VENET n. m., attesté une fois en moyen français (1423), puis au XVIIe s. (1681), est le diminutif de l'ancien français vene ou venne, variante de vanne, du latin médiéval venna « retenue d'eau (pour la pêche) », peut-être d'origine gauloise. Le mot, technique, désigne une enceinte de filets verticaux disposés en demi-cercle pour retenir le poisson quand la mer baisse.
VENETTE n. f. est un diminutif (1662) du moyen français vesne « vesse » (1552, Rabelais), dérivé de vesner « vesser » (1552) puis aussi « bourdonner » (1611), issu du latin populaire °vissinare, altération du latin classique vissire « vesser » (→ vesse), mot d'origine expressive comme le vieil islandais fisa de même sens.
❏  Par une métaphore courante, on passe de la diarrhée à la peur qui peut la provoquer (venette est attesté dialectalement pour « diarrhée ») ; encore employé au XIXe s. pour « peur » (Flaubert, Goncourt, etc.), venette est vieilli ou régional, y compris dans la locution avoir les venettes « avoir peur », disparue au XXe siècle.
L VENGER v. tr. (1080), d'abord venjiar (v. 980), est issu du latin classique vindicare, terme de droit signifiant « réclamer en justice » et « réclamer à titre de propriété, revendiquer », « dégager, délivrer », « punir, châtier l'auteur d'un mal, d'un tort causé ». Ce verbe dérive de vindex, -icis, terme de droit désignant la caution fournie par le défendeur, qui se substitue à lui devant le tribunal et se déclare prêt à subir les conséquences du procès ; dans la langue courante, vindex signifiait « protecteur, défenseur », « vengeur » et par extension « qui tire vengeance, qui punit ». ◆  Le premier élément du mot est d'origine incertaine ; ce pourrait être l'accusatif de vis « force, violence » (→ violer) ; le second est l'élément qu'on retrouve dans judex (→ juge), mot racine correspondant à dicere (→ dire) ; le vindex serait celui qui montre au juge la violence faite à son client.
❏  Le verbe semble s'employer d'abord, en ancien français, pour « punir (qqn) qui a causé une offense », comme en latin. Le complément désigne alors le coupable, et le verbe équivaut plus ou moins à punir, sens bien attesté au XIIIe s. (vengier, v. 1283). Cependant, le latin vindex suppose trois personnages, l'offenseur, l'offensé et la caution (vindex) qui se substitue au second pour punir le premier ; cette idée se réalise dans l'emploi de venger qqn « le dédommager moralement en punissant son offenseur, ou celui qui lui a nui », et ceci dès le XIe s. (1080, Chanson de Roland). Avec se venger de « rendre soi-même une offense à (qqn, un offenseur) pour se dédommager moralement », attesté à la même date, cet emploi est le plus vivant aujourd'hui. ◆  Venger une offense, « la réparer en punissant l'offenseur », s'emploie d'abord avec Dieu pour sujet (1553). ◆  D'autres emplois ont disparu, comme le pronominal soi venger (d'une maladie) « guérir » (v. 1360), le transitif venger son ire (à qqn) « décharger sa colère sur lui » (v. 1440-1475) ou ont vieilli comme la formule classique venger son honneur (1636, Corneille) « faire une réparation morale à (ce qui a été compromis, attaqué, détruit) », ou encore le sens affaibli « constituer une compensation à (un tort, une déficience) » (déb. XVIIe s., M. Régnier).
❏  VENGEANCE n. f., réfection (XVIe s.) de venjance (1080), désigne l'« action de se venger, de venger qqch. », et correspond aux valeurs du verbe. ◆  Le mot s'applique aussi (1670, Bossuet) au désir de se venger. Le mot entre dans des syntagmes verbaux : demander une vengeance (1549) et, d'abord avec un sujet de chose, crier vengeance (1561, Calvin). Faire la vengeance de (1538 ; Rabelais, faire vengeance) a vieilli, mais tirer vengeance (1636) reste usuel.
VENGEUR, VENGERESSE n. et adj. est issu du bas latin vendicator, vendicatrix « personne qui venge », dérivés de vindicare ; de là viennent les formes populaires vengedur, vencheur (v. 1120), puis, rattachés à venger, vengeor (av. 1191) et vengeur (1380) ; vengeresse, aujourd'hui littéraire et rare, est relevé au XIIIe s. comme adjectif.
❏ voir REVANCHE, REVENDICATION, VENDETTA, VINDICATIF, VINDICTE.
VENGERON n. m., attesté en moyen français (1499) après le latin médiéval vengeranorum « des vengerons », génitif pluriel, semble être d'origine gauloise, selon le linguiste Jacob Jud, comme l'alémanique Winger. Le mot s'est maintenu en français de Suisse, pour un poisson, une variété de gardon des lacs Léman, de Neuchâtel, etc., comestible mais assez fade.
VÉNIEL, ELLE adj. (v. 1380), d'abord venial (v. 1230), est emprunté au bas latin venialis « pardonnable, excusable », dérivé du latin classique venia « action de bien vouloir », « faveur, grâce accordée par les dieux », terme utilisé dans les prières et qui a pris le sens de « pardon, indulgence » auquel se rattachent les dérivés. Venia dérive d'un nom radical de la racine de Venus (→ Vénus). ◆  Venia avait été emprunté par l'ancien français dans prendre venie « faire sa pénitence » (v. 1155) et par l'ancien provençal (v. 1200, venia « génuflexion »).
❏  L'adjectif s'applique à un péché digne de pardon (opposé à péché mortel). Par extension et littérairement (1697), il qualifie une faute légère, sans référence religieuse.
❏  Le dérivé VÉNIELLEMENT adv., réfection (1442) de venialment (1279), ne s'emploie qu'en théologie.
L VENIN n. m., réfection (v. 1240) de venim (v. 1120), forme conservée jusqu'à la fin du XVIIe s. et qui a donné venimeux (ci-dessous), est l'aboutissement du latin populaire °venimen, altération par substitution de suffixe du latin classique venenum « décoction de plantes magiques », « charme, philtre », qui a pris rapidement le sens de « poison ». Venenum provient sans doute d'un ancien °venes-nom « philtre d'amour », °venes se rattachant à la même racine indoeuropéenne que Venus (→ Vénus). En ancien français, deux développements phonétiques avaient produit des formes en r (veren, v. 980 ; verin, XIIe s.) et en l (velin, XIIIe s.) ; la seconde s'est conservée jusqu'au XVIIe siècle.
❏  Le premier sens attesté est « poison » (v. 1240 ; veren, v. 980). ◆  Le mot désigne très tôt (v. 1120, venim) une substance toxique sécrétée par certains animaux, notamment les serpents. ◆  Par métaphore, venin se dit dès l'ancien français (v. 1190, velin ; XIIIe s., venin) pour « haine cachée, méchanceté » et « doctrine, idée, discours dangereux », dans un emploi devenu très littéraire, sauf dans la locution jeter, cracher son venin « dire des méchancetés dans un accès de colère » (1690). D'autres locutions comme être sans venin « sans méchanceté » (1694) ne se sont pas maintenues. La locution proverbiale morte la bête, mort le venin (1685, La Fontaine) est en revanche encore vivante.
❏  VENIMEUX, EUSE adj., dérivé de la forme ancienne venim, a eu de nombreuses variantes liées à celles de venin (ci-dessus). On trouve isolément le nom masculin venimus (v. 1120) « magicien (empoisonneur) », d'après le latin veneficus. ◆  L'adjectif s'applique à ce qui a du venin (v. 1170-1175, venimos ; XIIIe s., venimeux) et, par extension (XVIe s.), à ce qui empoisonne. ◆  Il s'est employé pour « pourri » (1534, d'un bois), pour « vénéneux » (fin XVIe s.) et a qualifié en médecine ce qui contient du pus (1314). ◆  Au figuré (XIIIe s.), comme venin, il correspond à l'idée de haine malfaisante, souvent cachée, hypocrite ; la métaphore du serpent-démon est réanimée explicitement par la métaphore langue venimeuse « personne médisante » (1694 ; Cf. langue de vipère). Voir aussi vlimeux.
■  De venimeux dérivent VENIMOSITÉ n. f. (fin XIIIe s.), littéraire et rare au propre et au figuré, et VENIMEUSEMENT adv. (v. 1380), littéraire et seulement usité au figuré.
■  Le composé ANTIVENIMEUX, EUSE adj. est attesté en 1897.
À partir de venin ont été composés DOMPTE-VENIN n. m. inv. (1545), nom régional d'une plante médicinale, l'asclépiade, et récemment ANAVENIN n. m., terme de biologie (1970).
ENVENIMER v. tr., formé de en-, venin et suffixe verbal, a en ancien français, comme venin, des variantes en l (envelimer, XIIIe s.) et en r (enverimer, v. 1215). Il est sorti d'usage au sens propre d'« infecter de venin ou de poison » (v. 1120) et aux sens figurés, pour « corrompre (le cœur, l'esprit de qqn) » (v. 1190, envelimer et envelimé « plein de malveillance ») ou pour « empirer » (1538, en parlant des affaires). ◆  Il signifie « infecter une blessure », d'abord (1400) au pronominal s'envelimer, puis au XVIIe s. sous la forme moderne (1660), et, au figuré, « rendre plus vive (une querelle, etc.) » (1662) avec une forme pronominale à la fin du XVIIe s. (1699).
■  Le dérivé ENVENIMEMENT n. m. (v. 1155) est rare au propre comme au figuré.
■  ENVENIMATION n. f. est un terme de médecine (1897) ; l'ancien français avait employé envenimoison (v. 1170).
■  Le composé DÉSENVENIMER v. tr. s'emploie au propre (1566) et au figuré (1864).
VÉNÉNEUX, EUSE adj. est emprunté (1478) au bas latin venenosus « vénéneux », dérivé de venenum.
■  L'adjectif s'applique d'abord en médecine à ce qui corrompt, provoque la maladie, ainsi qu'aux animaux (1478) dont la morsure est dangereuse, puis (1496) à une plante, notamment un champignon, qui contient un poison dont l'ingestion empoisonne. Par métaphore littéraire, il signifie (1536) « méchant, malveillant ». Il s'est employé par extension en parlant de la chair d'un animal (XVIe s., Rabelais), du venin d'un serpent.
■  Le dérivé VÉNÉNOSITÉ n. f. (v. 1380) est didactique et rare.
❏ voir VLIMEUX.
L VENIR v. intr. est issu (880) du latin classique venire « se déplacer de manière à aboutir à un lieu (où se trouve une personne) » et aussi « arriver, se présenter », « échoir (à qqn) », « parvenir à », « venir dans tel ou tel état », « en venir à ». Venire se rattache à une racine indoeuropéenne °gwen-, °gwa- qui exprime l'idée de déplacement vers un but et que l'on retrouve en grec dans banein (→ base).
❏  Venir est d'abord attesté avec la valeur générale du latin. Le verbe s'emploie dès la fin du Xe s. au sens de « succéder, survenir » (v. 980), en parlant d'événements, du temps, des saisons, d'où l'année, l'heure, etc., qui vient « prochaine » (XVIe s.), calque du latin classique veniens annus et, par figure (1050), venir bien, mal « tomber bien, mal ». ◆  Venir est aussi employé (1080) en fonction de semi-auxiliaire, suivi d'un infinitif, avec le sens de « se mettre à (faire), faire en sorte de pouvoir ».
■  S'en venir « arriver, venir, au sens spatial » (1080), longtemps d'usage général, est aujourd'hui régional et rural en France, mais courant en français québécois (le voilà qui s'en vient, qui arrive). ◆  Venir à, avec un complément abstrait qui marque le terme d'un processus, signifie « parvenir à » (v. 1050, venir a la paix). Le complément en à indique le terme d'un mouvement dans venir à qqn « aller vers lui » (v. 1175), d'où « attaquer », puis venir sus a qqn (XIVe s.), contre qqn (1560), sortis d'usage de même que venir a terre « descendre de cheval » (v. 1175).
■  Venir de, suivi d'un complément qui marque la cause, signifie (v. 1175) « être l'effet de, découler », en parlant de faits, d'actions.
Par métaphore, et le sujet désignant des idées, des sentiments, venir à se dit (v. 1200) pour « commencer à être, se présenter », une partie de ces emplois étant repris dans en venir à ; venir dans est vieilli avec cette valeur.
■  À partir du sens général de « se produire », venir s'emploie pour « naître », d'abord dans venir a vie (v. 1250), venir a terre (v. 1260), disparus, et aujourd'hui dans venir au monde (1560).
■  Dès le XIIIe s., venir de faire qqch. s'emploie pour « être de retour, après avoir fait qqch. » ; c'est cette valeur qui conduit au XVIe s. à l'emploi périphrastique de venir de pour marquer, à l'indicatif présent, un passé récent (elle vient de sortir), à l'indicatif imparfait (elle venait de sortir), un plus-que-parfait récent.
■  L'idée d'un terme atteint est aussi réalisée dans les emplois figurés disparus venir a terre « entrer en possession d'un héritage » (1260) et venir ens « rentrer », en parlant de contributions de sommes d'argent (1320). ◆  Avec sa valeur générale, venir s'emploie en parlant d'inanimés (1382, à propos des eaux). ◆  À la fin du XIIIe s., aller et venir, qui avait eu une valeur fréquentative au XIIe s., a pris celle de « se diriger vers un endroit et y arriver », d'où l'aller et le venir, exprimant ce mouvement.
■  Venir de signifie aussi « arriver en provenance de » (v. 1050) et, au figuré, « provenir de » (v. 1170), en particulier en parlant de personnes (v. 1250), puis d'un mot (1550 Ronsard). Venir contre a servi à former venir contre un serment « l'enfreindre » (1468), venir contre un testament « le contester » (1482). Venir sur « approcher (d'un terme) » (1490-1496) est propre au moyen français. Venir a bien (a mal) « se développer bien, mal » (1538) a été remplacé par venir bien (mal) [1690] ; venir a rien (1538), venir a néant (1549), « disparaître », ne s'emploient plus.
Diverses valeurs du verbe se développent à partir du milieu du XVIe siècle. On relève alors venir à qqch. « se résoudre à qqch. » (1549), qui a disparu, et, spécialement, faire venir qqn à la raison (1549), disparu, alors qu'on comprendrait encore revenir à la raison ; venir à un certain prix « se monter à » (1550), venir à terme « à l'époque normale » (1550). ◆  Venir de signifie (1606) « provenir » et s'emploie notamment en parlant d'un mot, d'une maladie, etc., ainsi qu'en emploi impersonnel de là vient que, d'où vient que (1675). ◆  Dans la première moitié du XVIIe s., venir entre dans la locution venir d'un autre monde « ignorer ce que tout le monde sait », qui a cessé de s'employer avant d'où venez-vous ? (1690), d'où tu viens ? d'où vient-il, celui-là ?, en concurrence avec sortir. ◆  En venir à « finir par employer après une évolution » est relevé en 1640, de même que il faut en venir là ; où voulez-vous en venir ? « à quoi faites-vous allusion ?, de quoi voulez-vous parler ? » est attesté en 1652. ◆  Venir de se dit à propos de choses pour « provenir de » (1658, à propos de traditions). En parlant des personnes, venir de rien (1690) correspondait à « avoir réussi, s'être enrichi rapidement ». Venir à et venir de peuvent être considérés comme des semi-auxiliaires, de même que venir pour, en français du Québec, qui signifie « être sur le point de » (elle venait pour sortir). ◆  En 1690, Furetière relève venir pour « arriver à (une limite, etc.), atteindre », venir bien « être payé régulièrement » en parlant d'un revenu et des locutions alors nouvelles : les choses vont et viennent ; au bon joueur vient la balle « l'habileté fait trouver les occasions favorables » est sorti d'usage.
■  En venir à, suivi de l'infinitif, équivaut à « être réduit à » (1694) ; sentir venir qqch. de loin est également attesté à la fin du XVIIe siècle.
■  Voir venir qqn s'emploie par figure (1668, Molière) pour « deviner ce que qqn pense », puis pour « observer ce que qqn fait » (1694). La locution voir venir qqch. prend le sens (1787) de « rester dans l'expectative ». ◆  On relève encore au XVIIIe s. laisser venir (av. 1747) et qu'il y vienne ! comme menace (1798).
■  Venir bien (mal) s'emploie spécialement en gravure (1656, Brébeuf), puis en photographie, à propos d'un tirage.
Dans une construction devant adjectif, venir peut équivaloir à devenir. Cet emploi était normal en France, du XVe s. (1405) jusqu'au XVIIe s. ; il est encore dans Furetière, 1690. Devenu archaïque dans l'usage général de France, négligé par les descriptions, il s'est maintenu en milieu rural dans le nord et l'est de la France, et aussi en Auvergne et dans le Sud, de la Provence à la Gironde. Marqué comme régional et fautif en France, il est usuel en Belgique, en Suisse, au Québec, d'où il provient d'usages régionaux de l'ouest de la France (Nantes). Les constructions fréquentes de venir, verbe d'état dans ce sens, placent le verbe devant un adjectif attribut ; venir vieux semble la plus courante ; l'attribut peut être un nom (il est venu médecin). ◆  Ce sémantisme n'a rien d'anormal ; il continue certaines valeurs anciennes et classiques du verbe, décrites ci-dessus, et où venir réunit les idées transmises par provenir, parvenir, survenir, devenir.
Enfin venir, intransitif, pour « jouir, éprouver du plaisir » est employé par Apollinaire (1906) et ne peut être qu'un calque de l'anglais to come, usuel dans ce sens.
❏  VENU, UE adj. et n. est employé avec un adverbe dans être bien (mal) venu « arriver bien (mal) à propos ». ◆  Le mot entre comme nom masculin dans plusieurs expressions demeurées vivantes : le premier venu désigne d'abord la première personne à se présenter (1580, Montaigne ; 1559, adj.) et par extension « n'importe qui » (1640) ; dernier-venu (1580) s'emploie aussi pour « personne dont on fait peu de cas » (1876). Nouveau-venu « personne qui vient d'arriver » (1580), se dit aussi d'une personne qui vient d'être admise dans un groupe (1668, Molière). ◆  Les tard-venus a désigné (1765) les gens de guerre qui, licenciés après le traité de Brétigny, parcouraient la France en la pillant ; le mot, comme adjectif, s'applique encore à un enfant né après ses frère et sœur.
■  BIENVENU, UE adj. et n., vient de bien et venu dans la formule de politesse bien soyez venu (XIIe s.). Soyez le bienvenu se dit aussi de qqn, qqch. accueilli avec plaisir (XVe s.).
■  BIENVENUE n. f. a désigné (XIIIe s.) une fête offerte par une personne qui arrive pour la première fois dans un groupe, d'où le sens disparu de « repas de noces » (1551). Le mot se dit (1530) pour « bon accueil », aujourd'hui dans des expressions, et pour « heureuse arrivée » (souhaiter la bienvenue à qqn). ◆  En français canadien, le mot sert de réponse polie à un remerciement, calquant l'usage anglo-saxon de welcome, répondant à thank you.
■  MALVENU, UE adj. s'est d'abord appliqué (1155) à une personne indésirable, d'où le sens de « malheureux » (mil. XIIe s.) ; être mal venu de faire (v. 1172), puis (XIXe s.) à faire qqch., est littéraire pour « ne pas avoir le droit de faire qqch. ». Par extension, malvenu s'emploie pour « hors de propos ».
La substantivation de l'infinitif, le VENIR n. m., est rare ; au figuré, on a dit être en son premier venir (1440-1475) pour « avoir la vigueur de la jeunesse », emploi disparu. ◆  L'aller et le venir s'est employé pour « deux soufflets » (1640), plus tard remplacé par un aller et retour.
VENUE n. f., participe passé substantivé de venir, signifie dans ses premiers emplois « arrivée » (v. 1155), sens noté « vieilli » par les dictionnaires au XVIIIe siècle. Avec cette valeur, de venue, de première venue s'est dit pour « tout de suite, dès l'abord » (1275) ; le nom s'est employé pour « rente, revenu » (1290), « action de se déplacer » (1359), puis pour « endroit par où l'on vient » (1549), et aussi « extraction » (XVe s.), « choc violent » (v. 1500). ◆  Une spécialisation pour « chose qui survient inopinément » (1658) est sortie d'usage. ◆  Venue s'emploie encore aux sens de « naissance » (XVe s.) et de « manière dont poussent, se développent les plantes » (XVe s.), dans la locution adjective d'une seule venue, tout d'une venue (1531) « poussé en une fois (c'est-à-dire vite, bien) ». ◆  De venue a signifié « en grand nombre » (1549). Avec l'idée de « croissance », tout d'une venue s'est appliqué (1680) à un homme grand et mal fait (dont la taille n'est marquée ni aux épaules ni aux hanches). Par figure, tout d'une venue qualifie (XIXe s.) un caractère sans nuances. De première venue (XIXe s.) a été supplanté par de premier jet en parlant d'une écriture ; d'une belle venue « d'une belle composition », en parlant d'une œuvre, n'est attesté qu'au XXe siècle mais s'applique à une personne, par métaphore des plantes, depuis le XVIe s. (1547). ◆  La locution allées et venues (fin XIVe s.), toujours usuelle, s'emploie aussi par figure (v. 1431) pour « démarches qu'on fait pour une affaire ».
VENANT, ANTE adj. et n., du participe présent, a d'abord désigné comme nom (v. 1270) le flux montant de la marée. La locution à tous venants (v. 1380), puis à tout venant (1559) « à tous ceux qui se présentent », s'est employée adverbialement pour « à la minute ».
■  TOUT-VENANT n. m. est d'abord un terme technique désignant (1837) la houille non triée, puis dans l'usage courant (v. 1930) s'applique à tout ce qui se présente sans triage préalable, ou à des personnes sans caractère particulier (le tout-venant, 1932).
■  La forme venant entre dans d'autres combinaisons. ◆  Allant et venant, adj. et n., est littéraire (1560) pour « gens qui vont et viennent ». ◆  Bien venant est sorti d'usage au sens de « qui est payé régulièrement », en parlant d'une rente (1661, Molière), de même que mal venant (1763, Voltaire). Bien venant et mal venant signifient aussi « qui vient bien, mal », en parlant d'un enfant, d'un arbre (1845 ; mal venant, v. 1820).
Le composé SURVENIR v. tr. apparaît avec la variante sorvenir (déb. XIIe s.) ; il est sorti d'usage au sens, attesté au XIIe s. (1155), de « venir par surcroît, s'ajouter » ; il s'emploie aujourd'hui couramment pour « arriver brusquement » (XIIe s.). ◆  Le verbe a eu le sens de « venir au secours » (1493) et de « subvenir » (XVIe s., survenir à qqch.).
■  Le participe présent SURVENANT, ANTE adj. et n. a signifié « étranger » (v. 1145, n.) ; le mot désigne une personne qui survient (v. 1175, sorvenant). Il est sorti d'usage comme adjectif et encore employé régionalement (Canada) comme nom.
■  SURVENUE n. f. (v. 1160, puis v. 1360) est seulement littéraire pour « fait de survenir à l'improviste ».
■  SURVENANCE n. f. « action de se produire tout à coup » (XVe s.) est aussi un terme de droit (1740).
VENEZ-Y-VOIR n. m. inv., formé de l'impératif de venir (1549), s'est dit dans la langue classique par ironie d'une chose sans importance. ◆  Au XIXe s., il a désigné un objet par lequel on cherche à attirer l'attention.
VENIAT n. m. inv., mot latin signifiant « qu'il vienne » (subjonctif de venire), est un ancien terme de droit (1690) désignant l'ordre donné à un officier de justice de venir rendre compte de sa conduite.
❏ voir ADVENIR, AVENIR, CONTREVENIR (à CONTRAVENTION), CONVENIR, CONVENTION, CONVENTUEL, COUVENT, DEVENIR, ÉVÉNEMENT, ÉVENTUEL, INTERVENIR, INVENTER, PARVENIR, PRÉVENIR, PROVENIR, SOUVENIR, SUBVENIR.
VÉNITIEN, IENNE adj. et n. est emprunté (1208, venicien, n. m.) à l'ancien italien venetiano (italien moderne veneziano), dérivé de Venezia « Venise ».
❏  L'adjectif s'applique à ce qui appartient à l'ancienne république de Venise (XIIIe s., n. m., « monnaie de Venise ») et à la ville de Venise ; il qualifie en particulier une couleur de cheveux d'un blond roux dans blond vénitien (attesté 1874, Goncourt). ◆  Le vénitien désigne aussi le dialecte italien de Vénétie (1672).
❏  VÉNITIENNE n. f., substantivation de l'adjectif au féminin, se dit (1667) d'une étoffe de soie qui fut d'abord fabriquée à Venise et d'un tissu d'ameublement (1728).
L + VENT n. m. est issu (v. 1050) du latin classique ventus « vent », « air en mouvement », au figuré dans des acceptions très variées reprises en français, en particulier et par métaphore « flatulence » et, surtout au pluriel, « bonne ou mauvaise fortune », « tendances, influences, courants d'opinion » et « soulèvement contre qqn ». Ventus appartient à une famille où l'on trouve le gallois gwynt, le gotique winds (Cf. anglais wind, allemand Wind), mais l'indo-iranien a une autre forme (sanskrit vatah).
❏  En français comme en latin, le mot désigne depuis ses premiers emplois les mouvements naturels de l'atmosphère et leurs effets, les déplacements de l'air. Cette acception première donne lieu à de nombreux emplois spéciaux, concrets et abstraits. Certains contextes culturels ont produit des effets sémantiques particuliers : la navigation des navires à voiles avec les idées de vitesse, de direction, la vénerie, avec la notion d'indice, liée au phénomène physique de la transmission des odeurs, la musique, avec l'idée du souffle producteur de son.
■  Le premier sens attesté est la valeur initiale du latin, « mouvement de l'air », dans le contexte maritime. Parmi les emplois généraux concernant le phénomène naturel, la présence et l'absence de vent se marquent par des tours comme il y a, il fait du vent (régionalement : Cantal, Provence... il fait vent), par le verbe venter, par le vent se lève, souffle, tombe. Le vocabulaire du vent, lexicalisant la direction (vent du nord, de l'est, du sud...), la nature, l'origine des vents, n'exclut pas des emplois spécifiques du mot général, le vent (1560 à Grenoble) pouvant désigner en Franche-Comté, dans le Lyonnais, la Drôme, l'Ardèche, le Jura le vent du sud qui amène la pluie, ou bien en Lorraine, celui d'ouest, qui a les mêmes effets, soulignant l'association du vent et de la pluie* dans l'idée de « mauvais temps », en français d'Europe. Une première métaphore se manifeste dès le XIIe s., où des locutions donnent à vent la valeur de « vide, absence », qu'a aussi le mot air. Ainsi, vivre de vens signifiait « vivre de rien » (v. 1160) et vent est attesté isolément au sens de « choses vaines, promesses creuses » (XIIe s.), valeur qui existe aussi en ancien provençal. La notion d'absurdité est présente dans le moyen français battre vent « dire des insanités » (v. 1382). ◆  La notion de « vide » sera reprise en français classique, croisée avec la métaphore du souffle dans ne sentir que du vent (1654) « n'avoir qu'un effet nul ou insignifiant ». ◆  Sur le plan intellectuel, vent équivaut aussi à « vanité » (v. 1270 ; v. 1200 « chose vaine »), sorti d'usage au XVIIIe s., sauf dans des locutions comme n'estre que vent (fin XIVe s.), que du vent (v. 1700), aujourd'hui c'est du vent. On a dit n'avoir que du vent (2e moitié XVIIe s.) pour « être bavard et vain ».
Au XIIe s. aussi, le mot entre dans le vocabulaire de la chasse, signifiant « odeur laissée par le gibier » (v. 1176). Une série de locutions, où vent correspond à « signe, indice », en découle : (n'avoir) ne vent ne voie (v. 1170), ne vent ne nouvelle (1316), n'entendre [comprendre] ni vent ni fumée (1571), etc., jusqu'à n'avoir ni vent ni nouvelle (1651), toutes sorties d'usage, comme sentir le vent (v. 1572) « être informé », alors que avoir vent de qqch. (1461) se dit encore. Ces expressions se ressentent d'une autre valeur métaphorique, où vent correspond à « espace libre où les rumeurs se divulguent » (mettre qqch. au vent, déb. XVIIe s.). ◆  La vénerie connaît d'autres locutions propres et figurées, comme avoir le vent de (une bête) « percevoir l'odeur (du gibier) » (v. 1375), avoir trop de vent, etc. Par métonymie, avoir le vent du gibier, avoir bon vent correspondent aussi (v. 1390) à « avoir du flair, du nez ». Ce vocabulaire se développe au XVIIe s. avec prendre le vent « aller à la rencontre du gibier » (1606), aller dans le vent (1694), et plus tard (1834) aller au vent, aller à bon vent (1834) « suivre les bons indices », suivre le vent (1608), savoir de quel côté vient le vent (1640) qui peut aussi s'interpréter comme métaphore maritime. Ces expressions encore connues sont souvent mal interprétées, la référence à la vénerie n'étant plus familière.
■  Un autre emploi fréquent en ancien français correspond à « air libre, milieu extérieur, non protégé ». On peut y rattacher le motif du pendu qui se balance « en l'air », dans estre levé au vent « être pendu » (XIIIe s.), puis estre pendu au vent (v. 1330) et mettre au vent « pendre » (XVe s.), expressions déjà sorties d'usage à l'époque classique. En revanche, herbergier (loger) au vent « coucher dehors, à la belle étoile » (v. 1215) se prolonge, avec l'utilisation d'une autre valeur (voir plus loin) dans être logé aux quatre vents (1690) « loger dehors, à la belle étoile », quatre vents venant du sens de « points cardinaux » (ci-dessous). ◆  Au XVIIe s., on trouve aussi jeter au vent « abandonner, dissiper (des biens) » (1640), qui correspond en français actuel à par la fenêtre, et envoyer au vent (1645) « se débarrasser de (qqch., qqn) », sortis d'usage.
Dès le XIe s., vent est constamment utilisé dans le contexte de la navigation, produisant des emplois et locutions parfois repris par la langue courante. Avoir bon vent « avoir le vent favorable » (v. 1225), renforcé dans avoir bon vent et marée (1538), d'où avoir vent et marée « bénéficier de circonstances favorables » (1694), disparu (à cause de l'homonymie avec contre vents et marées « en surmontant les difficultés »), se résolvent en français moderne dans la formule de souhait bon vent !, souvent ironique (Cf. bon voyage !).
■  Plusieurs locutions techniques concernent la position par rapport au vent, essentielle dans la navigation à voile : sur le vent (v. 1375), « dans la direction opposée à celle du vent », s'oppose à sous le vent, qui a signifié spécialement « séparé par un autre navire du lieu d'où le vent souffle » (1694) et s'emploie aujourd'hui en parlant des îles. ◆  De nombreux syntagmes maritimes apparaissent à partir du XVIe siècle : vent devant « contraire » (1529), vent debout (1718) qui succède à debout au vent (1680), vent derrière (1529). Vent en poupe « venant de l'arrière, donc favorable », plus ancien, a donné au figuré avoir le vent en poupe (1492) « être favorisé par les circonstances », d'où « être en train de réussir », très vivant. ◆  C'est évidemment de la marine que procède la formule d'accueil quel bon vent vous amène ? (1613), modification de quel vent vous maine ? (v. 1178), vous pousse ? (1579), quel bon vent vous mène ? (1532-1550) et toujours vivante. ◆  Être vent dedans (1812) s'est dit par métaphore pour « être ivre » (1876), remplacé par avoir du vent dans les voiles, peut-être lié à tirer des bordées.
■  Le contexte de la marine est aussi à l'origine, depuis le moyen français, de la valeur symbolique du vent-vitesse. D'où plus tost que vent (déb. XIIe s.), aller, courir, etc. comme vent (1216), devenu aller comme le vent (1553), (aller) plus vite que le vent (1552). ◆  Par métonymie, vent signifie « direction d'où souffle le vent », notamment dans les quatre vents (1533) « les quatre points cardinaux ».
■  Le thème du vent, phénomène variable, imprévisible, se retrouve dans des emplois concrets et dans des valeurs métaphoriques, « inconstance », « changement brusque », ceci dès l'ancien français : se retourner à chascun vent (v. 1265) signifie « être inconstant ». ◆  De tels emplois se multiplient en français classique, avec à tout vent (1680), à tous les vents (1685) qui sont liés au thème de la girouette. Une expression plus tardive, le vent tourne, exploite la même image pour illustrer le changement des circonstances (et non plus des attitudes humaines individuelles). Le rapport concret entre vent et des mots comme tourner, sauter, etc. correspond aussi à ce thème, ainsi que coup de vent (av. 1529) « changement brusque de force ou de direction du vent », d'où en coup de vent « rapidement » (1872). ◆  Au vent ! dans l'usage familier, s'est dit pour exprimer un refus (1862), puis pour renvoyer, comme fous le camp ! (dans Courteline, 1896).
Parmi les emplois spécialisés du latin, celui de « flatulence » a été repris (1re moitié XIIIe s.) dans vent du cul « pet », qui n'avait pas en ancien français la vulgarité qu'on lui prêterait aujourd'hui. Ce type d'emploi a donné l'euphémisme vent (1680) avec la même signification. ◆  On peut rattacher à cette acception la valeur physiologique de « respiration, haleine » (1538), surtout dans des locutions comme prendre du vent « respirer » (1528), cueillir vent « reprendre haleine » (v. 1340), reprendre son vent (1694), toutes sorties d'usage. Une extension spécialisée correspond à « voix » (1584), d'abord dans vent de gorge « cri » (déb. XVIe s.) ou « son musical », valeur qui s'est conservée dans instrument à vent (1685).
■  Vent correspond aussi à « l'air libre », notamment en fauconnerie où prenre [prendre] son vent s'est dit (1470) de l'oiseau qui prend son essor. ◆  Avec le sémantisme développé par le composé éventer (ci-dessous), exploité aussi en vénerie, vent se dit du milieu extérieur en tant que nuisible à une substance conservée dans un récipient. Donner vent à une bouteille (v. 1459) correspond donc à « éventer son contenu », prendre du vent se dit du vin qui s'aigrit (1876). Comme éventer, le mot a aussi une valeur positive dans faire le vent à qqn « l'éventer » (déb. XIIIe s.) ou se donner vent (1530) « se rafraîchir, s'éventer », sortis d'usage. ◆  Croisé avec l'idée de vanité, ce sémantisme se retrouve dans tête au vent (1787), variante de tête à l'évent « étourdi ».
■  Une autre spécialisation apparue au XVIe s. est « déplacement, courant d'air » (1552), aussi dans des locutions comme arquebuse à vent (1680) « à air comprimé ». Ce sens a disparu, sauf dans sentir le vent du boulet « échapper de peu à un grave danger » (vent du boulet, 1858, attestation tardive par rapport à vent de la balle du canon, 1640, Oudin) et surtout faire du vent (1888) « faire l'important », par l'image du déplacement d'air. Ce sémantisme était déjà présent en moyen français, mais surtout dans des locutions comme le vent de la chemise d'où, par une image de la chemise (de nuit) flottante et agitée, vent de chemise (fin XVe s.) « ébats érotiques ».
■  C'est aussi au XVIe s. que vent s'applique aux influences du sort, par métaphore de l'effet de déplacement causé par le vent qui emporte les objets, dans autant en emporte le vent (v. 1270 ; XIIIe s., autant en porte...) « cela n'a pas d'importance », et aux influences d'un milieu, par exemple dans vent du peuple (déb. XVIIe s.), vent de la cour (v. 1600) et un peu avant (1588) bon vent « faveur (d'un milieu, du peuple...) », expressions disparues au profit de locutions comparables formées avec air. On peut rattacher à cette idée d'influence et à celle de direction, appliquées à la mode, la locution (être) dans le vent (XXe s.) « à la mode ».
Ces différents domaines et ces directions métaphoriques sont souvent mêlés, comme on vient parfois de le voir. Des expressions issues de la marine à voiles concernent soit la direction, soit la force, soit le changement du vent, d'où des figures différentes. Ainsi, regarder d'où vient le vent a signifié « regarder de tous côtés », puis (1718) « observer le cours des événements », comme (déb. XVIIIe s.) voir d'où vient le vent.
Plusieurs emplois, en astronomie, comparent aux déplacements de l'atmosphère terrestre des flux de particules, par exemple dans vent solaire (flux d'électrons, protons, hélions) et vent stellaire.
❏  Plusieurs dérivés anciens de vent ont disparu, comme ventelet « petit vent » (v. 1175) ou ventine « coup de vent » (1389).
■  VENTER v. impers. (v. 1130) se dit du vent quand il se produit. Ce verbe a eu de nombreux sens, dans des emplois personnels, transitifs et intransitifs, tels « être jeté au vent » (v. 1155), « souffler (le feu) » (v. 1240), « frapper dans le vide », en parlant d'une épée (1527), « exposer à l'air » (1636) (venter des habits), disparus après l'époque classique, « pousser par le souffle du vent » (1636) était encore en usage au XIXe siècle. ◆  Le verbe ne survit que comme impersonnel, pour « faire du vent » (1585). Il s'emploie dans le proverbe on ne peut empêcher le vent de venter, relevé en 1808. Alors que ce verbe est marqué comme d'usage soutenu, rare à l'oral en français d'Europe, il est usuel en français du Canada.
■  De venter dérive VENTAGE n. m., d'abord ventaige « vent, tempête » (v. 1501). En technique rurale, il signifie « action de vanner » (1783), reprenant le sens du moyen français ventir, v. tr. (1552), « vanner le blé ».
■  Le composé SURVENTER v. impers. est attesté en 1529.
VENTAIL, AUX n. m. (1314), réfection de ventaille (1080), désigne la partie de la visière des casques clos, par où passait l'air. ◆  Un autre sens (1655), lui aussi de ventaille (v. 1240), disparu au sens de « volet d'une fenêtre », désigne le battant d'une porte ou d'une fenêtre. Dans ce sens, le mot s'écrit VANTAIL.
■  VENTEAU n. m., terme technique, d'abord au sens de « ventail » (1611), se dit (1757) de l'ouverture par laquelle pénètre l'air d'un soufflet de forge, ouverture fermée par une soupape.
■  VENTILLON n. m. (1872), formé avec le suffixe diminutif -illon, désigne la soupape du venteau d'un soufflet.
■  VENTIS n. m., terme technique, d'abord venti (1812), « arbres arrachés avec des cordes comme par le vent », se dit (1872) des arbres abattus par le vent.
■  VENTEUX, EUSE adj. est emprunté au dérivé latin classique ventosus « où il y a du vent », « exposé au vent », au figuré « léger, rapide comme le vent », « qui tourne à tous les vents », « vain, vide ».
■  Le mot est d'abord attesté (1256, venteus) au sens de « qui produit des flatuosités ». Il qualifie aussi ce qui s'accompagne de flatuosités (1552). ◆  Rare au sens propre « du vent », repris (v. 1380) du latin, il a été employé au figuré comme en latin pour « rapide comme le vent » (1584), puis pour « vain » (v. 1585, vanteux), « léger comme le vent », en parlant de l'écume (1608).
■  VENTÔSE n. m. a été créé (1793) par Fabre d'Églantine à partir du latin ventosus pour désigner le 6e mois de l'année du calendrier républicain (19 ou 21 février au 19 ou 21 mars), mois des giboulées et du vent.
Parmi les composés préfixés, les plus usuels sont formés avec le préfixe é- (de ex-).
■  ÉVENTER v. tr., d'abord écrit esventer (v. 1120 ; XVe s., forme moderne), a signifié en vénerie « dépister (le gibier) », sens lié à vent « odeur ». ◆  Il s'emploie ensuite (v. 1165) pour « exposer au vent, à l'air », en parlant d'une literie, du foin, etc., puis au sens d'« être rafraîchi à l'air libre » (fin XIIe s., v. intr.), « rafraîchir en agitant l'air » (v. 1180, au pronominal ; XIIIe s., comme transitif), d'où ÉVENTÉ, ÉE adj. (XIIIe s., isolément). ◆  Éventer a signifié (v. 1310) « lancer (une flèche) » et s'éventer « se précipiter ».
■  Le verbe, par référence à la valeur de vent « indice, nouvelle », s'est employé par figure pour « avertir (qqn) » (1382), d'où être éventé de qqch. « être averti de qqch. » (XVIe s.), acception disparue. De là éventer qqch. « rendre public, faire connaître » (1493), qui s'est utilisé dans éventer un livre « le publier » (mil. XVIe s.) et pour « exprimer » (v. 1580, s'esvanter, en parlant des passions ; 1610, esventer des pensées). Le participe passé éventé est aussi adjectivé en ce sens (1653). ◆  S'éventer prend le sens de « se gâter au contact de l'air », en parlant d'un vin, d'une étoffe, etc. (1559), d'où l'emploi du participe substantivé, dans (v. 1390) sentir l'éventé, à propos d'un vin. Éventer s'emploie transitivement pour « gâter en exposant à l'air » (1835). ◆  Au figuré, éventer qqn « rendre écervelé » est encore relevé en 1932 (Académie), mais ne devait plus s'employer depuis le début du XIXe s.
■  Depuis le milieu du XVIe s., le verbe s'emploie dans le vocabulaire de la chasse, dans éventer un lieu « trouver les traces du gibier », éventer le gibier (1606), éventer une voie (1669) et par métaphore éventer les traces de qqn « les suivre » (1685), tous emplois archaïques ou disparus. ◆  Au figuré, le verbe signifie « découvrir (un secret, un piège, etc.) » (1587), d'où « trouver (un objet) » (1617), sens qui ne s'est pas maintenu. Il s'est employé par extension pour « mettre à l'air libre, ouvrir », par exemple dans éventer une mine (1636), une veine (1660), une carrière (1676) ; la locution figurée éventer la mine, la mèche (1694) est toujours vivante dans l'usage littéraire. ◆  Avec la valeur d'« exposer à l'air », le verbe est utilisé dans divers domaines : éventer du grain « le remuer pour éviter la fermentation » (1694), éventer une voile « mettre le vent dedans » (1694), éventer un piège pour lui ôter son odeur (1756), éventer une étoffe pour unir la couleur à la sortie de la cuve (1765). ◆  Éventé, ée adj. « écervelé » (esventé, 1571) et un éventé (1584), une éventée (1890) ne se disent plus.
ÉVENTAIL n. m. est attesté isolément au XIVe s. (esventail) comme terme d'horlogerie, puis pour « ouverture » (1409), « soupirail » (1690). Ces valeurs ont disparu. ◆  Le mot désigne aussi (1416) un instrument portatif repliable, souvent formé d'une matière souple plissée, qu'on agite pour produire de l'air et de la fraîcheur. Ce sens est le seul vivant aujourd'hui. Par extension, il se dit d'un chasse-mouches en fibres tressées (1578), en français d'Afrique aujourd'hui. Éventail de bouleau « poignée de verges » (1640) a disparu comme la locution familière éventail à bourrique « bâton (pour frapper) » (1888). ◆  En éventail « en forme d'éventail » est relevé en 1721. ◆  Par analogie, éventail désigne un écran pour isoler (1723, éventail d'émailleur). ◆  Le sens de « mauvais tableau » (1761), aujourd'hui disparu, s'explique par la réputation douteuse des peintres d'éventails, contraints de travailler très rapidement et de manière répétitive. ◆  Au XXe s., éventail se dit d'un ensemble de choses diverses d'une même catégorie par la métaphore du déploiement (éventail des salaires 1945, R. Aron, des prix).
■  Le dérivé ÉVENTAILLIER, IÈRE n. (1723 ; d'abord eventailler, 1503), « fabricant ou marchand d'éventails », a été remplacé par ÉVENTAILLISTE n. (1690, éventaliste), signifiant aussi « peintre d'éventails » (1701).
■  2 ÉVENT n. m., déverbal de éventer, a désigné (1521, esvent) un conduit pour détourner l'eau d'une source. ◆  Le mot se dit ensuite de ce qui laisse passer l'air, spécialement de l'ouverture au-dessus des fosses nasales de certains animaux (1558), de l'ouïe des poissons (1564), de la narine des cétacés (1690), le plus souvent au pluriel.
■  La locution tenir de l'esvent « être peu sensé » (1566) est sortie d'usage, comme tête à l'évent « personne étourdie » (1654), cependant encore connu. L'emploi pour « altération par action de l'air » (v. 1600), d'où sentir l'évent « être gâté » (1611) ont également disparu. Toutes ces acceptions correspondent à un emploi de vent (ci-dessus). ◆  Dans le vocabulaire technique, évent désigne depuis le XVIIe s. (1676) un conduit ménagé dans les moules de fonderie pour l'échappement des gaz et s'emploie dans divers domaines techniques pour « conduit » (1811), « fissure » (1835), « petite ouverture ».
■  ÉVENTOIR n. m., formé avec le suffixe -oir des instruments, a désigné une ouverture dans un tonneau (1391, esventoir), une ouverture destinée à l'aération (1532, esventouer), spécialement dans une mine (1797), un éventail (1523), utilisé en particulier pour activer le feu (2e moitié XVIe s.), et un chasse-mouches (1538). Le mot a disparu dans tous ses emplois.
■  ÉVENTEMENT n. m., « action d'éventer, de s'éventer » (1538, esventement), désigne aussi (1636) l'altération subie par des aliments exposés à l'air. Le mot a disparu pour « vannage du blé » (v. 1600) et « divulgation d'un secret » (1611).
D'autres composés ont été formés à partir de vent.
■  ABRIVENT n. m., formé de abri*, est sorti d'usage pour « abri pour une sentinelle » (1752) et se dit d'un paillasson qui protège les plantes du vent, aussi nommé BRISE-VENT n. m. inv. (1690), de briser*.
■  1 CONTREVENT n. m., terme de marine (1559), signifie « vent contraire », d'où 1 CONTREVENTER v. intr. (1534) et À CONTREVENT adv. (mil. XVIIIe s.).
■  2 CONTREVENT n. m., de contre-, s'est dit pour « clayon » (1511), emploi disparu. ◆  Le mot désigne (1642) un volet qui protège des intempéries et, en charpenterie (1676), une pièce de bois oblique qui renforce les fermes, d'où 2 CONTREVENTER v. tr. (1690), dont dérive CONTREVENTEMENT n. m. (1694).
VOL-AU-VENT n. m., attesté d'abord dans gâteau vol-au-vent (1750), puis seul en 1800, est composé de 1 vol, à cause de la pâte feuilletée, légère, qui forme le moule de cette entrée, garnie d'une préparation de viande ou de poisson, de fruits de mer, avec des champignons, etc. Des syntagmes (vol-au-vent financière, marinière) et des appellations de sens voisin (bouchée* à la reine) manifestent l'importance culinaire de la notion. Voir aussi timbale.
■  COUPE-VENT n. m. inv., de couper, désigne un écran placé derrière une moto pour protéger du vent le coureur cycliste qui la suit (1893) et, plus généralement (1894), un dispositif pour réduire la résistance de l'air. ◆  Au Québec, d'après l'anglais windbreaker, le mot se dit (XXe s.) d'un blouson dont le tissu protège du vent.
VENTILER v. tr., réfection de venteler (fin XIe s.), est emprunté au latin ventilare « exposer au vent », d'où dans la langue rustique « exposer le grain au vent, vanner », « secouer », au figuré « attiser », d'où en bas latin impérial « attaquer, persécuter » et « discuter, débattre ». Ventilare dérive de ventus.
■  Le verbe s'est d'abord employé sous la forme venteler au sens d'« agiter en l'air (un drapeau) » (fin XIe s.), sens sorti d'usage au XVIIe s., puis, comme intransitif, de « flotter au vent » (1080), encore au XVIIe siècle. ◆  Le sens figuré, « secouer, tracasser » (v. 1126), procède de la même métaphore que vanner. ◆  Du latin est reprise l'acception juridique « examiner une cause, la plaider » (1265), sortie d'usage. ◆  L'idée d'« exposer au vent » se retrouve dans les sens techniques de « vanner (le blé) » (1611), « sécher », disparus.
■  Ventiler a pris son sens concret au XIXe s., d'abord pour « rafraîchir (le corps) » (1820), sorti d'usage, puis avec la valeur de « renouveler l'air dans un lieu clos » (1842), probablement antérieur (Cf. ventilation), qui est aujourd'hui l'acception principale du verbe.
■  En droit et en commerce, ventiler signifie (1611) « évaluer (une ou plusieurs portions) relativement au tout, dans une vente ». Par extension, le verbe prend à la fin du XIXe s. l'acception de « répartir entre plusieurs comptes », puis la valeur générale (mil. XXe s.) de « répartir en plusieurs groupes » (des choses ou des personnes).
■  Le dérivé VENTILEMENT n. m. s'est dit isolément (1596, ventillement) pour « examen des comptes ». Il est rare et littéraire pour désigner l'action de ce qui fait du vent (1882).
■  VENTILEUSE n. f. (1901, Maeterlinck) se dit en zoologie d'une abeille qui bat des ailes à l'entrée de la ruche pour en renouveler l'air ; on trouve aussi VENTILATEUSE (déb. XXe s.), de ventilateur.
VENTILATION n. f. est un emprunt au dérivé latin classique ventilatio, -onis « exposition à l'air » et, en bas latin, « vannage du blé », au figuré « séparation des bons et des méchants lors du jugement dernier ». ◆  Le mot a eu des emplois parallèles à ceux du verbe. Il est attesté en 1382 comme terme juridique, probablement pour « examen d'une cause » (Cf. ventiler). ◆  Il désigne (1495) le fait de rafraîchir, en particulier d'aérer un lieu clos (1819), sens aujourd'hui le plus courant. ◆  Au figuré, il est employé en droit pour « estimation » (1574) et s'emploie aujourd'hui comme terme de finances (XXe s.) pour « répartition ».
■  VENTILATEUR n. m., dérivé savant de ventiler, a sans doute subi l'influence de l'anglais ventilator, emprunt au latin ventilator « vanneur » (du supin de ventilare) avec changement de sens. En effet, le mot apparaît (1744) dans la traduction d'un texte anglais, désignant un appareil servant à brasser l'air. Cet emploi est resté usuel, les objets produisant le courant d'air ayant varié, de la pale déplacée (panka) à l'éventail, puis à l'appareil à hélice (au XXe s., ventilateur électrique). Le mot se dit aussi (1771) d'un tuyau qui conduit à l'extérieur les gaz d'une fosse d'aisances et, par ailleurs, d'un appareil qui produit un courant d'air pour trier en éliminant les impuretés (1770, « tarare »), pour alimenter une combustion (1835), pour refroidir le moteur d'une automobile (1903), sens usuel (courroie de ventilateur, etc.). ◆  L'abréviation VENTILO n. m. (1952) est familière.
❏ voir BIELLE, PARAVENT, VENTOUSE.
VENTE → VENDRE
VENTERNE n. f., mot d'argot ancien, semble être un emprunt à l'espagnol ventana « fenêtre », avec modification d'après des mots comme lanterne, pour désigner la fenêtre (1800). Il est sorti d'usage au XIXe s.
❏  VENTERNIER n. m. (écrit van... Raspail, 1836) désignait un cambrioleur opérant par les fenêtres.
VENTIS, VENTÔSE → VENT
1 VENTOUSE n. f., modification (1314) de ventuse (v. 1240), aussi ventueuse (1314), est emprunté au bas latin ventosa, abréviation du latin classique cucurbita ventosa signifiant proprement « courge pleine de vent », de cucurbita « courge* » et du féminin de ventosus, dérivé de ventus (→ vent). On disait aussi en bas latin medicinalis cucurbita et cucurbitula « petite ventouse ».
❏  Le mot, comme en bas latin médical, désigne une petite cloche de verre appliquée sur la peau après qu'on y a raréfié l'air, pour provoquer une révulsion. ◆  Par analogie, il s'est employé en arboriculture (1796), le mot désignant alors une branche non taillée qui absorbe l'excès de sève. ◆  Ventouse se dit ensuite (1828), après avoir désigné la sangsue (1817), d'un organe de succion qui permet à divers animaux aquatiques (batraciens, etc.) de rester attachés à la surface d'un corps solide, d'où faire ventouse « adhérer » (1891). ◆  Par extension, ventouse s'emploie (1942) pour des dispositifs qui se fixent contre une surface plane par vide partiel d'où, au figuré, voiture* ventouse.
❏  Le dérivé VENTOUSER v. tr. est attesté au XIIe s. (v. 1179, ventuser), le terme didactique VENTOUSAIRE adj., au XXe siècle.
L'homonyme 2 VENTOUSE n. f. est un dérivé (1676) de vent ou est directement formé sur le latin ventus « vent* ». ◆  Le mot se dit en technique d'une ouverture : dans un fourneau, pour régler l'arrivée d'air (1676), dans un mur épais, pour l'écoulement de l'humidité (1680), dans un tonneau, pour soutirer le vin (1685), dans un conduit, une fosse, etc., pour l'aération (1690), etc. Il désigne également un hublot d'aération dans un navire (1831) et un effondrement partiel dans une chaussée (1873).
L VENTRE n. m. est issu (1050) du latin venter, ventris, terme général désignant le ventre en tant que réceptacle des entrailles ou du fœtus ; par analogie de forme, le mot se dit d'objets techniques, de contenants, etc. Venter a pour correspondants le grec gastêr « ventre, estomac » (→ gastéro-), le sanskrit udáram « ventre », le vieux prussien weders de même sens.
❏  Le mot est d'abord attesté en français pour désigner chez la femme l'abdomen en tant que siège de la gestation et des organes génitaux internes, l'utérus. ◆  Il se dit aussi (1080), chez l'homme et la femme, de la partie du tronc correspondant à la paroi abdominale et à une partie de la cavité de l'abdomen, et, pour les animaux, de la partie analogue, et par extension de la paroi inférieure du corps par opposition à dos. Avec cette valeur, le mot entre dans des locutions dont beaucoup ont disparu ; sur ventre « à toute vitesse » (1200) sera supplanté par ventre à terre (ci-dessous), en parlant des quadrupèdes. ◆  Petit ventre (1372 ; d'après le latin ventriculus) a disparu au profit de ventricule.
■  Ventre s'emploie couramment depuis l'ancien français pour désigner l'abdomen humain en tant que siège de la digestion (v. 1120), en particulier dans des locutions comme faire ventre « s'engraisser » (mil. XIIIe s.), manger, boire à ventre déboutonné « avec excès » (1532), se remplir le ventre, d'abord remplir son ventre (1552), avoir les yeux plus gros (plus grands) que le ventre « être incapable de manger autant qu'on le désirait » (fin XVIe s.) qui a eu plusieurs variantes et signifie par métaphore « s'exagérer ses capacités », avoir, prendre du ventre « grossir du ventre » (mil. XXe s.) ; la plupart de ces locutions sont aujourd'hui en usage. La locution proverbiale ventre affamé n'a pas d'oreilles, attestée chez Rabelais, représente une adaptation d'un proverbe latin (Caton le Censeur, IIe s. av. J.-C.) signifiant « Il est difficile de discuter avec le ventre, avec la faim, car ils n'écoutent rien ». La locution se brosser le ventre « ne rien avoir à manger » (1881), puis « se priver de qqch. », a produit un emploi familier de se brosser*.
Par analogie de forme, le mot nomme la partie renflée d'une chose (1314, ventre du doigt) ou un objet qui présente un renflement (1327), spécialement le bombement que prend une partie de construction, sous l'effet d'une pression (1552, faire ventre ; aussi faire le ventre, 1762), la partie remplie, centrale d'un muscle (1562), et aussi la partie bombée de la coque d'un navire (fin XVIe s.). Une autre valeur spéciale, « partie centrale (d'une page) » (1556), a disparu.
Par métaphore du sens initial, ventre a désigné l'intérieur du corps humain, sens qui demeure dans une locution comme savoir ce que qqn a au ventre (1463), devenue ce qu'il a dans le ventre (1618), c'est-à-dire à la fois « dans l'esprit » (métonymie de tête) et « dans le cœur », ou encore n'avoir rien dans le ventre « manquer d'énergie », (re)mettre du cœur au ventre « (re)donner du courage ». Ces symbolismes, très différents de ceux de la digestion, sont assez proches, dans un contexte culturel tout différent, de ceux du mot ventre en français d'Afrique, par calque des mots des langues africaines, pour « siège des émotions, des sentiments ». Ainsi, avoir le ventre amer correspond à « être vindicatif, rancunier ».
■  Concrètement, le mot s'emploie spécialement pour les intestins et leur fonctionnement, d'où mal au ventre « aux intestins » (1538, mal de ventre, encore en usage) et, au figuré faire mal au ventre à qqn « lui être très désagréable », avec un sujet nom de chose.
■  Dans la langue classique apparaissent plusieurs locutions métaphoriques sur le sens concret : passer, marcher sur le ventre de qqn « en être victorieux » (1656), sur le ventre « de tout son long » (1607). En donner à qqn sur le ventre et partout (1640) s'est utilisé pour « le maltraiter beaucoup ».
■  Le sémantisme le plus ancien en français, celui d'« utérus », est utilisé en droit dans le ventre anoblit (1536) où ventre correspond à « ascendance matérielle », puis dans curateur au ventre (1685) chargé de surveiller la grossesse d'une veuve enceinte et d'administrer la succession du père de l'enfant à naître.
■  Dans la langue classique, apparaissent plusieurs locutions où ventre a sa valeur la plus courante : ventre à terre renvoie au cheval qui, dans un galop rapide, semble frôler le sol ; attestée au XVIIIe s. (1754), l'expression a remplacé sur ventre (ci-dessus), par référence au corps humain. C'est le symbole de la soumission dans la locution disparue demander pardon ventre à terre (1685), supplantée par se mettre ou être à plat ventre devant qqn « s'humilier » (1767). ◆  Danse du ventre (1889) désigne une danse orientale féminine caractérisée par des mouvements rythmés du bassin.
Le mot, après les métaphores du XIVe s., reprend dans d'autres contextes le sémantisme de « partie renflée ». Dans le vocabulaire de la physique (1700), ventre désigne le lieu des points d'un corps en vibration où les oscillations ont la plus grande amplitude (le ventre d'une onde). ◆  Ventre se dit aussi de la partie la plus large d'une cuve, d'un four (mil. XIXe s.), de la partie large et tranchante d'un burin (1872) ; il ne s'emploie plus en marine pour l'arrondi d'une voile gonflée par le vent (1904, le ventre d'une voile). ◆  Par analogie avec le ventre des animaux, il équivaut parfois (1928) à « partie inférieure » (le ventre d'un avion).
❏  Le dérivé VENTRIÈRE n. f. s'est dit (v. 1130) d'un large ceinturon, faisant partie de l'armure qui protégeait le ventre. Le mot désigne aussi une sangle qui passe sous le ventre d'un cheval (1325). ◆  Par analogie, ventrière se dit d'une pièce de bois qui soutient un assemblage de charpente (1361), ou le « ventre » d'un navire avant le lancement (1792). ◆  Par ailleurs, ventrière, dérivé de ventre au sens d'« utérus », s'est employé en ancien et en moyen français (v. 1290) pour « sage-femme ».
■  Le composé SOUS-VENTRIÈRE n. f. (1370), « sangle qui passe sous le ventre d'un cheval », a été utilisé pour « ceinture de pantalon », d'où la locution familière manger à s'en faire péter la sous-ventrière « avec excès ».
■  VENTRAILLES n. f. pl., « viscères d'un animal » (XIIe s.), avec l'influence formelle d'entrailles, est régional.
■  VENTRÉE n. f. se dit d'abord (v. 1180) pour « fruit du ventre (d'une femme) », sens disparu, d'où vient l'emploi toujours vivant de « portée (d'un animal) » (1567). Le mot désigne ensuite (v. 1225) la nourriture dont on emplit le ventre, donc « grande quantité de nourriture » : s'en foutre une ventrée. ◆  Ventrée, d'après ventre pour « intestins », a aussi désigné les excréments (contenu du ventre) [XIIIe s., hapax ; repris v. 1550] et l'enflure d'un bâtiment qui bombe (v. 1310).
■  VENTRÈCHE n. f., d'abord ventresche (XIIIe s.), s'est dit en ancien et moyen français de la peau du ventre. ◆  Il a été repris en tant que régionalisme gastronomique pour désigner la partie ventrale de certains poissons (notamment le thon). Dans le Sud-Ouest de la France, c'est un régionalisme appliqué à la poitrine de porc, salée et roulée ; ce sens tend à se répandre dans le reste de la France, par le commerce et la restauration, mais reste marqué (à la différence de mots occitans comme magret). ◆  La variante VENTRESQUE n. f. (1611), « intestins », s'est dite d'une préparation de charcuterie.
VENTRU, UE adj. s'applique (1490) à qqn qui a un gros ventre (aussi ventré en ancien français, XIIIe s.), d'où un ventru (1490). L'adjectif qualifie aussi (1531) une chose bombée, renflée. ◆  Par figure, il qualifie un homme riche, et spécialement au XIXe s. (1820) un député du centre qui soutenait le ministère (parce qu'il était souvent l'hôte des dîners officiels).
VENTRAL, ALE, AUX adj., emprunt (1520) au latin impérial ventralis « relatif au ventre », en conserve le sens ; il s'applique aussi à ce qui se porte sur le ventre (notamment, parachute ventral opposé à dorsal), substantivement le ventral n. m., et en sports à ce qui se fait sur le ventre. ◆  Le mot s'emploie également en sciences (1845, en botanique, suture ventrale) pour désigner la face inférieure d'un organisme ou d'un organe, par opposition à dorsal.
■  En dérive VENTRALEMENT adv. (XXe s.), terme de sciences naturelles.
BAS-VENTRE n. m. désigne (1636) la partie inférieure du ventre, qu'on appelait le petit ventre, d'où par euphémisme les parties génitales.
Le composé ÉVENTRER v. tr. (1538, esventrer ; forme moderne, 1549), formé comme étriper, signifie « déchirer le corps de (un être vivant) en ouvrant le ventre ». Le mot correspond à l'ancien provençal esventrar « ouvrir le ventre d'un animal » (1315). S'éventrer s'est dit (1690) pour « se faire mal au ventre, à force de crier » et au figuré pour « faire tous les efforts possibles », sens sortis d'usage. ◆  Par figure, éventrer a pris les sens de « fendre largement (un objet) pour atteindre ce qu'il peut renfermer » (1835) et de « défoncer, percer » (fin XIXe s.).
■  ÉVENTRÉ, ÉE adj. a signifié « défait, vaincu moralement » (1226, esventré) et « mal arrangé » (v. 1550, écrit évantré).
■  Du verbe dérivent ÉVENTREMENT n. m. (1669, en parlant d'un animal), ÉVENTRATION n. f., terme de chirurgie (1743), employé aussi au figuré, et ÉVENTREUR n. m. (1890), mot créé à propos de Jack l'Éventreur, nom français d'un célèbre criminel londonien des années 1889-1890 appelé en anglais Jack the Ripper (de to rip « déchirer, fendre »).
VENTRIPOTENT, ENTE adj., d'abord attesté chez Rabelais (1552, Dieu ventripotent), à propos de Bacchus, est composé de potens « puissant » (→ pouvoir) ; l'adjectif s'applique à qqn qui a un gros ventre.
■  VENTRILOQUE n. est un emprunt (1552, Rabelais) au bas latin ventriloquus, littéralement « qui parle du ventre », composé de loquus, de loqui « parler » (→ locution). ◆  Le mot se dit d'une personne qui peut articuler sans remuer les lèvres, d'une voix qui semble venir du ventre. Il est aussi adjectif (1704).
■  Le dérivé VENTRILOQUIE n. f. (1817) est didactique et rare.
Dans les jurons anciens, le nom de Dieu était remplacé par un mot qui le rappelait ou par un nom de saint, réel ou imaginaire ; on trouve ventre dieu au XVe s., qui devient ventre beu (1440), ventre bieu (v. 1480), VENTREBLEU interj. (1552, Rabelais), au XVIIe s. ventredié, ventregné, ventreguienne puis vers 1750 ventrebille. ◆  Ventre saint-Gris est attesté dans la première moitié du XVIe s. (1547, N. du Fail) et ventre saint-Fiacre au début du XVIIe s. (d'Aubigné).
❏ voir UTÉRUS, VENTRICULE.
VENTRICULE n. m. est emprunté (1478) au latin ventriculus, souvent ventriculus cordis « petit ventre du cœur », le mot signifiant aussi « estomac », diminutif de venter « ventre* ». Ventriculus avait abouti par ailleurs à ventroil « ventre » (v. 1200).
❏  Le mot désigne en médecine chacun des deux compartiments inférieurs du cœur (opposé à oreillettes) (1503) et aussi chacune des deux principales cavités de l'encéphale (1478). Il s'est employé pour « estomac » (1536), autre latinisme. ◆  En zoologie, il s'applique (1718) au renflement du duodénum des oiseaux, qui forme un second estomac.
❏  En dérive VENTRICULAIRE adj. (1819) « du ventricule du cœur », et « du ventricule cérébral », d'où des composés didactiques (→ atrium, auriculaire).
■  VENTRICULOGRAPHIE n. f., de -graphie, et VENTRICULOSCOPIE n. f., de -scopie, termes de médecine, « radiographie, radioscopie des ventricules (du cerveau, du cœur) », sont attestés au milieu du XXe siècle.
VENTURI n. m. est un emprunt, attesté en langue anglaise en 1887 dans venturi tube (Herschel), venturi meter et venturi, du nom du physicien italien Giovanni Batista Venturi (1746-1823), pour dénommer un appareil de mesure pour le débit d'un gaz, fondé sur la mesure de pressions différentielles. ◆  Le mot, qui n'entre dans les dictionnaires français généraux qu'en 1949 (Larousse), s'applique en automobile à la buse d'un carburateur.
VENU, VENUE → VENIR
VÉNUS n. f. est un emprunt (1246) au latin Venus, -eris « l'amour, l'acte amoureux, l'objet aimé », personnifié et divinisé comme nom de la déesse de l'Amour (correspondant à l'Aphrodite grecque) ; le mot est aussi le nom d'une planète. Il se dit de qualités qui excitent l'amour (grâce, charme, séduction). Venus a des correspondants formels dans le védique vanas- en composition dans gir-vanas- « aimant les hymnes » (en parlant des Dieux), le sanskrit vanchati « il désire » et l'ancien haut allemand wunskan « désirer ». Le nom semble donc évoquer primitivement le désir.
❏  Le mot entre en français (1246) pour désigner comme en latin une planète du système solaire et son apparence (désignée par étoile du matin, du soir) [écrit avec une majuscule]. En alchimie, il s'est dit pour « étain » (1564) puis « cuivre » (1611), cristaux de Vénus signifiant « acétate de cuivre » (1701). ◆  Il s'est employé ensuite à l'époque classique (1624) au sens de « grâce, agrément », en parlant d'une œuvre d'art, du style. ◆  Il a eu le sens d'« ardeur amoureuse » (1538), sorti d'usage après le XVIe s., mais continué par plaisirs de Vénus (XVIIe-déb. XIXe s.) « plaisirs de l'amour », et sacrifier à Vénus « faire l'amour ». Une Vénus désigne aujourd'hui et depuis le XVIIe s. au moins (1674, La Fontaine) une femme d'une grande beauté.
■  Par référence à la mythologie, la déesse étant souvent représentée debout sur une conque, conque de Vénus (1736), puis vénus (1778) est le nom d'un mollusque bivalve comestible et, spécialement (1803), celui de la praire (Venus verrucosa).
■  Au sens de « femme consacrée à l'amour », Vénus banale (1794), puis Vénus des carrefours (av. 1850, Balzac) a désigné une prostituée, et maladie de Vénus (1814), mal de Vénus (1832), coup de pied de Vénus (1876) une maladie vénérienne. ◆  Le mot, écrit avec une majuscule, désigne une statue de Vénus et, qualifié, dans des noms de pièces archéologiques (1848), une statuette supposée représenter le canon féminin d'une culture (une vénus préhistorique).
❏  Du nom dérivent 1 VÉNUSIEN, IENNE adj. (1872), d'abord synonyme de vénusiaque, qui se dit en psychologie d'un caractère doux, accommodant, qui évite les affrontements et VÉNUSIAQUE adj. (déb. XXe s.), littéraire, qui signifie « propre à Vénus, qui excite l'érotisme » et « d'une beauté digne de Vénus ».
Deux dérivés du latin Venus ont été empruntés.
■  VÉNUSTE adj. (1481), emprunt au latin venustus « qui excite l'amour », « charmant, séduisant », signifie dans un usage très littéraire « qui a une beauté, une grâce, digne de Vénus ».
■  VÉNUSTÉ n. f., littéraire, conserve (v. 1500) le sens du latin venustas « beauté physique, grâce, charme ».
2 VÉNUSIEN, IENNE adj. et n. s'emploie pour « relatif à la planète Vénus », et, sur le modèle de martien, à propos des habitants supposés de la planète Vénus (1872, chez Charles Cros).
❏ voir VENDREDI, VÉNÉRER, VÉNÉRIEN, VÉNIEL, VENIN.
VÉPÉCISTE → V. P. C.
VÊPRES n. f. pl. représente une francisation (v. 1207, vespres, encore au début du XVIIIe s.) du latin ecclésiastique médiéval vesperae « office divin qu'on célèbre le soir », pluriel sur le modèle de vigiliae (→ vigile). C'était, déjà en bas latin, le sens du latin classique vespera « temps du soir, soirée », variante féminine de vesper, lequel désigne aussi l'étoile du soir et l'occident (ancien provençal vespre, italien vespero). La parenté avec le grec hespera « le soir » (→ hespérides) est claire, les deux mots se rattachant aussi d'une façon plus lointaine au gallois ucher et au vieux slave vecěrŭ ; la diversité des formes dans les langues indoeuropéennes s'explique peut-être par un tabou linguistique.
❏  Le mot, écrit vêpres depuis le XVIIe s. (1636), conserve son emploi religieux dans la liturgie catholique, spécialement dans premières vêpres (1690), dites la veille d'une fête religieuse, et secondes vêpres (1876), dites le jour d'une fête. Il faisait partie de la langue courante, du XVIIe s. au milieu du XXe s., dans la mesure où la journée des catholiques pratiquants pouvait être rythmée par les vêpres (aller aux vêpres, entendre sonner les vêpres). ◆  En histoire, l'expression les Vêpres siciliennes s'applique au massacre de troupes françaises par la population de Palerme et à l'insurrection contre Charles Ier d'Anjou, roi de Sicile, qui commença le lundi de Pâques, 30 mars 1282, à l'heure des vêpres.
❏  VÊPRE n. f. au singulier, forme moderne (XVIIe s.) de vesprae (v. 980), vespre (1080), s'est employé au sens latin de « soir », encore à l'époque classique, d'où bas vespre « fin de la soirée » (v. 1175) et le terme d'adresse bon vêpre « bonsoir ». Le mot s'est employé au sens latin de « couchant » dans au vespre de « à l'ouest de » (1636).
■  Le dérivé VÊPRÉE n. f. (1080, vespree), « soirée », ne s'emploie que par archaïsme poétique, souvent par allusion à la poésie du XVIe s., notamment à Ronsard. ◆  Le mot s'est dit pour « réunion du soir, veillée » (XIVe s.) et « après-midi » (1600), encore régionalement au XIXe s. (par ex., chez G. Sand).
VESPÉRAL, ALE, AUX n. m. et adj., emprunt du XIXe s. au dérivé bas latin vesperalis, désigne dans la liturgie catholique (1812) le livre contenant les prières et les offices du soir. ◆  L'adjectif signifie « du couchant » (1832) ; il est didactique ou littéraire.
❏ voir VESPERTILION et aussi FAR WEST, OUEST, WESTERN, WISIGOTH.