VANTERNE n. f. représente un croisement (1800) de vantail* et de lanterne*, ou est emprunté à l'espagnol ventana « fenêtre », croisé avec lanterne.
❏  Le mot équivaut en argot à « fenêtre », d'où l'emploi figuré de vanternes pour « lunettes » (1837) et la locution vol à la vanterne « en pénétrant par les fenêtres laissées ouvertes » (1844). Tous ces emplois ont disparu.
VANUATAIS, AISE adj. et n. qualifie ce qui est relatif à l'archipel des Vanuatu, îles situées au nord-est de la Nouvelle-Calédonie, république indépendante depuis 1980. Le nom, dans la langue autochtone, signifie « notre pays » (apparenté au tahitien fenua « terre »). L'archipel avait été baptisé par les Espagnols Tierra austral del Espiritu Santo, par Bougainville (1768) Archipel des Grandes Cyclades, par Cook (1774) New Hebrides, nom conservé jusqu'à l'indépendance. En français de Vanuatu et en Nouvelle-Calédonie, on dit aussi VANUATAN, ANE, adj. et n. Pour le nom des habitants, on emploie aussi (un, des) VANUATU(S) et (un, des) NI-VANUATU(S), ni- étant dans la langue un marqueur nominal.
VAPEUR n. f. et n. m. est emprunté (v. 1270), d'abord sous la forme vapour (v. 1265), au latin classique vapor, -oris « émanation visible » d'un liquide chaud, par extension « chaleur, air chaud », « bouffées de chaleur », et au figuré « feux, ardeur de l'amour ». Vapor, dont l'origine est obscure, n'a pu être rapproché que du lituanien kvẽpia « une vapeur se répand », kvãpas « vapeur, fumée ».
❏  Seul le premier sens du latin est repris en ancien et moyen français ; au XVIIe s., vapeur désigne aussi toute espèce d'exhalaison de corps liquides ou solides, acception archaïque. ◆  Par analogie, le mot se disait (1609) dans l'ancienne médecine d'une exhalaison qu'on supposait s'élever du sang jusqu'au cerveau, d'où des vapeurs n. f. pl. (1650) désignant les troubles et malaises dus à ces vapeurs, vapeur de fille (1684), ancien nom de l'hystérie, et l'emploi du mot au singulier pour désigner tout ce qui peut troubler le cerveau, comme l'alcool, l'excès de nourriture (1610). ◆  Par figure, vapeur a signifié (1609) « objet passager, fragile ». ◆  Le mot a été employé en chimie (1701, bain de vapeur) et dans les techniques de distillation, puis bain de vapeur équivaut à « étuve » (1762).
■  Vapeur désigne ensuite la vapeur d'eau utilisée comme force motrice (1784), notamment dans à vapeur (1794) « actionné par la vapeur d'eau ». ◆  Machine à vapeur est un calque de l'anglais steam engine et remplace l'ancien machine à feu. Bateau, navire à vapeur subit aussi l'influence de l'anglais steamship, d'où une vapeur (1828) rapidement disparu, et un VAPEUR n. m., désignant par ellipse un bateau à vapeur (1841), emploi aujourd'hui archaïque ou évocateur du passé. ◆  À toute vapeur, par figure, signifie « à toute vitesse » (1868 ; aussi à la vapeur, 1865). Renverser la vapeur (retourner dans Carco, 1927) correspond à « changer d'attitude ».
❏  VAPORISER v. tr., dérivé savant du latin vapor (1756), signifie « faire passer (une substance) de l'état liquide à l'état gazeux ». ◆  Le verbe est passé dans l'usage général (1866) au sens de « disperser et projeter en fines gouttelettes ».
■  En dérivent VAPORISATION n. f., terme de physique (1756) et couramment « action de vaporiser » (1904), VAPORISAGE n. m., terme technique (1867), VAPORISATEUR n. m., qui a désigné un inhalateur (1824) et se dit très couramment d'un petit pulvérisateur (1884), et VAPORISEUR n. m., terme technique (1876), synonyme de vaporisateur (1904).
À partir du radical de vapeur ont été composés au XXe s. des termes techniques en métallurgie : VAPOMÉTALLURGIE n. f. (v. 1970), en industrie pétrolière ; VAPOCRAQUAGE n. m. (1973), équivalent de l'anglais steam cracking qu'il remplace, d'où viennent VAPOCRAQUEUR n. m. (1973) et VAPOCRAQUER v. tr. (1975).
VAPOREUX, EUSE adj. est un emprunt au latin impérial vaporosus « plein de vapeur », dérivé de vapor ; il apparaît sous les formes vapoureux (1377), vaporeus (v. 1400), écrit vaporeux au XVIe s. et qualifiant ce qui a l'apparence de la vapeur.
■  L'adjectif s'est employé jusqu'au XIXe s. pour qualifier qqn qui souffre de vapeurs (1689), substantivé au masculin (1762) puis au féminin (v. 1800). Par ailleurs bain vaporeux s'est dit (1690) jusqu'au XVIIIe s. pour bain de vapeur. ◆  Vaporeux qualifie au figuré (1765) des idées, un tableau, etc., qui ont un aspect flou, incertain, puis une chevelure (1831), et (1872) quelque chose de léger, fin et transparent (tissu vaporeux). Seules ces valeurs figurées ont survécu.
■  En dérive VAPOREUSEMENT adv. (XIXe s.), littéraire, employé au concret comme à l'abstrait.
VAPORETTO n. m. est emprunté (XXe s.) à l'italien vaporetto « petit bateau à vapeur faisant le service des voyageurs en Italie (notamment à Venise) », dérivé de vapore « vapeur », du latin classique vapor.
Enfin, un abrègement argotique puis populaire de vapeur, VAPE n. f. s'est employé (1925) pour « bain de vapeur », sorti d'usage. ◆  La locution figurée (être) dans la vape (vieilli), puis dans les vapes signifie familièrement « être hébété » et aussi « dans une situation confuse » ; tomber dans les vapes « s'évanouir ». Ce sens reprend en partie et renforce les valeurs figurées de vapeurs dans la langue classique et moderne.
❏ voir ÉVAPORER.
VAQUER v. est emprunté (1265) au latin classique vacare « être vide », d'où « être libre, inoccupé » et par figure « avoir du temps », « être oisif » (→ vacant) ; il est employé à l'impersonnel à l'époque impériale, dans vacat « il y a temps pour », « il est loisible de ». Vacare se rattache à une famille de mots indoeuropéens à w- initial, exprimant l'idée de vide, de lieu désert ; le germanique présente un radical wost- (anglais waste, allemand Wüste « désert ») ; Cf. vain ; vaste.
❏  Le verbe est introduit comme intransitif avec le sens latin « être vacant, sans titulaire », en parlant d'une charge, d'une dignité, etc., emploi disparu. ◆  La valeur figurée aboutit à deux acceptions opposées ; vaquer à qqch. (XIIIe s.) signifie « s'occuper de qqch. », le temps libre étant utilisé ; par ailleurs le verbe s'est employé pour « être inoccupé, chômer » (1382), d'où vaquer à qqn « avoir le temps de s'occuper de (qqn) » sorti d'usage (1530). ◆  Cette acception se développe, et vaquer signifie « suspendre ses fonctions pendant un certain temps », en parlant d'un tribunal, d'une administration (1549), puis à propos d'établissements scolaires (1636), vaquer en venant à se dire d'un écolier qui a un congé, des vacances* (1876). ◆  Dans l'acception première (« occupation »), la construction transitive vaquer qqch., « s'occuper de qqch., faire des projets » (1658, Scarron), est sortie d'usage, de même que vaquer à qqn (XVIIe s.), vaquer à soi-même (fin XVIIe s., Mme de Sévigné).
❏  Le dérivé 1 VACATION n. f. signifie d'abord (v. 1250) « zèle, ténacité » ; cette acception a disparu, mais la valeur d'« occupation » s'est conservée dans différents emplois du mot. Il a été employé pour « occupation » (v. 1390), puis a désigné (déb. XVe s.) le salaire versé à un ouvrier, à un homme d'affaires (1405, vaccacion ; 1480, vacations) et a eu le sens de « profession, métier » (1408) relevé jusqu'au XIXe s. et les expressions selon la vacation de qqn « conformément à son statut » (1re moitié XVIe s.) et homme de vacation « artisan » (1690), sorties d'usage. Vacation stérile « mariage sans enfants » (fin XVIe s.) ne s'est pas maintenu non plus. ◆  Au XVIIe s. le mot, au sens de « salaire », se spécialise, désignant les honoraires payés aux gens de loi, aux membres d'un jury d'examen, etc. (1668, au plur.) et, par ailleurs, le temps consacré par la justice ou par des experts à une affaire (1694). ◆  Par extension, vacation se dit (XXe s.) d'une période de durée déterminée pendant laquelle une personne recrutée à titre d'auxiliaire est affectée à une tâche ; Cf. ci-dessous vacataire. En français d'Afrique, classe à double vacation (ou à double flux) : classe scolaire où l'enseignement est dispensé à deux groupes d'élèves, chacun à temps partiel.
L'homonyme 2 VACATIONS n. f. pl. est un emprunt au latin classique vacatio « exemption, dispense », en particulier « exemption de charges militaires » (vacatio militiae) et « argent donné pour être exempté », dérivé du supin de vacare. Le mot s'est employé au sens du latin avec la valeur de « manque » ; vacation de droit (v. 1355) s'est dit d'une dispense de charges, en vacation a signifié (1370) « en état de repos » et le mot a désigné l'état d'un immeuble non occupé (1387). ◆  Puis le pluriel vacations désigne (1425) le temps pendant lequel les tribunaux cessent leurs fonctions, sens resté vivant. ◆  Le mot a également signifié (1447) « état d'une charge sans titulaire », supplanté par vacance*.
VACATAIRE n., terme administratif (v. 1950), désigne une personne qui occupe une fonction pendant une durée limitée, sans être titulaire de son emploi.
❏ voir ÉVACUER, VACANT, VACIVE, VACUITÉ.
VAQUOIS n. m. est la francisation de vakoa, mot malgache
❏  C'est le nom d'un pandanus, plante arborescente, ligneuse dont on utilise les fibres en sparterie.
❏  La forme VACOA, plus fidèle à l'étymon malgache, est employée par Bernardin de Saint-Pierre (1773). C'est la seule en usage à l'île Maurice, à la Réunion, en français de Madagascar.
VAR n. m. représente (1931) les initiales de volt* ampère* réactif.
❏  Ce terme de physique désigne une unité de puissance réactive, qui correspond à un courant alternatif de 1 ampère sous une chute de tension de 1 volt.
❏  Le mot a fourni les composés VARMÈTRE n. m. (mil. XXe s.), de -mètre, et VARHEURE n. m. (1953), de heure, d'où VARHEUREMÈTRE n. m. (1953).
VARACTOR n. m., terme d'électronique (1968), est emprunté à l'anglo-américain varactor, composé de var, emprunté au français, et de [re]actor, du français réacteur*.
? VARAIGNE n. f. succède en ce sens (1752) à varengue (1580), par les dialectes de Saintonge et du Poitou. On a supposé une altération de varenne, garenne* ; on peut aussi penser à 1 varangue*, mais rien n'est sûr. Le mot en français régional de Saintonge, du Poitou désigne les tuyaux de bois par lesquels l'eau de mer est conduite dans un marais salant.
VARAN n. m. est la francisation (1812) du latin des zoologistes varanus, emprunt à l'arabe waran, waral. Le mot désigne un reptile saurien des régions chaudes d'Asie et d'Afrique, lézard de grande taille. Le varan ou dragon de l'île de Komodo peut dépasser 3 m. Varan malais (Asie du Sud-Est), varan du Nil (Afrique), varan du désert sont des espèces distinctes.
? 1 VARANGUE n. f., d'abord warengue (1379) puis varangue (1573), est d'origine incertaine. Selon Bloch et Wartburg, l'étymon serait l'ancien norrois vrong, ce que confirmerait l'existence de l'ancien anglais wrang(a), du bas allemand wrang, du néerlandais vrang ; l'espagnol varenga aurait été emprunté au français. En revanche, P. Guiraud part de l'espagnol varenga et du provençal varengo, varenglo « gaule, verge », et postule un dérivé du latin classique vara « perche », avec un suffixe -inicus qui aboutit régulièrement à -engue, -ingue.
❏  Ce terme de marine désigne une pièce courbe placée sur la quille, fixée par son milieu perpendiculairement à l'axe du bâtiment.
2 VARANGUE → VÉRANDA
VARAPPE n. f., relevé en 1875, vient du toponyme Varappe, nom d'un couloir rocheux du mont Salève, près de Genève.
❏  Le mot s'est dit de la réunion des ascensionnistes qui descendirent les premiers le ravin de la Varappe. En alpinisme, il désigne (v. 1925) l'ascension d'un couloir rocheux, d'une paroi abrupte. L'emploi le plus courant est faire de la varappe.
❏  En dérivent VARAPPEUR, EUSE n. (1895) et VARAPPER v. intr. (1898).
VARA-VARA n. m. est un emprunt au malgache varavara désignant en français de l'océan Indien un poisson (Lutianidés) de couleur rougeâtre, pêché bien que sa chair puisse être toxique.
VARECH n. m., d'abord warec, verec (v. 1120), puis varech (1369), a été emprunté à l'ancien scandinave vagrek « épave », comme l'ancien anglais wraec (anglais wreck « naufrage ») et l'allemand Wrack. Le mot s'est aussi écrit varec (1550).
❏  Il désigne les herbes marines (goémon, algues, etc.) rejetées par la mer (v. 1120, marin verec « varech de mer ») et ensuite les restes d'un naufrage, les épaves (v. 1175) et tout ce que la mer rejette, par opposition à ce qui a été pêché ou tiré du fond de la mer (v. 1181), d'où le sens de « vaisseau qui a été coulé » (1694, varet) ; cette acception, dominante du XVIe au XVIIIe s., a été éliminée par la première, où l'origine du mot s'est perdue. Le mot est aujourd'hui un synonyme partiel de goémon.
❏ voir VRAC.
VARENNE n. f. représente (1268) une variante de garenne* ; pour Dauzat, le mot, confondu avec garenne, dériverait d'un prélatin vara « eau », ce que confirmerait le sens de la variante VARAIGNE n. f. (1719) qui désigne régionalement l'ouverture par laquelle l'eau de mer entre dans un marais salant.
❏  Varenne s'est dit d'un terrain où il était défendu de chasser ou de pêcher sans l'autorisation du seigneur. Il désigne (1684) un terrain non cultivé que fréquente le gibier, sens qui a vieilli ou est devenu régional. Le mot est surtout représenté dans des noms de lieux.
VAREUSE n. f. est un dérivé (1784) d'une variante dialectale (Ouest) de garer* « protéger » (v. 1180, varer a aucun). On trouve au XIXe s. la variante vaireuse.
❏  Le mot s'est dit de la chemise de grosse toile que portaient les esclaves de Saint-Domingue ; à partir de la Révolution, il désigne (1793) une blouse courte en grosse toile portée par les marins, les pêcheurs, pour protéger leurs vêtements. ◆  Par extension, il s'emploie pour un petit pardessus féminin (1849), puis une veste très ample (1867) et la veste de certains uniformes militaires (1872), sens actuel.
VARICE n. f. est emprunté (1314) au latin classique varix, -icis, sans étymologie connue.
❏  Le mot désigne comme en latin une dilatation permanente d'un vaisseau sanguin, spécialement d'une veine. Il s'est écrit varisse (1680), jusqu'au milieu du XVIIIe siècle. ◆  Par analogie, il s'emploie (1680) en parlant d'une tumeur qui se forme sur le jarret du cheval. ◆  En zoologie (1836), il s'applique à un renflement au bord de certaines coquilles.
❏  VARIQUEUX, EUSE adj. (1541 ; v. 1370, variceux), emprunt savant au dérivé latin classique varicosus « qui a des varices », s'emploie en médecine (ulcère variqueux) et en zoologie (1835, coquille variqueuse).
■  VARICOCÈLE n. f. est un composé hybride (1707) fait sur le modèle de cirsocèle, de même sens (1694), emprunt au grec kirsokêlê, de kirsos « varice », qu'il a remplacé. Le mot est formé du radical de varice et du grec kêlê « tumeur » et se dit d'une dilatation variqueuse du cordon spermatique, des veines utéro-ovariennes.
VARICELLE → VARIOLE
+ VARIER v. est emprunté (v. 1155) au latin classique variare « diversifier », « nuancer », au propre et au figuré, notamment en parlant du style, et en emploi intransitif, « être varié », aussi au figuré. Le verbe dérive de l'adjectif varius « moucheté, tacheté, bigarré », à propos de la peau de l'homme et des animaux, adjectif appliqué dans la langue rustique à une terre arrosée seulement en surface ; varius, dans le domaine moral, signifie « divers », « inconstant, irrésolu » (→ vair). Le rapprochement de varius avec varus « bouton » est hypothétique.
❏  Au milieu du XIIe s., varier reprend comme verbe transitif les sens latins ; il signifie « donner à (qqch.) plusieurs aspects divers », « rendre (plusieurs choses) nettement distinctes ». Le verbe s'emploie aussi intransitivement (v. 1190) pour « se modifier, changer » (d'une personne, d'une chose). En emploi pronominal (v. 1180), c'est l'aspect négatif du changement qui avait été retenu, se varier équivalant à se corrompre ; cette valeur a disparu. ◆  On relève en ancien et en moyen français de très nombreux emplois, en construction transitive ou intransitive, où l'idée de « changer » se développe, en particulier dans le domaine moral ; la plupart sont sortis d'usage, varier ayant été supplanté par d'autres verbes (souvent par changer) et n'étant plus usité au pronominal. C'est la même idée de changement que l'ancien provençal variar (v. 1210) transmet en particulier à propos des changements dans la langue : « soumettre (une langue) aux changements fonctionnels » (v. 1220) et « modifier les données métriques (d'une strophe) » (v. 1350).
Varier s'est employé pour « hésiter, vaciller », attesté isolément au XIIIe s., puis normalement à la fin du XIVe s. (varier a). Cette acception a disparu à la fin du XVe siècle. Varier qqch. s'est dit (v. 1250) pour « contester », sens propre à l'ancien français. ◆  Se varier a ensuite signifié « changer d'avis » (1316), sens assumé plus tard par l'intransitif varier en qqch. (apr. 1375). ◆  Le verbe s'est employé, toujours à l'intransitif, pour « changer en mal » (1340-1370), « s'affaiblir » en parlant de la foi, de la raison, « agir mal » (v. 1380). ◆  Une autre acception issue de l'idée spatiale de changement aboutit à un emploi transitif, varier le pays « le parcourir » (1350-1370) et à varier, intr., « aller çà et là » (XVe s.). ◆  Ce sont les idées de contradiction et d'hésitation qui dominent certains emplois, également sortis d'usage, qui ont eu cours du XVe ou du XVIe s. jusqu'au milieu du XVIIe siècle. On relève depuis le XVe s. varier la volonté de qqn « le contrarier », varier envers qqn « être différent de qqn », se varier « changer de sentiment » ; varier de qqch. s'est dit pour « douter de qqch. » (v. 1450 ; 1559, varier ses pensements « ne savoir que penser »). Varier, intransitif, pour « être inconstant », serait encore compris (souvent femme varie...), mais l'emploi moderne a des nuances différentes, plus intellectuelles. ◆  Aux XVIe et XVIIe s., se varier (1530) et varier (1549) ont été employés pour « se contredire », spécialement dans le domaine juridique (1539, varier contre une partie, dans un procès). Dans un des rares emplois concrets relevés alors, varier a signifié (1611) « ne pas avoir la main sûre ». ◆  L'idée de modification (1654, se varier « se modifier ») se spécialise avec le sens (1694) de « s'écarter, ou se rapprocher, du nord », en parlant d'une aiguille aimantée. ◆  À la fin du XVIIe s. est attesté un emploi à propos du discours, varier la phrase signifiant « dire la même chose en des termes différents ». Un peu plus tôt varier « changer de discours » avait pris la valeur péjorative de « se contredire, dire n'importe quoi » (1636). ◆  Le verbe se dit également (1694) pour « présenter des changements importants », en parlant des avis qu'ont plusieurs personnes ou une seule personne successivement. ◆  Varier a ensuite en sciences (1727) la valeur de « prendre plusieurs valeurs différentes entre des limites ». ◆  Le verbe entre aussi dans le vocabulaire de la musique (1765), varier un air se disant pour « broder sur un air sans en changer le motif » (Cf. variation). ◆  Il est ensuite employé en grammaire (varier en genre, en nombre), en opposition à invariable, puis (1812) au sens plus général de « présenter des différences, qualitatives ou quantitatives, indépendantes du temps ou de l'espace ».
❏  VARIÉ, ÉE adj. représente le participe passé latin variatus, ses valeurs correspondant d'abord à celle de vair* ; l'adjectif s'applique en effet à un animal tacheté (v. 1165, veirié), puis à une partie de l'écu chargée de vair (v. 1225, vairiet) et est employé en orfèvrerie pour « niellé » (1341, verié, d'où le verbe disparu verer, 1398). ◆  Varié reprend ensuite les valeurs de variatus, restant dans ses premiers emplois (fin XIVe s., variet) un terme de blason. ◆  La plupart des autres acceptions s'articulent avec celles du verbe varier. On relève ainsi estre varié en soi « changer d'avis » (XVe s.) et, à partir du XVIe s., les valeurs modernes : l'adjectif, au pluriel, qualifie des éléments différents les uns des autres (XVIe s.), puis s'applique à ce qui présente des aspects, des éléments différents, « orné de différentes couleurs » (1671) ; il s'emploie spécialement en architecture (1701, colonne variée), en physique (1765, mouvement varié ; 1803, mouvement uniformément varié), etc.
■  VARIANT, ANTE adj. et n. m., participe présent de varier, s'est d'abord appliqué (1382) à un esprit, à un caractère qui change souvent, acception sortie d'usage. ◆  Repris au XXe s., l'adjectif signifie en chimie « qui a une variance non nulle » ; il est utilisé en composition (par ex. uni- ou monovariant). En biologie, domaine où les dictionnaires le signalent en 1933, il a été remplacé par mutant. ◆  Il s'applique en général à ce qui présente des variations par rapport à une moyenne, concurrencé par variable.
■  Le dérivé VARIANTE n. f. comporte dans ses divers emplois l'idée de différence ; il désigne (1717) un passage d'un texte qui diffère de la leçon principale ou admise généralement. Il s'est dit concrètement (1769) d'une courtine qu'on change souvent de place, sens disparu. ◆  Le mot, repris au XIXe s. au pluriel (1842) comme équivalent de « condiments variés », est aujourd'hui régional. ◆  Il a vieilli en biologie (1845), où l'on emploie mutant, mais reste vivant pour désigner une forme, un mot différent d'une forme de référence mais ayant la même nature (1794). De là le sens de « moyen d'expression qui s'écarte de la norme d'une langue » (variante régionale d'un mot, en rapport avec variation). ◆  Il signifie également (1841) « solution, forme (d'une expérience, etc.) légèrement différente mais voisine ». Variante s'emploie spécialement en parlant de la manière de commencer une partie, aux échecs.
■  INVARIANT, ANTE adj. et n. m., formé de in- négatif et de variant (1794 ; repris v. 1830), s'applique à ce qui ne varie pas. En mathématiques (1877, un invariant n. m.), il désigne, puis qualifie (1905, adj.) une relation, une grandeur, une propriété qui se conserve dans une transformation. En chimie (1948), il se dit d'un système en équilibre. Invariant (adj. et n. m.) s'emploie dans plusieurs domaines spécialisés, dont la linguistique (n. m.), l'informatique (adj.).
■  COVARIANT, ANTE adj., de co- et variant, est un terme de mathématiques (1877, n. m. ; 1932, adj.), comme COVARIANCE n. f. (1921).
Sur le radical de varier ont été composés VARIOMÈTRE n. m. (1894), de -mètre, terme technique désignant un appareil qui sert à la mesure des inductances électriques et (mil. XXe s.) un instrument de mesure des vitesses ascensionnelles des avions, et VARIOCOUPLEUR n. m. (1929), terme d'électricité.
Plusieurs mots usuels ou didactiques ont été empruntés à des dérivés latins de varius ou de variare.
■  VARIÉTÉ n. f. est un emprunt (v. 1120) au dérivé latin varietas « diversité » au propre et au figuré, en particulier « changement d'humeur, inconstance ». ◆  Le mot a d'abord désigné des ornements variés pour embellir les habits. Il s'emploie ensuite (v. 1165-1170) pour « diversité des choses qui ont des traits communs », le sens temporel de « changement » étant sorti d'usage. ◆  Au XVIe s. (une fois isolément au XVe s.), variété a repris le sens latin de « changement d'humeur », emploi disparu au XVIIe siècle. ◆  Au sens d'« élément distinct », le mot, en histoire naturelle, s'emploie (1690) pour « subdivision de l'espèce », délimitée par la variation des caractères, d'où son usage dans une classification quelconque. ◆  Au pluriel, on désigne par variétés, comme titre (1622-1633), un recueil qui contient des morceaux sur des sujets variés (Cf. varia, ci-dessous). ◆  En 1790 est créé le Théâtre des Variétés de Mme Montansier, dont le répertoire « varié », était surtout composé de vaudevilles ; par extension, le mot désigne (1913) l'ensemble des activités de spectacle concernant un type de chansons, de spectacles comiques, etc., destinés à un large public, d'où émission de variétés, à la radio, à la télévision.
■  Variété dans son acception en sciences naturelles a donné le terme didactique VARIÉTAL, ALE, AUX adj. (1961).
VARIANCE n. f. est emprunté (1155) au dérivé latin classique variantia « variété » ; le mot s'est dit pour « changement », puis pour « variabilité » (1396), « incertitude » (1466). ◆  Il devient ensuite archaïque et disparaît de l'usage. ◆  Il est repris en sciences, désignant (1904) le nom de conditions définissant un système physique ou chimique que l'on peut faire varier arbitrairement, sans détruire l'état d'équilibre, puis est utilisé en statistique (mil. XXe s.).
■  En dérive INVARIANCE n. f. (1908), de 1 in-, « propriété invariante ».
VARIABLE adj. est emprunté (fin XIIe s.) au latin impérial variabilis « sujet à varier », et en conserve le sens. L'adjectif est employé depuis le XVIIIe s. dans le vocabulaire technique et scientifique ; il s'applique en mathématiques à une grandeur qui peut prendre plusieurs valeurs distinctes (1704), est usité en grammaire (1798, mot variable), en médecine (1835, pouls variable), en météorologie (1835), en physique, etc. ◆  Il est substantivé au féminin, dans une variable en mathématiques (1765), pour « élément dont la valeur peut varier, n'est pas assignée », avec des emplois plus généraux pour « élément qui varie en fonction d'autres éléments » et au masculin en météorologie (1690).
■  En dérivent VARIABLEMENT adv. (v. 1380, variablament), rare, et VARIABILITÉ n. f. (v. 1380), employé comme l'adjectif dans des domaines didactiques (1845 en mathématiques, 1864 en biologie, 1872 en grammaire).
■  Le contraire préfixé INVARIABLE adj., de 1 in-, s'applique à ce qui ne change pas (v. 1370, Oresme) et, par extension à une personne qui ne change pas de manière de penser (1611), emploi archaïque. ◆  Il s'emploie spécialement en mathématiques par opposition à variable (1704, quantité invariable « constante ») et en grammaire (1798) pour qualifier une forme lexicale qui ne se modifie pas en discours : prépositions, adverbes, quelques noms. ◆  Il qualifie en général un processus qui continue sans varier (XXe s.).
■  L'adjectif a fourni l'adverbe INVARIABLEMENT (1495), plus courant que son contraire, pour « en ne changeant pas », INVARIABILITÉ n. f. (1616 ; XXe s. en grammaire) et INVAR n. m. (1904, par abréviation), marque déposée désignant un acier au nickel.
VARIATION n. f. est un emprunt (1314) au dérivé latin classique variatio « action de varier ».
■  Le mot, qui s'écrit aussi variacion aux XIVe et XVe s., désigne un changement dans un ordre de faits (1314), puis en particulier (2e moitié du XIVe s.) un changement dans les opinions, les conduites ; les sens d'« incohérence » (1440-1475) et d'« hésitation » (1466) ont disparu. ◆  Variation s'emploie spécialement dans de très nombreux domaines, le changement s'effectuant au cours d'une durée : en physique (1618, variation de l'aiguille aimantée), en astronomie (1691, du mouvement de la lune ; 1819 avec une valeur générale). ◆  En musique (1703), il désigne une modification d'un thème et, au pluriel, une composition où un même thème est repris avec des modifications et des enrichissements successifs ; d'où thème et variations, aussi au figuré. ◆  En grammaire, il concerne (1798) le changement d'un mot variable ; il est courant en mathématiques (1811), en biologie (dep. 1791). ◆  Au XXe s., le mot s'applique à ce qui varie socialement, par rapport à une norme, et à un moment donné ; ce sens est usuel en linguistique, à propos d'éléments (lexique, notamment) et de règles qui diffèrent à l'intérieur du même système linguistique (la variation régionale, sociale, du français), et aussi en sociologie.
■  VARIATEUR, TRICE adj. et n. m., formé sur le radical de variation, est un terme technique employé en mécanique (1904, variateur de vitesse, n. m. ; aussi poulie variatrice) et en électricité (1968, n. m.).
■  VARIATIONNEL, ELLE adj. (mil. XXe s.) qualifie ce qui est relatif à la variation d'une grandeur.
■  VARIATIONNISTE adj. et n. concerne la variation sociolinguistique.
Plusieurs mots latins, de varius ou de variare, ont été repris en français.
■  NE VARIETUR loc. adv. et adj. signifie en latin « pour qu'il ne soit pas changé » ; cette locution introduite en français (1579) s'applique d'abord, en droit, à un acte, un document, et indique que des précautions juridiques ont été prises pour éviter que l'acte, etc. ne soit altéré. ◆  Par analogie, édition ne varietur désigne (déb. XXe s.) l'édition définitive d'un texte. ◆  Ne varietur s'emploie également en sciences (1904) pour « qui ne varie pas ».
■  VARIA n. m. pl., mot latin signifiant « choses variées », désigne en français (1872) un recueil d'œuvres variées et, dans les agences de presse, se dit au XXe s. (att. 1973, T. L. F.) d'un article se rapportant à des sujets variés, comme équivalent français de l'anglais features. ◆  Le moyen français avait emprunté le mot sous la forme varie (adj.) « divers » (mil. XVIe s.).
■  VARIORUM adj. inv. est une abréviation de la locution latine cum notis variorum scriptorum « avec les notes de plusieurs commentateurs ». Le mot est d'abord employé comme nom masculin (1721) puis en apposition ou fonction d'adjectif dans édition variorum (1842) « avec des notes et des commentaires ».
❏ voir 2 VARIOLE, VÉRAISON.
1 VARIOLE n. f., attesté d'abord au pluriel, isolément au XIVe s., et repris au XVIe s. (1562), n'est employé au singulier qu'au XVIIIe s. (1761). Le mot est emprunté au bas latin médical variola (VIe s.), diminutif du latin classique varus « éruption sur la face, bouton », probablement avec influence de varius « varié », « tacheté » (→ vair) ; le latin classique avait pour diminutif varulus.
❏  Le mot, depuis le XVIIIe s., désigne une maladie infectieuse, épidémique et contagieuse d'origine virale, caractérisée par une éruption généralisée. Cette maladie était appelée petite vérole, et variole a été employé pour éviter les ambiguïtés de vérole, qui désignait plusieurs maladies, dont la syphilis. Cette maladie porte au Québec le nom familier de grosse picote.
❏  Variole a fourni plusieurs dérivés en médecine : VARIOLIQUE adj. (1764) « de la variole », d'où ANTIVARIOLIQUE adj. (1902 ; 1804, anti-variolique) ; VARIOLEUX, EUSE adj. (1766) « atteint par la variole », d'où substantivement « malade qui a la variole » (1812 ; attesté au féminin 1824) ; VARIOLETTE n. f. (1812), supplanté par varicelle ; VARIOLÉ, ÉE adj. (1829 ; 1845, n.), synonyme de varioleux ; VARIOLIFORME adj. (1833), de -forme « qui présente l'aspect de la variole » ; VARIOLISATION n. f. (1876).
■  VARIOLITE n. f. désigne par analogie (1764) une roche présentant des pustules sphériques.
■  VARICELLE n. f. a été formé en médecine (1764) sur le radical de variole d'après les diminutifs latins en -cellus, -cella. Cette maladie, autrefois nommée petite vérole volante, atteignant souvent les enfants sous une forme bénigne, le mot est entré dans l'usage courant.
❏ voir VÉROLE.
2 VARIOLE n. f., dérivé de varius (→ varier), s'est dit d'une alouette au plumage roux (mil. XVIIIe s.) et d'un poisson rouge taché de brun de l'océan Indien (1842).