soixante choses ou personnes, la soixantaine s'employant (1779) pour l'« âge de soixante ans ».
■  SOIXANTE-DIX adj. et n. m., réfection (1550) de seisente dis (v. 1165) et témoin de l'ancien système vicésimal, s'est maintenu et a supplanté septante, qui ne l'a emporté qu'en français de Belgique et de Suisse. Il a pour dérivé SOIXANTE-DIXIÈME adj. et n. (1550), concurrencé par septantième (français de Belgique, de Suisse).
■  Avec une valeur spécialisée, SOIXANTE-QUINZE n. m. inv. (1904) vient de « canon de soixante-quinze millimètres » et désigne un canon de campagne qui fut essentiel du côté français, lors de la Première Guerre mondiale.
■  SOIXANTE-HUITARD, ARDE adj. et n. (v. 1970) s'applique à ce qui concerne les événements de mai 1968 en France et est construit d'après quarante-huitard. De là POST-SOIXANTE-HUITARD, ARDE adj. et n. (1980).
■  SOIXANTE-NEUF, outre le nom du chiffre, par allusion à la forme de 69, s'applique à une position érotique où les partenaires sont tête-bêche (attesté avec certitude en 1864, Rigaud, à la même époque, évoquant un poète du XVIe s., Dorat, sans preuve). Le mot s'emploie dans faire 69.
SOJA n. m. est un emprunt (1828, après soya, 1732) au mandchou soya, la Mandchourie étant la grande région de culture du soja ; on relève aussi la forme soui et soi (1765), transcription approximative du japonais shoyu. Ce dernier rend le chinois shi-yu, de shi « haricots salés » et yu « huile ».
❏  Soui a d'abord désigné la sauce japonaise appelée aujourd'hui sauce de soja et faite à base de haricots de soja salés et fermentés. Puis, sous la forme soja, le mot désigne (1874) cette plante d'origine chinoise, de la famille des légumineuses, semblable au haricot et cultivée pour ses graines. Soja est aussi le nom d'une plante analogue, originaire de l'Inde, utilisée dans la cuisine extrême-orientale, notamment sous la forme de pousses germées dites (XXe s.) germes de soja. Gâteau, fromage de soja se disait en français du Viêtnam. ◆  Le mot s'est employé (1972) dans la locution familière western soja, formée d'après western spaghetti, pour désigner un film d'action et d'aventures tourné en Extrême-Orient et dont les personnages sont asiatiques.