❏
Sortir reprend les sens du latin « décider (qqch.) » (v. 1145), « tirer au sort, jeter les dés » (v. 1155, comme intransitif) d'où
se sortir « être tiré au sort » (v. 1355) et, par extension, comme transitif, « prédire (qqch.) par le sort » (v. 1155), qui s'est maintenu jusqu'à la fin du
XVe s. ; de ces acceptions viennent plusieurs emplois également disparus :
sortir de (faire qqch.) a signifié « décider de (fixer le sort) », en parlant des dieux (v. 1150) et
sortir de « obtenir connaissance de (qqch.) par le sort » (v. 1210). Par extension,
sortir à a signifié en moyen français « parvenir par sa destinée » (v. 1450).
◆
Parallèlement,
sortir avait aussi le sens latin de « choisir » (v. 1170,
sortir de « faire son choix à propos de ») et, en particulier, « désigner (un dignitaire ecclésiastique) » [1172-1174,
tr.], et celui de « distribuer, réserver pour » (v. 1330), encore au
XVIe s. avec
se sortir « se donner en partage » (v. 1530).
◆
Cette valeur étymologique demeure lorsque
sortir est employé pour « être tiré » en parlant d'un numéro (de loterie, etc.) que désigne le hasard (1664), d'où par analogie à propos d'un sujet d'examen (
XXe s.), mais le verbe est alors senti comme rattaché au sens moderne « aller au dehors », par une spécialisation ou une extension.
■
Le sens latin d'« obtenir » a été retenu en droit, probablement par réemprunt, dans sortir juridiction (1395) « subir le jugement », puis dans sortir son effet « produire son effet » (1439), en parlant d'une sentence. Avec cette valeur, le verbe a la conjugaison régulière des verbes en -ir, contrairement à sortir, verbe de mouvement.
L'idée de « mouvement » se réalise, semble-t-il, d'abord pour ressortir « rebondir », dès La Chanson de Roland (1080), et au XIIe s. dans sortir de la mort « y échapper » (v. 1150) qui correspond à l'idée latine de sortitus « désigné par le sort », d'où « épargné ». Cette acception a disparu, de même que, dans un emploi pronominal, se sortir « paraître, se manifester » (1358), mais la figure est reprise au XVIe siècle.
◆
De cet emploi pronominal procèdent sortir pour « aller dehors », emploi répandu au XVIe s. (1530), construit avec hors (1538), ou en évidence (1559) ainsi que sortir, sans complément, « apparaître en se produisant à l'extérieur » (1501) en parlant d'une plante, d'une dent. Par extension, sortir correspond à « apparaître en totalité ou en partie hors (de qqch.) » [v. 1485], d'où sortir de l'onde (1690 ; de l'eau, XIXe s.) à propos d'un bateau qui apparaît à l'horizon. Cette acception se retrouve dans une locution familière les yeux lui sortent de la tête, qui se disait autrefois pour marquer une grande vivacité (1740), aujourd'hui pour « avoir les yeux exorbités » (1876).
◆
Par une spécialisation, sortir veut dire « être livré au public » en parlant d'une marchandise (1874) et « commencer à être connu » (1926), de même que la métaphore sortir de l'ombre. Sortir, pour « être nettement visible sur un fond » (1675), est moins courant que ressortir (Cf. ci-dessous).
D'autres emplois de nature abstraite et intellectuelle se rattachent à ce sens à partir de la fin du
XVe s. : « ne pas se tenir à une chose fixée » dans
sortir d'un propos (fin
XVe s.), d'où
sortir de son sujet (1690),
sortir du sujet (1718),
sortir de la question (1718), emplois où le verbe équivaut à
s'écarter, s'éloigner ; avec la même valeur, des emplois métaphoriques supposent un sens concret (ci-dessous), par exemple
sortir des bornes, des limites du sujet, mais d'autres emplois abstraits ont cours :
sortir des règles (1636),
sortir de son devoir (1694),
ne pas sortir de là « persister » (1779).
◆
À la fin du
XVe s., on trouve aussi
sortir de « être issu, venir de », spécialement
sortir du ventre (d'une femme), « naître (de) » [1499], avec l'idée d'origine, réalisée ensuite dans l'emploi pour « être produit par » dans un contexte religieux à propos des œuvres divines (1560).
■
À propos des êtres humains, sortir de veut dire « avoir pour ascendance » (1640), par exemple dans la locution familière se croire sorti de la cuisse de Jupiter (→ cuisse), et « avoir été formé (quelque part) » (1701 ; 1782 sortir des mains de qqn). Cette idée d'origine s'est conservée dans des usages régionaux, où sortir de (nom de lieu) correspond à « être originaire de ».
◆
Sortir du rang (1893) s'emploie à propos d'un officier qui n'a pas suivi la formation, puis d'une personne qui n'a pas suivi la voie hiérarchique normale. D'où sortez-vous ? se dit (1713) à une personne qu'on n'a pas vue depuis longtemps ; par figure, la locution s'emploie familièrement en parlant de qqn dont l'ignorance est choquante (1792) et d'où sort-il ? concerne une origine sociale impliquant le manque d'éducation ou l'ignorance. Ces emplois sont aujourd'hui plutôt rattachés au sens spatial dominant « aller au dehors ».
Ce sens spatial concret d'« aller hors (d'un lieu), du dedans au dehors, à l'extérieur », semble exister depuis le XIIe s. (v. 1175), mais ne s'impose, par rapport à issir (→ issue) qu'au XVIe s., sortie étant attesté avec cette valeur en 1400. Il est devenu dominant et de nombreux emplois qui se rattachent à des valeurs antérieures sont aujourd'hui interprétés comme métaphoriques de cette acception (voir ci-dessus). La valeur générale de mouvement pourrait d'ailleurs remonter à l'ancien français, si l'on en juge par ressortir (« rebondir », 1080). Verbe intransitif, sortir de signifie « quitter un lieu » (1530) ; avec cette valeur, les constructions transitives (1534, sortir le pays) et pronominales ne se sont pas maintenues ; sortir signifie spécialement « aller dehors pour se battre » (1550). Sortir au devant de qqn (1538) a été remplacé par aller au-devant...
◆
Sortir, employé absolument, correspond à « aller se promener, faire des visites » (1636) et être sorti « ne pas être chez soi » (1664). Dans cette acception qui correspond à un emploi de sortie, le verbe a des contenus variables selon les contextes (plaisirs mondains, activités extérieures, parfois par euphémisme).
◆
Le verbe entre dans plusieurs locutions proverbiales comme la faim fait sortir le loup du bois (XVIe s.) toujours connu, sinon en usage, ou encore il ne peut sortir du sac que ce qui y est (1606), qui se disait d'une personne sans éducation, locution disparue dont on connaît de nombreuses variantes (1611, comme il semble sortir d'un sac à charbon, il ne peut sortir que de la poussière noire).
◆
Si on le fait sortir par la porte, il rentre par la fenêtre (1690), s'emploie à propos d'un importun.
◆
Sortir s'emploie en particulier quand il s'agit de quitter un lieu où l'on est enfermé, par exemple dans sortir de prison (1553), de captivité (1694).
◆
De même, le verbe se dit d'un objet en mouvement, d'un fluide (1550) ou d'une chose qui devrait se maintenir dans un lieu, un contenant, par exemple une rivière (1690, sortir de son lit) ; avec cette valeur, le verbe s'emploie par figure dans sortir de ses gonds (1559, sortir hors des gonds), qu'on rapprochera de être hors de soi. Sortir d'une boîte se dit au figuré en parlant d'une personne vêtue de neuf (1640), ensuite d'une personne prétentieuse (1863), emploi disparu.
◆
Dans de nombreuses expressions, le sujet désigne abstraitement un contenu de conscience dans sortir de la mémoire (1640), de l'esprit (1678), de la tête (1796), de l'idée « ne plus y être » (ça m'est sorti de...). Sortir du sujet (ci-dessus) qui procède du sémantisme de l'origine, est aussi interprété spatialement.
◆
Sortir du son (1669), de la mesure (1718) s'est employé en musique pour « perdre », sortir de cadence (1690) en danse.
◆
Par ailleurs, sortir dans / sur « avoir une issue » s'est dit (v. 1690) en parlant d'une pièce (sortir sur le jardin) ; il a été remplacé par donner* (sur).
◆
Parallèlement, avec plusieurs valeurs simultanées, spatiales mais aussi abstraites (ci-dessus), sortir de (qqch.) signifie « cesser d'être dans (un état), de faire (une chose) », d'abord dans sortir hors de (l'enfance, l'hiver) [1538], puis sortir de (1690) et dans sortir de maladie (1538), sortir du collège « avoir achevé ses études » (1694), sortir de la vie (1610) « mourir », condamné par Vaugelas, sortir du monde (1669). Cette valeur s'est conservée dans un usage du français du Maghreb, sortir des études « terminer ou avoir terminé ses études ». Dans le même usage, on emploie sortir pour « partir pour l'étranger ».
◆
La valeur concrète spatiale est ranimée par une métaphore dans la locution familière n'en sortir que les pieds devant (1694), devenue sortir les pieds devant (1838), « ne sortir de quelque part que mort ».
◆
D'autres emplois classiques, sortir (de colère, de chagrin) « ne plus être (en colère, etc.) » [1666], sortir d'erreur « reconnaître ses erreurs » (1694) ont disparu.
◆
Le verbe s'emploie aussi en parlant d'une difficulté (1538), en particulier dans en sortir, s'en sortir (1788) « venir à bout d'une situation pénible ou d'un travail difficile ».
◆
Dans un contexte social, sortir s'est employé à propos d'une activité, dans sortir de page « cesser d'être page » (1549), type de construction encore vivante à la fin du XVIIe s. par exemple dans sortir de fille (1693) « se marier » ; cet emploi n'est plus possible qu'avec un complément désignant la situation qui se termine, par exemple sortir de charge (1636), sortir de condition (1680) « n'être plus employé quelque part », sortir de sa sphère, autrefois « quitter sa condition » (1694) puis au figuré « quitter le domaine que l'on connaît ».
◆
Sortir de correspond aussi à « laisser, abandonner une occupation », par exemple dans sortir de la messe (1680), sortir de dîner (1718), sortir de table (1798) ; sortir de suivi de l'infinitif, (1718, sortir d'entendre la messe) est aujourd'hui familier et implique un passé récent. La locution familière sortir d'en prendre signifie « n'être pas prêt à refaire ce qui a été pénible » (1837).
◆
Sortir d'avec qqn « venir de lui parler » (XVIIIe s.) n'est plus en usage.
◆
Lorsque le complément désigne un état psychologique, un sentiment, le verbe veut dire « abandonner (un comportement habituel ou naturel) », ainsi dans sortir de son caractère (1611), sortir du respect (1636), sortir hors de son bon sens (1690) ; sortir de soi « faire abnégation de sa propre personne » (fin XVIIe s.) a pris le sens de « devenir autre » et spécialement « cesser de s'intéresser uniquement à soi ».
◆
Par métaphore de l'œuf, sortir de sa coquille signifie « être encore tout jeune » (1694) et « quitter sa réserve, sa timidité » (XXe s.).
◆
La locution familière il me sort par le cul (1867) ne s'emploie plus, mais il me sort par les yeux (XXe s.), « il m'est insupportable », est toujours en usage, et fait allusion à je ne peux plus le sentir, le voir. La première, plus vulgaire, correspond au sémantisme de « rejeter, expulser » ; Cf. chier.
À côté de ces emplois intransitifs,
sortir, avec le sémantisme du mouvement vers l'extérieur, a développé une valeur transitive « mettre dehors ». Le verbe s'emploie pour « accompagner au dehors (un être qui ne peut sortir seul) » [1596, d'un animal], d'où plus tard
sortir un malade (1871) en concurrence avec l'intransitif dans
faire sortir qqn.
◆
Avec un complément nom de chose, le verbe signifie « mettre (un objet) dehors » (1611), spécialement « mettre au grand air » (1835), par exemple une plante et par ailleurs « tirer (qqch.) d'un lieu » (1668), en particulier retirer des pions rentrés, pour les mettre sur la table de départ de son adversaire, autrefois au tric-trac (1752), aujourd'hui au jacquet (
XXe s.).
◆
De là vient le sens figuré d'« étaler, manifester avec ostentation (qqch.) » surtout au figuré, en parlant des connaissances (déb.
XXe s.,
sortir sa science). C'est à cet emploi que se rattache l'expression
sortir son français, qui s'emploie à la Réunion pour « parler français (et non pas créole) pour se mettre en valeur » et aussi « mal le parler », avec l'idée d'effort et d'artifice.
◆
Concrètement, on dit en aviation
sortir le train d'atterrissage et (1937)
sortir les roues.
■
En parlant d'une personne et figurément, le verbe signifie « faire sortir (d'une situation, d'un état) » [v. 1630, sortir qqn d'embarras], aussi dans sortir qqn de là.
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En emploi concret pour « accompagner (qqn) dehors » (ci-dessus), sortir s'emploie familièrement pour « accompagner au spectacle, dans des visites », en prenant l'initiative de cette sortie (1788) et aussi au sens de « faire sortir, expulser (qqn) » [1888], d'où le slogan politique plaisant sortez les sortants (les députés sortants). Le verbe s'emploie en sports pour « éliminer ». Attesté au début du XXe s. (1903), sortir qqch. à qqn signifie « dire, lancer ».
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Sortir (un objet fabriqué), c'est enfin le mettre dans le commerce (1938). Ces emplois correspondent en général à faire sortir, où le verbe est intransitif.
Si SORTIR, n. m. (1540), est peu en usage, il s'emploie depuis le XVIe s. dans la locution prépositive au sortir de... (1559) qui a la valeur spatiale et la valeur temporelle du verbe, dans un usage littéraire.
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Les dérivés sont usuels.
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SORTABLE adj. a signifié à l'époque classique « de nature à convenir » (1395, Bloch et Wartburg), d'après la valeur de sortir « choisir » ; en ce sens, on a aussi employé sortissable (XVe s.). L'adjectif, sorti d'usage, a de nouveau été dérivé du verbe vers la fin du XIXe s. (1894, L. Bloy) appliqué familièrement à ce que l'on peut montrer en public ou à une personne qui présente bien, surtout dans des tours négatifs (il n'est pas sortable).
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Ces tours équivalent au préfixé INSORTABLE adj. (XXe s.).
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SORTEUR, SORTEUX, EUSE n., attesté en 1872, désignait en français de Normandie une personne aimant les sorties, les distractions. Le mot s'est aussi employé au Québec.
◆
En français de Belgique,
sorteur n. m. se dit de celui qu'on nomme en France
videur, dans une boîte de nuit, un club.
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SORTIE n. f. (1400), tiré du participe passé du verbe, n'en a conservé que l'idée de mouvement. On relève isolément pour « action de sortir » la forme
essort (
XIIIe s., puis 1431).
◆
Sortie désigne d'abord l'action de quitter un lieu, en particulier pour faire qqch., le moment où on le quitte (1636), d'où
à la sortie avec une valeur temporelle (1636), puis spatiale (1690). Il a des emplois spéciaux : au théâtre pour l'action de quitter la scène, où l'on parle aussi de
fausse sortie (1835), en marine à propos de la navigation à courte distance d'un port (v. 1870), pour désigner le moment où l'on quitte un lieu de travail (1885), ou, en sports, le mouvement par lequel un gymnaste achève son travail aux agrès.
◆
Avec cette valeur, outre les emplois concrets, comme
sortie d'usine (1875) « mouvement des personnes qui sortent »,
sortie entre dans des locutions où il correspond à « fait de s'absenter » et où
sortir n'est pas toujours en usage.
Sortie correspond aussi à « permission de sortir » (dans un internat, etc.), sens attesté en 1832. Le mot est repris dans avec son sens général dans
jour de sortie (attesté début
XXe s.) « moment de la semaine pendant lequel une personne contrainte à séjourner quelque part peut s'absenter ». Correspondant à un emploi spécial du verbe,
être de sortie, familier, « sortir pour se distraire », « être absent » et, à propos de choses, « faire défaut » (1925).
■
Dans le vocabulaire militaire, une sortie (1570, sortye) se dit d'une attaque d'assiégés pour sortir de leurs positions forcées. Par figure de ce sens militaire, sortie s'emploie pour « attaque verbale » (1672), spécialement pour « attaque critique » (1760). Par analogie, il s'emploie en sports (mil. XXe s.), par exemple au football.
◆
L'expression sortie de deuil, en français d'Afrique, désigne la fin du deuil, un an après le décès.
■
Depuis la fin du XVIe s., sortie désigne par métonymie l'endroit par lequel des personnes (1597), des choses (1690) sortent, en concurrence avec issue*, d'où sortie de secours (attesté 1930) ou par ici la sortie ! (au figuré « allez-vous-en ! »).
◆
Il s'est dit spécialement en termes de fortifications (1793) pour « poterne » ; par extension, il désigne une voie de dégagement (XXe s.) et, en technique (XXe s.), la prise d'un appareil de reproduction sonore sur laquelle on peut brancher un autre appareil.
■
En parlant de marchandises, avec la valeur active (« action de sortir »), la sortie désigne le fait de sortir d'un pays (1626) d'où droit de sortie (1679). Au figuré, et avec un sujet nom de personne, sortie a signifié « fait de quitter la vie » (1635) ; lié à d'autres acceptions du verbe, il a le sens figuré de « moyen de se tirer d'embarras » (1636), archaïque, sauf dans les locutions (se) ménager une sortie (1835), une porte de sortie (1876).
◆
Il désigne aussi par métonymie un vêtement qui se porte en sortant d'un lieu (1843) ; de là sortie du bal (1859), remplacé (1871) par sortie de bal « vêtement chaud porté sur la robe de bal » et aussi sortie de bain (1904).
◆
Au XIXe et au XXe s., le mot s'emploie, en rapport avec des valeurs spéciales de sortir, en parlant d'une somme dépensée (1846) et, dans le vocabulaire technique (mil. XXe s.), du fonctionnement effectif d'un mécanisme, par rapport à la commande, acception spécialement utilisée en informatique (v. 1968).
◆
Sortie désigne aussi le fait pour un produit d'être livré au public (1927), par exemple la sortie d'un livre, d'un disque, d'un film.
◈
SORTANT, ANTE adj. et n., tiré du participe présent (fin
XVIIe s.), s'est appliqué à ce qui ressort, se fait remarquer, en parlant d'un visage. Le nom désigne ensuite (1788) une personne qui sort d'un lieu, spécialement qui cesse de faire partie d'un corps constitué (1835,
adj. et n. ; Cf. ci-dessus le slogan poujadiste sortez les sortants !) et en sports un joueur qui se retire d'une partie (
XXe s.).
◆
L'adjectif qualifie aussi un numéro tiré au sort (1835), avec le sens ancien et étymologique de
sortir.
◆
Le mot, en Afrique subsaharienne, s'emploie à propos d'un élève qui a terminé ses études dans une école.
◆
SORTANT n. m. se dit (1918, Proust) en architecture d'un élément qui fait saillie, opposé à
rentrant.
◈
1 RESSORTIR v., réfection (
XIIe s.) de
resortir (1080), de
re- et
sortir, est dès ses premiers emplois un verbe de mouvement, signifiant « rebondir » en parlant d'une arme avec laquelle on a frappé
(Cf. ci-dessous 3 ressort). Ceci pose un problème par rapport à
sortir, qu'il s'agisse d'un ou de deux verbes distincts (voir ci-dessus), lequel ne semble prendre une valeur spatiale que beaucoup plus tard.
Ressortir signifie aussi (v. 1112) « paraître avec plus de relief », d'où abstraitement (1564) « être rendu plus frappant par contraste avec d'autres choses »,
faire ressortir signifiant « mettre en relief » (1788).
◆
Dès le
XIIe s.,
ressortir a le sens aujourd'hui courant (v. 1155) de « sortir (d'un lieu) après y être entré » et s'est employé au sens de « reculer » dans
arriere resortir (v. 1155), par exemple dans un combat (déb.
XIIIe s.), sens qui ne s'est pas maintenu.
◆
Par figure, le verbe a signifié « changer d'avis, se dédire » (1165-1170), « renoncer à » (1255) et au pronominal « cesser de » (1165-1170,
soi resortir de).
◆
Avec l'idée de mouvement, l'ancien français avait d'autres acceptions : « repousser, renverser » (
XIIIe s.,
tr.), « poursuivre » (
XIIIe s.,
tr.), « tressaillir » (v. 1225,
intr.) et, dans le domaine du sentiment,
resortir de joie « bondir de joie », en parlant du cœur.
■
Au XVIe s., ressortir prend le sens itératif de « sortir de nouveau, une deuxième fois » (1549), d'où « être proposé de nouveau au public ». Le verbe s'est employé pour « aboutir à » (1559, aussi ressortir à effet), acception dont procède le sens de « se dégager de, résulter » (v. 1790), qui n'est plus en usage aujourd'hui qu'à la forme impersonnelle (1821, il ressort que).
◆
Au XVIIe s., ressortir, v. tr. a signifié « réexpédier (une marchandise) » [av. 1683, Colbert] ; puis, au XXe s., le préfixe marque la répétition de l'action dans divers emplois de sortir, transitif, « faire sortir une nouvelle fois (un livre, un film) » et « faire apparaître (qqch.) de nouveau », « répéter ».
■
Le dérivé RESSORTANT, ANTE adj., appliqué à ce qui fait saillie (1876), est rare.
■
Le déverbal de ressortir, 1 RESSORT n. m. est attesté au XIIe s. au sens d'« égout », proprement « ce qui permet de sortir » (Cf. sortie), relevé encore dans le nord de la France en 1629. L'idée de « recul » (Cf. ci-dessus arriere resortir) correspond en ancien français à l'emploi figuré pour « restriction » (1170), d'où « action de renoncer » (1255) et sans ressort correspondant à « sans restriction » (v. 1260).
◆
Par ailleurs le mot a eu les sens figurés de « recours » (v. 1155), « ressource, secours, remède » (1160-1170). Celui de « rebondissement, élan » (v. 1220) prépare la valeur métonymique lexicalisée dans 3 ressort (ci-dessous). De ces emplois, tous disparus, procèdent en effet les acceptions qui font distinguer deux homonymes en français moderne.
◈
2 RESSORT n. m., spécialisé dans le domaine juridique, désigne d'abord (v. 1210) le recours à une juridiction supérieure, la
justice de ressort (1756, Voltaire) étant le tribunal auquel on pouvait en appeler contre une décision du tribunal féodal, et aujourd'hui (1875) un tribunal auquel on peut faire appel. Par extension, le mot désigne (1265) la limite de compétence d'un corps judiciaire, puis en général le domaine où s'étend la compétence d'une juridiction (mil.
XIVe s.) et par extension d'une personne quelconque, dans la locution courante
(être) du ressort de (1694).
◆
Ressort se dit de la circonscription territoriale dans laquelle s'exerce la juridiction d'un tribunal (1353), mais ne s'est pas maintenu au sens de « juge, arbitre » (v. 1360). La locution
(juger) en dernier ressort « sans appel » (1529), en droit, s'oppose à
(juger) en premier ressort (1636), sorti d'usage ;
en dernier ressort signifie « finalement » (1667), selon la même évolution que
en dernière instance*.
■
Par ailleurs, l'idée de secours s'était maintenue dans le vocabulaire général et ressort s'est dit pour « refuge, lieu de retraite » (v. 1360) encore chez d'Aubigné (déb. XVIIe s.) et « abri » (1460), « recoin » (v. 1560).
■
De l'emploi juridique procède un autre verbe 2 RESSORTIR v. tr. ind. (v. 1320, Bloch et Wartburg sans précision de sens, puis 1462) au sens de « recourir à une juridiction supérieure » qui a disparu. Le verbe signifie encore « être de la compétence d'une juridiction » (1474) mais ne s'est pas maintenu pour « comparaître en jugement » (1481).
◆
Ressortir a pris l'acception figurée de « se rapporter à (un domaine) », parfois construit avec de (1585), et plus souvent avec à (av. 1741).
■
Le dérivé RESSORTISSANT, ANTE adj. s'applique à ce qui est du ressort d'un tribunal (fin XIVe s., puis 1694).
◆
Le mot est employé comme nom (déb. XXe s.), à propos d'une personne qui ressortit à une autorité, à un statut, emploi usuel dans un contexte administratif. En français d'Afrique, il s'applique à une personne qui se trouve, qui vit dans un lieu et qui est originaire d'un autre lieu (les ressortissants sénégalais du Mali, au Mali).
◈
3 RESSORT n. m., avec l'idée de « rebondissement » qui correspond aux premiers emplois de
ressortir, désigne (1260,
resort de sereüre) une pièce, souvent métallique, faite de façon qu'elle se rétablit dans son premier état après avoir été comprimée, d'où
à ressort « qui fonctionne au moyen d'un ressort ». Cet emploi assez général s'est spécialisé, le mot désignant au
XVIIe s. (1694) un mécanisme destiné à amortir les secousses (1694, pour une voiture), notamment un dispositif métallique en hélice (dit
ressort à boudin, 1676) ou reposait sur les propriétés élastiques de lames de métal (
ressort à lames, 1875).
Ressort de rappel (1876) précise la nature du processus. Le mot s'est dit jusqu'à l'époque classique avec une valeur active d'un mouvement fait par contrecoup (1416). Il s'est employé plus longtemps au figuré pour désigner un moyen plus ou moins secret qui sert à faire réussir une intrigue (v. 1560,
resourd ; déb.
XVIIe s.,
ressort) ; cette acception a vieilli.
◆
Par allusion aux ressorts d'une horloge ou d'un automate, mais toujours avec le sémantisme de l'action, le mot a pris (v. 1570) le sens de « cause agissante, force qui fait se mouvoir qqch. », vieilli en parlant des êtres vivants, comme l'emploi pour désigner ce qui stimule l'activité (1580) et le sens de « force, énergie » (1680), sauf dans l'usage littéraire et lorsque la métaphore du ressort concret est sentie, avec des verbes comme
tendre, détendre. Cette valeur s'est réalisée dans plusieurs locutions :
n'aller que par ressorts « n'avoir que des mouvements contraints » (1663),
ne se remuer (1694) ou
n'agir que par ressort (1718) « par des influences »,
esprit à ressorts « souple » (1765), sorties d'usage ; ce type d'emploi s'est conservé dans
donner du ressort (à) « plus de vigueur » (1762),
avoir du ressort « de la force morale » et
être sans ressort, manquer de ressort.
◆
Pièce à plusieurs ressorts a désigné (1611) au théâtre une pièce où plusieurs actions sont agencées.
◆
Le mot s'est dit aussi (1690) de la propriété de certains corps de reprendre leur position première, remplacé par
élasticité* ; faire ressort « agir par élasticité » (1647, trad. du lat. de Descartes) est compris aujourd'hui comme « agir à la manière d'un ressort ».