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Le mot, assez peu employé en ancien français, s'applique d'abord à ce qui sert à qqch., à ce qui peut être avantageux à qqn ; de là vient son usage en droit pour qualifier une terre dont on a l'usufruit (1507) et, par métonymie, l'expression
seigneur utile, « qui a les revenus d'une terre » (1508), sortie d'usage.
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Le sens fondamental, qui correspond à la notion d'avantage pratique, devient courant en français classique et s'est perpétué jusqu'à nos jours.
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L'emploi substantif
(l'utile) est attesté en 1616 chez d'Aubigné.
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Utile s'applique par extension (1637) aux personnes, par exemple dans
se rendre utile.
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L'adjectif entre dans le vocabulaire du droit (1718) dans
jours utiles « pendant lesquels un acte peut encore être accompli », puis s'emploie dans la locution
en temps utile (1835).
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L'emploi adverbial, familier, est relevé au milieu du XXe s. (voter utile).
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UTILEMENT adv., réfection (1538) de
utlement (v. 1190),
utielment (
XIVe s.), correspond aux différentes valeurs de l'adjectif.
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UTILISER v. tr. apparaît à la fin du XVIIIe s. (1792), d'abord dans des emplois didactiques. Il ne se répand qu'au milieu du XIXe s. ; attesté en premier lieu au sens de « rendre utile, faire servir à une fin précise », le verbe est devenu courant pour « employer », dans un sens très général.
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Du verbe dérivent UTILISATION n. f. (1796) « action d'utiliser », UTILISABLE adj. (1842) « qu'on peut utiliser », d'où INUTILISABLE adj. (1845), et le nom d'agent UTILISATEUR, TRICE n. et adj. (att. 1932).
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Le composé
RÉUTILISER v. tr. (attesté en 1949, évidemment antérieur) signifie « utiliser de nouveau (ce qui a déjà été employé) » ou « utiliser une nouvelle quantité de (une substance) ». Il s'emploie aussi au figuré, de même que
RÉUTILISATION n. f. (1961) et
RÉUTILISABLE adj. (1975).
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SOUS-UTILISER v. tr., « utiliser moins qu'on ne le pourrait », souvent au passif et participe passé, est attesté dans les dictionnaires en 1969,
SOUS-UTILISATION n. f. en 1947.
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INUTILE adj. est emprunté (1
re moitié
XIIe s.,
inutiles ; av. 1380, forme moderne) au latin
inutilis « inutile » et « contraire à l'utilité ». L'adjectif s'applique à des choses, puis à des personnes (v. 1530, Marot), d'où la locution
une bouche inutile (1743).
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En dérivent INUTILEMENT adv. (v. 1434), INUTILISER v. tr., d'emploi rare (1801), dont procèdent INUTILISÉ, ÉE adj. (1834), plus courant, et INUTILISATION n. f. (XXe s.) ; Cf. ci-dessous inutilité.
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UTILITÉ n. f., substantif correspondant à l'adjectif
utile, est emprunté (1120) au dérivé latin
utilitas « caractère de ce qui est utile », d'usage classique dans des emplois concrets et abstraits. Le nom conserve le sens latin ; il a en outre désigné ce en quoi une chose est utile (1314).
Utilité publique, terme de droit, est relevé en 1677.
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Une, des utilités désigne un rôle de peu d'importance, dans une pièce (1812, au pluriel ; 1801
remplir les utilités) et, par métonymie, un acteur qui joue ce genre de rôle (1845).
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Par ailleurs, le concept d'utilité prend au XIXe s. une valeur précise en économie, comme en témoignent les dérivés.
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UTILITAIRE adj. et n. (1830, n.), formé d'après l'anglais utilitarian (1781, nom ; 1802, adjectif), dérivé par J. Bentham de utility, désigne et qualifie d'abord une personne qui ne reconnaît pour principe du bien que l'intérêt général (1835, adj.). Il est souvent péjoratif pour « attaché à ce qui est utile » (1834), puis il s'applique aussi à ce qui vise à l'utile, en particulier (1872, véhicule utilitaire, alors opposé à de tourisme).
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Du premier emploi dérive le terme philosophique UTILITARISME n. m. (1831) qui s'est imposé en éliminant d'autres mots formés à partir de l'anglais utilitarianism (1827) : utilitairianisme (1845), utilitarianisme (1872).
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Le nom a fourni UTILITARISTE adj. (av. 1922), qui a supplanté utilitairien, ienne adj. (1845) qui avait été proposé par J. Bentham à l'Institut en 1802.
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L'adverbe UTILITAIREMENT (1834) est littéraire ou didactique.
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INUTILITÉ n. f., emprunt au préfixé latin inutilitas « absence d'utilité », attesté en 1396 avec le sens de l'étymon et rattaché par le sens et l'usage à inutile, est rare dans l'emploi de une, des inutilités pour « acte, parole inutile » (1676, Mme de Sévigné).